L’intervention d’Annie David hier soir a été coupée en deux en raison de l’heure avancée. Ma collègue m’a laissé le soin d’achever le développement de son argumentation.
J’aimerais profiter de cette explication de vote pour souligner les contradictions du Gouvernement et montrer qu’il se place, avec cette disposition, en rupture avec les positions prises depuis des années par le législateur, les juges, ainsi que les différents gouvernements, de gauche comme de droite, soucieux de protéger la montagne.
C’est la loi du 3 janvier 1991, défendue par le gouvernement Rocard, qui interdit la circulation des motoneiges à des fins de loisirs et qui fixe les dérogations possibles, au profit principalement des véhicules remplissant une mission de service public. Cette interdiction est réaffirmée par la circulaire du 6 septembre 2005, signée par Mme Nelly Olin, ministre issue des rangs de l’UMP. La Cour de cassation, pour sa part, a reconnu en 2010 le caractère professionnel du ravitaillement des restaurants d’altitude et a ainsi autorisé la circulation des motoneiges à cette fin. Pour autant, elle a confirmé en 2013 l’interdiction de convoyer les clients par motoneige, considérant que cette circulation était effectuée « à des fins touristiques ».
Interrogée à ce propos en 1998 par M. Barnier, alors sénateur, Mme Voynet, ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement, avait rappelé les dispositions législatives en vigueur et s’était fortement opposée à la circulation des motoneiges pour convoyer les clients des restaurants d’altitude.
Surtout, en juillet 2014, c’est votre propre gouvernement qui s’est opposé à cette dérogation. En effet, M. le secrétaire d’État Frédéric Cuvillier, en réponse à une question écrite de Mme la députée Sophie Dion, indiquait qu’« une telle dérogation aurait des incidences particulièrement néfastes pour l’environnement montagnard », qu’elle « serait contradictoire avec la pratique actuelle visant à diminuer l’usage de la voiture dans les stations de ski », qu’elle poserait des « questions de sécurité majeures » et que les « intérêts économiques supposés » n’étaient pas suffisants pour justifier l’autorisation de circulation. Il s’agit là d’un réel revirement émanant du même gouvernement, en trois mois seulement !
Au-delà de ce revirement, une question de fond doit être posée : quelle politique touristique souhaitons-nous développer dans nos montagnes ? Souhaitons-nous promouvoir un tourisme de luxe, se développant parfois au mépris de l’environnement et évoluant sans contact avec le tissu socio-économique local ? Ou, au contraire, souhaitons-nous développer un tourisme ouvert, appréciant la montagne pour ce qu’elle est, à savoir un havre de nature et de tranquillité ?
À ce sujet, l’Association nationale des élus de la montagne, l’ANEM, apporte des réponses intéressantes, qui doivent être développées. Elle défend l’idée d’un tourisme durable en montagne, 365 jours par an, d’un tourisme respectueux de l’environnement, mais ouvert au plus grand nombre. Elle mène ainsi un combat difficile pour relancer les classes de découverte et les classes de neige, afin de transmettre l’amour de la montagne aux plus jeunes, clientèle touristique de demain – j’ajoute que les classes de neige contribuent également à la réussite scolaire.
Enfin, l’ANEM défend la diversification des activités de montagne, notamment en prévision des conséquences du changement climatique et lutte pour améliorer les conditions de travail des travailleurs saisonniers ou pluriactifs.
Voilà les motifs qui animent les élus locaux et les parlementaires soucieux du développement durable de leurs montagnes ! Voilà les débats progressistes que nous devrions mener quant à l’avenir de notre montagne !