Intervention de Éliane Giraud

Réunion du 29 octobre 2014 à 14h30
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Suite de la discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Éliane GiraudÉliane Giraud :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la France, notre pays, doit impérativement trouver un nouveau souffle : parce qu’elle a porté et qu’elle porte un modèle social de grande qualité dans une économie mondialisée, parce que son histoire l’a toujours placée au cœur du moteur de l’Europe et parce que son avenir réside dans notre capacité collective à l’inventer.

Cette réforme, monsieur le secrétaire d’État, va bien au-delà d’une réforme de nos institutions. Elle représente un pas négocié, difficilement négocié, certes, mais très important pour faire avancer la conception que nous avons de la République de demain.

Créative, innovante, performante et juste, la France doit être un atout pour l’Europe.

Proposer une réorganisation territoriale qui s’appuie sur des régions plus grandes et plus fortes, c’est redessiner une carte de France avec des régions en trois dimensions : une dimension institutionnelle rationnelle, dans la recherche d’une réelle dynamique économique ; une dimension institutionnelle capable de réinventer une nouvelle proximité ; une dimension institutionnelle qui protège les identités, les spécificités et qui mette en valeur les cultures.

Je souhaite revenir sur la dimension économique de la réforme institutionnelle.

En proposant de grandes régions, nous inscrivons nos régions dans une dimension conforme à ce que demande et peut offrir l’Europe, pour en faire des moteurs de croissance.

Cette réforme est nécessaire, car elle correspond à la France du XXIe siècle. Elle est audacieuse, car elle place nos régions dans les grandes régions européennes. Elle est courageuse, car elle ne se réduit pas à un simple regroupement administratif, mais elle fait des régions des institutions stratèges qui vont contribuer encore plus à l’aménagement durable des territoires, au développement économique et à l’emploi, à la formation des jeunes, à l’amélioration des déplacements, mais aussi à la présence des services publics sur nos territoires.

Pour renforcer l’innovation et la compétitivité de nos entreprises, donner une visibilité plus forte à nos universités, offrir à notre jeunesse un réel souffle d’espoir et d’audace, les régions actuelles ont fait leurs preuves. En mutualisant, en additionnant des complémentarités, elles ne seront que plus pertinentes.

Notre pays a besoin de confiance et la région est une entité suffisamment grande, mais aussi suffisamment proche, pour accompagner cette dynamique à l’international, car c’est bien de cela qu’il s’agit aujourd’hui : une entreprise– et je parle là des PME – a besoin de diversifier très rapidement son carnet d’adresses ; or, aujourd’hui, ce carnet d’adresses est mondial.

Il a quelques jours, le président de la région Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne, était à Shanghai. Le pavillon Rhône-Alpes devient la maison France. Il y a, bien sûr, les entreprises industrielles innovantes de la french tech, mais nous exportons d’autres produits : le vin, par exemple, qui retrouve là des parts de marché qu’il ne peut plus trouver sur le seul marché intérieur. C’est bien une preuve, monsieur le secrétaire d’État, du combat commun que nous pouvons mener pour la croissance.

Quoi de plus concret qu’une réforme qui apportera aux Françaises et aux Français qui s’engagent, une vraie pertinence dans l’accompagnement de leurs propres projets ?

Les régions peuvent mener ces politiques d’innovation, de recherche, de présence à l’international et, dans une relation bien comprise, renforcer ces actions par celles des métropoles qui, en accueillant les entreprises, seront bien sûr un partenaire essentiel.

La région est également garante des équilibres économiques sur la totalité des territoires, urbains comme ruraux, de plaine comme de montagne. Là aussi, les partenariats que nous pouvons créer avec les maires, les intercommunalités et les départements seront indispensables, surtout si le débat sur les compétences va au fond des choses.

L’innovation doit innerver l’ensemble de notre territoire. La grande région aura cette force de la diversité

Les régions doivent réinventer la proximité. Depuis leurs créations, elles ne cessent de s’affirmer dans le quotidien des habitants de notre pays. Les régions ont beaucoup progressé ces dernières années : politiques territoriales, investissements et gestion du personnel dans les lycées, TER, antennes territoriales, etc. Elles ont fait un grand progrès dans l’amélioration du lien avec nos concitoyens.

Les élus régionaux sont plus connus mais aussi, souvent, plus présents sur le terrain. Il reste encore des progrès à faire, mais, au fond, n’est-ce pas un peu normal pour une institution encore très jeune, dont la première élection au suffrage universel date, je vous le rappelle, de 1986 ? La naissance des départements remonte à 1790 : c’est dire que nous avons encore du chemin à faire !

Donc, il faut bouger, regarder l’avenir et le bâtir. Gardons-nous de sous-estimer les difficultés liées à l’éloignement. Un territoire peut se sentir délaissé, abandonné, parce qu’il est enclavé ou éloigné des grands axes de communication.

Oui, monsieur le secrétaire d’ État, cette réforme, pour réussir, aura besoin d’un vrai de travail de collaboration entre les présidents de région concernés, mais aussi entre tous les élus, les responsables et les forces vives de notre territoire.

C’est bien un projet de mobilisation qu’il nous faut aujourd’hui bâtir ! Il faut que ces unions de régions – je préfère ce terme à celui de « fusion » –s’accompagnent d’une proximité réinventée, afin de mettre en place de nouvelles donnes démocratiques. Le Premier ministre l’a dit, certains présidents le font déjà et je voudrais saluer les présidents de la région Rhône-Alpes et de la région Auvergne, Jean-Jack Queyranne et René Souchon. Avec l’élargissement des compétences des régions, ce mouvement doit s’amplifier. C’est un beau défi et l’État manifeste là une véritable confiance à l’endroit des élus locaux.

Enfin, c’est une réforme institutionnelle qui prend en compte les identités et les spécificités. Cette réforme doit être inclusive. Elle doit permettre à chacun et à chacune de se retrouver sur des complémentarités et des réciprocités.

Je sais qu’il y a des craintes, et la carte pourrait évoluer perpétuellement. Mais il faut faire des choix. On les fait ! Vous les avez faits, monsieur le secrétaire d’État ! Le droit d’option apportera une réponse précise et claire et permettra des réajustements qui pourront être majoritairement souhaités.

Une grande région laisse forcément éclore ses identités et ses spécificités, comme elle se nourrit de la culture diversifiée qu’elle génère. De quoi avons-nous peur ? Nous sommes dans un monde où la mobilité est déjà l’un des éléments majeurs et le sera de plus en plus. Nous le voyons bien aujourd’hui : nés ici, éduqués ailleurs, évoluant en fonction d’un travail ou d’une situation familiale, nos concitoyens, les élus locaux que nous rencontrons viennent quelquefois souvent d’ailleurs. Cet « ailleurs » est indispensable à notre société moderne. Il en est la richesse, il en fait l’avenir.

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