Intervention de Paul Vergès

Commission des affaires économiques — Réunion du 5 novembre 2014 : 1ère réunion
Transition énergétique pour la croissance verte — Audition de M. Jean-Paul deleVoye président du conseil économique social et environnemental de M. Jean Jouzel et Mme Laurence Hézard rapporteurs d'un avis du cese

Photo de Paul VergèsPaul Vergès :

J'ai écouté avec passion les exposés présentés, mais également avec angoisse en pensant à l'avenir. Vous avez insisté sur l'importance nationale, européenne et mondiale de la transition énergétique. Or, la Réunion est un département intégré à la France, intégré à l'Europe, mais nous sommes dans l'Océan indien, à 10 000 kilomètres. Nous sommes face à une situation totalement différente. Nous avons tous les éléments pour la transition énergétique : l'éolien avec les vents alizés, le soleil, l'hydraulique avec nos montagnes, la géothermie avec un volcan en activité, et l'océan. Comment cependant réussir cette transition énergétique alors que la Réunion est un laboratoire de tout ce qu'il ne fallait pas faire ? Je prendrai un exemple : la facture du pétrole et du charbon augmente chaque année.

Sur le plan global, nous nous situons dans une zone de l'ancien empire colonial français, avec Maurice, les Seychelles, les Comores et Madagascar. Or nous sommes dans une situation d'évolution considérable qui pose le problème de l'énergie sous l'angle de la pression démographique. Nous étions 230 000 habitants en 1946 lorsque nous sommes devenus un département ; nous sommes actuellement 850 000 et nous serons un million dans quinze ans. La Réunion est une île modeste. Mais nous avons à proximité toutes les îles minuscules des Seychelles, des Maldives, l'île Maurice, et une île immense qu'est Madagascar. Madagascar avait 4 millions d'habitants en 1946, 24 millions d'habitants aujourd'hui, et en aura 55 millions en 2050. Nous ne pouvons pas poser le problème de la transition énergétique simplement sous l'angle de la Réunion. Comment allons-nous faire avec le voisinage d'une île comme Madagascar située à 700 kilomètres, dans un contexte de politique de regroupement, encouragée par l'Union européenne, avec les pays d'Afrique orientale ? En décembre sera signé l'accord d'intégration de ces pays, dans une zone couvrant au total 600 millions d'habitants. Qu'allons-nous faire, nous, département intégré à la France et à l'Europe, dans ce nouvel espace dans les années qui viennent ? Toutes les îles de la Commission de l'Océan indien couvrent un espace maritime commun égal à la Méditerranée. Toutes ces populations demandent un co-développement, chacune à des étapes différentes de leur développement. Voilà le problème angoissant qui se pose à nous.

Cette zone connaît une révolution dans tous les domaines, énergétique, climatique, démographique. C'est pourquoi je disais vous avoir suivi avec passion, mais également avec angoisse.

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