Intervention de Philippe Leroy

Réunion du 17 juillet 2014 à 21h30
Agriculture alimentation et forêt — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Philippe LeroyPhilippe Leroy, rapporteur :

Une autre question importante est celle des zones de montagne surboisées. J’aimerais que l’administration pense enfin à elles !

En France, certaines zones manquent de forêts : il faut absolument y empêcher le défrichement, quitte à multiplier par cinq ou six les compensations. En revanche, dans certaines zones de montagne, la forêt est si dense que le paysage se ferme. On me faisait remarquer tout à l’heure le caractère assez effrayant des images du tour de France traversant les Vosges : on ne voyait même plus les coureurs, on ne voyait que des sapins ! À certains endroits, le peloton s’engouffrait dans un tunnel noir. Comment voulez-vous que ces zones puissent conserver une population agricole et continuer à accueillir des touristes ? Elles deviennent purement forestières, purement sauvages, et il est urgent d’assouplir nos règles et de faire évoluer l’idéologie des forestiers en matière de défrichement, au moins pour ces zones surboisées.

À cet égard, l’Assemblée nationale a supprimé les dispositions qui avaient été adoptées par le Sénat ; je pense qu’il serait sage de les rétablir, pour protéger les zones de montagne où les taux de boisement dépassent 70 %.

Les députés nous ont aussi encouragés à prévoir, dans nos programmes régionaux de la forêt et du bois, des projets de desserte dans tous les massifs. Je crois qu’il ne faut pas aller au-delà. Les députés souhaiteraient que, chaque année, dans chaque département, on élabore un plan de desserte forestière. Il me semble que les problèmes liés à la ressource forestière et à son exploitation doivent se traiter par massif, sur une échelle de nombreuses années. On ne peut pas y revenir tous les ans. Dans cette perspective, le texte adopté par le Sénat en première lecture est sage et permettra d’éviter bien des conflits.

Quoi qu’il en soit, je crois que nous tenons le bon bout, même si nous reviendrons sans doute sur les sujets que je viens d’évoquer au cours du débat. Je souhaiterais à présent exprimer une légère inquiétude quant au problème des interprofessions.

Depuis la disparition du fonds forestier national, qui finançait, voilà dix ou quinze ans, les actions collectives des professions du bois, celles-ci se sont regroupées au plan national pour trouver les moyens de financement nécessaires.

Cela a été compliqué. On a créé une CVO, une contribution volontaire obligatoire ; les agriculteurs connaissent bien ce système. On a créé une taxe sur les produits industriels ; tout le monde l’a acceptée. On avait supprimé le fonds forestier national avec l’accord de tous les professionnels du bois, qui ne voyaient pas plus loin que le bout de leur nez. Ils sont revenus à des sentiments plus positifs en recréant, avec des moyens financiers nouveaux qu’ils prélèvent dans leurs propres caisses, deux interprofessions, l’une en amont et l’autre en aval. Ces interprofessions se mettent progressivement en place.

Environ 95 % des professionnels souhaitent conserver l’unité, afin de faciliter les actions collectives, notamment en matière de recherche et d’innovation, par exemple pour favoriser l’utilisation du bois dans le bâtiment. L’unité est utile à toutes les essences et à toutes les régions forestières. Seule une infime minorité d’irréductibles – en France, on est un peu gaulois – souhaiteraient créer des interprofessions par région ou par essence. Si nous ouvrons la porte à cette proposition, nous balkaniserons les actions collectives en matière de forêt et d’industrie du bois, ce qui sera préjudiciable à l’avenir.

Je me rallie donc totalement à l’amendement déposé en commission par Didier Guillaume à l’article 8. Oublier, à la faveur d’arguments trop régionaux, la nécessité de conserver en France, au moins pendant encore quelques années, l’unité de ces interprofessions que nous avons eu tant de mal à créer, ce serait un crime contre les actions forestières, au moment où l’État va recréer un fonds stratégique du bois.

Mes chers collègues, j’ai été un peu long. Je voulais être meilleur que Didier Guillaume, ou du moins, comme ce n’est pas possible, le battre en parlant deux fois moins longtemps que lui, …

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