... et elles sont tout aussi précises.
Vous fixez des objectifs de dépenses ; nous fixons les nôtres. Ce ne sont pas les mêmes, bien sûr, mais je vais vous détailler ceux que nous préconisons. Preuve sera ainsi apportée que l’on peut fabriquer un budget différent.
Je le disais dans mon intervention liminaire, nous n’avons pas rebâti entièrement le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Dans le temps qui nous était imparti, nous n’en avions pas la possibilité. Surtout, nous ne nous faisions pas beaucoup d’illusions sur le sort qui serait réservé à nos propositions.
Nous avons souhaité marquer ce texte de nos orientations et envoyer quelques signaux.
Je le répète, les mesures que nous proposons, madame la secrétaire d’État, ne sont pas beaucoup moins documentées que les vôtres, auxquelles le fait de figurer en annexe du projet de loi confère, il est vrai, un caractère plus officiel.
Un milliard d’euros d’économies, c’est à la fois beaucoup et, comme le relèvent certains dans l’opposition sénatoriale, bien peu.
Je rappelle que l’ONDAM, fixé à 182, 3 milliards d’euros pour 2015, est en augmentation de plus de 3 milliards d’euros chaque année. Dans notre pays, les dépenses de santé croissent bien plus vite que l’inflation et que la richesse nationale.
Nous avons entendu les discours sur le vieillissement, l’innovation, la sophistication des techniques. Certes, tout cela a un coût, mais comment font nos voisins, dont les populations ne sont pas, que je sache, dans un état sanitaire catastrophique ? Malgré plusieurs points de PIB de dépenses en plus, dans certains domaines, nos indicateurs ne sont pas les meilleurs.
Un tel rythme de progression, on le constate bien, n’est pas soutenable. Que proposons-nous pour y remédier ? Tout simplement d’aller au-delà de certains interdits que vous vous imposez.
Je passe rapidement sur la lutte contre la fraude, que vous avez également chiffrée dans le projet de loi. Je ne reprendrai pas à mon compte le chiffrage de la Cour des comptes, que l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, trouve excessif, mais nous pensons qu’il nous laisse une marge. Je rappelle que la Cour des comptes parlait de 20 à 25 milliards d’euros. On n’en est pas là ! La commission des finances propose de renforcer les sanctions. Nous fixons l’objectif sur ce poste à 50 millions d’euros, qui s’ajoutent à votre chiffrage.
À propos des produits de santé, nous proposons une nouvelle méthode d’évaluation des médicaments. Alors que pendant des décennies, sans innovation remarquable, les médicaments ont été évalués en relatif, le système d’évaluation est voué à l’implosion si les innovations se multiplient. Nous préconisons donc de revoir les règles selon lesquelles la HAS évalue ces médicaments en vue de leur remboursement. Je pense qu’une économie de 100 millions d’euros est une évaluation basse.
S’agissant des médicaments génériques, la Cour des comptes a montré l’ampleur des marges de manœuvre. Là encore, notre objectif de 150 millions d’euros d’économies me paraît tout à fait raisonnable.
Pour ce qui concerne le périmètre de la prise en charge, nous n’avons pas de tabou, pas même en matière d’automédication en cas de mal de tête ou de mal de gorge. Pourquoi, dans la période actuelle, ces petits achats devraient-ils forcément être remboursés ? Par rapport au reste à charge de certaines hospitalisations, c’est même profondément injuste. Nous avons chiffré l’économie réalisable à 85 millions d’euros.
J’ai retenu aussi, avec mes collègues de la majorité, un chiffre de 200 millions d’euros d’économies au titre de la lutte contre les actes inutiles ou redondants. Je rappelle, bien que je l’aie déjà suffisamment répété, que ces derniers correspondent à 28 % de la totalité des actes, ce qui représente, s’agissant des actes à proprement parler – soit un montant de 130 milliards d’euros – 30 à 35 milliards d’euros d’économies potentielles.
Nous n’envisageons pas d’aller aussi loin, mais proposons de réaliser, dans un premier temps, 200 millions d’euros d’économies. Il s’agit de se fixer un objectif et d’affirmer une volonté. C’est peu, certes, au regard de ces chiffres astronomiques, mais le soutien du législateur vous est acquis, madame la secrétaire d'État, pour la relance, dans ce domaine, de l’informatisation, qui nous semble être la clef pour combler le gouffre que ce type d’actes creuse dans le budget de la sécurité sociale, notamment en matière de relations entre les soins de ville et l’hôpital, mais pas seulement.
En lien avec cette question, nous avons tous en tête le coût des actes aux urgences qui est sans commune mesure avec celui d’une consultation en ville, fût-elle réalisée de nuit. Des solutions sont envisagées localement, et il faut les encourager. Je pense aussi au développement des bonnes pratiques. Le Gouvernement pourrait ainsi ouvrir une ligne téléphonique et lui attribuer le numéro « 15 bis » ou « 16 », puisqu’ils sont disponibles. Dans certains hôpitaux, il existe également des maisons médicales de garde, qui fonctionnent y compris de nuit.
Je rappelle que les actes d’un médecin de ville coûtent environ 60 euros. Aux urgences, le prix d’actes identiques s’élève à 240 euros. Vous voyez la différence ! Il convient donc de se saisir de ce problème.
Toujours pour ce qui concerne l’hôpital, nous avions prévu 65 millions d’euros d’économies au titre du rétablissement de la journée de carence dans la fonction publique hospitalière. Le principe de trois jours de carence ayant été adopté précédemment, ce sont 150 millions d’euros d’économies que l’on peut envisager. Je ne pense pas que ce chiffre puisse être contesté ; il nous a d’ailleurs été fourni par la Fédération hospitalière de France.
Au titre de la révision des accords relatifs à la réduction du temps de travail dans les hôpitaux – elle nous semble indispensable –, nous avons prévu 100 millions d’euros d’économies, ce qui est peu : cela représente à peine une demi-journée travaillée supplémentaire sur la masse salariale globale des hôpitaux. Nous avons cependant voulu laisser du temps à la négociation, puisque chaque hôpital est maître dans ce domaine.
Quant à la réforme de la tarification des urgences hospitalières, la Cour des comptes nous encourage à revoir les modalités actuelles, lesquelles incitent à la multiplication des actes, comme nous l’avions parfaitement relevé au sein de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS.
La Cour des comptes chiffre ces économies entre 300 et 500 millions d’euros. Il nous paraît difficile d’atteindre ce montant dans l’immédiat. Nous avons donc, sur ce sujet sensible, fixé l’objectif à 150 millions d’euros.
Vous avez dénoncé, madame la secrétaire d’État, des économies de posture.