La France a par conséquent bien besoin du choc de simplification. Celui-ci participe d’ailleurs à la mise en œuvre de l’objectif à valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi. Selon un chiffrage de l’État, pour notre pays, il devrait découler des mesures de simplification une économie globale de 2, 4 milliards d’euros.
Mais encore faut-il s’interroger davantage sur les raisons d’une telle complexité des normes, sans quoi la simplification se réduit à un trompe-l’œil pour nos concitoyens.
Plusieurs maux ont déjà été soulignés de longue date : l’inflation normative et ses corollaires, l’usage de la procédure accélérée à tout-va, la sur-transposition des directives européennes, qui surajoute de nouvelles obligations à d’autres, l’absence d’étude d’impact sérieuse accompagnant le plus souvent les projets de loi – les membres du groupe du RDSE ont fait remarquer ce paradoxe lors de l’examen de la réforme territoriale : l’étude d’impact a été conçue pour améliorer la fabrique législative, mais se trouve réduite aujourd’hui à une pure formalité technique –, la simplification par le biais de lois de simplification sans vision d’ensemble, source de complexification…
Pour ne s’attarder que sur cette dernière cause, il est à noter que le Parlement est en quelque sorte « dessaisi » par ces lois fourre-tout qui survolent tous les sujets sans les approfondir. Le législateur se voit ainsi privé de son rôle constitutionnel d’artisan de la loi sur des thèmes aussi essentiels que le droit du travail et la sécurité sociale.
De surcroît, en l’occurrence, la procédure accélérée est une nouvelle fois utilisée, une procédure dont on use et abuse… Les membres de mon groupe l’ont dit et répété en d’autres temps, sous d’autres majorités, et nous regrettons que cela ne change pas.
Cinq projets de loi affichant un objectif de simplification ont été successivement examinés en à peine deux années. Les lois adoptées sont ainsi devenues l’occasion de pallier les carences d’autres lois à peine promulguées. Comment ne pas voir que ce genre d’habitus législatif crée de la confusion chez nos concitoyens, qui ne savent plus à quelle norme se fier, et qui vont se perdre dans le jeu multiple des abrogations et des entrées en vigueur, repoussées, puis avancées et finalement encore décalées ?
Les mesures proposées dans le présent projet de loi en matière de droit du travail – portage salarial et apprentissage – auraient dû faire l’objet, a minima, d’un projet de loi spécifique et, a maxima, d’une grande concertation des partenaires sociaux, comme la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail en a posé le principe.
Par ailleurs, il est à noter que c’est le fonctionnement de l’administration qui est le plus souvent en cause, du fait de rigidités structurelles et de certains comportements ancrés dans la pratique. Tel est largement le cas en matière d’environnement. Il suffit de penser à l’abandon de la construction du centre de formation du Stade brestois pour protéger… l’escargot de Quimper !