Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 14 novembre 2014 à 21h30
Financement de la sécurité sociale pour 2015 — Articles additionnels avant l'article 56, amendement 113

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

… et cette réserve doit être prise en compte.

Le COR souligne traditionnellement l’importance de deux facteurs : le chômage, comme vient de le rappeler Mme la secrétaire d’État, qui n’est toujours pas stabilisé, et, élément très important, la productivité, qui est aujourd’hui insuffisante et orientée à la baisse.

Je n’ai pas forcément la « foi », pour reprendre l’expression de Mme la secrétaire d’État, mais c’est tout l’enjeu des décisions de politique économique prises depuis 2012 par le Gouvernement qui figurent dans les lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Et le groupe socialiste croit en la réussite de ces politiques.

Je veux revenir sur la portée des réformes des retraites successives conduites depuis les années quatre-vingt-dix par différents gouvernements. Je rappelle que, dans cette enceinte même, au terme d’un long débat sur la réforme présentée par M. Woerth, nous étions finalement tous convenus d’un point et d’un seul, à savoir qu’il faudrait bien mener un jour une réforme de fond – une réforme « systémique », comme nous disions. À ce propos, je note que l’amendement n° 113, que nous allons examiner dans quelques instants, comporte une date. Or une telle réforme systémique est contradictoire avec la mesure d’âge, qui est, elle, de nature paramétrique. Vous êtes donc dans la contradiction !

On cite souvent en exemple la réforme des retraites réalisée en Suède, qui a bénéficié d’un compromis politique et qui n’a jamais été remise en cause, malgré les alternances. Conduite sur une quinzaine d’années, elle repose sur un principe fort : un système structurellement à l’équilibre en phase avec les réalités économiques, soit un mélange de principes et de pragmatisme dont sont coutumiers les pays d’Europe du Nord.

Dans cette réforme, le volet par répartition est adossé à un compte notionnel ouvert pour chaque assuré, et c’est là où on en revient à votre préférence pour le système par points, M. Roche – position que je comprends très bien, puisque c’est aussi la mienne. Mais rappelez-vous quand même que, tout récemment, dans cette enceinte, vos collègues de la droite ont supprimé ce qui est l’amorce d’une réforme systémique, à savoir le compte pénibilité. §

Et je voudrais vous rappeler que c’est le gouvernement de M. Raffarin qui a lancé cette idée de compte pénibilité en 2003, même si les discussions avec les partenaires sociaux sur le sujet n’ont pas abouti. C’est finalement M. Woerth, alors ministre du budget, qui, en 2008, a introduit ce dispositif dans la loi, mais les décrets d’application n’ont jamais été pris… D’ailleurs, le décret d’application relatif au compte pénibilité que le Gouvernement vient de prendre le mois dernier, et qui fait l’objet de vos attaques, se contente de reprendre les critères qui étaient avancés par M. Woerth.

Vous avez donc supprimé, de manière parfaitement contradictoire, un dispositif qui était en germe depuis 2003, ce sur votre initiative. Et je me souviens que M. Bertrand, alors ministre du travail, avait déclaré que le compte pénibilité était une réforme majeure et que tous les problèmes de pénibilité qui n’étaient pas encore réglés constituaient la plus grande des injustices sociales.

Pourtant, tranquillement, à la faveur d’un texte sur la simplification, vous avez balayé d’un revers de manche tout le travail qui avait été accompli par des gouvernements que vous souteniez et, bien sûr, par le gouvernement actuel, qui a introduit le compte pénibilité dans la réforme de 2013.

Ce que je veux vous démontrer à travers cet historique, c’est que, pour accomplir des réformes structurelles, des réformes de fond, il faut forcément du temps, compte tenu des résistances. De fait, vous avez prouvé que vous étiez rétifs aux réformes structurelles, parce que le compte pénibilité est vraiment l’amorce d’une réforme systémique.

Par là même, et j’en terminerai ainsi, monsieur le président de la commission des affaires sociales, je me permets de relativiser votre appétence verbale à engager des réformes.

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