Intervention de François Rebsamen

Commission des affaires sociales — Réunion du 10 juillet 2014 : 1ère réunion
Conférence sociale 2014 — Audition de M. François Rebsamen ministre du travail de l'emploi et du dialogue social

François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social :

J'ai souhaité venir vous présenter le bilan de la conférence sociale, qui s'est tenue lundi et mardi, ainsi que la feuille de route présentée hier en conseil des ministres. Pour commencer, je vous livre en primeur le résumé de la rencontre à huis clos, lundi, entre les syndicats et le Président de la République. Comme l'a expliqué le Président de la République, le dialogue social n'est pas le consensus mais la recherche du compromis social. Celui-ci est possible sur la base du respect et de l'engagement réciproque. Il s'inscrit dans la durée. Depuis deux ans, plusieurs accords interprofessionnels ont été transposés dans la loi, comme celui créant le compte personnel de formation qui entrera en vigueur le 1er janvier 2015.

Plusieurs constats sont partagés. La croissance est nécessaire et suppose la confiance. La perte de compétitivité de notre économie depuis 10 ans s'est traduite par une hausse des prélèvements. Pour y remédier il est indispensable de baisser les charges. Le soutien à la croissance et à l'investissement en Europe est insuffisant et le taux de chômage des jeunes est élevé. La France connaît des difficultés qui lui sont propres. Notre taux de chômage des jeunes, même s'il a baissé de 0,5 %, reste, à 23 %, inacceptable, bien qu'il soit inférieur à la moyenne de l'OCDE. Le chômage de longue durée est préoccupant : on compte deux millions de personnes inscrites depuis plus d'un an, et un million depuis plus de deux ans En outre, chacun vante les mérites de l'apprentissage, mais le nombre des apprentis a baissé de 8 % l'an dernier. Les blocages sont divers et pas seulement d'ordre financier. Seuls 4 % des entreprises ont recours à des alternants. De plus, la France a pris du retard en matière d'investissement humain et public. Il faut poursuivre le dialogue social.

Plusieurs pistes se dégagent à l'issue de la conférence sociale. Tout d'abord, il convient de renforcer le dialogue social en Europe. La France propose, soutenue par plusieurs partenaires, la création d'un Eurogroupe social, pendant de l'Eurogroupe financier. J'ai réuni le comité du dialogue social pour les questions européennes et internationales pour réfléchir à son plan de travail annuel, en lien avec les experts et les partenaires sociaux. Il conviendra de tenir des réunions tripartites sociales en amont des réunions du Conseil européen.

Pour consolider notre démocratie sociale il faut mettre en place, avant la fin de l'année, le fonds paritaire de financement des organisations syndicales et patronales. Nous lancerons des négociations à l'automne pour améliorer le dialogue social dans les entreprises. Un groupe de travail se réunira à l'automne. Je présenterai un document d'orientation dès la fin du mois après consultation des syndicats. Tous les salariés doivent être représentés. Pourquoi, par exemple, ne pas donner voix délibérative aux administrateurs représentant les salariés dans les entreprises de plus de 1 000 salariés ? Il faut également faciliter l'exercice des fonctions syndicales ou celles des représentants du personnel.

Une négociation interprofessionnelle sera lancée sur le chômage de longue durée. Le comité de suivi du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) deviendra un comité de suivi et d'évaluation de l'ensemble des aides publiques. Présidé par le Premier ministre, il sera animé par France Stratégie, l'ancien Commissariat général à la stratégie et à la prospective. À la rentrée, je réunirai les organisations professionnelles d'employeurs et de salariés des 50 plus grandes branches, représentant plus de 75 % des salariés, pour faire le point sur les négociations liées au pacte de responsabilité. Des accords de branche ont déjà été signés, comme dans la métallurgie, mais en nombre limité. Il faut mettre en lumière les bonnes pratiques et favoriser leur diffusion. En outre, le nombre de branches doit être rationalisé. Il y en a trop en France : il faut couper les branches mortes !

Conformément aux souhaits exprimés par Louis Gallois et le réseau Alerte, nous pérenniserons la garantie jeunes, qui concerne aujourd'hui 4 000 jeunes, et l'étendrons avec l'objectif que 50 000 jeunes puissent en bénéficier en 2015 et 100 000 en 2017. La France sera le premier pays européen à la mettre en oeuvre. Grâce au suivi très fin réalisé par les missions locales, ce dispositif vise à assurer la continuité entre la formation initiale, la formation professionnelle, l'insertion, la lutte contre le décrochage scolaire et la lutte contre les discriminations de toutes natures.

Nous n'avons pas voulu définir un énième plan pour l'emploi des seniors, qui sont davantage victimes d'exclusion du monde du travail. Ils quittent parfois le marché du travail grâce à une rupture conventionnelle qui leur permet de s'inscrire à Pôle emploi. Les seniors qui ne sont pas pris en charge individuellement dès leur inscription au chômage deviennent souvent des chômeurs de longue durée. Aussi, 80 000 seniors sans emploi feront l'objet d'un suivi renforcé par 1 000 conseillers spécialisés de Pôle emploi. Pas moins de 80 000 contrats initiative emploi (CIE) leur seront dédiés en 2015. Une négociation interprofessionnelle pourra s'ouvrir sur le sujet des demandeurs d'emploi de longue durée, comme l'a demandé le réseau Alerte.

L'apprentissage stagne : 417 000 jeunes sont concernés, loin de l'objectif de 500 000 réaffirmé par les gouvernements successifs. Il faut lever les blocages, qu'ils soient psychologique ou financiers. Une étude de la Dares et de France Stratégie, Les métiers en 2022, montre que les métiers qui seront créateurs d'emploi à cet horizon sont ceux qui n'ont pas recours à l'apprentissage, comme les services à la personne. Nous n'atteindrons pas l'objectif de 500 000 si ces métiers ne s'ouvrent pas à l'apprentissage. En outre, 100 millions d'euros seront consacrés à renforcer la mobilité des apprentis et augmenter les capacités d'hébergement. Sans moyen de transport entre l'entreprise et le centre de formation d'apprentis (CFA), les choses sont difficiles ! Pour l'hébergement, 100 millions d'euros, issus du programme des investissements d'avenir, seront consacrés à la rénovation des CFA. En outre, une aide spécifique de 200 millions d'euros sera inscrite dans le projet de loi de finances rectificative : un amendement du Gouvernement créera une prime de 1000 euros pour l'embauche d'un premier apprenti ...

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