Intervention de Frédéric Cuvillier

Réunion du 22 juillet 2014 à 21h30
Réforme ferroviaire – nomination des dirigeants de la sncf — Adoption des conclusions de deux commissions mixtes paritaires

Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État :

Le régulateur devra aussi, désormais, veiller à ce que le système ne dérive pas en termes financiers.

Nous avons tenu à garantir son indépendance, notamment en imposant un avis conforme de l’ARAF, non seulement sur les péages, mais également sur les « redevances gare ».

Une étape importante va être franchie avec l’adoption du projet de loi, adoption que j’espère, bien sûr. Les fondements que pose ce texte permettront d’assurer l’avenir du service public ferroviaire et de le moderniser en profondeur. Sur cette base solide, le travail de mise en œuvre de la réforme va pouvoir commencer dans les tout prochains jours ; j’en prends l’engagement devant vous.

Il est important d’associer à cette réforme l’ensemble des acteurs du ferroviaire, et au premier chef les salariés de la SNCF et de RFF, pour construire et structurer le nouveau système. J’attends des présidents de la SNCF et de RFF – je devrais dire : des présidents de SNCF Mobilités et de SNCF Réseau – qu’ils se chargent rapidement de la mise en œuvre organisationnelle du nouveau groupe public, en lien avec les salariés.

Un événement dramatique s’est produit il y a quelques jours à Denguin, près d’un an après la catastrophe de Brétigny-sur-Orge, et j’ai en cet instant une pensée pour les deux cent cinquante personnes qui ont été victimes de cet accident, tout particulièrement pour les trente qui ont été blessées, dont quatre, grièvement. Cet accident montre combien il est important que nous réorganisions le système ferroviaire en réorientant ses priorités.

De tels drames créent évidemment de l’inquiétude dans l’ensemble de la population. C’est pourquoi la sécurité ferroviaire nous importe plus que jamais.

Qu’il s’agisse du routier, du ferroviaire ou du transport en général, au-delà de la gestion des grandes infrastructures et des problèmes de financement – on me pardonnera de m’éloigner quelque peu du cœur du projet de loi –, il nous faut impérativement nous soucier de la sécurité que nous devons à nos concitoyens. La première garantie qu’ils attendent, c’est la sécurité, c’est la sérénité dans le transport. Ils nous confient des vies, la leur et celles de leurs enfants. Nous avons donc le devoir de tout mettre en œuvre pour que nos concitoyens aient confiance dans nos systèmes de transport.

Le réseau ferroviaire français occupe, selon les critères retenus, la cinquième ou la septième place dans le classement européen. C’est donc un réseau fiable, un réseau de qualité, avec 17 000 trains circulant chaque jour. Cependant, il y a encore trop d’accidents – chaque accident est un accident de trop –, d’incidents, de perturbations. Le manque de régularité amène nos concitoyens à douter de l’efficacité de l’organisation de notre système ferroviaire.

Au-delà des divergences qui peuvent s’exprimer, je souhaite que cette réforme soit perçue comme une chance donnée au secteur ferroviaire français. Nous savons que celui-ci ne peut rester tel qu’il est. Il doit, par lui-même et sous l’impulsion de cette réforme, s’engager dans une modernisation radicale et rationaliser, optimiser ses modes de fonctionnement, pour répondre aux attentes des Français.

Je faisais référence à l’accident de Denguin. J’ai demandé aux présidents Rapoport et Pepy de rédiger un rapport, qui sera rendu dans les toutes prochaines semaines. Je souhaite qu’ils esquissent les orientations permettant une meilleure prise en compte des impératifs de sécurité. Je pense que cela passe aussi par un redéploiement de moyens humains et financiers.

Je souhaite que les parlementaires soient associés à cette réflexion. Je saisirai les présidences des deux assemblées, mais aussi les présidents de leurs commissions respectives, afin que vous soyez informés des propositions et recommandations contenues dans le rapport des présidents de SNCF Mobilités et de SNCF Réseau. Je souhaite également qu’un groupe d’experts indépendants, travaillant sous la houlette de l’établissement public de sécurité ferroviaire et en lien avec vous, étudie ces propositions et recommandations.

Il n’y a pas de fatalité. Il n’y a pas de place pour la tolérance à l’égard des risques ferroviaires, quels qu’ils soient. C’est une exigence légitime, c’est la vôtre et c’est la mienne. Elle relève de ma responsabilité, je souhaite le réaffirmer solennellement devant vous.

Je soulignais qu’il fallait que cette réforme prenne corps rapidement. L’engagement de la procédure accélérée a permis au Parlement de travailler de façon extrêmement efficace dans des délais optimaux, sous la houlette de M. le rapporteur, qui a su « vulgariser » le texte et y apporter des améliorations sensibles. Nous avons échangé dans un climat de confiance et de respect mutuel, mais surtout de responsabilité partagée.

Mes services ont commencé la rédaction des décrets d’application. Le travail de concertation et de négociation du volet social de la réforme va également se poursuivre, notamment dans le cadre des travaux préparatoires à l’élaboration du décret « socle ». L’ensemble des partenaires sociaux de la branche ferroviaire seront associés à sa rédaction.

Vous avez très justement évoqué, monsieur le rapporteur, les conditions dans lesquelles, faute d’une préparation suffisante du secteur public, l’ouverture à la concurrence du fret a totalement déstabilisé l’acteur historique. Nous souhaitons éviter que pareille bévue se reproduise. Si l’ouverture à la concurrence doit intervenir – nous n’en sommes ni les laudateurs ni les précurseurs –, elle interviendra. Encore faut-il qu’elle s’accompagne de la fixation de règles qui soient communes à tous les acteurs du ferroviaire. On ne doit pas faire peser sur le secteur public des règles telles qu’il se trouverait discriminé.

RFF et la SNCF vont engager parallèlement, avec leurs salariés, la réorganisation des établissements publics, nécessaire pour constituer le groupe public ferroviaire autour des trois EPIC : SNCF, SNCF Réseau et SNCF Mobilités.

Monsieur le rapporteur, vous avez eu raison de souligner l’enjeu européen. Nous sommes dans le cadre des négociations sur le volet « politique » du quatrième paquet ferroviaire. Nous avons eu à ce sujet de riches échanges dans cet hémicycle. À ceux qui, depuis de nombreux mois, multiplient les critiques au point de faire douter certains observateurs de l’eurocompatibilité de la réforme, nous avons apporté la preuve que cette réforme de la gouvernance de notre système ferroviaire permettait d’ouvrir une voie nouvelle en Europe, puisqu’elle bâtissait un système ferroviaire intégré tout en garantissant aux entreprises ferroviaires un accès transparent, équitable et non discriminatoire au réseau.

C’est avec beaucoup de satisfaction que j’ai lu récemment, dans un quotidien économique, les propos du commissaire européen Siim Kallas, qui considère désormais – ce n’était pas le cas il y a quelques mois ou quelques années – que notre réforme, votre réforme va dans le bon sens – je reprends son expression – et est eurocompatible.

Je me permets d’y insister, car, même lorsque nous avons brandi les courriers du commissaire européen, même lorsque nous avons souligné les avancées de la négociation européenne – la France a été extrêmement active –, même lorsque nous avons souligné combien nous avions fait bouger les lignes avec nos partenaires, notamment les Allemands, un certain nombre d’entre vous sont restés fidèles à une vision passée, au lieu de se réjouir des réussites du Gouvernement, qui a donné, modestement, mais avec beaucoup de perspectives, une orientation nouvelle à l’Europe du ferroviaire. La démonstration est faite et elle permet de lever toute ambiguïté. J’espère donc que nous n’entendrons plus de propos de nature à inquiéter ou à remettre en cause l’eurocompatibilité de la réforme.

Les mois qui arrivent seront importants pour le Parlement, pour vous, mesdames, messieurs les sénateurs. Vous serez désormais en charge du pilotage du secteur ferroviaire. Vous serez en charge de cette réforme, que vous devrez porter avec le Gouvernement, les acteurs du ferroviaire et les régions. Vous serez associés à l’élaboration des contrats entre l’État et le groupe public ferroviaire, et vous en contrôlerez le contenu.

Je conclurai en vous exprimant ma gratitude et mes remerciements. La réforme a fait l’objet de discussions. Elle a même été portée et peut-être « popularisée » au-delà de nos espérances par un mouvement que nous avons regretté, car les arguments ne nous semblaient pas correspondre aux buts de la réforme.

Par cette réforme, nous construisons un avenir pour le ferroviaire. Nous souhaitons pouvoir compter sur l’ensemble des acteurs du ferroviaire, et en premier lieu sur les cheminots. Nous souhaitons redonner confiance aux Français dans le secteur ferroviaire. Nous souhaitons ouvrir un nouveau chapitre de l’histoire de ce secteur. Le ferroviaire a lui-même des responsabilités importantes, car il est lié à une industrie pionnière au niveau international. Nous pouvons en être fiers.

Je souhaite à présent, monsieur le rapporteur, vous adresser quelques mots, dont votre modestie souffrira certainement.

Je vous remercie vivement. Je sais que vous étiez très attaché à ce projet de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion