Intervention de Jean-Étienne Antoinette

Réunion du 12 janvier 2009 à 15h00
Communication audiovisuelle — Article 1er

Photo de Jean-Étienne AntoinetteJean-Étienne Antoinette :

Je comprends bien que l’expression « notamment ethnoculturelle » puisse poser problème. Cependant, l’adverbe « notamment » n’est pas exclusif : il est distinctif de l’une des formes de la diversité à laquelle il convient de prêter une attention particulière, parmi les autres et non contre elles.

Il est bien vrai, et ma collègue l’a souligné, que « la télévision actuelle est majoritairement blanche, bien portante, “cadre” et masculine ». Cela plaide en faveur d’un effort portant sur toutes les formes de la diversité.

Je partagerais totalement l’idée d’un vocable générique de la diversité si toutes les formes de celle-ci évoluaient de la même façon ou si elles étaient toutes défendues avec la même vigueur et avec les mêmes résultats. Or ce n’est pas le cas !

La réalité est ce qu’elle est et, quand un gouvernement, dans un contexte de résistance des mentalités, veut réellement faire avancer l’acceptation d’une différence, il le fait en s’appuyant sur une loi contraignante, comme ce fut le cas avec la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Non seulement ce texte réaffirme le principe de l’obligation, pour les entreprises comptant au moins 20 salariés, d’employer au moins 6 % de travailleurs handicapés, mais il va jusqu’à renforcer les sanctions, à créer des incitations et à étendre celles-ci aux employeurs publics. Je me garderai bien de critiquer l’ingérence de cette loi dans la politique des entreprises ! Et, pour ma part, je considère que, demander des indicateurs de résultats, ce n’est pas fixer des quotas !

Prenons un autre exemple : la question de la parité et de l’égalité entre hommes et femmes a avancé grâce à la loi du 9 mai 2001, qui explicitait clairement ses objectifs sur des points précis.

Objectivement, la visibilité des femmes à la télévision a évolué, et les résultats sont nettement plus significatifs que pour la visibilité de la diversité des origines. Concrètement, en 2007, la part des femmes dans les journaux télévisés a été de 19, 5 %, contre 80, 5 % pour les hommes. C’était encore trop peu, mais c’était déjà bien plus qu’en 2005, où la part des femmes était de 15 % : quatre points de plus en deux ans, là où la diversité des origines a gagné… un point en dix ans ! Dans le même récent rapport du CSA, en effet, on apprend que, « s’agissant des animateurs et présentateurs, la part des personnes “vues comme non-blanches” passe de 6 % en 1999 à 7 % en 2008 ».

Lorsqu’un Noir a présenté, en 2006, le journal télévisé sur TF1, cela a eu indiscutablement une forte portée symbolique et a d’ailleurs donné lieu à d’innombrables articles et débats dans les médias, ce que ne produit plus l’apparition d’une nouvelle femme dans un journal télévisé !

Il y a donc des domaines où les pratiques et les mentalités évoluent réellement et d’autres où les choses stagnent lamentablement. Il faut en prendre acte et agir en conséquence. Toute autre attitude serait hypocrite et irresponsable.

Je terminerai mon propos – j’ai envie de dire mon plaidoyer – en citant encore une fois ma collègue Mme Bariza Khiari, dont l’intervention jeudi dernier sur le rôle fondamental des médias dans l’évolution des mentalités m’a décidément marqué : « Pour rapprocher les gens, pour briser ces frontières parfois indicibles, pour lutter contre les discriminations, il faut veiller non seulement à rendre visible la diversité, mais aussi à la faire voir sous des formes un peu plus positives. L’enjeu est essentiel. La visibilité est le catalyseur partiel de l’intégration, dont il peut constituer de toute évidence l’un des principaux piliers. On se sent en effet moins exclu quand on a l’impression, en regardant son écran, que la société vous accepte. Les médias jouent un grand rôle dans l’évolution des mentalités, dans la capacité de chacun à briser les stéréotypes de représentation de l’autre. »

En définitive, je crois profondément aux avancées démocratiques exprimées par des actes politiques forts, qui ont pour mission historique de bouleverser le rythme d’évolution du corps social afin de lui donner la dimension humaniste et équitable qui fonde notre civilisation moderne.

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