Intervention de Bruno Racine

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 22 octobre 2014 : 3ème réunion
Audition de M. Bruno Racine président de la bibliothèque nationale de france bnf

Bruno Racine, président de la Bibliothèque nationale de France :

Je vous remercie de votre accueil et de l'intérêt que vous portez à la BnF. Avec 2 300 emplois et une dotation globale de 212 millions d'euros, elle est en effet le plus gros établissement sous la tutelle du ministère de la culture.

La BnF est implantée sur sept sites : François-Mitterrand, le quadrilatère Richelieu, la bibliothèque-musée de l'Opéra, la bibliothèque de l'Arsenal, le centre technique de conservation de Bussy-Saint-Georges, la bibliothèque de Sablé-sur-Sarthe et la maison Jean Vilar à Avignon.

L'histoire de la BnF est longue et riche ; le dépôt légal pour la presse et les livres, dont l'origine remonte au XVIe siècle, a des assises solides et a progressivement été étendu à d'autres supports : phonogrammes, vidéogrammes, et, depuis 2006, Internet. La BnF a la charge générale du dépôt légal, à l'exception du cinéma, qui ressortit au Centre national de la cinématographie, et des médias audiovisuels, dont la charge est confiée à l'Institut national de l'audiovisuel (INA).

Une mutation majeure a eu lieu dans l'histoire de la BnF au tournant du siècle, par la volonté du Président François Mitterrand de créer une bibliothèque nationale d'un genre nouveau. L'ancienne n'attirait qu'un public limité ; désormais, la BnF reçoit un million de visiteurs par an, manifestations culturelles comprises. Elle a été pionnière en matière de bibliothèque numérique : Gallica, créée en 1997, est l'une des plus grandes du monde avec 3 millions de documents en libre accès.

Nous vous ferons parvenir le rapport d'évaluation du précédent contrat de performance. Il est globalement positif ; les objectifs ont été jugés atteints, notamment en matière numérique. Notre actuelle feuille de route triennale résulte du contrat de performance en vigueur, signé en 2013, qui met davantage en avant la stratégie de l'établissement. Celle-ci est guidée par trois valeurs clés : confiance d'abord, pour ceux qui déposent leurs documents chez nous ; partage ensuite, de nos compétences et savoir-faire avec notre réseau de 250 pôles associés, dont le Sénat, pour sa bibliothèque patrimoniale ; innovation enfin, car les contraintes budgétaires et technologiques nous imposent de repenser nos modes d'action.

Quatre grands chantiers sont devant nous. D'abord, la rénovation du quadrilatère Richelieu, conduite par l'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC). Une première phase de ce chantier lancé en 2010 sera achevée en septembre 2015. Une fois la rénovation terminée, nous ouvrirons largement le site au public. Ses espaces seront partagés entre la BnF, l'Institut national d'histoire de l'art (INHA) - dont la bibliothèque occupera la plus belle salle du bâtiment - et l'École des chartes, afin d'en faire le premier pôle mondial d'histoire des arts et de l'image. Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche contribue assez largement à cette première phase.

Deuxième chantier : le numérique. Gallica en est le fer de lance, mais il ne se réduit pas à la numérisation des documents. Maintenir le rythme de celle-ci impose de diversifier les financements. Nous bénéficions pour l'heure de ceux du Centre national du livre (CNL), de notre budget propre, du mécénat et de partenariats public-privé signés dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir (PIA). Nous assurons en outre la mise en oeuvre de ReLire, grand projet de numérisation des ouvrages indisponibles mais sous droit du XXe siècle, la conservation des données de long terme et la diffusion de toutes ces richesses. Nous développons également notre coopération aux plans international et national, en redistribuant une partie de nos crédits à nos pôles associés. La BnF est enfin l'un des plus gros contributeurs au projet Opendata, grâce à la mise à disposition d'Etalab de plusieurs millions des notices qui constituent un considérable capital intellectuel.

Troisième chantier : la redéfinition de nos publics. Plus le numérique prend d'ampleur, plus la question de la venue des publics sur nos sites se pose. La maintenance de nos implantations physiques coûte cher. Nous engageons donc une conquête ou une reconquête de nos publics en chair et en os.

Quatrième et dernier chantier : la modernisation de notre gestion, dans un contexte de diminution de nos moyens. La BnF est avec le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) le seul établissement public à avoir entièrement dématérialisé sa chaîne de dépenses et de recettes. Reste que son département immobilier pèse lourd ; le site François-Mitterrand vieillit - il a vingt ans. Nous sommes passés près de la catastrophe l'année dernière avec l'inondation de certains espaces. Paradoxalement, jamais autant de livres n'ont été imprimés qu'à l'ère du numérique, ce qui place la BnF au bord de la saturation de ses capacités de stockage.

Depuis 2010, nous suivons une programmation budgétaire triennale, avec l'objectif de maintenir la soutenabilité de nos finances et de garder un niveau minimal de fonds de roulement. Ce n'est pas facile, car celui-ci finance traditionnellement nos grands investissements ; il a par exemple soutenu, à hauteur de 12 millions d'euros, la rénovation du quadrilatère Richelieu. Nous nous efforçons de ne pas sacrifier l'acquisition et la conservation de documents.

En 2015, la subvention de fonctionnement de l'État est reconduite, après plusieurs années de baisse. Mais l'effet du surgel de crédits nous contraindra à trouver 750 000 euros. Nous avons alerté notre ministère de tutelle sur le vieillissement du site François-Mitterrand, et aurons dans le triennal à venir un surplus de crédits d'investissement destinés à financer, notamment, un nouveau plan de sécurité incendie.

Nos marges de manoeuvre étant faibles, nous lançons peu d'actions nouvelles. Elles concernent essentiellement le logement social de nos agents et les bourses de recherche. En effet, nous avions 2 510 emplois en 2008 ; ils seront 2 267 en 2015, soit une baisse de près de 10 % en six ans : c'est considérable. Sans cela, nous n'aurions pu absorber la baisse des dotations de l'État. Le glissement vieillesse-technicité de notre personnel fait à lui seul augmenter notre masse salariale de 2 à 2,5 millions d'euros par an. Nos baisses d'effectifs se font au prix de tensions réelles, qui nous contraignent à une gestion extrêmement attentive et précautionneuse.

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