Intervention de Alain Fouché

Réunion du 29 octobre 2014 à 14h30
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Suite de la discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Alain FouchéAlain Fouché :

Madame la présidente, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je veux d’abord saluer l’excellent travail de la commission spéciale, présidée par Jean-Jacques Hyest, car elle a permis d’apporter un certain nombre de solutions importantes.

Je perçois une évolution de la part du Gouvernement ; sans doute les dernières échéances n’y sont-elles pas étrangères.

In fine, le Sénat réaffirme son attachement aux territoires en rendant sa vocation à chacune des collectivités, commune, intercommunalité, département, région.

Nous reviendrons ultérieurement et de manière plus approfondie sur les compétences, mais il était important d’en parler dès à présent.

Nous sommes tous convaincus de la nécessité, dans un souci d’économie et de simplification, de clarifier les compétences de chaque collectivité et de supprimer les doublons ; il y a même urgence à cet égard. Il suffit de citer l’exemple des collèges, des lycées, des comités départementaux et régionaux du tourisme...

Dans une région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes de 4 millions d’habitants, que fera un comité régional du tourisme quand il devra participer à la commission concernant Saint-Jean-de-Luz ou celle concernant Loudun, des villes situées à plusieurs centaines de kilomètres l’une de l’autre, la seconde se trouvant en outre à 80 kilomètres de Tours ? Ce sont des doublons qu’il faudrait supprimer.

Un équilibre doit être trouvé entre les collectivités et leurs centres de décisions respectifs, qui doivent être présents sur les territoires.

Il faudra que tout cela soit clair. À cet égard, le Gouvernement évolue. Les départements devront poursuivre leurs actions de proximité, qui sont si appréciées et même plébiscitées par les élus locaux et les habitants, dont ils sont les premiers partenaires financiers. Tournés vers l’avenir, ils répondent aux problématiques locales de tous genres, à commencer par le soutien aux communes.

Il faut conserver les départements – c’est ce que semble dire le Gouvernement –, mais sans les déshabiller.

Réduire le millefeuille territorial et améliorer la gouvernance en clarifiant les compétences et en simplifiant les procédures, voilà notre mission.

Dans ce big bang territorial, les nouvelles régions devront être chargées des grands projets, nous en sommes d’accord. Il faudra aussi veiller à l’équilibre : les petits départements représentés par deux ou trois élus, cela pose tout de même un vrai problème...

Les grands projets, ce sont les grandes infrastructures : routes, universités, énergie, zones portuaires et aéroportuaires, haut débit, ainsi que les grands projets économiques. Mais les conseils généraux devront conserver leurs grandes priorités, qui constituent une partie de l’aménagement du territoire local : aide aux communes, services publics en milieu rural, sans oublier un certain nombre de projets structurants.

Ainsi, dans la Vienne, deux projets importants ont été mis en place par le conseil général. Ni le conseil régional ni l’État n’y ont investi d’argent.

Le premier projet, la technopole du Futuroscope, qui a été créée par René Monory et que j’ai eu l’honneur de présider avant que la Caisse des dépôts et consignations ne devienne majoritaire, représente 10 000 emplois. S’il a vu le jour, c’est parce qu’il y avait une volonté locale, et non régionale ou nationale.

Le second projet, c’est le domaine que Center Parcs est en train d’installer dans le nord de la Vienne et qui permettra de créer 700 emplois. Là encore, c’est grâce à l’intervention locale des communes, des communautés de communes et des élus, aux côtés des dirigeants de Center Parcs, que les choses avancent et que cette opération promet d’être une réussite.

Il faut donc que les départements conservent au niveau local des compétences, et une certaine maîtrise s’agissant des équipements économiques et touristiques situés sur leur territoire et à proximité, ainsi qu’en matière de solidarité.

Dans mon département, la Vienne, les dépenses de solidarité représentent 54 % du budget. Ces chiffres, comme le disait très bien Gérard Longuet, ne correspondent pas à des dépenses faites au hasard, mais à des politiques mûrement réfléchies.

Les départements seront l’échelon intermédiaire indispensable entre les futures régions et les intercommunalités.

S’agissant de ces dernières collectivités, vous envisagiez que le préfet dispose de pouvoirs et d’une certaine souplesse quant au seuil de 20 000 habitants. Il semble que ce seuil ne soit plus considéré comme intangible…

Chacun sait que les intercommunalités ne pourront pas assumer financièrement toutes les missions qui se rapportent à la solidarité. Les régions n’en veulent pas, elles l’ont dit. L’État en incapable de les prendre en charge puisqu’il les laisse aux départements. Quant aux diverses intercommunalités, elles ne disposeront pas toutes des mêmes moyens financiers pour y pourvoir. La vraie proximité sera donc assurée par le conseil départemental.

Je m’élève contre certaines accusations portées à l’encontre des collectivités, en particulier des départements, qu’elles proviennent de l’État, des gouvernements successifs ou de grandes structures. Ces critiques sont inacceptables.

Depuis les premières lois de décentralisation, les lois Defferre, les transferts de compétences et de personnels de l’État vers les collectivités n’ont cessé de s’amplifier. Voilà pourquoi les collectivités ont recruté, sans recevoir les compensations financières correspondantes !

Le désengagement de l’État sur nos territoires est permanent. Qui oserait dire le contraire ?

J’entendais, hier, le Premier ministre et vous-même, monsieur le ministre de l’intérieur, dire qu’il fallait confier aux préfets la mission de gérer la proximité. Or on fait tout le contraire aujourd’hui... Le mal est fait !

Dernièrement, les directions départementales des territoires ont été supprimées : plus de travaux dans les communes, plus de gestion des permis de construire ni du droit des sols ! Les services des domaines ne vont plus intervenir pour les communes. Certaines missions des sous-préfectures sont transférées sournoisement aux préfectures... Tout cela démontre que, malgré vos promesses, l’État se désengage de plus en plus des territoires. Les collectivités sont donc obligées de prendre le relai, avec l’aide des départements.

Dans le cadre de cette réforme, il faudra que chaque niveau de collectivité, la région comme le département, joue son rôle, non pas de façade, mais un rôle concret qui permette d’établir un bon équilibre régional.

Il y a dans ce projet de loi une forme de centralisme régional et étatique. Aussi serons-nous vigilants au moment d’examiner, en décembre, le texte relatif aux compétences des collectivités.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, entendez nos inquiétudes et celles des élus de tous horizons, y compris ceux de votre bord politique !

Vous le savez, nous nous battrons, au Sénat, pour la représentativité des territoires, pour la ruralité, qui représente 15 millions de Français, et pour la proximité, car elles permettront d’atteindre un véritable équilibre et l’épanouissement harmonieux de notre pays. §

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion