Le débat sur cet amendement m’amène à anticiper quelque peu celui qui aura lieu sur l’article 1er, parce qu’il touche au problème fondamental que pose cet article : la volonté de dessiner d’en haut la carte des nouvelles régions.
Une procédure complexe ayant pour but de fusionner les deux départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin avec la région avait été engagée en Alsace, mais elle n’a pas abouti, alors même qu’une majorité d’Alsaciens était favorable à la fusion, le « oui » n’ayant pas recueilli la majorité des voix dans le Haut-Rhin lors du référendum local organisé en avril 2013.
D’ailleurs, je regrette le retrait de l’amendement déposé par nos amis centristes sur le droit à l’autodétermination des départements, parce qu’il touche au même problème : nous nous apprêtons à imposer d’en haut des solutions qui ne sont en rien celles qui sont souhaitées localement.
Aussi, je regrette vivement que l’État n’ait pas choisi la méthode – dont l’actuelle majorité avait d’ailleurs, paradoxalement, dénoncé le caractère trop autoritaire – qui avait guidé la refonte de la carte de la coopération intercommunale : la loi fixait un cadre très précis comprenant les objectifs à atteindre, mais laissait le temps aux différentes communes et intercommunalités de s’organiser, pour peser les problèmes, parfois même pour mener des études d’impact, tout en prévoyant une date butoir au-delà de laquelle l’État retrouvait sa capacité d’initiative si les collectivités ne s’inscrivaient pas d’elles-mêmes dans le cadre légal. Je crois qu’une telle méthode aurait été infiniment souhaitable.
Aujourd’hui, la carte que nous propose la commission spéciale va finalement, à mon sens, être pire, puisque, en ne permettant pas l’expérimentation en Alsace et en l’interdisant a fortiori aux autres collectivités, on s’apprête à laisser l’Alsace seule, alors qu’elle compte moins d’habitants que la Lorraine, et à obliger les autres régions à fusionner.
On arrive donc à un résultat infiniment moins cohérent et satisfaisant que celui auquel on aurait pu parvenir en suivant une autre méthode. Intellectuellement, il est vrai, on ne peut que soutenir le droit des régions à approfondir leur organisation territoriale, plutôt qu’à l’élargir – nous y reviendrons lors de l’examen de l’article 1er.
Quoi qu’il en soit, pour ma part, je regrette que cet amendement ne soit pas juridiquement recevable – il l’est d’ailleurs d’autant moins qu’il contrevient à la règle de l’entonnoir –, car il montre bien que nous passons à côté de ce qui aurait dû être fait pour cette réforme territoriale.