Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 15 juillet 2014 à 14h30
Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 — Discussion d'un projet de loi

Marisol Touraine :

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion que nous entamons aujourd’hui est quelque peu exceptionnelle : c’est en effet seulement la deuxième fois, depuis que les lois de financement de la sécurité sociale existent, que vous est présenté un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.

Ces conditions exceptionnelles me conduisent à saluer tout particulièrement, et plus que de coutume, le travail accompli, malgré un calendrier chargé, par la commission des affaires sociales du Sénat, et à remercier sa présidente.

Au-delà des enjeux de calendrier et de la novation historique qu’il représente, ce projet de loi revêt une importance particulière, non pas par sa longueur – c'est un texte court, de seize articles dans le projet initial, contre vingt et un dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture –, mais parce qu’il constitue, avec le projet de loi de finances rectificative qui a été examiné la semaine dernière par la Haute Assemblée, la première mise en œuvre de la mobilisation exceptionnelle en faveur de l’emploi que représente le pacte de responsabilité et de solidarité.

Je le rappelle, le Président de la République a conforté et renforcé la priorité donnée à l’emploi le 14 janvier dernier. Cet objectif se traduit par des allégements de cotisations sociales non seulement pour les employeurs et les travailleurs indépendants, mais aussi – je le souligne, car cela n’est pas souvent le cas – pour les salariés. Ces derniers bénéficieront d’une augmentation d’environ 500 euros de leur pouvoir d’achat dès l’année 2015.

Le présent texte constitue également une première étape vers la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés.

Pour ce qui est des cotisations employeurs, la baisse des cotisations concernera, en 2015, les revenus s’élevant jusqu’à 1, 6 SMIC. Très concrètement, l’employeur d’un salarié percevant le SMIC ne payera aucune cotisation, ce qui se traduira de façon simplifiée sur la feuille de paie dès la fin du mois de janvier 2015.

Néanmoins, le texte qui vous est présenté ne porte que sur les allégements de cotisations pour les entreprises en 2015. Le respect des engagements pris par les entreprises dans le cadre du pacte précité nous permettra de franchir l’année prochaine une nouvelle étape pour renforcer encore la compétitivité de ces dernières. Comme l’a indiqué le Président de la République de manière claire et ferme lors de la dernière conférence sociale, la trajectoire est inscrite dans une durée de trois ans, ce qui permet aux entreprises françaises, mais aussi – je veux le souligner – aux investisseurs étrangers, de disposer de toute la lisibilité nécessaire pour les années à venir.

Il appartient désormais aux entreprises, grâce à la lisibilité qui leur est offerte, de se saisir de l’atout que constitue le pacte. Ainsi, nous pourrons progresser ensemble.

Les mesures proposées entraîneront évidemment des pertes de recettes pour la sécurité sociale. Je veux ici rassurer les parlementaires qui ont interrogé de façon récurrente le Gouvernement sur ce sujet : ces pertes seront compensées dans leur intégralité dans les lois financières pour 2015, vecteurs juridiques qui garantiront l’équilibre de la sécurité sociale, puisque la loi organique relative aux lois de finances ne permet pas d’inscrire dans une loi rectificative des dispositions qui, en termes de rééquilibrage, n’auront d’impact qu’à partir de l’année suivante – en l’occurrence, 2015.

S’agissant plus particulièrement du régime social des indépendants, le RSI, qui est l’objet d’une attention particulière de la part des parlementaires et qui est directement concerné par la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, je veux indiquer que son équilibre sera bien assuré de façon pérenne. En effet, les branches maladie et vieillesse de base du régime social des indépendants, aujourd’hui financées par la C3S, seront adossées aux branches maladie et vieillesse du régime général sur un plan strictement financier, ce qui permettra d’en garantir l’équilibre.

Ce dispositif de solidarité financière prévaut depuis cinquante ans pour le régime des salariés agricoles. Il est aussi à l’œuvre, depuis 2009, pour le régime maladie des exploitants agricoles. Mesdames, messieurs les sénateurs, le financement pérenne de ces deux régimes est garanti, et ni leur gestion autonome ni le niveau des cotisations ou des prestations n’ont été remis en cause. Il en ira de même du régime social des indépendants.

Dans le même temps, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale accélère les efforts d’économies engagés par le Gouvernement.

Tout d’abord, ce texte prévoit de ne pas revaloriser les retraites pendant un an. Je veux rappeler fortement que, conformément aux engagements du Premier ministre, les petites retraites ne seront pas concernées par cette absence de revalorisation. Ainsi, la retraite de base des personnes dont le total des pensions mensuelles ne dépasse pas 1 200 euros sera bien revalorisée. Très concrètement, cela signifie que près de la moitié des retraités ne seront pas touchés par la mesure de report de la revalorisation inscrite dans le présent texte.

Je ne veux pas sous-estimer l’effort que cette mesure peut représenter pour les retraités concernés, même si le contexte de très faible inflation en limite la portée. Néanmoins, je veux indiquer que l’ensemble du pays consent aujourd'hui à un effort pour l’emploi, en particulier pour l’emploi des plus jeunes. Cet effort est limité mais significatif, de sorte que seuls les retraités dont la pension globale est supérieure à 1 200 euros seront mis à contribution.

Au demeurant, je veux rappeler que le Gouvernement a pris des mesures fortes en faveur du pouvoir d’achat des retraités, en particulier des retraités modestes. Je pense à la double revalorisation, en 2014, du minimum vieillesse. Je pense également à la revalorisation de 50 euros de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé pour les plus de 60 ans ou encore au plan de revalorisation des petites retraites agricoles qui résulte de la réforme des retraites de janvier 2014.

Au cours de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale, le gel de l’allocation de logement familiale qui figurait dans le texte initial a été supprimé, à la suite de l’adoption d’amendements déposés par les députés socialistes. Ce report de revalorisation ne figure pas dans le texte soumis aujourd’hui à votre examen, le Gouvernement ayant accepté ces amendements.

Les efforts d’économies engagés par le Gouvernement concernent également l’assurance maladie. Sur ce plan, le présent projet de loi tire les conséquences de la sous-exécution de l’ONDAM 2013, en revoyant l’ONDAM 2014, qui s’établira donc à 178, 3 milliards d’euros. J’y insiste, cette mesure ne remet pas en cause le taux de progression de 2, 4 % de l’ONDAM – l’objectif national des dépenses d’assurance maladie – qui avait été voté lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale a adopté un amendement permettant de sécuriser les conditions dans lesquelles une recommandation temporaire d’utilisation peut être utilisée pour permettre la prescription d’une spécialité pharmaceutique en dehors de son autorisation de mise sur le marché.

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