Intervention de Yannick Vaugrenard

Réunion du 21 octobre 2014 à 14h30
Débat sur le bilan du crédit d'impôt compétitivité emploi

Photo de Yannick VaugrenardYannick Vaugrenard :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi constituait l’une des trente-cinq décisions concrètes du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, annoncé à la suite de la présentation du rapport de Louis Gallois sur la compétitivité de l’industrie française. Comme cela a été rappelé, son objectif est d’améliorer la compétitivité de nos entreprises, en particulier à travers des efforts en matière de recrutement, d’investissement, de recherche ou encore d’innovation.

Alors que les premiers versements de ce crédit d’impôt parviennent aux entreprises depuis quelques mois, il nous appartient – c’est précisément le but du débat de ce jour – de réaliser un point d’étape sur cette mesure, centrale dans la politique de relance économique du Gouvernement.

Examinons les chiffres dont nous disposons aujourd’hui, notamment ceux que le comité de suivi du CICE a publiés dans son rapport du 30 septembre dernier.

À ce jour, 8, 7 milliards d’euros ont été déclarés et 5, 2 milliards d’euros ont d’ores et déjà été restitués. Ce sont tout de même 713 000 entreprises, sur le million d’entreprises concernées, qui ont ainsi demandé à bénéficier du dispositif : 11 % sont des micro-entreprises, 31 % des PME et 25 % des entreprises de taille intermédiaire.

Certes, le Gouvernement avait escompté que les entreprises déclarent 10, 8 milliards d’euros. Mais, bien évidemment, le temps n’est pas venu de tirer un bilan définitif du CICE ; il est encore trop tôt pour voir ses effets sur le comportement des entreprises, et cela pour plusieurs raisons.

Premièrement, au moment de l’enquête réalisée par le comité de suivi, un quart des entreprises n’avaient pas encore arrêté leurs comptes. Le montant de 8, 7 milliards d’euros ne concerne donc que les structures ayant clos leur exercice entre janvier et avril 2014.

Deuxièmement, la créance ultime au titre de 2013 ne sera connue qu’en 2017, à échéance du droit au crédit d’impôt, puisque les entreprises disposent de trois ans pour l’utiliser.

Troisièmement, pour mesurer la réelle efficacité du CICE sur notre économie, il faut attendre les effets de la baisse des cotisations, qui ne seront pas mesurables avant deux ou trois ans au minimum.

La montée en puissance du dispositif est donc, par nature, progressive et nous pouvons aisément mesurer le décalage, normal, entre les annonces et les tout premiers effets. Mais nous savons, depuis quelque temps déjà, mes chers collègues, que le temps économique n’a rien à voir avec le temps politique, et encore moins avec le temps médiatique.

Toutefois, il est dès à présent possible de tirer quelques enseignements du rapport du comité de suivi, ainsi que d’une enquête réalisée par l’INSEE, auprès de 5 000 entreprises, sur la manière dont elles comptent utiliser le CICE.

Tout d’abord, cette enquête nous apprend que la connaissance du dispositif progresse de manière notable chez les dirigeants, par rapport à son lancement en 2013.

Interrogées sur leur future utilisation, 34 % des entreprises du secteur de l’industrie estiment que le CICE leur permettra d’embaucher, et ce chiffre grimpe à 48 % dans le secteur des services.

Par ailleurs, 58 % des entreprises du secteur de l’industrie et 52 % du secteur des services indiquent destiner le CICE à de l’investissement. Son rôle premier semblerait donc rempli, ce qui démontre que, dans les services comme dans l’industrie, la mesure répond à un besoin.

Compte tenu de ces éléments, toute analyse sur le CICE et ses effets nécessite prudence et humilité.

Le retour sur l’année écoulée est extrêmement instructif sur la façon dont sa mécanique a été progressivement assimilée et sur les obstacles que cette assimilation a pu logiquement rencontrer. Mais cette année ne peut être considérée comme véritablement représentative des comportements à venir. Lorsque les acteurs se seront appropriés le dispositif et que sa stabilité sera considérée comme acquise, certaines adaptations devront être envisagées. D’autres méritent sûrement de ne pas attendre…

Je souhaiterais revenir sur quelques points ayant créé la polémique, à savoir l’utilisation du CICE par certains grands groupes en vue d’augmenter les dividendes.

Il est évident que le CICE ne doit pas être détourné de son objet initial : la sauvegarde et la création d’emplois, ainsi que la modernisation de l’appareil productif. C’est pourquoi je soutiens tout ce qui vise à demander aux entreprises de rembourser les aides versées, dès lors que celles-ci servent à augmenter les dividendes ou la rémunération des actionnaires, ou qu’elles accompagnent la fermeture d’entreprises ou de succursales rentables.

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