Intervention de Jean-Jacques Lozach

Réunion du 26 janvier 2010 à 14h30
Réforme des collectivités territoriales — Article 1er

Photo de Jean-Jacques LozachJean-Jacques Lozach :

Tous les intervenants précédents l’ont répété, la colonne vertébrale de cette réforme, c’est l’instauration du conseiller territorial. C’est le moyen – l’artifice, oserais-je dire – imaginé par le Gouvernement pour réduire tant les pouvoirs locaux que le nombre d’élus. Cette création n’a d’ailleurs été préconisée, demandée ou sollicitée par personne, association nationale d’élus comme formation politique.

Cependant, ces dernières années se dégageait un accord sur la nécessaire clarification entre les collectivités locales, en termes aussi bien de compétences que de financements. Il faut bien admettre que plus personne ne s’y retrouve, et ce constat ne date pas d’hier : on ne sait plus très bien qui fait quoi, qui décide quoi, qui contrôle qui, qui prélève quoi, etc.

C’était d’ailleurs l’objectif premier de cette réforme, quand elle a émergé voilà douze à dix-huit mois. Force est de constater que tel n’est plus le cas aujourd'hui. Loin d’apporter de la lisibilité, ce texte créera de la confusion entre deux échelons, le département et la région, ce qui ne sera pas sans conséquences sur les communes ou les groupements de communes, que ce soit en termes de faisabilité de projets, de coopération entre les exécutifs locaux, de positionnement auprès des administrés ou bien dans les relations quotidiennes avec les services déconcentrés de l’État. Il nous faut redouter un effet domino.

Nous sommes nombreux à craindre que, dans un second temps, la confusion introduite n’entraîne une lutte d’influence, un rapport des forces entre les différents échelons, voire la tutelle ou la mainmise d’un échelon sur l’autre. Dans cette configuration-là, la logique voudrait que les régions l’emportent sur les départements. En réalité, ces dernières ne sortiront pas renforcées de cette réforme. Comme les conseils généraux, elles subissent une asphyxie financière et l’affirmation du fait régional comme pouvoir émergent connaît un brutal coup d’arrêt après vingt-cinq ans de montée en puissance.

En outre, la suppression de la clause de compétence générale concerne aussi bien la région que le département. Bien plus, avec cette réforme, il est à craindre que les présidents de conseil régional ne passent leur temps à arbitrer entre les présidents de conseil général, avec tous les risques de paralysie, voire de polémique qu’une telle situation comporte. Par ailleurs, n’est-ce pas contraire à la libre administration des collectivités, érigée pourtant en principe constitutionnel ?

Personne ne comprend davantage le mode de scrutin à un tour retenu – il n’est qu’à tenter de l’expliquer à son entourage ! –, qui est si éloigné de notre tradition électorale, pas plus que le redécoupage des cantons qui succède au redécoupage inique des circonscriptions législatives. Tout cela crée de la suspicion, tout cela sent la manipulation électorale et la manœuvre politicienne. Nous nous trouvons dans une situation institutionnelle analogue à celle de 1997, qui a vu une certaine dissolution de l’Assemblée nationale dont les conséquences politiques n’ont pas porté chance à leurs auteurs, voire à son auteur.

J’insisterai sur deux points.

En premier lieu, avec cette réforme, c’est la fin de la proximité. Nous mettons le doigt dans un engrenage qui provoquera inévitablement l’effacement de cette notion. C’est sur ce point que divergent le plus la majorité et l’opposition. Pour notre part, nous voulons aller plus loin en matière de décentralisation, c’est-à-dire permettre plus de proximité. Or la disparition programmée des élus locaux de proximité, et leur remplacement par les conseillers territoriaux, traduit une vision des relations entre l’État et les collectivités préméditée, orchestrée, qui va à contresens de l’histoire.

En effet, en cette période de mondialisation, de perte de repères et de références pour nombre de nos concitoyens, la notion de proximité est plus vitale que jamais. Le sort qui l’attend rejoint d’ailleurs tout un ensemble d’autres initiatives, allant malheureusement dans le même sens – disparition des services publics de proximité, changement de statut de La Poste, suppression des pays etc. –, ...

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