Cet amendement a pour objet d'assurer l'indépendance des instances qui seront désormais regroupées au sein de la Haute Autorité de santé et qui décideront de la commercialisation et du remboursement des médicaments.
Jusqu'à présent, cette structure - je vise ici principalement l'AFSSAPS, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé - était financée essentiellement par les laboratoires. En effet, l'examen du budget pour 2003 de l'Agence, tel qu'il est présenté dans son rapport d'activité annuel, permet de constater que les laboratoires lui ont versé 51, 8 millions d'euros, alors que ses recettes s'élèvent à 62 millions d'euros.
En d'autres termes, l'Agence, dont on connaît le rôle déterminant dans le processus de mise sur le marché des médicaments, est financée à 90 % par les laboratoires !
Dans le même temps, la subvention de l'Etat ne cesse de diminuer puisque, en 2003, à la suite de la régulation budgétaire, elle n'a atteint que 4, 9 millions d'euros, soit moins de 10 % du montant total des recettes.
Signalons au passage, pour être complet, que, ses dépenses s'étant établies à 91 millions d'euros, l'Agence a dû prélever environ 30 millions d'euros dans son fonds de trésorerie. C'est dire que l'Etat ne se soucie guère des modalités de son fonctionnement ni de son financement, alors que, je le répète, elle joue un rôle fondamental en matière de politique du médicament.
On peut donc aisément imaginer que nous souhaitions changer cette situation ! Tel est l'objet de l'amendement n° 150, qui tend à couper les liens financiers entre la Haute Autorité de santé aujourd'hui - hier, c'était l'AFSSAPS -, et les laboratoires, en réorientant vers l'Etat la rétribution que doivent ces derniers afin qu'elle soit reversée sous forme de subventions à la Haute Autorité de santé.
Dès lors qu'une institution dont la vocation est notamment d'évaluer le médicament en vue de sa mise sur le marché grâce à une procédure d'autorisation dépend pour son fonctionnement des firmes pharmaceutiques et non de l'Etat, on imagine aisément qu'il lui sera difficile de prendre en considération la dimension de santé publique de sa mission. Car les attributions de l'AFSSAPS hier, comme demain celles de la Haute Autorité de santé, relèvent non pas seulement d'un service rendu aux industriels, mais aussi d'une mission de service public.
Je le répète, dans un contexte où les firmes pharmaceutiques sont de plus en plus concentrées et puissantes, où la concurrence acharnée les presse d'obtenir le plus rapidement possible la mise sur le marché de leurs produits, le mode de financement actuel n'est pas acceptable.
Nous demandons donc que ces agences, grâce à un financement différent, soient plus indépendantes. Car, lorsque nous les avons créées, nous avons oublié qu'il fallait les rendre indépendantes non pas du seul pouvoir politique, mais aussi du pouvoir des laboratoires pharmaceutiques.