Monsieur le secrétaire d’État, je tiens à insister à mon tour sur la transparence. Je reviendrai en outre sur les formes de ratification qui garantissent la souveraineté nationale et, je l’espère aussi, la souveraineté européenne.
Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez bien indiqué que votre collègue Matthias Fekl avait écrit à la Commission. C’était le 17 septembre. Que répond la Commission ? Quels outils nouveaux seront mis en œuvre pour garantir l’information de chaque État ? En effet, dans la mesure où les cycles de négociations sont associés à des thèmes, il serait tout de même assez légitime qu’à l’issue de chaque thème les différents parlements nationaux soient informés.
Comme tous mes collègues, je m’associe bien sûr aux messages de sympathie qui ont été adressés au peuple canadien, aujourd’hui dans l’angoisse et la peine. Je constate cependant que, s’il a été beaucoup question du traité CETA avec le Canada, nous n’avons pas parlé d’un traité qui se prépare, avec ce même pays, dans le domaine des services. Cette négociation est menée dans le plus grand secret à Genève, à quelques rues de l’OMC, mais en dehors de l’OMC, avec la participation de l’Union européenne et des États-Unis, sous l’égide de l’ambassade d’Australie.
Nous devons être informés non seulement des étapes suivies et des sujets traités, mais aussi du champ de ces négociations. WikiLeaks a publié des documents classés « secret », dans lesquels on pouvait lire que la négociation sur les services était ouverte à des sujets aussi sensibles que la libéralisation de la sécurité sociale ou du champ éducatif. Il y est en outre question de l’instance de règlement des différends, dont nous avons parlé, mais aussi de l’interdiction qui serait imposée aux États signataires de renationaliser tel ou tel secteur ou de le restaurer comme service public. Parallèlement, obligation leur serait faite de verser les mêmes subventions aux opérateurs, publics ou privés, d’un même domaine intervenant dans le champ des services publics.
Inutile de vous dire que c’est tout un pan du modèle historique de la France, et, je l’espère, de son modèle futur, qui risquerait d’être menacé par des décisions de cette nature.
On nous oppose en général, pour chasser nos inquiétudes, d’une part que la transparence sera accrue, de l’autre que les traités conclus devront être ratifiés par les parlements nationaux. Or rien n’est moins sûr.
M. Bizet l’a rappelé, le nouveau président de la Commission, Jean-Claude Juncker, a pris position contre la présence, dans le futur traité, de la fameuse clause sur le mécanisme de règlement des différends. On peut certes y voir la prise de conscience du refus exprimé par les États membres, mais il y a une autre réalité : dans les couloirs de la Commission, on murmure que, si cette clause était supprimée, l’accord perdrait son caractère mixte et ne serait plus que purement commercial ; dès lors, il ne serait soumis qu’à la ratification du Parlement européen, et non à celle des États membres !
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous garantir qu’en tout état de cause tous ces grands traités dont nous parlons seront qualifiés de « mixtes », justifiant de ce fait une ratification par les États membres ?
L’ampleur et la diversité des sujets abordés aujourd’hui par les uns et les autres le montrent bien, derrière la question du libre-échange commercial demeure celle du juste échange, loin d’être réglée, elle. Comme l’ont dit M. Guerriau, Mme Khiari et d’autres collègues, le juste échange, c’est celui qui, respectueux des normes mais aussi des ambitions, sait faire vivre l’humain avant l’argent !