Intervention de Jacques-Bernard Magner

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 13 novembre 2014 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2015 — Mission « sport jeunesse et vie associative » - crédits « jeunesse et vie associative » - examen du rapport pour avis

Photo de Jacques-Bernard MagnerJacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis des crédits du programme jeunesse et vie associative :

Le document de politique transversale relatif à la politique en faveur de la jeunesse fait état de 82 milliards d'euros consacrés à la jeunesse en 2014. Le programme 163 « Jeunesse et vie associative » de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ne représente donc qu'une fraction modeste de l'effort national consenti en faveur de la jeunesse.

Les moyens du programme 163 s'établissent à 206 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2015, en baisse de 1,7 % par rapport à 2014. Néanmoins, après neutralisation de la réserve parlementaire non reconductible, soit un peu plus de 4 millions d'euros en 2014, la dotation de ce programme en 2015 apparaît en légère augmentation (+ 0,3 %) par rapport à 2014. La consolidation de l'effort budgétaire consenti à la mise en oeuvre du plan national prioritaire en faveur de la jeunesse et au soutien du développement de notre tissu associatif constitue donc un signal positif, en dépit des lourdes contraintes pesant sur nos finances publiques.

Le dispositif du service civique, créé en 2010 et qui concentre à lui seul plus de 60 % des moyens du programme, rencontre un succès remarquable, avec une croissance continue du nombre de jeunes de 16 à 25 ans qui s'engagent dans le cadre de missions d'intérêt général à caractère éducatif, environnemental, humanitaire ou encore sportif, destinées à renforcer la cohésion nationale et la mixité sociale. Au cours de l'année 2013, le nombre de volontaires a progressé de plus de 12 % par rapport à 2012. Le service civique devrait ainsi concerner près de 35 000 jeunes en 2014 et 40 000 en 2015. En outre, le 5 novembre 2014, l'Assemblée nationale a adopté en séance publique un amendement, déposé par le Gouvernement, tendant à abonder le programme 163 de 25 millions d'euros supplémentaires, correspondant au financement de 5 000 missions de service civique, afin de porter l'objectif de l'Agence du service civique en nombre de volontaires engagés en 2015 dans le dispositif à 45 000.

Comme l'a rappelé le Président de la République lors de sa conférence de presse du 18 septembre 2014, l'objectif demeure de mobiliser 15 % d'une classe d'âge à l'horizon 2017, soit près de 100 000 jeunes - un jeune sur sept -, la montée en puissance du service civique constituant une priorité du Gouvernement dans le cadre de son plan en faveur de la jeunesse. Tant pour l'offre que pour la demande de volontariat de service civique, la cible est atteignable : entre 2010 et 2014, le nombre de volontaires a été multiplié par sept, l'engouement autour du dispositif se maintient à des niveaux plus qu'encourageants avec presque 90 % de jeunes volontaires très satisfaits de leur expérience, et le nombre d'associations agréées a largement progressé.

Toutefois, le resserrement des marges de manoeuvre budgétaire continue de peser sur la capacité du dispositif à absorber l'offre en croissance continue de jeunes prêts à s'engager dans une mission de service civique. En 2014, la dotation du service civique s'avère, en fin d'année, insuffisante pour atteindre l'objectif de 35 000 volontaires, si bien que l'agence a obtenu le dégel de la réserve de précaution sur cette ligne du programme. En 2015, les ressources extrabudgétaires seront mobilisées afin de permettre à l'agence de tenir son objectif, en particulier la « garantie pour la jeunesse » proposée par l'Union européenne et à laquelle le service civique a été déclaré éligible par la Commission européenne.

Afin de répondre aux inquiétudes de la Cour des comptes sur la soutenabilité financière de la montée en charge du dispositif, le Gouvernement a d'ores et déjà entrepris des efforts en vue de réduire le coût unitaire des missions de service civique, sans porter atteinte à l'indemnité du volontaire et à son niveau de protection sociale. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a adapté les modalités de financement de la protection sociale instituées en 2010, en procédant à un alignement du régime de cotisation sur le droit commun en supprimant le mécanisme de compensation complémentaire versée par l'État à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). Cette mesure a ainsi permis de réduire de près de 20 % le coût mensuel unitaire d'une mission de service civique pour l'État, qui s'établit en moyenne à 804 euros par engagé.

Le Gouvernement a consenti à un effort de 100 millions d'euros en faveur du service civique sur le triennal 2015-2017. Afin d'abonder les crédits de l'Agence du service civique, des fonds devraient également être mobilisés dans le cadre de la garantie européenne pour la jeunesse et auprès d'autres départements ministériels et de personnes publiques intéressées au dispositif. Un financement interministériel du service civique est pleinement justifié dès lors qu'un grand nombre de ces missions d'intérêt général participent pleinement des objectifs de sensibilisation poursuivis par certains ministères auprès de la société civile, notamment en matière de santé (aide personnalisée auprès des personnes dépendantes, prévention des addictions, éducation alimentaire...), de formation des pompiers volontaires ou encore d'environnement et de développement durable.

Pour sa part, l'Agence du service civique, aujourd'hui présidée par M. François Chérèque, entend poursuivre ses efforts dans la maîtrise de ses coûts de gestion, en développant la dématérialisation des contrats de service civique, en améliorant le pilotage et le suivi des agréments et en mobilisant plus fortement les ressources issues du mécénat privé. À périmètres constants, l'agence table, pour atteindre ses objectifs, sur l'évolution suivante de ses moyens : 200 millions d'euros en 2015, 306 millions d'euros en 2016 et un peu plus de 417 millions d'euros en 2017.

Contrairement à ce que recommande la Cour des comptes, je ne pense pas qu'il soit raisonnable d'envisager une modulation de l'indemnité de service civique en fonction de la durée hebdomadaire de la mission. Si on peut admettre que certaines missions soient réalisées à temps partiel afin de ménager suffisamment de flexibilité pour des jeunes dont la situation le justifie, d'autres missions peuvent, du reste, conduire des jeunes volontaires à s'investir pour une durée hebdomadaire parfois bien supérieure à la durée légale de travail applicable à un salarié de droit commun, jusqu'à 48 heures par semaine. De fait, la compensation financière perçue au titre d'une mission de service civique a toujours eu un caractère forfaitaire car elle ne saurait être assimilée à une rémunération. Or, une modulation de cette indemnité en fonction du temps d'investissement hebdomadaire de l'engagé l'assimilerait à un défraiement, ce qui est contraire à l'esprit même de l'engagement de service civique qui n'a pas vocation à se substituer à un emploi, qu'il soit partiel ou à temps plein.

En revanche, une des pistes à explorer reste, selon moi, une plus forte mobilisation des collectivités territoriales. Elles ne représentent que 9 % des organismes agréés de service civique et ne réalisent que 7 % des recrutements effectifs de volontaires. Il est vrai qu'il est plus aisé pour une structure associative d'accompagner le jeune volontaire dans l'exercice de sa mission car elle est plus à même de mettre en place un tutorat de proximité adapté. Toutefois, la possibilité pour l'Agence du service civique de déléguer le soin aux collectivités territoriales d'attribuer des missions de service civique constituerait une source d'économie de l'ordre de 10 %, puisque l'agence ne serait pas tenue de leur reverser le forfait de 100 euros par engagé par mois au titre de la formation civique et citoyenne qui ne vaut que pour les associations.

En octobre 2014, le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports a déclaré l'engagement associatif « grande cause nationale » et s'est engagé à mettre en oeuvre les dispositions de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire en faveur du secteur associatif. À cet égard, il a annoncé qu'un premier décret d'application devrait intervenir à la fin du mois de novembre 2014 sur les modalités de mise en place des dispositifs locaux d'accompagnement (DLA) destinés à accompagner la création d'associations. Un autre décret devrait, à la même période, revoir le fonctionnement et le mode de désignation des membres du Haut Conseil de la vie associative, avec notamment l'instauration officielle de la parité.

J'en viens maintenant aux crédits en faveur du soutien aux associations et au développement de leurs ressources, à l'emploi dans les associations et à la formation des bénévoles : ils sont globalement préservés, dont :

- 25 millions d'euros pour le fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP) qui vise à structurer l'action associative en aidant principalement les associations à recruter leur premier salarié ;

- et 10,3 millions d'euros pour le fonds de développement de la vie associative (FDVA), destiné à soutenir des initiatives de développement de la vie associative, notamment dans le cadre d'actions de formation en conduite de projet associatif. L'Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement visant à augmenter cette dotation de 520 000 euros.

Nous pouvons nous féliciter de la signature, au mois de février 2014, par le Premier ministre, les grandes associations de collectivités territoriales et le Mouvement associatif, de la nouvelle charte des engagements réciproques entre les pouvoirs publics et le monde associatif, élaborée sur la base du rapport remis en juillet 2013 par notre collègue Claude Dilain et l'ancien préfet de la région Île-de-France, M. Jean-Pierre Duport. C'est dans cette logique que le Gouvernement a pris soin de sécuriser les procédures d'octroi de financements publics aux associations :

- en insérant dans la loi relative à l'économie sociale et solidaire une disposition définissant la subvention ;

- en formalisant une procédure sécurisée d'appel à initiatives qui relève du domaine de la subvention ;

- en révisant une circulaire de 2010 pour proposer un nouveau modèle de convention pluriannuelle et en élaborant un guide méthodologique à destination des collectivités territoriales.

En ce qui concerne plus spécifiquement la jeunesse, les crédits destinés à encourager la mobilité européenne et internationale de la jeunesse au sein des offices internationaux, dont principalement l'Office franco-allemand pour la jeunesse et l'Office franco-québécois pour la jeunesse, sont exemptés d'effort en 2015 et s'établissent à 14 millions d'euros.

Par ailleurs, l'extinction du fonds d'expérimentation pour la jeunesse (FEJ) n'est désormais plus envisagée. De nouvelles perspectives se sont ouvertes avec la mobilisation du FEJ pour l'opération « La France s'engage » lancée le 24 juin 2014 par le Président de la République. Dans ce cadre, le FEJ pourrait se voir doter de 25 millions d'euros du programme des investissements d'avenir, 15 millions d'euros de la société Total, le reste pouvant correspondre à des crédits budgétaires de l'ordre de 10 millions d'euros. Plus de 250 candidats se sont inscrits sur le site et les premiers projets ont été dévoilés à la fin de l'été.

En conclusion, compte tenu de la préservation des moyens en faveur de la jeunesse et de la vie associative, je vous proposerai de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 163 au sein de la mission « Sports, jeunesse et vie associative ».

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