Madame la sénatrice, à travers la question que vous avez adressée à Mme Kosciusko-Morizet, qui ne pouvait être présente ce matin, vous soulignez la difficulté de trouver un équilibre, dans l’utilisation du courrier électronique, entre le droit légitime des citoyens de s’adresser à leurs élus et l’abus qui peut parfois résulter du recours à de tels messages pour envoyer des pétitions.
À ma connaissance, ce problème n’a pas donné lieu à jurisprudence, mais des pistes existent.
Toutefois, l’article L. 34-5 du code des postes et des communications électroniques, que vous avez cité, vise à encadrer la prospection commerciale, c’est-à-dire l’offre de biens ou de services. Il ne constitue donc pas une base juridique applicable aux pétitions en ligne, sur lesquelles porte votre question et qui n’ont pas un but commercial.
En outre, concernant cet article, la CNIL a estimé, lors de sa séance du 17 février 2005, qui a donné lieu à un communiqué en date du 2 mars 2005, que « des personnes physiques peuvent être prospectées par courrier électronique à leur adresse électronique professionnelle […] sans leur consentement préalable », si le message leur est envoyé « au titre de la fonction qu’elles exercent dans l’organisme privé ou public qui leur a attribué cette adresse ».
Or les adresses électroniques des parlementaires à l’Assemblée nationale et au Sénat sont bien de nature professionnelle, et recevoir une pétition envoyée par un citoyen entre pleinement dans le cadre de la fonction d’un élu, même si cette pétition n’est pas personnalisée. On peut également considérer que le parlementaire, en communiquant sa biographie et son adresse électronique pour qu’elles soient mises en ligne, a consenti à leur utilisation par les électeurs.
Pour conclure, diffuser une pétition par voie électronique à partir des adresses des parlementaires collectées sur les sites des assemblées me semble parfaitement légal. Néanmoins, comme vous le soulignez, madame la sénatrice, cette pratique peut aboutir à encombrer la messagerie des élus et à entraver leur travail. Il est nécessaire de trouver une solution, qui pourra être sinon juridique, du moins organisationnelle.
Par exemple, il est peut-être envisageable d’encadrer le processus de pétition, en créant sur les sites des deux assemblées une fonctionnalité ad hoc reliée à une application spécifique qui dépouillerait les courriers électroniques et présenterait à l’élu un résultat global, car c’est le nombre de pétitionnaires qui importe.
En prenant ainsi l’initiative de développer la procédure de pétition, les assemblées donneraient un nouvel exemple de leur engagement en faveur de la participation des citoyens à la démocratie et au débat public.