Intervention de Gérard Rivière

Commission des affaires sociales — Réunion du 29 octobre 2014 : 1ère réunion
Loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 — Audition de Mm. Gérard Rivière président du conseil d'administration et pierre mayeur directeur de la caisse nationale d'assurance vieillesse

Gérard Rivière, président du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse :

Le déficit de la Cnav était de 8,9 milliards d'euros en 2010 ; il sera seulement de 1,5 milliard en 2015. Nous prévoyons un léger excédent de 400 millions d'euros en 2017. Certes, ces prévisions dépendent de variables telles que le taux de croissance de l'économie, ou encore de la masse salariale (+ 4,2 % en 2017 et 2018), mais elles restent d'actualité. Le régime est fortement marqué par les effets démographiques et notamment le papy-boom, bien plus importants que ceux liés à l'espérance de vie. En outre, les réformes récentes ont abouti à des effets de seuil, créant des à-coups, qui se feront sentir jusqu'aux générations nées en 1955.

En réalité, comme je le dis devant votre commission depuis trois ans, l'attention ne doit pas tant porter sur le déficit de la Cnav que sur celui du FSV, qui est un vrai sujet de préoccupation. Ce Fonds sert de stabilisateur automatique à la Cnav, tout en creusant son propre déficit. Ainsi, le déficit du FSV devrait atteindre 3,7 milliards d'euros en 2014 (et 2,9 milliards en 2015), pour 20 milliards d'euros d'engagement. En regard, la Cnav enregistrera un déficit de 1,7 milliard d'euros pour une enveloppe de 110 milliards de prestations. Bref, le FSV, qui reposait sur une idée pertinente lors de sa création, est aujourd'hui dans une situation paradoxale compte tenu de son déficit structurel. Son financement, initialement assuré par la contribution sociale généralisée, se complexifie et devient illisible à cause des nombreux « branchements de petits tuyaux » que l'on observe chaque année...

Depuis 2004, pas moins de 900 000 personnes ont pu partir à la retraite de manière anticipée, pour un coût de 17 milliards d'euros. En vérité, malgré une appellation commune, les dispositifs de retraite anticipée pour carrière longue, créés en 2004, qui se seraient éteints d'eux-mêmes sans les réformes engagées depuis 2010, sont bien différents de celui mis en place par le décret du 2 juillet 2012. Lorsque l'on a commencé à travailler à 14 ans et que l'on s'arrête à 60 ans, on a indiscutablement connu une carrière longue. Lorsqu'on a commencé à travailler peu avant 20 ans, c'est plus contestable...

Vous m'avez interrogé, monsieur le rapporteur, sur les effets de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites pour la Cnav. Pour l'instant, elle nous a apporté des ressources nouvelles. La plupart des autres mesures qu'elle prévoit n'auront un effet sur les dépenses qu'à moyen et long terme. Ce sera le cas par exemple pour le décret qui permet d'acquérir un trimestre d'assurance retraite en cotisant 150 heures payées au Smic contre 200 heures auparavant. De la même façon, le décret sur la prise en compte de l'ensemble des trimestres de congé de maternité pour les femmes n'aura un effet que dans plus de vingt ans puisqu'il ne concerne que les mères d'enfants nés à partir du 1er janvier 2015.

A ce jour, 23 décrets d'application de la loi ont été publiés. Il s'agit d'un rythme de parution que je qualifierais de « normal ». Manquent toutefois à l'appel plusieurs décrets importants tels que ceux relatifs au handicap ou bien encore celui relatif au taux plein pour les bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées justifiant d'une incapacité permanente. Ces dispositions sont pourtant censées entrer en vigueur au 1er février 2015...

Pour mémoire, l'avis du conseil d'administration de la Cnav sur le projet de loi garantissant la justice et l'avenir du système de retraites avait été négatif. Les votes négatifs sur ce projet de loi comme sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 ont été émis, vous vous en doutez, pour des raisons diamétralement opposées : les syndicats d'employeurs trouvent que les mesures de réduction du déficit structurel sont insuffisantes, les syndicats de salariés déplorent le gel des pensions qui s'est produit en 2014 !

L'intégration financière du RSI est un processus comptable qui se distingue d'un adossement. Mais je dois dire que la façon dont les choses ont été annoncées avait de quoi surprendre. Nous avons appris cette intégration de la bouche de la ministre lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2014 : ni les présidents, ni les directeurs de la Cnav, de la Cnam et du RSI n'avaient été consultés ! L'idée est visiblement d'aller à terme vers des comptes uniques pour la plus grande partie des régimes. L'intégration financière sera accompagnée de ressources nouvelles. La Cnav devant verser une dotation d'équilibre au RSI de 1,7 milliard d'euros en 2015, elle recevra une compensation sous la forme d'une part de la contribution sociale de solidarité des sociétés (CSSS), impôt que percevait le RSI. Toutefois, la C3S est en cours de disparition. Qu'en sera-t-il en 2016 et 2017, nous l'ignorons pour le moment. J'aurai l'occasion de vous reparler de ce problème puisque je resterai à mon poste jusqu'à l'automne 2017 !

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