Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les difficultés financières particulièrement lourdes que rencontrent de nombreuses communes, petites et moyennes, qui comprennent un important habitat pavillonnaire et n’ont pas de terrains disponibles pour réaliser les 20 % de logements sociaux imposés par l’article 55 de la loi relative à solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU.
Je note du reste, ma collègue Marie-Hélène Des Esgaulx s’apprêtant à poser une question allant dans le même sens, qu’une fois de plus des parlementaires soulignent la difficulté de la mise en œuvre de cette loi pour nombre de nos communes, communes qui ne remettent pas en cause ni ne contestent l’obligation qui s’impose à elles, mais qui se trouvent néanmoins confrontées à la rigueur du texte et à l’interprétation trop stricte et trop sévère qu’en font les préfets.
Pour illustrer cette difficulté, je prendrai l’exemple d’une des nombreuses communes du Val-de-Marne – Périgny-sur-Yerres, Le Perreux-sur-Marne, Vincennes… –, celui d’Ormesson-sur-Marne, petite commune de 10 000 habitants.
Malgré une politique d’achat et de portage de terrains en vue de la réalisation de logements sociaux, engagée dès les années quatre-vingt-dix, la ville s’est trouvée, lors de la promulgation de la loi SRU, sans aucun logement éligible à ce titre, les logements sociaux construits antérieurement ayant tous été acquis par leurs occupants, conformément à la politique qui était encouragée à l’époque.
La ville d’Ormesson-sur-Marne a donc été redevable d’un prélèvement de quelque 95 000 euros annuels, porté à 180 000 euros annuels à compter du 1er janvier 2009.
Pour deux nouveaux programmes de logements sociaux, les subventions communales ont été acceptées en compensation, mais la loi SRU ne permet une telle compensation qu’avec un décalage de deux ans et, en cas d’excédent de subvention, d’une seule année.
Pour le lancement d’un troisième programme de quarante-deux logements sociaux, la seule solution permettant la compensation du prélèvement de 2011 à 2015 a été de vendre le terrain à sa pleine valeur en 2009 et de réduire la charge foncière de plus de la moitié de sa valeur par subventions à l’organisme HLM, échelonnées sur les années 2009 à 2012.
Actuellement, la ville entreprend un nouvel effort pour se mettre en conformité avec la loi : le projet de construction d’un établissement hospitalier de quatre-vingt-quatre lits, accueillant des malades de longue durée, sur un terrain lui appartenant et estimé – tout de même ! – à 1, 8 million d’euros dont elle va faire don pour que l’opération soit menée à bien.
L’application d’un prélèvement majoré à partir de 2016 s’ajoutant au don de ce terrain apparaîtrait donc comme une « double peine » infligée à Ormesson-sur-Marne.
Il est indéniable que cette commune, comme bien d’autres, fait des efforts notables pour remplir ses obligations en termes de logements sociaux, dans la mesure des terrains disponibles dans une région où, vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, le foncier public est plus difficile à identifier que dans d’autres.
Dans le même temps, une ville beaucoup plus importante du Val-de-Marne, Vincennes, a vu diminuer de 20 % l’objectif triennal de logements sociaux à construire pour la période 2008-2010 afin que soient prises en compte ses particularités.
Les maires ont donc le sentiment que des traitements très différenciés s’appliquent selon les villes, ce qui, en l’occurrence – de manière assez déplaisante, car les maires ne cherchent jamais à ouvrir des contentieux –, a conduit récemment le maire d’Ormesson-sur-Marne à saisir le tribunal administratif de Melun en déposant un recours contentieux pour défaut de base légale.
Ce maire fonde son action sur l’illégalité de la décision de doublement de la majoration, laquelle interviendrait en contradiction avec la position de la commission départementale, qui, très souvent, porte un jugement beaucoup plus nuancé sur l’application des pénalités.
Monsieur le secrétaire d'État, ne serait-t-il pas envisageable soit d’annuler la majoration, voire le prélèvement lui-même, jusqu’à compensation du don du terrain à l’établissement hospitalier, soit de prévoir un aménagement de la loi SRU permettant la compensation des prélèvements par des contributions communales à la réalisation de logements sociaux dès l’année suivante et sans limite de durée jusqu’à épuisement ?
Pour de petites et moyennes communes, dont, hélas ! Ormesson-sur-Marne n’est pas le seul exemple, c’est tout l’équilibre budgétaire qui est en jeu.
Tous les maires, vous le savez, sont d’accord pour participer à l’effort de solidarité en matière de logement social, dont nul ne conteste le bien-fondé, pourvu que la spécificité des communes, et notamment leur histoire, soit prise en compte et que soit mesuré l’effort qu’elles accomplissent pour se mettre en conformité avec la loi.
Je vous remercie par avance, monsieur le secrétaire d'État, des réponses, que j’espère encourageantes, que vous pourrez apporter à ces maires en difficulté.