Intervention de Patrick Devedjian

Réunion du 1er février 2005 à 10h10
Questions orales — Situation de l'industrie textile en lorraine

Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie :

Monsieur Masseret, en France et en Europe, le secteur du textile et de l'habillement doit en effet faire face à des mutations très importantes : la suppression des quotas des accords multifibre, à compter du 1er janvier - autrement dit, nous sommes déjà dedans ! -, l'émergence de la Chine, qui devient un acteur majeur dans le domaine, l'élargissement de l'Union européenne... Il est vrai que les industries et les salariés traversent une période délicate. Mais, si vous me le permettez, c'est le cas depuis longtemps déjà !

Fort heureusement, beaucoup ont anticipé l'échéance du 1er janvier 2005. En réalité, le plus dur me semble derrière nous et le plus douloureux dans la mutation a déjà eu lieu. Je veux dire par là que l'industrie textile, qui est, dans notre pays, plus qu'une industrie historique, mais une vraie culture, n'est pas en déclin : elle est en mutation. C'est tout à fait différent ! Je suis convaincu qu'il existe un avenir crédible pour une telle industrie en France.

Vous avez comparé l'industrie textile à la sidérurgie, et je comprends bien le sens d'une telle comparaison, mais le textile n'est pas la sidérurgie !

Nous allons simplement changer la nature de nos fabrications, de nos productions. Ce ne sera pas la même chose, mais nous demeurerons le grand pays d'industrie textile que nous sommes.

Monsieur le sénateur, sachez que le Gouvernement n'a pas attendu la fin des quotas pour agir !

Je rappelle que nous avons pris des mesures afin d'encourager le secteur du textile et de l'habillement par un accroissement de sa capacité à innover et à créer de la plus-value. C'est l'avenir ! Seuls la différenciation des produits et des services offerts et le renforcement de la valeur matérielle ou immatérielle des biens permettront aux industriels européens de se démarquer durablement des produits de pays à faibles coûts salariaux.

C'est pourquoi Hervé Gaymard et moi-même avons souhaité que les entreprises du textile et de l'habillement puissent bénéficier d'un crédit d'impôt à hauteur de 10 % en volume des dépenses de création et de design pour leurs collections engagées en 2005. Il s'agit donc d'un doublement du dispositif actuel. Grâce à cette initiative, que nous comptons appliquer dès 2005, nous voulons accompagner les entreprises de la filière qui centrent leur activité sur les produits créatifs à forte valeur ajoutée.

Je ne méconnais pas, par ailleurs, la nécessité des mesures de réindustrialisation que vous préconisez. Mais, à mon sens, il est un axe premier, qui va dans le sens du renforcement de notre industrie textile et de la conservation du savoir-faire technique de personnels dont le métier, certes, évolue, mais qui, tout en changeant, demeure aussi exigeant.

L'innovation technologique est aussi un autre vecteur de l'indispensable différenciation de ces produits, et plusieurs outils sont d'ores et déjà mis en oeuvre.

Je pense ainsi à l'Institut français du textile et de l'habillement, l'IFTH, auquel l'Etat consacre onze millions d'euros annuellement pour développer et promouvoir l'innovation dans le textile.

Je pense aussi au réseau industriel d'innovation textile-habillement, le R2ITH, qui fait un travail remarquable.

Je pense encore à ce qui se fait au sein de la Commission. Nous avons, en effet, réussi à convaincre les autorités européennes de créer le groupe de haut niveau sur le textile avec d'autres partenaires européens qui rencontrent également des difficultés dans cette mutation.

Je pense enfin à la mise en place de la zone de libre-échange textile « Paneuromed » avec quarante-cinq pays du bassin méditerranéen. Ce dispositif sera de nature à faire pièce à la concurrence asiatique, singulièrement, chinoise, et, à certains égards, à la concurrence américaine aussi.

Monsieur Masseret, ces initiatives contribuent à faire de la France un chef de file dans ce domaine. Nous ne renonçons pas à être une grande puissance textile ! Si j'observe ce qui se passe dans ce que l'on appelle le « textile technique », je constate que la France se situe au quatrième rang mondial et que ce domaine connaît une croissance de 5 % chaque année en moyenne. Certes, il faut faire la part des choses, cela ne représente que 20 % de parts de marché. Mais ce n'est pas si mal et cela offre une vraie perspective !

Voilà les raisons pour lesquelles je suis favorable à la réindustrialisation, mais en partenariat avec les collectivités territoriales. A ce titre, je sais que je peux compter sur le conseil régional ainsi que sur le département des Vosges et d'autres encore.

Permettez-moi un exemple, celui du Nord-Pas-de-Calais, qui a pris l'initiative de créer un pôle de compétitivité. Or ces pôles de compétitivité, s'ils présentent d'abord l'avantage d'un ancrage géographique, contribuent également à une mise en réseau. Pourquoi pas une telle mise en réseau pour la région qui vous est chère, monsieur le sénateur ?

Cela étant, s'agissant du Nord-Pas-de-Calais, nous n'en sommes qu'à l'appel d'offres et il faut donc attendre le dépouillement pour affirmer ce que seront véritablement les projets. Mais je considère d'ores et déjà que les propositions du Nord-Pas-de-Calais sont sérieuses et méritent beaucoup d'attention. A ce jour, rares sont les régions concurrentes sur un projet aussi structuré ! Elles peuvent toutefois déposer jusqu'au 28 février !

La mise en réseau est une initiative que la Lorraine ne saurait, me semble-t-il, rejeter.

Reste que je suis favorable à ce que mon ministère et les collectivités locales collaborent à l'élaboration de mesures propres à trouver d'autres activités industrielles pour tous ceux qui ne réussiraient pas à accompagner cette mutation.

Notre priorité est et reste le maintien de la grande activité textile que notre pays a su développer pendant des siècles.

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