Intervention de Jacques Thouroude

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 13 novembre 2014 : 1ère réunion
Nouvelle organisation territoriale de la république — Audition de M. Jacques Thouroude président de l'association nationale des élus en charge du sport andes

Jacques Thouroude, président de l'Association nationale des élus en charge du sport :

En matière de sport professionnel, football mis à part, les clubs professionnels se regroupent sous forme de ligues. Celles-ci imposent aux collectivités territoriales des règles nombreuses et variables, alors qu'elles ne sont même pas soumises à la commission des normes, par exception au principe qui veut que qui paye contrôle. Il en résulte une privatisation des recettes et une socialisation des dépenses.

S'agissant des droits de retransmission télévisée, il faut distinguer le football et le rugby des sports en salle. En dix ans, ces droits ont été multipliés par deux et atteignent aujourd'hui un milliard d'euros, dont 800 millions d'euros pour le seul football.

Quant à l'autonomie des fédérations, je rappellerai que le code du sport permet une délégation de l'État aux fédérations mais que l'État contrôle les fédérations. Il est urgent que l'État institue un contrôle des ligues, surtout dans le contexte où les pouvoirs publics sont sollicités pour apporter un concours financier à la réalisation de nouveaux équipements. Ainsi, alors que la ligue du football professionnel, par la voie d'une déclaration publique de Frédéric Thiriez, son président, déclarait ne rien demander pour la mise aux normes des stades où se déroulera l'Euro 2016, les collectivités territoriales ont, en définitive, été sollicitées à hauteur d'1,3 milliard d'euros. D'autant que plusieurs formules juridiques existent, qu'il s'agisse d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public ou d'un bail emphytéotique, qui permettent, par exemple, de créer des loges ou d'augmenter le nombre de places dans les stades. Lorsqu'un organisme perçoit 800 millions d'euros, au titre des droits de retransmission télévisée, il est inconcevable qu'il ne contribue pas au financement de la mise aux normes des stades.

La limitation de la participation des collectivités territoriales à la moitié du coût de ces aménagements pourrait constituer une première étape. Je prendrai l'exemple de la rénovation des piscines, évoquée par plusieurs d'entre vous. Alors que la Cour des comptes a évalué à 21 milliards d'euros le montant des travaux à engager et que nous avons pris un très grand retard sur le terrain, plusieurs programmes illustrent la prise en compte de nos préoccupations, notamment en matière d'égalité d'accès aux équipements. Ainsi, dans les schémas définis par le Pays d'Aix, à Lille et à Toulouse, l'implantation des équipements tient compte de l'éloignement des populations pour les utiliser.

Je ne peux pas apporter de réponses précises quant à l'évaluation du financement des équipements par des fonds européens. Ces apports s'inscrivent dans le cadre de financements croisés : lorsqu'une région conduit un projet sur la base d'un tel montage, elle ne flèche pas ce qui relève de ses propres financements, d'apports de l'État ou de fonds européens.

Un mot du rapport de la mission d'évaluation sur les effets de levier des subventions d'équipement du centre national pour le développement du sport remis en mai dernier par Serge Mauvilain, inspecteur général de la jeunesse et des sports, à la ministre des droits des femmes, de la ville, de la jeunesse et des sports : si je ne remets pas en cause la teneur du rapport, je conteste ses conclusions. En effet, il propose de resserrer les règles d'éligibilité aux crédits du CNDS, qui seraient désormais réservées exclusivement aux porteurs de projets du mouvement sportif, intégrées aux parts régionales, dont elles constitueraient un « préciput » dédié à l'investissement sportif et susceptibles d'être abondées, sur proposition des commissions territoriales. Or il est évident qu'un projet - et on sait bien que beaucoup n'aboutissent pas - se monte plus facilement quand les financements sont multiples. Si le CNDS n'accorde plus d'aide et que la région et le département contribuent chacun à hauteur de 15% de l'investissement, il sera difficile de boucler le projet, à moins que les collectivités territoriales souhaitent accroitre leur part, ce qui paraît peu réaliste dans le contexte de très forte contrainte budgétaire qui pèse sur elles. Outre qu'il exerce un véritable effet de levier, le CNDS représente un label : souvent, régions et départements attendent de savoir s'il participe au financement avant de s'engager. En outre, il constitue un lieu de concertation entre l'État, les fédérations et les collectivités territoriales. Même si je comprends que chacun doive contribuer au redressement des comptes publics, il serait donc gravissime de réduire de manière importante cette enveloppe nationale.

S'agissant de la question du chef de filât, il est clair que le sport doit demeurer une compétence partagée car aucune collectivité territoriale ne peut financer l'intégralité d'un investissement. Il importe, par conséquent, de définir qui a la responsabilité de quoi, sachant qu'en tout état de cause, ce sont les communes, voire les intercommunalités, qui détiennent le foncier, sauf convention et même s'il n'est pas question de se priver du milliard et demi d'euros qu'apportent chaque année régions et départements.

Une mutualisation est également indispensable pour le fonctionnement des équipements. Malheureusement, le mouvement sportif reste sur de vieux schémas : il y a cinq ans, le CNDS a accordé une aide de 2,5 millions d'euros à la restructuration et rien encore n'a été entrepris par les fédérations sportives.

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