Intervention de Alain Anziani

Réunion du 21 octobre 2014 à 21h30
Application de l'article 68 de la constitution — Adoption définitive d'un projet de loi organique dans le texte de la commission

Photo de Alain AnzianiAlain Anziani :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai envie de commencer mes propos par un adverbe : « Enfin ! ». Enfin, nous sommes saisis d’un projet de loi organique mettant en œuvre l’article 68 de la Constitution !

Comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur – je salue une nouvelle fois la qualité de votre travail, mais nous y sommes habitués –, les questions autour de la procédure de destitution se posent depuis 2001. Or, depuis cette date, c’est le silence.

Rappelons, comme vous l’avez d’ailleurs fait devant la commission des lois, l’origine de ce questionnement. Comme souvent dans notre pays, malheureusement, c’est un scandale, celui des emplois fictifs de la ville de Paris, qui a conduit le Président de la République à créer une commission. Il est en effet habituel que notre pays ne fonctionne que par les scandales et l’émotion qu’ils suscitent, notamment en matière institutionnelle. À l’époque, nous pouvions toutefois craindre que cette commission, selon la formule de Clemenceau, ne soit qu’une façon d’enterrer l’affaire. Cela aurait pu être le cas, et nous sommes en effet passés tout près de l’enterrement. En tout cas, nous avons dû patienter sept ans – un septennat ! – depuis la révision constitutionnelle de 2007 pour voir apparaître les prémices d’une mise en œuvre de la procédure de destitution. Au cours de cette longue période, le chef de l’État a pu bénéficier de la protection de l’article 67, sans être soumis à sa contrepartie, inscrite à l’article 68. Dès lors, le Président de la République pouvait à peu près faire tout ce qu’il souhaitait.

Je me rappelle fort bien les propos tenus ici par Robert Badinter, qui nous disait que nous vivions dans une drôle de République car la seule femme française qui ne pouvait pas divorcer sans le consentement de son mari était l’épouse du Président de la République – certains, sur ces travées, se rappellent sans doute de cette formule. De surcroît, si le chef de l’État avait été responsable d’un accident de la circulation, les victimes n’auraient pas pu être dédommagées. On voit bien que la situation était intenable ; elle reposait sans doute sur une vision très monarchique de la présidence de la République et sur l’adage bien connu que le roi ne peut mal faire. Or si le roi ne peut mal faire, il n’est peut-être pas nécessaire d’encadrer son action et de préciser sa responsabilité…

Il faut saluer, comme M. le secrétaire d’État l’a fait, le coup d’accélérateur dans cette course de lenteur donné par la proposition de loi organique déposée par François Patriat et Robert Badinter, dont le sort a varié au gré des majorités sénatoriales : une majorité ancienne l’avait renvoyée devant la commission des lois, considérant sans doute qu’il fallait donner du temps au temps, …

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