Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 23 juillet 2014 à 14h30
Taxis et voitures de transport avec chauffeur — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui un texte de loi attendu par l’ensemble de la profession concernée.

Pour autant, cet examen se fait dans des conditions particulières, hélas récurrentes : le Parlement ne dispose que de très peu de temps et de très peu de marge de manœuvre pour faire son travail de législateur.

En effet, cette proposition de loi a été encore une fois frappée par la procédure accélérée. La célérité du processus est remarquable : le rapport Thévenoud a été remis au mois d’avril dernier, la proposition de loi a été déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 18 juin, puis examinée un mois après par la commission du Sénat. Reconnaissons-le, cette précipitation tend, au fond, à prendre le Parlement pour une simple chambre d’enregistrement.

Certes, vous nous direz que le temps de la concertation a eu lieu pendant l’élaboration du rapport remis par le député Thomas Thévenoud, à la suite des altercations violentes entre les taxis et les VTC. Cependant, nous contestons ce recours systématique aux rapports sollicités par le Gouvernement à des personnalités, quelles que soient par ailleurs leurs qualités.

Effectivement, une telle démarche prive les parlementaires du débat démocratique nécessaire, puisque, une fois le rapport remis, il est demandé à la représentation nationale de ne pas revenir sur l’équilibre trouvé alors.

En l’espèce, on nous demande un vote conforme, ce qui ne sera pas possible à mon avis. En tout état de cause, un tel procédé ne correspond absolument pas à notre conception du rôle des institutions parlementaires, socle du modèle républicain.

Nous sommes par ailleurs surpris par la déclaration du ministre Arnaud Montebourg selon laquelle il faut en finir avec les professions réglementées. Nous espérons qu’il ne défera pas dans quelques mois le travail actuel du Parlement.

Sur le fond, cette proposition de loi apporte des avancées réelles pour les taxis.

Il faut dire que la profession a été durement touchée par la loi de modernisation de l’économie, ou loi LME, adoptée en 2008 sous le mandat de Nicolas Sarkozy, laquelle a démantelé la plupart des secteurs ou services, au nom de la concurrence libre et non faussée. Le bilan de cette loi est particulièrement négatif ; il est donc absolument opportun de revenir sur celle-ci.

En effet, VTC et taxis doivent proposer non pas des offres concurrentes, mais bien des offres complémentaires. Or la loi LME a permis l’organisation de cette concurrence frontale, qui a largement pénalisé les taxis et cristallisé des conflits importants.

Par conséquent, nous estimons que le principal avantage de cette proposition de loi est de réintroduire de la régulation dans le secteur, de remettre au cœur du dispositif le rôle de la puissance publique, comme en témoigne le registre national mis en place à l’article 1er. Ainsi, ce registre regroupera les informations relatives à toutes les autorisations de stationnement délivrées aux propriétaires ou exploitants de taxis. Cette base de données, qui sera publique, sera alimentée non seulement par les autorités administratives qui délivrent les autorisations de stationnement, mais également, de manière facultative, par les taxis, qui pourront choisir d’intégrer dans l’interface la géolocalisation de leurs véhicules.

De plus, les entreprises éditrices d’applications auront accès gratuitement à ces données et pourront mettre en relation clients et chauffeurs. Gratuité et maîtrise publique, ces éléments sont suffisamment rares dans les textes que nous examinons pour que nous nous en félicitions aujourd’hui.

En outre, dans le domaine du symbolique, nous partageons la volonté de changer l’appellation des VTC et de remplacer la notion de tourisme par celle de transport, plus fidèle à la réalité. Plus fondamentalement, nous approuvons la réglementation plus contraignante imposée aux VTC, notamment l’interdiction qui leur est faite d’opérer sous le mode de la maraude, qu’elle soit physique ou numérique.

Autre point positif, le fait que les autorisations de stationnement deviennent incessibles. Une telle disposition permettra l’extinction progressive du marché des licences, qui introduit un fonctionnement malsain et pèse trop lourdement sur les finances des taxis. Il s’agit également de replacer l’État au centre de la régulation, puisque les autorisations expirées reviennent obligatoirement à l’État, qui les réaffecte. C’est positif.

Pour autant, nous continuons de penser que certaines questions restent en suspens. On peut ainsi se demander dans quelle mesure les nouvelles normes seront réellement contrôlées. En effet, comment la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pourra-t-elle correctement contrôler les VTC alors que ses moyens ne cessent de diminuer au fil des lois de finances ?

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