Intervention de Yves Daudigny

Réunion du 14 novembre 2014 à 9h30
Financement de la sécurité sociale pour 2015 — Article 43 bis nouveau

Photo de Yves DaudignyYves Daudigny :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en matière de médicaments, nous sommes confrontés en France à deux particularités que ne connaissent pas les autres pays européens : d’une part, un retard considérable en matière de recours aux médicaments génériques ; d’autre part, des appréhensions tout à fait irrationnelles à leur encontre, de la part tant des prescripteurs que des patients, ceci ne suffisant d’ailleurs pas à expliquer cela.

Ainsi, à la fin de l’année 2013, le médicament générique ne représente que 31 % du marché pharmaceutique remboursable en volume et 19 % en valeur, ce qui place la France loin derrière les autres pays européens.

En 2012, la réactivation de la mesure « tiers payant contre génériques » a été bénéfique et a marqué le retour d’une politique volontariste en la matière. Les obstacles à une plus large diffusion des génériques sont toutefois nombreux.

J’ai conduit l’année dernière, au sein de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, un premier travail de recherche et d’auditions de l’ensemble des parties prenantes de ce secteur, et j’ai formulé dans le rapport publié à cette occasion un certain nombre de préconisations.

L’obstacle psychologique n’est pas le moindre à surmonter, d’où le titre de ce rapport : « Les médicaments génériques : des médicaments comme les autres ». Je rappelle, à cet égard, que les excipients sont les mêmes que ceux qui sont utilisés pour les princeps, comportent les mêmes risques et posent la même question des matières premières.

Un deuxième obstacle identifié est le système du répertoire des groupes de génériques, trop restrictif, mais également contourné par trop de prescriptions hors champ.

Un troisième obstacle à la diffusion des médicaments génériques résulte des stratégies mises en place par les laboratoires pour en limiter le développement : par le dépôt de brevets secondaires, la création de fausses innovations, dites « me too », la pratique de prix prédateurs, l’intervention des visiteurs médicaux. Le rôle du prescripteur est évidemment fondamental. En Allemagne, l’incitation pèse sur le médecin soumis à une enveloppe fermée...

Je me félicite donc de l’adoption par l’Assemblée nationale des articles 43 bis, 43 ter et 44 bis, qui s’inscrivent parfaitement dans ces réflexions, et je vous incite très vivement, mes chers collègues, à les faire vôtres.

Notre commission a d’ailleurs donné un avis favorable à l’article 43 bis, qui permettra justement d’élargir le répertoire des génériques aux médicaments dont la substance active est d’origine végétale ou minérale, et à l’article 44 bis, lequel renforce l’incitation à la prescription de génériques dans les établissements de santé.

Tel n’est pas le cas sur l’article 43 ter, qui doit permettre la substitution de médicaments dispensés par voie inhalée. Or c’est la troisième fois depuis 2011 que nous sommes appelés à débattre de cette proposition.

À l’époque, vous aviez, monsieur le président de la commission, mis en évidence que la substitution ne garantissait pas la sécurité du patient, compte tenu de la spécificité des systèmes de diffusion du médicament, qui nécessitent un apprentissage du patient. Vous aviez été entendu et la proposition fut remise sur le métier. Celle qui est soumise à notre examen aujourd’hui permet, à mon sens, de lever ces réserves. La substitution ne sera possible qu’en initiation de traitement ou pour assurer la continuité d’un traitement déjà initié. J’ajoute qu’un tel dispositif est développé dans d’autres pays, sans aucun problème.

Enfin, s’agissant des médicaments génériques, nous ne pouvons pas rester indifférents à la dimension économique et aux réalités de l’emploi dans ce secteur. Nous ne pouvons pas non plus, cependant, placer le débat uniquement sur le terrain du chantage à l’emploi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion