Intervention de Jean Desessard

Réunion du 23 juillet 2014 à 14h30
Taxis et voitures de transport avec chauffeur — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui a pour objet de réguler la concurrence entre taxis et VTC. Elle fait suite, comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur, à une série de manifestations organisées partout en Europe par les taxis, qui considèrent que les VTC leur font une concurrence déloyale dans la mesure où ils sont soumis à moins de contraintes, notamment financières.

C’est la licence des taxis qui constitue le cœur du problème. Elle peut être transmise à titre onéreux. Son prix – je prends les chiffres de notre rapporteur – atteint 230 000 euros en moyenne à Paris. Encore ne s’agit-il que du prix officiel ; à mon avis, le coût réel est plus élevé. Dans certaines villes, comme Nice, le prix peut même atteindre 400 000 euros. Il s’agit donc d’un investissement important. Les licences constituent un véritable patrimoine ; les taxis eux-mêmes disent qu’il s’agit de leur retraite.

Il existe également des taxis locataires, qui ne sont pas tenus d’acheter une licence pour exercer leur profession, mais doivent en revanche verser une somme assez importante aux loueurs. Cette somme peut aller jusqu’à – je prends encore les chiffres de notre rapporteur – 4 500 euros par mois ! En résumé, les taxis qui optent pour ce régime doivent payer pour aller travailler. Comme cela a été dit, cette situation s’apparente à de l’esclavage moderne et génère beaucoup de stress pour ces chauffeurs, qui ne savent pas s’ils auront assez pour payer chaque mois leur employeur.

En revanche, il suffit aux chauffeurs de VTC d’acquérir une carte professionnelle de chauffeur de voiture de tourisme, d’un montant de 100 euros, pour exercer leur profession. On voit bien que les deux professions ne font pas face aux mêmes enjeux financiers. Il est facile de se lancer dans une profession quand il suffit de débourser 100 euros, mais on peut se poser des questions quand il s’agit d’acquitter 200 000, 250 000 ou 300 000 euros...

Les écologistes proposent de s’attaquer à la racine du problème, c'est-à-dire à cette distorsion de concurrence. Nous souhaitons qu’il soit mis fin au régime des licences qui exige un investissement démesuré de certains nouveaux taxis et incite les autres à acheter le droit de travailler auprès des loueurs. Pour ne pas léser ceux qui détiennent aujourd’hui une licence, nous proposons que leur investissement soit transformé en droits à la retraite.

De cette manière, il n’y aura que des gagnants, puisque tout le monde pourra commencer à travailler soit en véhicule de tourisme, soit en taxi, sans débourser une somme importante.

Bien sûr, une telle proposition nécessite un débat plus approfondi, notamment concernant les sources de financement à trouver pour les régimes de retraite, mais elle a le mérite de régler définitivement le problème.

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui permet tout de même d’apporter des solutions concrètes aux difficultés des taxis, sans nuire pour autant aux chauffeurs de VTC.

Celle-ci prévoit plusieurs mesures pour, d’une part, adapter la profession de taxi à la concurrence – je n’ai pas le temps de développer, mais chacun a sa propre expérience de l’accueil dans les taxis et on pourrait en parler longuement – et, d’autre part, remettre à plat et mieux réguler la réglementation applicable aux VTC.

Tout d’abord, la base de données publique et gratuite ouverte aux taxis permettra d’étendre leur monopole de maraude aux nouvelles technologies en en interdisant l’accès aux VTC.

Ensuite, la fin du système actuel de location et son remplacement par une location-gérance donnera la possibilité à de nombreux taxis locataires de disposer d’une réelle protection sociale en tant que commerçants indépendants.

En outre, l’incessibilité des nouvelles licences mettra un terme à la spéculation dont les taxis sont les premières victimes.

Enfin, la reprise en main de la procédure d’immatriculation des VTC et l’instauration d’un socle de sanctions permettra enfin de rétablir l’équilibre entre les deux professions en contrôlant plus étroitement les VTC.

Ainsi, même si la présente proposition de loi ne va pas aussi loin que nous le souhaitons, à savoir en particulier en s’attaquant au problème principal que constituent les licences, elle a néanmoins le mérite d’apporter un peu de justice et d’équilibre dans un conflit entre deux professions qui n’a que trop duré.

Les écologistes voteront donc en faveur de ce texte.

Pour terminer, je tiens à féliciter de leur travail le rapporteur M. Jean-Jacques Filleul

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