Intervention de Philippe Duron

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 9 septembre 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Philippe duRon candidat proposé aux fonctions de président du conseil d'administration de l'agence de financement des infrastructures de transport de france afitf

Philippe Duron :

C'est un plaisir pour moi d'être ici pour évoquer un sujet qui, au-delà de la question des infrastructures de transport, est lié à l'ensemble des problématiques de mobilité et comporte de réels enjeux économiques.

L'AFITF est un établissement public de l'État dont la création a été décidée lors du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) de décembre 2003. L'idée était de traiter la question des infrastructures de transport en leur affectant une recette dédiée - les dividendes des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes - à travers une structure de cantonnement, l'AFITF. Celle-ci a été mise en place le 1er janvier 2005 ; Gérard Longuet en a été nommé président ; Dominique Perben lui a succédé en 2011. Depuis 2005, le conseil d'administration s'est réuni à 46 reprises. Il a engagé 33 milliards d'euros, dont 16 ont déjà été financés. Les projets retenus ont fait l'objet d'une contractualisation par l'État, le Parlement ayant voté chaque année les recettes affectées à l'AFITF. La privatisation des sociétés d'autoroutes par le Gouvernement Villepin a privé l'Agence d'une recette dynamique mais la logique initiale a été maintenue malgré les réserves du ministère des finances et de la Cour des comptes. On lui a donc affecté d'autres recettes : une soulte de 4 milliards d'euros, liée à la privatisation - consommée en moins de trois ans -, mais aussi des recettes en provenance des sociétés d'autoroutes - la taxe d'aménagement du territoire et la redevance domaniale -, ainsi que, par la suite, une part du produit des amendes radar. Comme cela n'était pas suffisant, on lui a attribué une subvention d'équilibre d'environ un milliard d'euros par an. L'AFITF a donc pu disposer d'un budget d'environ 2,2 milliards d'euros par an, nécessaire pour financer les projets engagés. Mais le contexte budgétaire difficile a rendu nécessaire de trouver d'autres financements. C'était le but de l'écotaxe, dont 760 millions sur un produit total de 1,2 milliard devaient revenir à l'AFITF. Les mésaventures de l'écotaxe sont connues avec des résistances à la fois populaires, celles des « bonnets rouges », et professionnelles, celles d'un grand syndicat professionnel de la route. Il n'a donc pas été possible de réduire à zéro en quatre ans la subvention d'équilibre budgétaire. Le péage de transit qui doit se substituer à l'écotaxe sera beaucoup moins productif et il manquera au minimum 500 millions d'euros au budget de l'AFITF, voire 800 millions à un milliard si l'on retient, comme cela avait été prévu par le Gouvernement Ayrault, les projets du deuxième scénario établi par la commission Mobilité 21. On entend parler depuis quelques jours de l'affectation d'un supplément de 2 centimes sur la taxe poids lourds, mais aucune décision ne semble être prise et il faut donc attendre le projet de loi de finances pour 2015.

L'AFITF est une agence « grenellienne » dans sa conception puisque 70 % des autorisations d'engagement vont à des modes de transport alternatifs à la route, même si 58 % des crédits de paiement vont à la route, du fait de la plus grande rapidité de consommation des crédits routiers.

Le budget 2014 de l'AFITF peut être qualifié de budget de crise. Il a été bouclé en 2013 grâce à une ponction sur la trésorerie, en 2014 il l'a été par un accroissement de la subvention d'équilibre budgétaire qui atteint 625 millions d'euros au lieu des 400 millions prévus. Si l'année est plutôt normale en crédits de paiement, elle fait apparaître une diminution des engagements : les contrats de projet n'ont pu être inscrits, de même que le troisième appel à projets de transports collectifs en site propre (TCSP). Enfin, certaines dépenses ont été étalées, celles de la ligne TGV Tours-Bordeaux et de la deuxième partie de la ligne Est. Ces retards de paiement ne pourront perdurer.

Quel bilan depuis deux ans ? Comme je l'avais annoncé, j'ai cherché à améliorer la transparence de l'agence, en créant un site web et en établissant un rapport annuel d'activité. Je m'étais engagé aussi à modifier la structure du conseil d'administration qui est paritaire entre hauts fonctionnaires et représentants des administrations, d'un côté, et élus nationaux et personnalités qualifiées de l'autre. Il me parait en effet souhaitable que les grandes associations d'élus soient présentes dans le tour de table, ce qui pourra être fait dès l'achèvement de la réforme territoriale.

Nos priorités sont en cohérence avec celles du Gouvernement. Le ministre des transports, lors d'un déplacement dans le Nord ce matin, a insisté sur la sécurité. C'est essentiel, que ce soit à travers l'entretien des infrastructures de transport ferroviaire, une priorité que de récents accidents ont dramatiquement rappelée, ou pour la préservation du patrimoine routier exceptionnel de notre pays. Plusieurs indicateurs semblent montrer une dégradation de l'état d'entretien des routes, par l'État comme par les conseils généraux. Ce sont 500 millions à 1 milliard d'euros par an qu'il faudrait pouvoir y consacrer.

L'autre priorité concerne les transports du quotidien pour lesquels les attentes de nos concitoyens sont fortes, en termes de capacité, de confort et d'efficacité. Le remplacement des trains d'équilibre du territoire (TET) est intégralement prévu d'ici 2025, 110 millions y sont affectés dès cette année. L'AFITF s'intéresse aussi aux grandes infrastructures à portée européenne, le projet Lyon-Turin et le canal Seine Nord Europe.

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