rapporteur pour le Sénat des commissions mixtes paritaires. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission mixte paritaire réunie le 16 juillet dernier est parvenue à un accord sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant réforme ferroviaire, d’une part, et de la proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de la SNCF, d’autre part.
Sur le projet de loi, 30 articles restaient en discussion ; 21 ont été adoptés dans la rédaction du Sénat. Les principaux apports de la commission mixte paritaire sur les autres articles sont les suivants.
À l’article 1er bis A, le dispositif des contributions locales temporaires, introduit par le Sénat sur l’initiative de notre collègue Philippe Marini, a été réservé aux aménagements extérieurs des gares d’intérêt régional et local. En outre, leur bénéfice reviendra exclusivement aux collectivités territoriales qui auront fait le choix de les mettre en place. Par ailleurs, pour éviter que cette ressource ne devienne permanente, la durée d’imposition maximale a été réduite à dix ans au lieu de trente.
À l’article 2, la CMP a retenu le principe de la définition par le Parlement des ratios nécessaires à l’application de la règle de maîtrise de l’endettement de SNCF Réseau. Elle a, en revanche, supprimé la référence à la loi de finances, dans la mesure où les ratios doivent être déterminés dans une perspective pluriannuelle. La commission a aussi insisté sur la nécessité de prendre en compte les conditions de la concurrence intermodale.
À l’article 4, elle a précisé les missions dans le cadre desquelles l’ARAF, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires, consulte le Gouvernement, afin d’exclure expressément de cette procédure les missions exercées par l’Autorité en matière de règlement des différends et de sanction.
À l’article 5 bis, la commission mixte paritaire a étendu au STIF, le Syndicat des transports d’Ile-de-France, en plus des régions, le bénéfice de l’ouverture des données des services conventionnés. La CMP n’a donc pas remis en cause les grands équilibres trouvés lors des débats à l’Assemblée nationale et au Sénat, car il était nécessaire, sur un sujet aussi important, de voter un texte équilibré et adapté.
En effet, la réforme du système ferroviaire est nécessaire et urgente. Elle assure la cohérence du système ferroviaire, tout en étant eurocompatible. En outre, elle rend possible la construction d’un cadre social commun à tous les travailleurs de la branche ferroviaire.
Je dirai maintenant quelques mots pour étayer ces affirmations.
Premièrement, la réforme est nécessaire. La situation actuelle issue de la loi de 1997 n’est pas du tout satisfaisante. Une partie non négligeable du réseau a vieilli, faute de moyens suffisants pour régénérer ce dernier. Le développement du réseau à grande vitesse, joint à la non-reprise de la dette de la SNCF par l’État, se traduit par 37 milliards d’euros de dette pour RFF, Réseau ferré de France, le gestionnaire d’infrastructure.
La « logique système » ne fonctionne pas bien : nulle part au monde l’infrastructure n’est coupée en deux comme en France, avec, d’un côté, RFF, et, de l’autre, la direction de la circulation ferroviaire, la DCF, et SNCF Infra, deux filiales de la SNCF. Cette césure a créé de la redondance, des surcoûts et de grandes difficultés au quotidien.
Pour améliorer le service rendu aux usagers – voyageurs et chargeurs –, mais aussi pour améliorer la performance économique afin de stabiliser l’endettement, il a été décidé de regrouper RFF, la DCF et SNCF Infra dans une structure, SNCF Réseau, qui sera le gestionnaire unique des infrastructures et en charge de la circulation des trains.
Pour autant, le système ferroviaire reposant sur un mode guidé, il faut éviter que les questions d’entretien soient disjointes des contraintes de l’exploitation. D’où l’idée d’un groupe public industriel verticalement intégré avec un EPIC de tête qui assure le contrôle et le pilotage stratégiques, la cohérence économique, l’intégration industrielle et l’unité sociale du groupe public.
Cette organisation me paraît adaptée. Elle a d’ailleurs été retenue depuis longtemps par la Deutsche Bahn, où une holding de tête chapeaute deux sociétés, l’une s’occupant des infrastructures et de l’attribution des sillons, l’autre étant exploitant ferroviaire. Cette organisation est reconnue unanimement comme celle qui assure le meilleur fonctionnement.
Deuxièmement, cette réforme est non seulement nécessaire, mais aussi urgente.
La réforme doit intervenir avant l’adoption par la Commission européenne et le Parlement européen du quatrième paquet ferroviaire. Si la France tardait à réorganiser son système ferroviaire et ne le faisait qu’après l’adoption du quatrième paquet, il n’est pas impossible qu’elle soit obligée de séparer totalement le gestionnaire d’infrastructures et l’exploitant historique. Cette réforme assure donc la cohérence du système ferroviaire, tout en étant eurocompatible. C’est le troisième point sur le lequel je souhaitais insister.
Le rattachement du gestionnaire unifié d’infrastructures SNCF Réseau à l’exploitant historique SNCF Mobilités, au sein d’un groupe unifié, l’EPIC SNCF, ne devrait pas poser de problèmes, puisque des dispositions sont prévues pour assurer l’accès non discriminatoire au réseau.
SNCF Réseau sera indépendant en matière d’allocation des sillons et de tarification de l’usage des infrastructures, c’est-à-dire pour les deux fonctions essentielles reconnues par la Cour de justice de l’Union européenne et la Commission européenne. Cette indépendance sera assurée par ailleurs par les pouvoirs reconnus en la matière à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires.
Enfin, pour tirer les conséquences négatives de la libéralisation « à la hussarde » du fret, intervenue voilà quelques années, la réforme a pour objectif d’éviter le dumping social en cas d’ouverture à la concurrence de tous les services ferroviaires de transport de voyageurs, en permettant la construction d’un cadre social commun à tous les travailleurs de la branche ferroviaire.
Ainsi, le statut des cheminots est maintenu. Un décret-socle définira les règles applicables en matière de durée du temps de travail. Une convention collective du secteur ferroviaire sera négociée au sein d’une commission mixte paritaire représentant les employeurs et les salariés du secteur.
Mes chers collègues, voilà les raisons pour lesquelles je vous propose d’adopter ce projet de loi sur lequel l’Assemblée nationale et le Sénat ont travaillé main dans la main, avec le souci de renforcer le service public ferroviaire.
Je remercie tous les collègues, députés et sénateurs, qui ont travaillé sur ce projet de loi, notamment celles et ceux qui sont intervenus en commission, séance publique et commission mixte paritaire. J’adresse un grand remerciement à Gilles Savary, rapporteur du projet de loi à l’Assemblée nationale, qui a fait adopter le texte dans un contexte marqué par une grève à la SNCF. Gilles Savary a su intégrer un certain nombre d’amendements, dont l’adoption a amélioré le texte – je pense en particulier à ceux qui ont visé à renforcer l’intégration sociale au sein du groupe public.
Il a en outre accepté d’échanger régulièrement avec moi durant la longue période qui a précédé l’examen du projet de loi par le Parlement. Nous avons poursuivi activement ce travail de concertation pendant les semaines d’examen du texte par le Parlement.
Je tiens donc particulièrement à rendre hommage à Gilles Savary, à sa compétence, son engagement, son sens du dialogue et son respect de tous ses collègues, qu’ils soient députés ou sénateurs.
Mes remerciements s’adressent également à M. le secrétaire d’État et à ses collaborateurs, avec qui les échanges ont été nombreux et fructueux.
Je voudrais enfin remercier la responsable de la commission du développement durable, l’administratrice et l’administrateur de la commission, qui m’ont beaucoup aidé dans mon travail, ainsi que l’administrateur de la commission des finances qui a accompagné François Patriat, rapporteur pour avis de cette commission.