Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 13 novembre 2014 à 15h00
Financement de la sécurité sociale pour 2015 — Article 15

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

L’article 15 prévoit une limitation des délais de contrôle des entreprises de moins de dix salariés, une extension du périmètre de contrôle et la possibilité, pour le directeur de l’URSSAF, de conclure une transaction avec les entreprises, et ce au nom d’une relation de confiance entre les entreprises et les organismes de contrôle, mais aussi d’une sorte de rationalisation des contrôles afin de ne pas porter atteinte, plus qu’il n’est nécessaire, à l’activité des TPE.

Pour les sénateurs du groupe CRC, comme pour beaucoup d’autres ici, la lutte contre la fraude au paiement des cotisations par les employeurs doit être une priorité. Pour autant, il nous semble inenvisageable que cette mesure se fasse à moyens constants.

En effet, les URSSAF sont à bout de souffle : la régionalisation entamée en 2012 a profondément marqué l’organisation de l’activité et modifié les charges de travail.

De plus, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, les URSSAF ont perdu de l’ordre de 1 200 postes entre 2007 et 2013. Elles ont également enregistré, en décembre 2012, 850 000 inscriptions dans le cadre de la mise en place du régime de l’auto-entrepreneur, et ce à moyens constants.

La Convention d’objectifs et de gestion 2014-2017 prévoit, quant à elle, de supprimer 740 équivalents temps plein, dont 96 en 2014 et 167 en 2015.

Certes, le délai de trois mois peut être prolongé. L’étude d’impact précise toutefois que cette prorogation a vocation à s’appliquer seulement dans des circonstances exceptionnelles, comme dans le cas d’un accident subi par un inspecteur ou un contrôleur du recouvrement.

Pourtant, selon la Cour des comptes, cette fraude est estimée entre 20, 1 et 24, 9 milliards d’euros pour l’année 2012. Je sais que ces chiffres sont contestés, ce qui est rare lorsque la Cour des comptes émet des avis. Est-ce parce qu’ils sont dérangeants ? Ils le sont d’autant plus, sans doute, que cette somme comblerait le déficit de la sécurité sociale pour 2014…

En ce sens, la question de la confiance reste posée. Si un inspecteur ou un contrôleur ne peut terminer en trois mois le contrôle d’une entreprise de moins de dix salariés, c’est peut-être simplement qu’il n’est pas en possession de tous les éléments qui lui permettraient de le conclure.

De plus, le développement de transactions tel qu’il est prévu par cet article 15 n’est pas acceptable, du fait de la logique qui est instaurée entre l’administration et les entreprises, et ce alors même que les moyens de contrôle sont largement insuffisants. Si les pouvoirs des directeurs des organismes de recouvrement en matière de transaction ont été atténués par trois amendements et sous-amendements de l’Assemblée nationale, nous pensons toutefois que cet article remet en cause la démocratie sociale au sein de ces organismes en donnant au directeur le pouvoir de transaction.

Il est très important pour nous de ne pas transiger sur les droits des salariés. La commission de recours amiable, qui est une émanation des conseils d’administration, donc des représentants des assurés sociaux, est la seule qui doit avoir le pouvoir d’examiner la contestation de l’entreprise et, éventuellement, d’accepter le principe d’une transaction.

Vous l’aurez compris, mon intervention vaut également défense de notre amendement de suppression de l’article, lequel n’est pas, à notre avis, à la hauteur de la lutte contre le travail dissimulé et la fraude aux cotisations, mais adapte, cahin-caha, le manque de moyens dévolus aux missions de contrôle.

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