Intervention de Louis Nègre

Réunion du 29 octobre 2014 à 14h30
Délimitation des régions et élections régionales et départementales — Suite de la discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Louis NègreLouis Nègre :

Pourquoi engager une procédure accélérée au Parlement et mettre en place un calendrier aussi expéditif ?

Sur le fond, j’ai deux remarques à faire.

Premièrement, ce texte, je l’ai dit, est mal né... Mais il est, de plus, prématuré. On a mis la charrue avant les bœufs.

Si l’on avait voulu procéder de manière logique, on aurait commencé par le début : on aurait d’abord déterminé les compétences de ces nouvelles régions ; puis, on aurait pris la précaution élémentaire de définir les financements pour un bon fonctionnement de ces structures, et l’on sait que les régions achoppent aujourd’hui sur des problèmes de financement. Or ces financements sont nécessaires, et même indispensables, pour assurer un fonctionnement régulier des services publics.

Il n’y a pas un seul mot dans ce texte sur les compétences et les financements associés. D’où un vrai problème de méthode.

C’est après que les compétences eurent été définies et les financements, assurés qu’il eût fallu se préoccuper de délimiter les périmètres.

Deuxièmement, le redécoupage de la carte de France a vite viré pour tous au casse-tête, tant il paraît difficile de savoir quel critère le Gouvernement a privilégié : s’agit-il des synergies entre deux régions, de l’existence d’un réseau de transports structuré, des liens culturels et du sentiment d’appartenance de la population, de la présence d’une métropole par région, de considérations politiques ? Quel est le fil directeur de cette démarche ?

À ce stade de la discussion, je tiens à saluer le travail efficace du président de notre assemblée, Gérard Larcher, qui a rencontré le Président de la République et a obtenu gain de cause pour que, sur ce texte fondamental pour les collectivités locales, soit appliqué l’article 50-1 de la Constitution. Le président du Sénat a donc souhaité, à juste raison, que l’exécutif remette en perspective cette réforme territoriale qui a beaucoup et même énormément varié depuis les annonces du mois d’avril dernier.

Cette initiative est bienvenue, surtout après les prises de position contradictoires des uns ou des autres qui font qu’aujourd’hui on ne sait plus où l’on en est, y compris à gauche, où j’ai d’ailleurs entendu prononcer des termes aussi significatifs que « zigzag », « brouillard », « surréaliste », « chaotique », « déconnecté », « accentuation des fractures », « injuste » et même « mortifère ». C’est dire !

Le Premier ministre se devait d’apporter les éclaircissements nécessaires sur un texte particulièrement flou et instable, notamment sur le calendrier électoral. Les annonces d’hier n’apportent aucune réelle amélioration quant au fond, sauf, je le reconnais, l’adaptation nécessaire et indispensable du seuil de 20 000 habitants pour les intercommunalités – ne pas le faire revenait à condamner d’emblée la ruralité – et la fixation tant attendue de la date des élections cantonales au mois de mars prochain.

Notre démarche s’appuie sur le principe suivant : nous ne ferons pas d’obstruction systématique sur la réforme territoriale, mais nous souhaitons la réécrire ici, au Sénat, qui est par excellence la maison des collectivités locales et des territoires.

En première lecture, alors que la majorité était différente, le Sénat a vidé le texte de sa substance en supprimant ce redécoupage. Maintenant que le Sénat est revenu à droite, nous avons la ferme volonté d’apposer notre marque sur ce projet de loi, pour protéger nos institutions départementales et communales. Notre objectif est de donner une cohérence générale à une réforme qui en est à sa quatrième version du redécoupage et qui est contestée par beaucoup !

Au-delà de ces appréciations, mon intervention portera sur quatre points particuliers.

Le premier a trait aux dispositions relatives à la délimitation des régions. Le préalable à toute discussion d’un texte délimitant de grandes régions était, pour nous, la réaffirmation de la vocation de chacune des collectivités territoriales. C’est fait avec l’article 1er A.

Par ailleurs, la commission spéciale a établi une carte modifiée, de compromis, avec quatorze régions métropolitaines, plus la Corse. Cette carte n’est pas parfaite, mais elle a le mérite de constituer une proposition sérieuse. Cela étant, messieurs les ministres, de nombreuses considérations émanant des territoires n’ont pu être prises en compte. Il eût été préférable, sur le fond, d’avoir une vision plus souple et plus proche des réalités du terrain.

Le deuxième point concerne la réaffirmation, grâce à notre majorité, de l’introduction par la commission spéciale à l’article 1er A du principe de subsidiarité, du maintien de l’existence des départements, qui sont des espaces de proximité et de solidarité, et des communes qui constituent la cellule de base de l’organisation territoriale de la République.

Le troisième point, c’est le droit d’option. Grâce à la majorité de la commission spéciale, ce dispositif, introduit par la loi de 2010, puis supprimé par l’Assemblée nationale, a été rétabli.

Le quatrième point est relatif à la représentation minimale des départements. Nous réaffirmons la nécessité de cet échelon institutionnel dont l’avenir reste toujours aussi incertain.

En conclusion, je me félicite des avancées significatives proposées par la commission spéciale et je voterai donc le texte qu’elle nous soumet, qui rend ce projet de loi imparfait plus acceptable.

Nous serons particulièrement vigilants lors de la bataille qui aura prochainement lieu sur les compétences des différentes collectivités. §

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion