Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je commencerai par faire un compliment : cette proposition de loi est absolument nécessaire. En effet, depuis la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, il existe indéniablement un problème de rationalisation de l’offre de transport léger de personnes.
La proposition de loi qui nous est soumise doit donc garantir le bon développement des taxis et des véhicules de tourisme avec chauffeur et assurer une juste concurrence entre les deux acteurs.
Elle a été discutée à l’Assemblée nationale le 10 juillet dernier, après engagement de la procédure accélérée. Toutefois, l’urgence ne doit pas mener à la précipitation ! Malgré l’adoption de nombreux amendements, le texte est encore loin d’être parfait. Il demeure trop contraignant sur plusieurs points majeurs.
Et voici que, pour des raisons de circonstances, le Gouvernement veut faire adopter le texte au Sénat sans modification, donc sans véritable débat ! Mais pourquoi le Sénat renoncerait-il à son rôle de législateur en votant conforme un texte rédigé uniquement par l’Assemblée nationale ?
Ce texte contient des dispositions contraires à l’esprit d’entreprise. Il ne favorise pas le développement de l’emploi et de l’initiative individuelle, alors que, dans le même temps, le Gouvernement prétend redresser la situation économique.
Cette proposition de loi doit permettre de pacifier les relations entre les VTC et les taxis et de définir durablement des règles de concurrence justes entre ces deux acteurs.
Une loi trop vite rédigée et qui ne satisfait aucune des parties prenantes ne peut être perçue comme une bonne solution. En outre, rien ne justifie d’adopter le présent texte en urgence et de manière définitive avant la fin de la session, puisque les mesures qu’il prévoit n’entreront en application qu’au mois de mars 2015.
Le débat ne peut se limiter à une opposition entre des professions réglementées qui refuseraient de s’adapter et obtiendraient gain de cause afin d’éviter la concurrence et ceux qui se sont lancés dans de nouveaux moyens de consommation. La majorité des chauffeurs de taxis ont une réelle volonté de se moderniser et de s’adapter aux demandes des consommateurs. L’une des professions considérées n’a pas tous les torts. Il faut donc faire en sorte que toutes deux puissent cohabiter justement, toujours au bénéfice des consommateurs.
Si certaines sociétés de VTC étrangères pratiquent une concurrence déloyale, il faut l’éviter et faire en sorte qu’elles appliquent la loi. La stigmatisation de certains ne doit pas faire oublier les développeurs français vertueux comme LeCab, SnapCar, Chauffeur-Privé, AlloCab ou Supershuttle.
La liberté d’entreprendre doit être préservée avant tout. Si les VTC disposent effectivement d’outils électroniques et d’une réglementation qui leur confèrent un avantage concurrentiel indéniable sur les taxis, ces derniers ne semblent pas s’être adaptés assez rapidement à l’ère numérique.
Les membres du groupe UMP partagent donc l’avis des auteurs du texte pour ce qui concerne la modernisation de l’activité de taxi.
Nous sommes notamment tout à fait favorables à l’article 1er, que vous avez évoqué, monsieur le rapporteur, qui vise à créer un registre de disponibilité des taxis, et à l’article 1er bis, qui permet le paiement par carte bancaire dans les taxis.
Cela étant dit, cette proposition de loi instaure de nombreuses règles supplémentaires et des contraintes, alors qu’il faudrait au contraire plus de liberté et de flexibilité. Alors que les dispositions concernant les taxis sont généralement favorables aux consommateurs, les VTC sont en l’espèce malmenés. Vous voudriez tuer la profession que vous ne vous y prendriez pas autrement !
Une disposition, qui fait débat au sein même de votre gouvernement, introduit une restriction générale à la liberté d’aller et venir des VTC et de leurs chauffeurs.
L’obligation faite aux VTC de rejoindre le lieu d’établissement de leur exploitant ou un lieu de stationnement hors chaussée après chaque prestation est inacceptable.
Cette mesure qui leur est imposée est une contrainte que leurs concurrents directs sur le marché de la réservation au préalable ne subissent pas, les taxis utilisant des centrales radios.
Outre qu’elle les rend moins efficaces, la mesure entraîne pour les VTC l’engagement de coûts supplémentaires qui rendra leur activité impraticable.
Il convient de rappeler que le Conseil constitutionnel a clairement souligné l’anticonstitutionnalité d’une interdiction générale de stationnement sur la voie publique pour les motos taxis.
Et n’oublions pas cette disposition ubuesque, qui précise qu’un VTC ne peut « s’arrêter ou stationner sur la voie ouverte à la circulation publique, à l’abord des gares et des aérogares, ou, le cas échéant, dans l’enceinte de celles-ci, au-delà d’une durée, fixée par décret, précédant la prise en charge de clients. » Elle empêchera, comble de l’absurde, les VTC de s’arrêter pour laisser descendre leurs clients avant d’honorer la réservation suivante !
Il n’est vraiment pas raisonnable d’adopter, en l’état, ce texte !
En réalité, cette proposition de loi touche à des domaines variés : le pouvoir d’achat des clients, pour qui le prix est une composante essentielle dans le choix du mode de transport, l’emploi et l’attractivité de notre pays. Les modes de transport constituent en effet le premier contact avec la France des touristes et hommes d’affaires en déplacement.
À dire vrai, la manière dont nous traitons ce sujet est surtout révélatrice d’une certaine conception de la concurrence, de la liberté d’entreprendre et de l’innovation.
Le développement des VTC n’a jamais constitué un frein à celui des taxis, ces deux modes de transport étant complémentaires. Le développement des deux acteurs est bon pour l’emploi et pour les usagers.
Nous sommes tous dans cette enceinte confrontés à la pénurie de l’offre de taxis. Paris a aujourd’hui le plus mauvais ratio du nombre de chauffeurs par habitants, inférieur même à celui qui prévaut dans des villes de taille bien plus réduite.
Le contingentement du nombre de taxis a en outre empêché toute création d’emplois en trente ans.
À Paris, les deux tiers des taxis fonctionnent aujourd’hui sur réservation. On dénombre 14 000 abonnés à un système de radio-taxi, et le Sénat en sait quelque chose ! Un tiers des taxis seulement pratiquent la maraude.
La conséquence pour le consommateur est la cherté de la course.
À Londres, où les VTC se sont beaucoup développées, 20 % des citoyens les plus défavorisés utilisent les taxis et minicab une fois et demie plus que 20 % de ceux qui sont plus favorisés. Parce qu’ils y ont accès, les plus défavorisés font le choix de recourir au taxi plutôt que de posséder une voiture, qui leur coûterait plus cher.
Or le taxi parisien est à ce jour un service destiné aux plus aisés !
Si l’offre de taxis et de VTC augmente, les Parisiens en useront. Les déplacements seront alors plus rapides et pratiques ; ils généreront moins de pollution et une circulation plus fluide.
Il existe en France dix acteurs majeurs du VTC ; ils ont environ 3 500 voitures et 50 % des chauffeurs sont des professionnels reconvertis.
Ces entreprises créent de l’emploi et assurent à leurs chauffeurs une rémunération honorable. Pour ne citer qu’un exemple, plus de 400 emplois ont été créés par la société LeCab en un an et demi. On peut raisonnablement estimer à 10 000 les créations d’emplois dans les cinq ans.
Ne nous empressons pas de tuer ce qui marche, notre pays ne peut se le permettre !
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe UMP voteront contre ce texte, s’il n’est pas raisonnablement modifié.