Intervention de Didier Guillaume

Réunion du 17 juillet 2014 à 21h30
Agriculture alimentation et forêt — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Didier GuillaumeDidier Guillaume :

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie tout d’abord de nous avoir donné des nouvelles rassurantes du ministre de l’agriculture. J’espère que Stéphane Le Foll nous reviendra bientôt en pleine forme, mais je ne doute pas que, en attendant, vous saurez parfaitement le remplacer au banc du Gouvernement, vous qui connaissez bien les questions agricoles et la ruralité.

Contrairement à la loi d’orientation agricole de 2006 et à la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche de 2010, le présent projet de loi fait l’objet de deux lectures. Le Gouvernement a fait ce choix afin de laisser la discussion au Parlement s’approfondir, en vue d’atteindre l’objectif que nous visons tous : favoriser l’émergence d’une agriculture équilibrée, moderne, transformée, ouverte sur l’agroécologie. C’est un choix judicieux, car les lectures successives ont permis d’améliorer le texte initial.

Je tiens vraiment à remercier le président Daniel Raoul, dont la sagesse et les qualités d’animateur sont unanimement reconnues, d’avoir donné la possibilité à tous les membres de la commission des affaires économiques, quel que soit leur groupe politique, de s’exprimer pour faire évoluer le projet de loi, l’améliorer. Je suis très fier d’être le rapporteur d’un texte qui a été coproduit, coconstruit par le Gouvernement et les deux assemblées.

Vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, lors de la première lecture, les députés avaient adopté 408 amendements en commission et 218 en séance publique : c’est beaucoup pour un texte de ce type. Le Sénat avait, quant à lui, adopté 245 amendements en commission et 219 en séance publique.

Au-delà des chiffres, deux points sont à souligner.

En premier lieu, la discussion de ce texte a été marquée par une volonté de pragmatisme, de dépassement des clivages partisans, au rebours de tout dogmatisme. Si un nouveau projet de loi a été déposé, c’est sans nul doute parce que l’agriculture a besoin que nous lui apportions les meilleures garanties pour qu’elle puisse développer sa compétitivité et sa contribution à l’aménagement du territoire, et surtout pour que les femmes et les hommes qui ont choisi ce secteur d’activité puissent vivre de leur travail.

En second lieu, le Sénat a imprimé fortement sa marque sur ce texte lors de la première lecture. Nous avons soutenu l’ambition politique du projet de loi, qui est d’assurer la transition vers l’agroécologie, c’est-à-dire d’aller vers une agriculture qui soit plus durable, tout en étant économiquement performante. C’est là un point essentiel. Ne nous perdons pas dans de faux débats : c’est sur ces deux pieds que l’agriculture française doit marcher.

Dans cette perspective, nous avons suivi une ligne directrice, visant à mieux prendre en compte les conditions concrètes d’exercice de leur activité par les agriculteurs et à leur simplifier la vie. Sur de nombreux sujets, je pense que nous y sommes parvenus.

Trois piliers doivent fonder notre agriculture : la compétitivité, l’efficacité, la modernité au travers de l’agroécologie.

Oui, nous l’affirmons, l’agriculture doit être compétitive, sur le plan interne et à l’export. Notre agriculture ne saurait se borner à l’autosuffisance ; ses productions doivent pouvoir être exportées.

L’efficacité est absolument indispensable, même si tous les modes agraires sont bien sûr importants.

Enfin, l’agriculture doit se tourner vers la modernité, c’est-à-dire vers l’agroécologie. Ne regardons pas en arrière, ne soyons pas figés, ne faisons pas comme nous avons toujours fait, dans ce secteur, depuis cinquante ans.

Dans cet esprit, plusieurs dispositions importantes ont été adoptées par le Sénat en première lecture.

Aux articles 1er et 3, nous avons précisé les conditions de reconnaissance des GIEE, en réclamant qu’ils répondent à une exigence de triple performance économique, sociale, environnementale. C’est là pour nous un point essentiel. Le Sénat peut être fier d’avoir été à l’initiative de cet ajout.

À l’article 4, nous avons permis l’extension du bail environnemental, mais en prévoyant un garde-fou important : ne pas imposer aux agriculteurs de nouvelles contraintes auxquelles ils ne pourraient faire face.

À l’article 5, nous avons cherché à simplifier la procédure d’agrément concernant les groupements agricoles d’exploitation en commun, les GAEC. Nous y sommes parvenus.

Afin de fluidifier les relations entre bailleurs et preneurs, nous avons aussi apporté quelques retouches au statut du fermage, sans en remettre en cause les grands équilibres.

À l’article 6, nous avons aménagé la clause miroir pour les coopératives, tout en prenant garde à ne pas mettre en place des usines à gaz qui empêcheraient les coopératives d’aller de l’avant et d’être, elles aussi, compétitives. Ce sujet a fait l’objet de longues discussions, plusieurs d’entre nous étant des coopérateurs ou d’anciens coopérateurs.

À l’article 8, nous avons assoupli le cadre applicable aux accords interprofessionnels, pour prévenir tout blocage des interprofessions, qui sont indispensables à la structuration de nos filières.

En ce qui concerne la protection des terres agricoles, nous avons confirmé les prérogatives des CDPENAF, en ne permettant pas, toutefois, que leur avis puisse entraîner un blocage, sauf dans un cas très particulier : celui de l’atteinte substantielle à des surfaces agricoles situées dans les aires des appellations d’origine protégée. Il faut faire confiance à l’intelligence des territoires et aux élus de terrain. Ne les dessaisissons pas de leurs prérogatives, comme ce serait le cas si un avis conforme de la CDPENAF était requis dans toutes les situations.

Le Sénat est dans son rôle lorsqu’il défend les prérogatives des élus. Laissons aux responsables de terrain le soin d’organiser la protection des terres agricoles. Qui mieux qu’eux connaît la situation locale ?

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