Intervention de Yvon Collin

Réunion du 6 novembre 2014 à 9h30
Accord fiscal avec la chine — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’année 2014 a été marquée par les célébrations du cinquantième anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la France et la République populaire de Chine. Notre pays a fait figure de pionnier, étant parmi les premiers États occidentaux à reconnaître le gouvernement communiste. Cette antériorité n’a toutefois pas permis le développement de relations économiques que nous pourrions qualifier de « privilégiées ».

Le 31 octobre 1984, soit voilà trente ans, alors que Pékin entamait sa libéralisation, notamment par la création de ses premières zones économiques spéciales, le Sénat votait la convention fiscale franco-chinoise qui est toujours en vigueur actuellement. En trois décennies, la Chine s’est prodigieusement ouverte au monde et a opéré son véritable grand bond en avant, au point de devenir la deuxième puissance économique du monde.

La ratification de cet accord est l’occasion de nous pencher sur les équilibres, mais aussi sur les déséquilibres, de nos échanges économiques. Le premier chiffre qui vient à l’esprit est celui du déficit commercial. Il s’élève, comme le mentionne excellemment notre collègue Éric Doligé dans son rapport, à 26 milliards d’euros, constituant le premier déficit bilatéral de notre pays. Mais la Chine, c’est aussi un taux de croissance qui laisse rêveur : ce dernier, bien qu’étant en léger tassement, devrait d’élever à 7, 4 % en 2014 et est estimé à 7, 1 % pour 2015 – c’est déjà pas mal !

Il importe donc de rénover le cadre juridique de nos relations fiscales avec la République populaire de Chine afin de développer les échanges entre les deux pays dans l’intérêt de nos entreprises, de nos emplois, mais également, en termes de finances publiques, s’agissant de la lutte contre l’évasion et la fraude fiscales.

L’accord signé le 26 novembre 2013 doit permettre d’améliorer et de faciliter l’accès de nos entreprises à l’immense marché intérieur chinois. Les secteurs automobile, aéronautique, énergétique, agroalimentaire et bien d’autres sont autant de formidables réservoirs de croissance et de débouchés pour elles.

Cet accord entend également promouvoir les investissements directs des entreprises chinoises sur notre sol. Outre les cas emblématiques, comme l’entrée du constructeur Dongfeng dans le capital de PSA ou le rachat par des fortunes chinoises de domaines viticoles dans le Bordelais, il faut relever l’augmentation des investissements directs chinois dans l’Hexagone.

Pour ce faire, le présent accord comporte plusieurs avancées. Nous pouvons citer le plafonnement à 5 % du montant maximal de la retenue à la source, qui facilitera la remontée des dividendes pour les entreprises françaises, ou encore la suppression du crédit d’impôt forfaitaire, qui constitue également un progrès par rapport à la réglementation actuellement en vigueur, notamment en matière de ressources budgétaires.

La nouvelle convention améliore également les conditions d’implantation, mais aussi d’exercice pour les entreprises françaises en Chine. L’une des principales nouveautés à ce titre concerne la modification et l’assouplissement de la définition d’un établissement stable.

Il faut cependant préciser que les difficultés dans nos relations avec la Chine concernent non pas tant le contenu de cette convention que ce qui n’y figure pas, à savoir l’ensemble des freins et obstacles à l’ouverture du grand marché chinois à la concurrence internationale. Si l’alliance avortée du groupe Danone avec le chinois Wahaha demeure dans les mémoires, cette avanie n’a cependant pas empêché le groupe français de renforcer sa présence avec un nouveau partenaire local.

La présente convention étant le fruit d’un compromis entre deux États – c’est souvent le cas –, certaines dispositions sont clairement favorables à la partie chinoise. C’est en particulier le cas du traitement spécial réservé à l’imposition des fonds souverains ou du droit élargi pour la Chine d’imposer les cessions de participations dans des sociétés chinoises.

Cet accord bilatéral comporte également des dispositions relatives à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Cette dernière fut érigée en priorité lors de la réunion du G20 de Londres, en 2009. En août 2013, la Chine a signé la convention fiscale multilatérale, dont le modèle a été mis au point par l’OCDE.

Si les accords bilatéraux ou multilatéraux se sont multipliés, la question de leur efficacité à lutter contre la fraude et l’optimisation fiscale « agressive » reste, me semble-t-il, toujours posée.

L’accès aux données constitue, à ce titre, un enjeu majeur. L’échange automatique n’étant pas encore à l’ordre du jour, nous devrons nous contenter dans cette convention de progrès insuffisants. Parallèlement, en attendant la concrétisation du dispositif BEPS dans la lutte contre l’érosion des bases fiscales et le transfert de bénéfices, les clauses anti-abus présentes dans l’accord entendent mettre un frein à l’optimisation fiscale abusive.

En dépit des observations et réserves que je viens d’émettre, l’accord soumis à notre approbation constitue une initiative nécessaire et comporte d’indéniables avancées. Dans ces conditions, il recevra le soutien de l’ensemble des sénateurs du RDSE.

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