Monsieur le ministre, je souhaite interroger le Gouvernement sur la représentation du CNRS en Nord-Pas-de-Calais.
En effet, à la veille de la mise en oeuvre du prochain plan quadriennal « Recherche », nous sommes alertés par les chercheurs qui sont très inquiets de la très faible représentation du CNRS dans notre région et particulièrement dans le secteur des sciences humaines dont on me dit qu'il est quasiment sinistré.
Pour illustrer mon propos, je souhaiterais porter à votre connaissance quelques chiffres qui, si dramatiques qu'ils soient, n'en sont pas moins parlants.
En Nord-Pas-de-Calais, trois universités sur quatre - Artois, Littoral et Valenciennes - possédant un département lettres et sciences humaines ne disposent pas d'équipes de recherche labellisées CNRS. Or vous n'êtes pas sans savoir que seul le label CNRS est actuellement reconnu au niveau international.
Pour la quatrième université, Lille III-Charles de Gaulle, trois unités mixtes de recherche au maximum devraient survivre dans le prochain plan quadriennal, qui débutera en 2006.
Le secteur des sciences de l'homme et de la société ne représente dans notre région que 0, 4 % des effectifs du CNRS, chercheurs et ingénieurs, techniciens, administratifs cumulés, soit une centaine de personnes pour 4 millions d'habitants !
Pour reprendre l'expression d'un des chercheurs de Lille, je me demande à quel pourcentage considérera-t-on que l'on a atteint le stade de la mort clinique.
Enfin, pour en terminer avec ces chiffres, j'ajoute que, tous secteurs et toutes disciplines confondues, notre région ne représente que 1, 8 % des effectifs totaux du CNRS.
Il y a des circonstances où les principes d'égalité de traitement sur le territoire ou de continuité territoriale prennent une forme tout à fait inattendue.
Ainsi les quatre régions du nord-ouest de la France, Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Haute-Normandie, et Champagne-Ardenne totalisent 2, 5 % des effectifs nationaux avec 650 personnes, alors les quatre régions du sud-est de notre pays - Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Languedoc-Roussillon, et Midi-Pyrénées - cumulent 8 420 personnes soit 30, 4 % des effectifs nationaux.
Alors que le projet pour le CNRS prévoit de constituer des pôles d'excellence régionaux, visibles à l'échelon européen et mondial, je crains fort que les moyens ne soient pas donnés à notre région pour entrer dans ce dispositif.
Et même si Bernard Larrouturou, directeur du CNRS, affirme avoir tenu compte des « disparités sur le territoire pour fixer des priorités, notamment pour l'interrégion Nord-Ouest, et tout particulièrement pour la région Nord-Pas-de-Calais », nous n'en sommes que très peu convaincus puisque, s'agissant de la création des pôles de compétitivité, il indique à ses directeurs d'unité que le Gouvernement n'identifiera et ne soutiendra qu'un petit nombre de sites. De quoi forcer l'inquiétude des chercheurs et des élus !
Vous le savez, notre région occupe une place stratégique au sein de l'Europe du Nord. Elle est en pleine reconversion et se bat pour ne pas devenir une friche industrielle.
Ce ne sont pas les talents qui manquent dans notre région. Nombres de thésards au statut précaire souhaiteraient vivement être labellisés CNRS.
Or, paradoxalement, pour accorder le label CNRS à une équipe, on ne la juge pas sur la qualité de son travail, mais on la juge sur le nombre de chercheurs CNRS qu'elle compte. Il faudra bien sortir de ce cercle vicieux pour accroître le potentiel de recherche du Nord-Pas-de-Calais.
Manifestement, la mise en place des pôles de compétitivité se fera en priorité dans les métropoles régionales et universitaires qui disposent déjà de personnels et d'infrastructures.
Dès lors l'économie de notre région subira une fois de plus un handicap terrible tant la recherche est au coeur des évolutions futures.
En conséquence, monsieur le ministre, je vous demande de bien vouloir m'informer des dispositions que compte prendre le Gouvernement pour que la région Nord-Pas-de-Calais voit son potentiel de recherche rééquilibré et que cesse cette spirale funeste qui pénalise notre région et, par conséquent, son avenir.