Madame la ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur les conséquences malheureuses que pourrait avoir l'application de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales au regard du respect du principe de l'autonomie communale.
Je rappellerai en préalable que le principe de libre administration des collectivités territoriales est inscrit à l'article 72 de la Constitution de 1958. Ce principe a permis l'adoption de lois de décentralisation.
Je ne pense pas que la loi du 13 août 2004 ait été conçue comme un outil de contrainte des collectivités territoriales. Ce serait un comble ! Pourtant, l'autonomie communale pourrait être remise en question, dans les faits, dans le département de Seine-et-Marne.
En effet, s'il faut considérer les dispositions de l'article 152 de ladite loi comme un élément permettant de faciliter la transformation d'un syndicat intercommunal à vocation multiple en communauté de communes, le nouvel article L. 5211-41-2 inséré dans le code général des collectivités territoriales peut devenir un moyen de contraindre des communes à intégrer un établissement public de coopération intercommunale.
Prenons l'exemple d'un SIVOM composé de quatorze communes, créé voilà une trentaine d'années pour exercer un nombre de compétences très limitées, à savoir la gestion d'un équipement sportif et la collecte des ordures ménagères exclusivement.
Au fil du temps, les projets évoluent, d'autres liens se tissent avec d'autres territoires, d'autres communes. En 2004, la majorité des communes constituant le SIVOM souhaite sa transformation en communauté de communes, quitte à procéder au transfert temporaire, pour quelques mois, des compétences obligatoires afin de satisfaire aux dispositions suivantes de l'article L. 5211-41-2 du code général des collectivités territoriales :
« Lorsqu'un syndicat de communes exerce déjà, au lieu et place des communes qui le composent, les compétences fixées par le présent code pour les communautés d'agglomération ou les communautés de communes, ce syndicat peut se transformer en l'une de ces deux catégories d'établissement, sous réserve qu'il remplisse les conditions de création exigées. »
Or cinq communes membres du SIVOM ont élaboré un projet de création d'EPCI différent, avec d'autres communes voisines, selon un périmètre cohérent, présentant un intérêt communautaire clairement défini, des actions répondant bien à l'intérêt des populations, des ressources bien étudiées. Ces cinq communes représentant le quart de la population totale couverte par le SIVOM, elles ne peuvent constituer une minorité de blocage contre le projet de transformation du SIVOM en communauté de communes, puisque la décision se prend à la majorité qualifiée.
Dans ce cas, madame la ministre, la possibilité de transformation du SIVOM en communauté de communes, telle que définie à l'article 152 de la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales, prime-t-elle sur tout autre projet ? S'il en était ainsi, des décisions prises à l'unanimité par des conseils municipaux se verraient bafouées.
De plus, comment imaginer que les politiques mises en oeuvre par une structure intercommunale puissent être pertinentes et efficaces sans l'adhésion de l'ensemble des membres de celle-ci ?
Manifestement, l'application de la loi pose un problème important à cet égard. Faut-il alors attribuer au seul préfet le rôle d'arbitre ? Ne vaudrait-il pas mieux encadrer le texte législatif, de façon à prévoir que l'exercice, par le syndicat de communes, des compétences nécessaires à sa transformation en EPCI devra obligatoirement être effectif depuis suffisamment longtemps, à savoir deux ou trois ans, afin d'éviter tout recours abusif aux dispositions de l'article 152 ?