Séance en hémicycle du 14 novembre 2014 à 21h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Hervé Marseille.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été publiée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Alain Milon, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Caroline Cayeux, MM. René-Paul Savary, Yves Daudigny, Mmes Catherine Génisson, Annie David.

Suppléants : MM. Gilbert Barbier, Jean-Noël Cardoux, Francis Delattre, Gérard Dériot, Mme Michelle Meunier, MM. Gérard Roche, Jean-Louis Tourenne.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Dans la discussion des articles de la quatrième partie, nous en sommes parvenus au titre II.

Titre II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES D’ASSURANCE VIEILLESSE

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 76, présenté par M. Roche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Avant l’article 56

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « soixante-deux » sont remplacés par les mots : « soixante-quatre » et la date : « 1955 » est remplacée par la date : « 1960 » ;

2° Au deuxième alinéa, la date : « 1955 » est remplacée par la date : « 1960 » et la date : « 1954 » est remplacée par la date : « 1959 » ;

3° Au quatrième alinéa, la date : « 1954 » est remplacée par la date : « 1958 » ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« …° – À raison de quatre mois par génération pour les assurés nés entre le 1er janvier 1959 et le 31 décembre 1959 ».

La parole est à M. Gérard Roche, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

La soutenabilité de notre système de retraite par répartition, qui dépend étroitement de la croissance économique, n’est nullement garantie aux horizons 2020, 2030 et au-delà, compte tenu de la gravité de la crise que traverse notre pays, dont les effets à long terme sur la croissance potentielle sont difficiles à évaluer.

Certes, la durée de cotisation a été augmentée dans la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, mais ce texte n’était pas à la hauteur des enjeux, car il n’a pas prévu le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite entamé par la loi du 9 novembre 2010 au-delà du 1er janvier 2017.

L’effet très favorable sur les finances de la branche vieillesse d’un relèvement de l’âge légal de départ à la retraite, surtout à moyen et à long terme, n’est pourtant plus à démontrer.

C’est pourquoi le présent amendement tend à prévoir le relèvement graduel de cet âge légal au-delà du 1er janvier 2017 et à le fixer à 64 ans au 1er janvier 2024 pour la génération née en 1960.

En vertu des dispositions de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, la poursuite du relèvement de l'âge légal de départ à la retraite entraînera mécaniquement celle du relèvement de l'âge de la retraite à taux plein sans décote, qui lui est supérieur de cinq ans. Ce dernier, qui sera porté à 67 ans au 1er janvier 2017, sera donc de 69 ans au 1er janvier 2024.

La commission a voulu présenter cet amendement car, en examinant les chiffres de l’évolution de notre régime de retraite, on voit bien que l’équilibre ne sera pas atteint en 2017 ni au-delà.

L’équilibre ne sera pas au rendez-vous non seulement en raison de l’importance de la crise économique, mais aussi parce que, dans les chiffres qui nous sont présentés – 1, 7 milliard d’euros de déficit en 2014 et un peu plus de 1 milliard d’euros en 2015 –, on ne prend pas en compte le déficit du FSV, le Fonds de solidarité vieillesse, qui s’élève aujourd’hui à 2, 9 milliards d’euros, et qui se maintiendra à peu près à ce niveau : même à l’horizon 2018 ou 2019, il s’établira à près de 2 milliards d’euros. Autrement dit, le FSV, qui est porté par la CADES, est en fait un trompe-l’œil.

C’est pourquoi nous vous soumettons, mes chers collègues, cette proposition, qui, je le reconnais, est extrêmement dure socialement, mais qui est la seule possible. En effet, quand on regarde la courbe d’évolution du déficit, on voit bien que, depuis 2010, c’est le report de l’âge légal de départ à la retraite qui a permis les améliorations les plus significatives : ainsi, alors que le déficit dépassait les 11 milliards d’euros en 2010, il est tombé cette année à 1, 7 milliard d’euros. Bien sûr, d’autres mesures ont eu aussi des effets positifs, dont le report de la revalorisation des pensions de six mois prévu par la loi du 20 janvier 2014 et l’augmentation de 0, 3 % des cotisations tant des salariés que des employeurs.

Oui, et je m’adresse à mes collègues de la gauche, cette proposition est très dure, mais je n’aurais pas osé la présenter si deux dispositifs ne permettaient pas d’adoucir le système : le départ à la retraite anticipée pour les carrières longues qui date de 2003 et qui a été très largement amélioré en 2012, ainsi que le compte personnel de prévention de la pénibilité. Je me tourne à présent vers mes collègues de la droite : je sais que vous n’êtes pas de cet avis, mais je considère, pour ma part, que la réelle prise en compte de la pénibilité une très bonne chose. Certes, le mécanisme doit encore être amélioré, car les employeurs estiment le compte pénibilité, en l’état, inapplicable, en raison des difficultés qu’ils rencontrent.

Ainsi, si notre amendement est adopté, l’âge légal de départ à la retraite sera reporté à 64 ans en 2024, mais les personnes qui ont travaillé dur et qui ont eu des carrières longues pourront toujours prendre leur retraite à 62 ans et bénéficier du taux plein à 67 ans.

Je vous demande, mes chers collègues, d’adopter un comportement républicain, car notre régime de retraite par répartition, auquel nous sommes tous attachés, risque de connaître de graves difficultés et son avenir est incertain. C’est pourquoi, il faut, d’un côté, que la majorité sénatoriale tende la main à la gauche car le compte pénibilité constitue une réelle avancée, et, de l’autre côté, que l’opposition sénatoriale comprenne qu’on rendra un grand service à la France si on arrive à pérenniser notre système de retraite.

Madame la secrétaire d’État, la mesure que je propose est très confortable pour vous, car son adoption rendra la préparation du budget plus facile à l’avenir : certes, elle est forcément impopulaire, mais c’est le Sénat qui en portera la responsabilité.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie

Monsieur le rapporteur, je vous remercie de cet hommage rendu au compte pénibilité et de la volonté de consensus dont vous avez fait preuve. Pour autant, comme vous le savez, le Gouvernement a soumis au Parlement une réforme des retraites qui a été examinée en 2013 et mise en œuvre à partir de cette année. La question de la barrière d’âge a été tranchée à ce moment-là. Le choix qui a été fait est effectivement celui de l’allongement de la durée de cotisation, qui sera portée à 43 ans en 2035 pour les personnes qui sont nées en 1973.

Je comprends votre inquiétude sur l’équilibre du régime des retraites. Néanmoins, on ne peut pas tout le temps changer les règles, d’autant que la dernière réforme est très récente. De plus, le principal problème du régime des retraites, c’est le chômage, et donc le nombre de cotisants, et non pas le nombre de bénéficiaires. Or il faut faire confiance aux politiques que mène le Gouvernement. Elles sont prioritairement axées sur la croissance et le redressement productif de la France et doivent avoir un effet sur le taux de chômage et sur le niveau de l’emploi. Ayons donc foi, si je puis dire, dans l’efficacité à moyen terme – car vos préoccupations portent sur le moyen terme, monsieur Roche – des politiques que nous menons et dans la capacité du pays à se redresser et à créer de l’emploi.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mon explication vaudra pour les trois amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l’article 56, auxquels je suis évidemment très défavorable.

Monsieur le rapporteur, ne vous excusez pas d’avoir présenté l’amendement n° 76, car il fournit l’occasion de porter un regard plus global sur la question.

Je commencerai par rappeler certains propos qui ont été tenus lundi dernier, lors de la discussion générale, au sujet des retraites. M. le rapporteur général a ainsi déclaré que la loi du 20 janvier 2014 « ne sera[it] pas la dernière », à quoi M. Roche, rapporteur pour l’assurance vieillesse, a ajouté qu’il était persuadé que cette même loi avait « apporté une réponse très insuffisante », précisant en outre qu’il était lui-même favorable à un régime par points.

Sur la portée de cette loi, je voudrais faire remarquer que le comité de suivi des retraites, dans le premier avis qu’il a rendu au mois de juillet, en se fondant sur le rapport du Conseil d’orientation des retraites, le COR, indiquait que « la trajectoire de retour à l’équilibre financier d’ici 2020 rest[ait] accessible, sous réserve de la réalisation des prévisions macro-économiques retenues dans le cadre du programme de stabilité », …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

… et cette réserve doit être prise en compte.

Le COR souligne traditionnellement l’importance de deux facteurs : le chômage, comme vient de le rappeler Mme la secrétaire d’État, qui n’est toujours pas stabilisé, et, élément très important, la productivité, qui est aujourd’hui insuffisante et orientée à la baisse.

Je n’ai pas forcément la « foi », pour reprendre l’expression de Mme la secrétaire d’État, mais c’est tout l’enjeu des décisions de politique économique prises depuis 2012 par le Gouvernement qui figurent dans les lois de finances et de financement de la sécurité sociale. Et le groupe socialiste croit en la réussite de ces politiques.

Je veux revenir sur la portée des réformes des retraites successives conduites depuis les années quatre-vingt-dix par différents gouvernements. Je rappelle que, dans cette enceinte même, au terme d’un long débat sur la réforme présentée par M. Woerth, nous étions finalement tous convenus d’un point et d’un seul, à savoir qu’il faudrait bien mener un jour une réforme de fond – une réforme « systémique », comme nous disions. À ce propos, je note que l’amendement n° 113, que nous allons examiner dans quelques instants, comporte une date. Or une telle réforme systémique est contradictoire avec la mesure d’âge, qui est, elle, de nature paramétrique. Vous êtes donc dans la contradiction !

On cite souvent en exemple la réforme des retraites réalisée en Suède, qui a bénéficié d’un compromis politique et qui n’a jamais été remise en cause, malgré les alternances. Conduite sur une quinzaine d’années, elle repose sur un principe fort : un système structurellement à l’équilibre en phase avec les réalités économiques, soit un mélange de principes et de pragmatisme dont sont coutumiers les pays d’Europe du Nord.

Dans cette réforme, le volet par répartition est adossé à un compte notionnel ouvert pour chaque assuré, et c’est là où on en revient à votre préférence pour le système par points, M. Roche – position que je comprends très bien, puisque c’est aussi la mienne. Mais rappelez-vous quand même que, tout récemment, dans cette enceinte, vos collègues de la droite ont supprimé ce qui est l’amorce d’une réforme systémique, à savoir le compte pénibilité. §

Et je voudrais vous rappeler que c’est le gouvernement de M. Raffarin qui a lancé cette idée de compte pénibilité en 2003, même si les discussions avec les partenaires sociaux sur le sujet n’ont pas abouti. C’est finalement M. Woerth, alors ministre du budget, qui, en 2008, a introduit ce dispositif dans la loi, mais les décrets d’application n’ont jamais été pris… D’ailleurs, le décret d’application relatif au compte pénibilité que le Gouvernement vient de prendre le mois dernier, et qui fait l’objet de vos attaques, se contente de reprendre les critères qui étaient avancés par M. Woerth.

Vous avez donc supprimé, de manière parfaitement contradictoire, un dispositif qui était en germe depuis 2003, ce sur votre initiative. Et je me souviens que M. Bertrand, alors ministre du travail, avait déclaré que le compte pénibilité était une réforme majeure et que tous les problèmes de pénibilité qui n’étaient pas encore réglés constituaient la plus grande des injustices sociales.

Pourtant, tranquillement, à la faveur d’un texte sur la simplification, vous avez balayé d’un revers de manche tout le travail qui avait été accompli par des gouvernements que vous souteniez et, bien sûr, par le gouvernement actuel, qui a introduit le compte pénibilité dans la réforme de 2013.

Ce que je veux vous démontrer à travers cet historique, c’est que, pour accomplir des réformes structurelles, des réformes de fond, il faut forcément du temps, compte tenu des résistances. De fait, vous avez prouvé que vous étiez rétifs aux réformes structurelles, parce que le compte pénibilité est vraiment l’amorce d’une réforme systémique.

Par là même, et j’en terminerai ainsi, monsieur le président de la commission des affaires sociales, je me permets de relativiser votre appétence verbale à engager des réformes.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Vous vous en doutez, nous sommes opposés à cet amendement proposé par Gérard Roche au nom de la commission.

Je ne vais pas revenir sur l’historique que vient de faireNicole Bricq, il est tout à fait juste : le compte pénibilité était partie intégrante de la réforme des retraites ; il avait reçu l’accord des organisations syndicales, du moins celles qui adhéraient à la réforme. Les premières négociations remontent à 2003, puis d’autres ont suivi en 2008, et enfin celles de 2013 ont abouti à la loi de janvier 2014, dont les décrets d’application sont parus au mois d’octobre : les gouvernements successifs ont ainsi pu chacun réformer le système de retraite. Mon groupe avait contesté ces réformes et sa position n’a pas changé.

M. Roche nous demande d’adopter un comportement républicain, parce que notre système de retraite est en grande difficulté, ce dont je conviens, mais c’est à cause d’un manque de recettes. On en revient toujours au même point : faute de recettes, on n’arrive plus à assurer la pérennisation de notre système de retraite.

Selon moi, les parlementaires que nous sommes devraient surtout se souvenir de l’origine de la protection sociale, qui trouve sa source dans le programme du Conseil national de la résistance, un programme dont l’objectif était de répondre aux besoins d’une population maltraitée, meurtrie, en s’adressant surtout à la classe des travailleurs, qui était en très grande difficulté au sortir de la guerre. Les dirigeants de notre pays ont vraiment accompli, à ce moment-là, un grand geste républicain, monsieur Roche.

Le Gouvernement de l’époque comprenait des ministres de droite comme de gauche, et je vous rappelle que c’est un ministre communiste, Ambroise Croizat, qui fut l’un des fondateurs de notre protection sociale. C’était un véritable gouvernement républicain au sens où nous pouvons l’entendre ce soir dans cette enceinte, et ce gouvernement a été capable, alors que la France était peut-être dans une situation financière plus difficile encore que celle que nous connaissons à l’heure actuelle, d’asseoir le financement d’un système de protection sociale sur les richesses produites par le travail.

Aujourd’hui, nous sommes en train d’inverser la logique qui a prévalu à ce moment-là et de renier tout ce qui a été très justement construit à l’époque pour répondre à la détresse d’une grande partie de notre population.

Je me rappelle l’année 1982, quand la retraite à 60 ans a été obtenue. Je me souviens très bien de la joie de mes collègues de travail de l’époque, surtout des femmes, qui avaient la cinquantaine – l’âge que j’ai aujourd’hui –, et qui voyaient leur avenir s’ouvrir d’un seul coup, parce qu’elles se rendaient compte qu’elles pourraient partir à la retraite à l’âge de 60 ans et enfin mener une vie digne après toutes ces années de travail.

J’avais déjà évoqué dans cet hémicycle ce souvenir lorsque M. Woerth nous avait présenté sa réforme des retraites, et je trouve dramatique que nous soyons revenus sur cette avancée pour notre pays.

Le présent amendement, qui tend à repousser à 64 ans l’âge de la retraite, mesure qui repousse d’autant l’espoir pour un grand nombre de femmes et d’hommes d’avoir enfin un moment de répit, un moment de vie pour soi, nous ne pouvons l’accepter, comme nous ne pouvions accepter non plus le report à 62 ans de l’âge légal de départ.

Nous sommes persuadés que, avec un autre système de financement, nous pourrions assurer la retraite à 60 ans à taux plein à toutes celles et tous ceux qui l’ont bien méritée !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ainsi, un vendredi soir, dans un hémicycle clairsemé, vous nous soumettez un petit amendement sur les retraites, alors que nous avions débattu durant trois semaines de la réforme des retraites. Quelle audace !

Cette méthode ne me semble toutefois pas à la hauteur de l’enjeu. Sur un sujet aussi important, on ne devrait pas éviter un véritable débat de société.

Cela étant, je voudrais en quelques mots exprimer mon désaccord avec cet amendement. Comme l’a dit Mme David, nous étions déjà opposés à la réforme des retraites voilà quelques années, alors nous ne voulons pas en rajouter une couche aujourd’hui.

Cette réforme n’a d’ailleurs pas permis de faire la démonstration que les gens travaillant plus longtemps, le chômage est résorbé. Au contraire, il augmente ! Il faudrait que l’on m’explique comment on va pouvoir résorber le chômage en obligeant nos concitoyens à travailler plus longtemps. Y aurait-il un gisement d’emplois disponibles ?

Que l’on m’explique pourquoi les personnes âgées de 50 à 60 ans trouveraient du travail si on repousse de deux ou trois ans l’âge de départ à la retraite. Ces personnes ont des difficultés pour trouver du travail. Pourquoi en trouveraient-elles subitement davantage ? Je connais l’explication avancée par les techno-libéraux : un employeur embauchera plus facilement une personne âgée de 58 ans si elle reste dans l’entreprise jusqu’à 64 ans qu’une personne de 58 ans qui ne restera que deux ans. J’attends les quelques cas où cela va se produire ! Je connais en revanche beaucoup d’employeurs qui ne veulent pas embaucher une personne âgée de 54 ans parce qu’elle est trop vieille.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Et même une personne âgée de cinquante ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Expliquez-nous pourquoi les seniors trouveraient davantage de travail ! Expliquez-nous pourquoi les jeunes seraient contents d’être au chômage alors que les anciens travailleraient davantage !

Attention, il ne s’agit pas d’empêcher les gens qui souhaitent continuer à travailler de le faire, les médecins comme les autres. En revanche, ceux qui veulent partir devraient en avoir le droit. C’est pourquoi le débat sur la pénibilité n’aurait pas dû être engagé, car il aurait fallu en rester simplement à la retraite à 60 ans.

Quoi qu’il en soit, tant qu’il y a du chômage, tout relèvement de l’âge légal est incompréhensible. Car l’argent que l’on économise sur les retraites sera dépensé en assurance chômage, avec un bilan nul pour la collectivité. Ou alors il ne faut pas investir davantage dans l’assurance chômage et accepter que de nombreuses personnes n’aient plus d’argent et donc plus de pouvoir d’achat. Mais peut-on se résoudre ainsi au développement de la pauvreté ? Vous êtes le premier, monsieur Roche, à dire que ce n’est pas acceptable.

À cet égard, nous avons conduit une mission d’étude sur la pauvreté et nous nous sommes aperçus qu’il y avait une grande pauvreté chez les jeunes âgés de moins de 25 ans, comme par hasard ceux qui n’ont pas droit au RSA. Pour autant, nous n’en avons pas automatiquement déduit qu’il aurait fallu leur accorder le RSA. De la même façon, tant qu’il y a du chômage, on ne comprend pas comment la mesure proposée pourrait générer une économie pour la société.

De surcroît, nous sommes, les écologistes, pour le partage du travail. Nous ne croyons pas à une croissance exponentielle des emplois et du travail, car nous savons que les ressources sont finies, que l’on peut produire plus en travaillant moins à l’échelle d’une société et que les robots vont se développer. Si l’on ne trouve pas un autre moyen de financement, je suis d’accord, il y aura des problèmes, mais je ne crois pas à cette nécessité de travailler toujours plus. Vous allez me rétorquer que je rêve ! Mais voilà des années que l’on dit que la croissance ne va pas revenir. On constate d’ailleurs chaque année qu’elle ne revient pas et pourtant, vous ne nous dites pas que nous avions raison il y a dix ans, neuf ans, huit ans, etc., mes chers collègues… Vous, vous croyez toujours au retour de la croissance. Et c’est vous qui me taxez de rêveur !

Nous ne sommes pas des rêveurs quand nous affirmons que la croissance ne va pas revenir et qu’il faut organiser dès maintenant le partage du travail pour que tout le monde en ait !

En conclusion, mes chers collègues, vous l’avez compris, les écologistes s’opposeront au présent amendement.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Je ne peux pas laisser passer ce que j’ai entendu sans réagir.

En premier lieu, l’amendement de Gérard Roche va dans le sens des propos qu’a récemment tenus le Président de la République dans une émission télévisée. Je ne sais pas si sa langue a fourché à cette occasion ou s’il voulait faire passer un message subliminal, mais je l’ai bien entendu dire à une interlocutrice que, dans quelques années, l’âge de départ à la retraite dans notre pays avoisinerait les 63 ou 64 ans, exactement celui que nous propose M. le rapporteur.

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Spontanément, les gens travaillent plus longtemps ! Ce sont les statistiques !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Il me semble tout de même que la parole du Président de la République compte encore un peu. Vous pouvez écouter le verbatim de son intervention, mes chers collègues, vous retrouverez ses propos.

Cela étant, la France est, je crois, l’un des derniers pays d’Europe à n’avoir pas compris que, eu égard à l’augmentation considérable de l’espérance de vie qu’elle connaît grâce aux progrès de la médecine, il était indispensable de travailler quelques années supplémentaires pour parvenir à l’équilibre de son régime de retraite qui est structurellement déficitaire.

Madame Bricq, j’ai entendu vos propos : ils sont parfaitement cohérents, sauf lorsque vous dites que les prévisions étaient fondées sur des projections de croissance économique dont on verra si elles sont respectées. Nous savons très bien qu’elles ne seront pas réalisées. Nous savons très bien que, l’année dernière, le Gouvernement avait tablé ses prévisions de recettes sur un taux de croissance de 0, 8 %, alors qu’il ne sera que de 0, 4 %. Nous savons très bien que le taux de croissance de 1 % qu’il envisage pour 2015 est déjà fortement remis en cause par le Haut Conseil des finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Il n’est pas fortement remis en cause ! Il est juste optimiste !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Et nous savons très bien que, depuis deux ans, toutes les prévisions et les engagements qui ont été pris sur le plan économique par le Gouvernement n’ont pas été respectés.

Dans ces conditions, comment voulez-vous que nous n’attirions pas l’attention du Gouvernement, à travers cet amendement, sur les difficultés très rapides qu’auront les régimes de retraite à s’équilibrer ? Il me semble que c’est un amendement de bon sens.

Bien entendu, nous sommes pour le système de retraite par points. Nous l’avons dit et répété. Nous avons défendu un tel système l’an dernier à l’occasion de l’examen du texte relatif aux régimes de retraite, mais nous n’avons pas été entendus. Nous nous sommes heurtés à un mur, et il est donc bien logique que nous essayions, a minima, de compenser ce manque de prise de conscience de la part du Gouvernement.

Je voudrais aussi revenir sur le compte pénibilité. Pardonnez-moi, madame Bricq, mais vos propos constituent une caricature de la réalité. Lors du débat sur le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises, je n’ai entendu aucun orateur de la majorité sénatoriale dire qu’il était contre la prise en considération de la pénibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mais vous avez supprimé le compte pénibilité !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Calmez-vous, madame Bricq, je ne vous ai pas interrompue tout à l’heure !

Nous ne renions absolument pas ce que le Gouvernement précédent a fait en la matière. Plusieurs orateurs de la majorité sénatoriale ont au contraire indiqué qu’ils étaient très favorables aux mesures qu’avait insérées M. Woerth dans son texte.

Nous avons simplement relevé que la façon dont le Gouvernement mettait en œuvre la prise en compte de la pénibilité correspondait à une usine à gaz, inapplicable sur le plan administratif, qui allait crucifier les petites entreprises, incapables d’appliquer le dispositif et d’établir les fiches individuelles de pénibilité.

Au-delà de l’amendement de suppression du compte pénibilité que nous avons adopté, nous avons présenté deux amendements de repli qui me semblent relever de la sagesse même. Le premier visait à demander une réflexion sur la façon de porter à connaissance les éléments de pénibilité grâce à la déclaration annuelle des données sociales : il y a là une piste à creuser, et j’avais suggéré que le Gouvernement consulte les professionnels du chiffre et du droit pour trouver une méthode permettant d’aboutir à ce résultat.

Quant au second, il prévoyait une procédure de rescrit, de manière que les petites entreprises, confrontées à cette usine à gaz, et ayant peur d’être sanctionnées si elles appliquaient mal ce compte pénibilité, puissent demander à l’administration si l’interprétation qu’elles faisaient du texte était la bonne, afin de pouvoir l’appliquer en toute sécurité, sans risquer de subir des pénalités et des procédures. C’est tout simple ! En revanche, aucun d’entre nous n’a dit à un quelconque moment qu’il était contre la prise en compte de la pénibilité ! Nous voulons simplement instaurer des méthodes de simplification qui permettent de mettre en œuvre ce texte au profit des salariés sans déstructurer les entreprises dans leur organisation administrative et sans leur imposer un surcoût considérable.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

M. Gérard Roche, rapporteur. Madame la secrétaire d’État, je savais bien que vous ne donneriez pas un avis favorable. Je voudrais toutefois brièvement vous répondre. Vous nous avez dit qu’il fallait tenir compte du chômage. C’est vrai. Mais, actuellement, dans les projections à long terme

M. le rapporteur montre un graphique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

C’est précisément l’un des éléments qui m’a poussé à présenter aujourd’hui le présent amendement.

Mme Bricq, avec la rigueur intellectuelle qui la caractérise, a développé un propos mesuré. Je luis fais toutefois remarquer que le comité de suivi des retraites a écrit que les aléas de la croissance constitueraient le principal défi auquel sera confronté le système. C’est aussi ce que j’ai voulu dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Quant à la réforme systémique par points, que nous appelons tous de nos vœux, elle ne peut se faire qu’après la réunion d’une conférence sociale que nous souhaitons de tout notre cœur à partir de 2015. La discussion sera longue, assurément.

Mme David a parlé du Conseil national de la résistance et du pacte républicain. Je pense sincèrement que ce fut un grand moment de générosité de la République française après la guerre. La couverture sociale et le régime de retraite sont nés à cette époque.

Depuis, les choses ont évolué : si, au début, la retraite des salariés dépendait de la seule heure de travail, d’autres systèmes sont venus s’adjoindre, notamment celui des agriculteurs ou le régime social des indépendants.

Le répit, dites-vous ? Mais nous y sommes tous favorables ! J’ai été médecin pendant longtemps et, comme vous, je sais très bien qu’une personne ayant exercé un travail dur et pénible n’a pas la même espérance de vie qu’une personne ayant travaillé dans un bureau.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Toutefois, j’aimerais vous voir défendre la réforme des régimes spéciaux avec la même ardeur que vous mettez à défendre le répit. On voit encore aujourd’hui des personnes partir à la retraite à 55 ans, après avoir exercé des métiers relativement confortables. Or personne n’ose s’attaquer à ces questions !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Il y a bien d’autres points dont nous pourrions discuter sans agressivité.

Jean Desessard me reproche de présenter cet amendement à la sauvette, le soir. Lors de la dernière réforme des retraites, j’arrivais au Sénat avec mon cartable, sans oser rien dire, comme si j’entrais au collège pour la première fois. §Puis, deux changements sont intervenus : nous avons obtenu la majorité lors des dernières élections sénatoriales et j’ai été nommé rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse, ce qui me permet de m’exprimer aujourd’hui.

En revanche, ce n’est pas moi qui ai choisi de parler ce soir devant un auditoire relativement réduit. J’aurais préféré le faire en journée, pendant tout un après-midi, et devant un hémicycle plein. Sans avoir un ego particulièrement démesuré, cela m’aurait fait beaucoup plus plaisir.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Je n’ai vraiment pas choisi ce moment et l’on ne peut m’en tenir rigueur.

Je rappellerai enfin à M. Desessard qu’il n’existe que trois façons de rééquilibrer le régime de retraite : soit on augmente les cotisations, ce qui n’est pas possible en raison de la situation économique, soit on diminue les pensions – je vous rappelle que dans mon département, la Haute-Loire, le montant moyen des pensions est de 883 euros –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

… soit on allonge un peu la durée du temps de travail. Cette dernière solution est le seul moyen envisageable, et c’est celui que j’ai proposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Je ne serai pas plus long. Merci de votre attention ; sachez que j’ai parlé avec beaucoup de sincérité.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je mets aux voix l'amendement n° 76.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici le résultat du scrutin n° 27 :

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 56.

L'amendement n° 85 rectifié, présenté par Mmes Debré et Deroche, MM. Bas, J. Gautier, Cardoux et Gilles, Mmes Cayeux, Gruny et Garriaud-Maylam, MM. Chaize, J.P. Fournier, del Picchia et Duvernois, Mme Duchêne, M. Bouchet, Mme Duranton, MM. Grosperrin, B. Fournier, Charon, Cambon, Bouvard et Doligé, Mme Des Esgaulx, MM. Grand et César, Mme Deromedi et MM. Bignon, Falco, Bonhomme, G. Bailly, Buffet, Genest, Gremillet et Dassault, et ainsi libellé :

Avant l’article 56

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 815-9 du code de la sécurité sociale est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation au premier alinéa et dans des conditions définies par décret, lorsque le demandeur ou le bénéficiaire de l’allocation de solidarité aux personnes âgées ou son conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité perçoivent, au jour du dépôt de la ou des demandes ou en cours de service, des revenus d’activité, ces revenus peuvent être cumulés avec la ou les allocations de solidarité aux personnes âgées et les ressources personnelles de l’intéressé ou des époux, concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité dans la limite d’un plafond.

« Ce plafond est fixé à 1, 2 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance lorsque l’allocation de solidarité aux personnes âgées est versée à une personne seule ou à un seul des conjoints, concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité et à 1, 8 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance lorsque l’allocation de solidarité aux personnes âgées est versée aux deux conjoints, concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.

« Les dispositions prévues aux deuxième et troisième alinéas sont applicables, dans des conditions définies par décret, aux personnes qui sont titulaires des allocations mentionnées à l’article 2 de l’ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse. »

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Je présente cet amendement au nom de ma collègue première signataire, Isabelle Debré.

Il s’agit de revenir aux dispositions d’une proposition de loi adoptée par le Sénat au mois de janvier 2013 et d’autoriser le cumul de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’ASPA, ou des autres allocations constitutives du minimum vieillesse avec des revenus d’activité, afin de permettre aux bénéficiaires de vivre dignement. Rappelons que le minimum vieillesse est de l’ordre de 800 euros !

Par cet amendement, nous proposons de permettre à ces retraités de disposer d’un complément de revenu à concurrence de 1, 2 SMIC pour une personne seule et de 1, 8 SMIC pour un couple. Il s’agit tout de même d’un minimum !

Cette proposition de loi, qui retenait le principe d’un droit au travail pour tout citoyen français, a été adoptée à une forte majorité au Sénat, le groupe socialiste ayant, à l’époque, décidé d’opter pour une « abstention positive ». Malheureusement, pour des raisons que nous ignorons, la loi qui devait en résulter n’a jamais vu le jour.

Je relève d’ailleurs que cette disposition serait particulièrement utile en milieu rural, les retraités agricoles ayant des revenus extrêmement faibles. Les bénéficiaires du minimum vieillesse pourraient ainsi continuer de réaliser de petits travaux au service de certains commerçants, de certains artisans, voire même de travailler dans le secteur des services à la personne. Il s’agirait ainsi d’un complément de revenu intéressant et d’un apport non négligeable à la société.

Cela étant, à notre grande surprise, l’Assemblée nationale a adopté, le 25 avril 2013, et malgré le fort consensus au Sénat, une motion de renvoi en commission de la proposition de loi susvisée. Depuis, rien n’a bougé.

Le Gouvernement nous a promis à plusieurs reprises qu’il procéderait par voie réglementaire, mais, malgré plusieurs interpellations sous forme de questions au Gouvernement ou d’interventions lors de différents débats, nous ne voyons rien venir.

Il s’agit pourtant d’une simple mesure d’équité et de justice sociale au profit des plus démunis de nos aînés. C’est la raison pour laquelle, par cet amendement, sur lequel nous avons demandé un scrutin public, nous avons souhaité rappeler très solennellement le Gouvernement à son engagement d’appliquer ce texte le plus rapidement possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

L’avis de la commission est favorable.

Cette disposition a fait l’objet d’une proposition de loi adoptée par le Sénat le 31 janvier 2013.

Le Gouvernement s’était engagé à adopter un décret permettant de la mettre en œuvre. En l’absence de ce texte réglementaire, il revient donc au législateur d’autoriser ce cumul.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Le Gouvernement partage le souci de soutenir le minimum vieillesse, qui a bénéficié, en sus de l’augmentation automatique du 1er avril, d’un coup de pouce supplémentaire le 1er octobre, ce qui permet d’arriver au montant de 800 euros que vous venez d’évoquer, monsieur Cardoux.

Le Gouvernement partage également le souci de Mme Debré de mettre en œuvre ce dispositif. Nous avons d’ailleurs eu l’occasion d’en discuter ensemble.

Cependant, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, qui sera satisfait d’ici à deux ou trois semaines. Le décret vient en effet de sortir du Conseil d’État, ce qui est une étape positive dans la vie d’un décret. §En tout état de cause, il devrait être publié avant la fin de l’année. À défaut de retrait de cet amendement, je me verrai contrainte d’émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur Cardoux, l'amendement n° 85 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Vous nous dites que le décret va sortir dans quinze jours. Dont acte. Toutefois, il y a quelque temps de cela, je ne sais si c’est vous ou Mme Touraine qui nous faisait la même promesse, et nous n’avons toujours rien vu.

Je maintiens cet amendement, sur lequel nous avons demandé un scrutin public. En l’adoptant, la Haute Assemblée enverra un signe fort.

Le cas échéant, après avoir obtenu des certitudes quant à la parution de ce décret, les sénateurs que nous aurons désignés pour nous représenter en commission mixte paritaire auront la sagesse de retirer cette disposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Nous avons eu ce débat à plusieurs reprises. Nous, écologistes, soutenons cet amendement.

Mme la secrétaire d’État nous dit qu’un décret va paraître. Il aura fallu du temps, mais cela signifie que nous sommes en accord sur le fond. Si quelque détail nous séparait encore, il faudrait nous le dire…

Votons cet amendement qui va dans le bon sens et tant mieux si le décret arrive ! De quoi pourrait-on se plaindre ? Le Parlement adopte un dispositif intéressant et un texte d’application paraît dans la foulée ! Ma foi, je ne comprends pas ces réticences.

S’agit-il d’un problème de communication ? Le Gouvernement aurait-il préféré revendiquer la paternité de ce dispositif ? Nous en discutons depuis si longtemps qu’il est difficile de savoir qui le premier a lancé cette idée.

Toujours est-il que nous avions déjà adopté ce dispositif et que nous voterons cet amendement.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Je ne veux pas tenter de faire pression sur le Sénat.

J’ai entre les mains l’extrait du registre des délibérations du Conseil d’État, en date du 4 novembre dernier, qui comporte le projet de décret.

J’attire votre attention sur un élément de procédure : si le présent amendement est adopté par le Sénat et maintenu par l’Assemblée nationale, nous ne pourrions publier ce décret. Il nous faudrait alors reprendre la procédure et rédiger un nouveau texte, conforme avec l’amendement.

Or si la rédaction de ce décret a pris autant de temps, c’est qu’il a fallu une consultation importante. Ce décret n’a pas été facile à élaborer. Cela étant dit, je laisse au Sénat le soin de prendre ses responsabilités.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

C’est ce qu’il fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je n’ai plus le droit d’intervenir, mais si je le pouvais, je dirais que cela change les choses…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Madame la secrétaire d’État, je suis toujours dans l’expectative.

Vous nous dites qu’un décret va paraître, mais nous ne le connaissons pas. Est-il conforme à la proposition de loi adoptée par la Haute Assemblée ? Nous ne le savons pas.

Les seuils que nous avons inclus sont-ils retenus par le Gouvernement ? Le plafond que vous avez fixé est-il bien celui qui figurait dans la proposition de loi, à savoir 1, 2 fois le SMIC pour une personne seule, et 1, 8 fois pour les couples ?

Je ne mets absolument pas en doute votre parole, mais les délais de mise en œuvre et le temps nécessaire pour élaborer ce décret nous semblent trop importants. Voilà pourquoi nous sommes dubitatifs.

Le débat reprendra en commission mixte paritaire. C’est la raison pour laquelle je vous suggère de bien vouloir communiquer à la rédactrice de cet amendement et au groupe UMP du Sénat le texte du décret. Nous vous avons écoutée et, le cas échéant, nous saurons faire preuve de sagesse et retirer cette disposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Je tiens à souligner la cohérence des différents amendements déposés par la majorité sénatoriale. La commission des affaires sociales nous a proposé d’adopter un pacte républicain consistant, à terme, à faire travailler les Français jusqu’à 67 ans ou 69 ans.

J’avais auparavant entendu dire qu’une politique d’austérité encore plus dure que celle que propose le Gouvernement devait être menée pour ne pas laisser aux jeunes générations le fardeau de la dette. Vous faites donc appel aux jeunes, chers collègues de la majorité sénatoriale, pour appuyer cette proposition d’austérité, qui passe par des économies drastiques sur les budgets sociaux, certains évoquant même le chiffre de 140 milliards d’euros. Or cela conduirait à une baisse de la consommation très importante, dont l’emploi paierait toutes les conséquences, ce qui ne manquerait pas de faire naître des problèmes liés à la diminution, ou à l’insuffisance, des cotisations des actifs, pourtant nécessaires pour financer, grâce au système de répartition, les retraites des anciens.

Ce pacte républicain que vous nous proposez est extrêmement dangereux. Quel avenir pour la jeunesse dessinez-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Quel avenir lui dessinez-vous en l’endettant ? C’est un progrès social à crédit !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Ce pacte consiste également en la suppression du compte pénibilité. Autant le dire, nous n’avons jamais été des fanatiques de ce compte ; ce n’est pas la voie que nous aurions empruntée pour la reconnaissance de la pénibilité. Mais admettez tout de même, mes chers collègues, qu’un vrai problème se pose en la matière ! La première inégalité, pour les Français, est la différence d’espérance de vie selon le métier exercé : un ouvrier qui travaille dans des conditions pénibles et difficiles peut espérer vivre entre sept et huit ans de moins qu’un cadre supérieur, par exemple. Si vous considérez, chers collègues de la majorité, qu’il ne doit y avoir dans le pacte républicain aucune solidarité ni aucune prise en compte de la pénibilité, nous n’en avons pas la même conception !

Par le présent amendement, il nous est maintenant proposé de cumuler l’ASPA avec des revenus d’une activité, vous proposez même des « petits boulots » aux retraités. Voilà votre projet de société : faire travailler les gens jusqu’à 67 ans ou 69 ans, en leur donnant un petit plus, et en les faisant travailler dans les rues, par exemple, comme je l’ai vu au Japon, où ce système existe. Dans ce pays, en effet, il n’est pas rare de voir des gens âgés de 70 ans ou plus faire la circulation pendant la nuit !

Ce pacte républicain n’est pas le nôtre ; nous dénonçons les propositions que vous nous soumettez, qu’elles portent sur le compte pénibilité, sur le cumul entre l’ASPA et un revenu d’activité, ou sur l’allongement de la durée de cotisation, nécessaire à l’obtention d’une pension à taux plein, jusqu’à 69 ans. Je ne sais pas si vous avez conscience de ce que vous nous suggérez d’adopter. En tout cas, je vous le dis, je suis complètement révolté ! §

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’État

J’ai été interrogée sur les seuils mentionnés dans le décret qui nous occupe. Ce dernier précise que, lorsque le foyer est constitué d’une seule personne, les revenus professionnels du demandeur ou bénéficiaire pris en compte font l’objet d’un abondement forfaitaire égal à 0, 9 fois la valeur de la rémunération mensuelle minimale. Il prévoit également que cet abondement est égal à 1, 5 fois la valeur de la rémunération mensuelle et porte sur les revenus professionnels du foyer, lorsque le ou les demandeurs ou allocataires sont mariés, concubins ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.

Traduit en termes absolus mensuels, plus simples à comprendre, cela signifie que le minimum vieillesse se monte à 800 euros, augmentés de 435 euros bruts, soit 380 euros nets, cumulables sans voir réduit le minimum vieillesse. Le total s’élève donc à un peu plus d’un SMIC, sans que le minimum vieillesse soit affecté.

Voilà la réponse à la question que vous avez posée, monsieur Cardoux, et le contenu du décret qui sera publié dans les jours qui viennent.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur Cardoux, que décidez-vous finalement, après cette précision ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Madame la secrétaire d’État, vous nous avez fourni les éléments financiers que j’attendais. Je considère que vous avez pris un engagement ferme de publication du décret dans un délai de quinze jours et dans les conditions indiquées à l’instant.

Par conséquent, monsieur le président, je retire l’amendement n° 85 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 85 rectifié est retiré.

L’amendement n° 113, présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Avant l’article 56

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Afin d’assurer la pérennité financière et l’équilibre entre les générations du système de retraites par répartition, ainsi que son équité et sa transparence, une réforme systémique est mise en œuvre à compter du premier semestre 2017.

Elle institue un régime universel par points ou en comptes notionnels sur la base du septième rapport du Conseil d’orientation des retraites du 27 janvier 2010.

Le Gouvernement organise une conférence sociale et un débat national sur cette réforme systémique au premier semestre 2015.

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Sans recommencer le débat qui vient d’avoir lieu sur la réforme des retraites, je tiens à insister sur un point évoqué par M. le rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse, par M. Cardoux et par Mme Bricq, portant sur la réforme structurelle du système de retraite. Il s’agit pour moi d’une question d’équité, de transparence et de justice.

Avec la prise en compte, notamment, de la pénibilité, rien ne justifie plus, à mes yeux, les différences entre les trente-huit régimes qui composent notre système par répartition.

Voilà dix ans que nous sommes, vous le savez, mes chers collègues, très attachés à cette réforme structurelle, qui a été mise en œuvre avec succès par certains de nos voisins européens, notamment en Suède. Cette ambition est d’ailleurs partagée par 73 % des Français qui sont favorables à la convergence des régimes publics et privés vers un système unique. Il ne s’agit pas, bien sûr, de la mener en un jour ; on sait bien que tout cela prendra du temps, vraisemblablement une dizaine d’années.

Cet amendement tend donc à mettre en place de manière progressive un régime universel par points, ou par comptes notionnels, et à permettre l’organisation d’une conférence sociale et d’un débat national au premier semestre de l’année 2015. J’ose espérer qu’il aura plus de succès que ceux que nous avons déposés sur ce sujet dans le passé, lesquels, après avoir pourtant été adoptés à la grande majorité des membres du Sénat, n’ont malheureusement jamais été suivis d’effet.

Je précise, monsieur le président, que mon groupe ne demandera pas de scrutin public !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Avis favorable, sous réserve de l’organisation d’une conférence sociale et d’un débat national sur cette réforme systémique importante, si possible dès l’année 2015.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’État

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Je dois dire que j’ai maintenant du mal à m’y retrouver dans les diverses propositions des membres de la majorité sénatoriale. Ils proposent d’abord l’adoption d’un système de retraites par répartition qui requiert des cotisations jusqu’à 69 ans.

Puis les mêmes qui ont voté pour cette mesure – on pourra le vérifier – proposent ensuite, avec cet amendement, un dispositif tout à fait différent : l’instauration d’un système de comptes notionnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Cela revient, pour nous, à l’abandon du pacte républicain et du système de retraites par répartition, fondé sur le financement des retraites des pensionnés par les générations actives.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Le dispositif proposé est tout autre ; il débouchera nécessairement sur un système de retraite par capitalisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Ce système par points, dont vous nous vantez les mérites, serait, selon vous, supérieur au système de retraite par répartition. Je voudrais tout de même modérer vos ardeurs, mon cher collègue. Certains pays du nord de l’Europe, qui avaient expérimenté ce système, ont fait machine arrière tant les dégâts étaient importants pour les salariés. Par ailleurs, aux États-Unis, le même phénomène a eu lieu : avec la crise économique, des retraités se sont retrouvés dans une situation catastrophique, à cause de ce système que vous érigez pourtant en modèle.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

En tout état de cause, vos propositions sont d’une incohérence totale, et annoncent la rupture du pacte républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Vous avancez par ailleurs des arguments selon lesquels ce système permettrait de faire converger les régimes publics et privés. On comprend à demi-mot que, pour vous, les fonctionnaires sont privilégiés. Je le rappelle pourtant, quelques mois avant l’examen dans cet hémicycle de la réforme des retraites de 2013, un rapport avait démontré exactement l’inverse ! S’il existe bien des règles dissemblables entre les régimes publics privés, si certains éléments diffèrent bien d’un système à l’autre, le montant des pensions de retraite et le taux de remplacement par rapport au revenu d’activité sont à peu près les mêmes entre les régimes, à quelques euros près. Cet argument, par conséquent, ne tient pas non plus.

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je ne veux pas rouvrir un débat que nous avons déjà eu.

Je vais seulement devoir expliquer une fois de plus à M. Watrin que le système par points est un système par répartition. Il est d’ailleurs défendu par les principaux syndicats réformistes de France. Pas par ceux que vous soutenez, bien sûr, mon cher collègue ! Cela dit, croyez-vous que ces organisations se prononceraient en faveur d’un système qui ne fonctionne pas par répartition ? C’est la base même de notre culture : la mutualisation !

Il s’agit seulement de remplacer les trimestres par des points. C’est ce qu’il faut vous mettre dans la tête :…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

… nous proposons un système de retraite non pas par capitalisation, mais par répartition, établi sur la base de points additionnés dès le premier jour de travail. C’est tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Mais je renonce tout à fait à vous convaincre. Ne prolongeons pas le débat, et passons au vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Avant le vote, il y a les explications de vote, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Nous voilà bien embêtés : quand ce n’est pas M. Roche qui, un vendredi soir, nous suggère de réformer le système des retraites, c’est M. Vanlerenberghe qui s’y met !

Personnellement, d’ailleurs, je ne suis pas opposé à votre proposition, mon cher collègue, qui consiste à réétudier le système actuel. Quand on examine la situation des travailleurs précaires, les carrières accidentées, on sait très bien que le système de calcul des cotisations par trimestre peut poser des problèmes. D’ailleurs, lors de nos débats sur la réforme des retraites, nous avons plusieurs fois abordé ce point précis. Le système par points peut, en la matière, être beaucoup plus objectif, en tenant beaucoup mieux compte de la précarité. J’entends déjà ce que ne manquera pas de répliquer M. Watrin à cet argument : il ne faut pas se faire à la précarité, il faut la combattre plutôt que de l’accepter !

Je le répète, je ne suis pas opposé à ce que nous ayons ce débat. Mais, si nous, écologistes, pouvons aborder le sujet de la répartition par points, nous sommes fondamentalement favorables à la fiscalisation du système. Nous sommes en effet pour le partage du travail ; nous souhaitons que les gens travaillent moins, ce qui implique que la société assure principalement la prise en charge de la solidarité. Dans ce modèle, l’assurance n’est qu’un complément ; elle voit même le plafond de son recours limité afin de faire vraiment jouer la solidarité nationale.

Un débat est donc nécessaire, et nous sommes d’accord pour le mener, monsieur Vanlerenberghe ; vous voyez que nous ne sommes pas fermés !

Pour autant, si nous nous prononçons pour le débat sur le système de retraite par points, nous ne souhaitons pas voir adopter ce soir ce système, dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je comprends bien que vous désiriez profiter de votre majorité sénatoriale pour affirmer certaines positions et lancer la discussion avec l’Assemblée nationale. Néanmoins, je ne peux pas me prêter à ce jeu, mon cher collègue.

Dès lors, et même si, dans l’idée, je pense que la gauche, la droite et les écologistes doivent envisager un débat national sur le système de retraites et ses modalités, je voterai contre cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Le débat dure un peu, mais le sujet est important. Réformer les retraites, sans doute ; encore faut-il en avoir débattu et avoir mis toutes les pistes de réflexion sur la table !

Ce soir, deux idées s’affrontent. Mais si nous devons, selon vous, monsieur Vanlerenberghe, nous mettre dans la tête que le système que vous proposez est un système par répartition, vous devez, quant à vous, mettre dans la vôtre que nous ne sommes pas d’accord avec vous !

On peut ne pas être d'accord avec vous ! Vous êtes persuadé que vous avez la solution ; nous pensons, nous, que ce n’est pas la bonne. Votre proposition - que chaque salarié cotise pour lui-même - rompt avec le principe de solidarité sur lequel est aujourd'hui fondé le système par répartition, que nous défendons.

Nous ne sommes pas d’accord. Que chacun se mette bien cela dans la tête, monsieur Vanlerenberghe !

La protection sociale, qui relève d’un projet de société, mérite effectivement un vrai débat. Mais je ne suis pas convaincue qu’il soit pertinent d’engager une réforme, même nécessaire, au détour d’un amendement portant article additionnel au projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Faisons en sorte que la discussion puisse avoir lieu dans le pays !

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 56.

Par dérogation aux conditions prévues au I de l’article L. 351-14-1 du code de la sécurité sociale, les périodes passées entre le 18 mars 1962 et le 31 décembre 1975 dans les camps militaires de transit et d’hébergement par les assurés, alors qu’ils étaient âgés de 16 à 21 ans, qui sont enfants des anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local ayant servi en Algérie et fixé leur domicile en France, sont prises en compte par le régime général d’assurance vieillesse, sous réserve du versement de cotisations prévu au premier alinéa du I du même article L. 351-14-1, diminué d’une réduction forfaitaire prise en charge par l’État dans des conditions et limites fixées par décret.

Le nombre de trimestres d’assurance attribués en application du présent article est limité à quatre, sans que le total des trimestres acquis à ce titre et, le cas échéant, en application dudit article L. 351-14-1 n’excède le plafond fixé au premier alinéa du I du même article.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 77, présenté par M. Roche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

Par dérogation aux conditions prévues à l’article L. 351-14-1 du code de la sécurité sociale, les enfants des anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local qui ont servi en Algérie et qui sont venus fixer leur domicile en France voient les périodes qu’ils ont passées dans des camps militaires de transit et d’hébergement entre le 18 mars 1962 et le 31 décembre 1975 prises en compte par le régime général d’assurance vieillesse sous réserve :

1° qu’ils aient été âgés de 16 à 21 ans pendant les périodes mentionnées à l’alinéa précédent ;

2° du versement des cotisations prévues au premier alinéa de l’article L. 351-14-1, diminué d’une réduction forfaitaire prise en charge par l’État dans des conditions et limites fixées par décret.

La parole est à M. Gérard Roche, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Il s’agit d’un amendement rédactionnel qui se justifie donc par son texte même.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Le sous-amendement n° 310 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, MM. Mézard, Barbier, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mme Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Amendement n° 77, alinéa 3

Après les mots :

formations supplétives

insérer les mots :

et assimilés

La parole est à M. Gilbert Barbier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

L’article 56 permet aux enfants de harkis de racheter un maximum de quatre trimestres d’assurance vieillesse au titre des périodes passées dans des camps militaires de transit et de reclassement à la fin de la guerre d’Algérie. Il prévoit également une réduction forfaitaire à la charge de l’État.

Ce sous-amendement tend à préciser que l’aide au rachat de trimestres doit bénéficier non seulement aux formations supplétives, mais également aux assimilés.

Il est important de réparer un tel oubli pour éviter une interprétation trop restrictive du dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 114 est présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.

L'amendement n° 142 rectifié est présenté par MM. Gilles et Milon, Mme Gruny, M. Dériot, Mme Debré, M. Cardoux, Mmes Cayeux et Canayer, M. Chasseing, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre et Forissier, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia et MM. D. Robert et Savary.

L'amendement n° 259 est présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 1

Après les mots :

formations supplétives

insérer les mots :

et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie.

L’amendement n° 114 n'est pas soutenu.

La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l'amendement n° 142 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 259.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement s’inscrit dans la même logique que le sous-amendement défendu par M. Barbier.

Il nous semble important d’ajouter les mots : « assimilés ou victimes de la captivité en Algérie ». Ils ont été omis dans le projet de loi, alors qu’ils figuraient bien dans l’étude d’impact transmise au Parlement par le Gouvernement. Cet oubli serait un très mauvais signal à l’égard des populations concernées. Les souffrances que ces dernières ont subies à cause de notre République doivent, me semble-t-il, être reconnues.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 310 rectifié bis, ainsi que sur les amendements identiques n° 142 rectifié et 259 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

La commission émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 310 rectifié bis et souhaite que les amendements identiques n° 142 rectifié et 259 deviennent des sous-amendements à l’amendement n° 77.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 77, tel que modifié par le sous-amendement n° 310 rectifié bis, et un avis défavorable sur les amendements identiques n° 142 rectifié et 259 ou autres sous-amendements qui survivraient au vote...

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur Savary, qu’en est-il de l’amendement n° 142 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Madame David, qu’en est-il de l’amendement n° 259 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je le retire au profit de l’amendement de la commission tel qu’il sera modifié par le sous-amendement n° 310 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 259 est retiré.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 310 rectifié bis.

Le sous-amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

En conséquence, l'amendement n° 142 rectifié n’a plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 56, modifié.

L'article 56 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 200 rectifié, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Après l'article 56

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 83 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Un décret fixe par pays la liste des autorités susceptibles de pouvoir certifier des certificats de vie sans nécessité de demander une contre-signature à une autorité française. »

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 199, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Après l’article 56

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les modalités d’application de l’article 83 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 201, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

I. - Après l'article 56

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre 1er du titre 5 du livre 3 du code de la sécurité sociale est complétée par une sous-section ... ainsi rédigée :

« Sous-section …

« Dispositions relatives aux carrières effectuées à l’étranger

« Art. L. 351-6-… – Dans le cas d’une carrière effectuée dans plusieurs pays signataires de conventions bilatérales de sécurité sociale avec la France ou dans lesquels le règlement (CE) n° 987/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 fixant les modalités d’application du règlement (CE) n° 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale s’applique, la durée d’assurance prise en compte pour le calcul du taux de la retraite comprend l’ensemble des périodes d’assurance et de résidence accomplies en France et dans les pays susmentionnés. Un décret fixe les conditions d’application de cette disposition. »

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre …

Favoriser la coordination des conventions bilatérales pour les carrières à l’étranger

Cet amendement n’est pas soutenu.

L’article 19 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites est complété par un X ainsi rédigé :

« X. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités particulières d’application du présent article pour les artistes du ballet relevant de la caisse de retraites des personnels de l’Opéra national de Paris.

« Le II du présent article entre en vigueur, pour les assurés mentionnés au premier alinéa du présent X, à compter du 1er janvier 2018. » –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 95, présenté par Mmes Lepage et Conway-Mouret et MM. Leconte et Yung, est ainsi libellé :

Après l’article 56 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Sous réserve de l’appréciation de la situation locale par les autorités consulaires françaises, les justificatifs d’existence que doivent fournir, au plus une fois par an, les bénéficiaires d’une pension de retraite versée par un organisme français résidant hors de France, peuvent être transmis par voie postale, par télécopie ou par voie électronique.

La parole est à Mme Claudine Lepage.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Produire un justificatif d’existence n’est pas une démarche spécifique aux Français établis hors de France.

En effet, les pensionnés vivant en France peuvent être amenés à présenter une attestation prouvant qu’ils sont bien en vie pour continuer à percevoir leur retraite.

Les moyens de vérification à l’étranger sont plus aléatoires ; les éventuels risques de fraude doivent évidemment être pris en considération. Je comprends donc parfaitement qu’il soit nécessaire de se présenter au consulat de son lieu de résidence pour authentifier la procédure.

Cependant, tous les pays n’ont pas des services postaux fiables. Si le certificat de vie qui doit être produit une fois par an n’arrive pas, ou pas dans les délais, auprès de la caisse de retraite, la suspension du versement de leur unique source de revenus a des conséquences graves, voire dramatiques pour beaucoup de nos retraités à l’étranger.

Dans ces conditions, il serait juste et souhaitable que les pensionnés ayant bien effectué les démarches nécessaires en se rendant au consulat, parfois distant de plusieurs centaines de kilomètres de leur domicile, ne soient pas victimes des aléas dans l’acheminement du courrier de leur pays de résidence.

Je vous demande donc d’adopter cet amendement, qui a pour objet d’autoriser la transmission du certificat de vie à la caisse de retraites en France par télécopie ou par voie électronique.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Madame la sénatrice, le Gouvernement est sensible au problème que vous soulevez. Nous mesurons bien les difficultés que rencontrent les personnes confrontées à ces demandes.

C'est d’ailleurs la raison pour laquelle la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 avait déjà largement assoupli les délais relatifs à la production des certificats d’existence pour les pensionnés résidant à l’étranger. En outre, nous avons engagé un vrai travail de simplification.

Pour autant, ce qui rend ce travail plus exigeant et plus complexe, c’est la nécessité de s’assurer du contrôle du versement des pensions en garantissant la validité et l’authenticité des certificats transmis.

Le rapport prévu par l’article 45 de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites permettra de proposer des solutions aux difficultés liées à la perception d’une pension de retraite à l’étranger.

Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

Nous travaillons sur ce dossier, qui est complexe. Nous sommes obligés de faire preuve de vigilance quant aux mesures de contrôle des certificats d’existence.

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Non, je vais le retirer, monsieur le président.

Je remercie Mme la secrétaire d’État des engagements qu’elle vient de prendre ; je lui fais naturellement confiance pour travailler sur le sujet.

Cela étant, le fait d’ouvrir la possibilité de transmettre les certificats de vie par voie électronique à partir du consulat me semble une mesure de bon sens. Je ne vois pas en quoi cela remettrait en cause l’authenticité de tels documents.

Je retire l’amendement, monsieur le président.

Pour l’année 2015, les objectifs de dépenses de la branche Vieillesse sont fixés :

1° Pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, à 224, 0 milliards d’euros ;

2° Pour le régime général de la sécurité sociale, à 120, 9 milliards d’euros. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous allons maintenant examiner par priorité les deux articles du titre V.

Titre V (priorité)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

I. – Au début du 2° de l’article L. 135-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « Une partie, fixée par la loi de financement de la sécurité sociale, » sont remplacés par les mots : « Une fraction, fixée par décret, qui ne peut être inférieure à 50 %, ».

II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.

III. – Pour l’année 2015, les dépenses de prise en charge mentionnées au 2° de l’article L. 135-2 du code de la sécurité sociale sont fixées à 3, 4 milliards d’euros pour le régime général, à 400 millions d’euros pour le régime des salariés agricoles et à 100 millions d’euros pour le régime social des indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 80, présenté par M. Roche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Gérard Roche, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

C’est au législateur qu’il revient de fixer chaque année, en loi de financement de la sécurité sociale, le transfert du Fonds de solidarité vieillesse au régime général, au régime des salariés agricoles et au régime social des indépendants au titre de leurs dépenses de minimum contributif.

Comme je l’expliquais, le dispositif monte en puissance avec la prise en charge des cotisations chômage.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Monsieur le rapporteur, je comprends tout à fait votre souhait que le Parlement ne soit pas dessaisi.

Toutefois, il faut se souvenir que le dispositif voté les années précédentes était censé être transitoire. En réalité, les régimes n’étaient pas en mesure de fournir des indications précises quant aux montants. Le Parlement votait donc une somme qui était jugée approximativement suffisante pour répondre aux besoins.

Entre-temps, nous avons fait des efforts et obtenu des avancées dans les systèmes d’information. Les régimes ont pu mettre en place un suivi distinct en comptabilité des prestations versées par les régimes au titre du minimum contributif.

Ainsi, les montants de ces prestations différentielles seront retracés séparément des autres composantes des avantages de base d’ici à 2016. Ils ne seront plus évalués sur une base seulement statistique.

C’est cette évolution que traduit la mesure soumise à votre vote. Le montant de la prise en charge sera désormais exprimé en pourcentage de la dépense engagée par les régimes, cette clef étant fixée par décret.

Pour autant, et j’espère ainsi vous rassurer, le législateur n’est pas dessaisi : il demeure garant de l’équilibre entre le financement par les régimes et la contribution du Fonds de solidarité vieillesse. En effet, il est prévu que la prise en charge ne pourra pas être inférieure à 50 %.

Pour toutes ces raisons, je sollicite le retrait de votre amendement, monsieur le rapporteur. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 80 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

M. Gérard Roche. C’est le dernier amendement que je présentais dans ce cadre ; je ne voudrais pas partir sur une mauvaise impression.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Je retire l’amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 80 est retiré.

Je mets aux voix l'article 63.

L'article 63 est adopté.

Pour l’année 2015, les prévisions des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de sécurité sociale sont fixées ainsi qu’il suit :

En milliards d’euros

Prévisions de charges

Fonds de solidarité vieillesse

L'article 64 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Nous reprenons le cours normal de notre discussion et en revenons aux articles du titre III.

Titre III

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL ET MALADIES PROFESSIONNELLES

I. – Le montant de la contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante est fixé à 380 millions d’euros au titre de l’année 2015.

II. – Le montant de la contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante est fixé à 693 millions d’euros au titre de l’année 2015.

III. – Le montant du versement mentionné à l’article L. 176-1 du code de la sécurité sociale est fixé à un milliard d’euros au titre de l’année 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 260 est présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 287 est présenté par Mme Archimbaud, MM. Desessard, Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante est constitué également d’une contribution, due pour chaque salarié ou ancien salarié à raison de son admission au bénéfice de l’allocation de cessation anticipée d’activité. Cette contribution est à la charge de l’entreprise qui a supporté ou qui supporte, au titre de ses cotisations pour accidents du travail et maladies professionnelles, la charge des dépenses occasionnées par la maladie professionnelle provoquée par l’amiante dont est atteint le salarié ou l’ancien salarié.

La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 260.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

La liste des établissements, actuellement fixée par arrêté ministériel, dans lesquels il faut avoir travaillé pour avoir droit à une cessation anticipée d’activité du fait de l’amiante est beaucoup trop restrictive selon nous, et il est urgent de la réactualiser.

Du fait de ce caractère restrictif, en effet, tous les salariés en contact avec l’amiante n’ont pas accès au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA. En accompagnant mieux ces salariés et en ouvrant la liste des établissements concernés, on permettra à un plus grand nombre d’entre eux de prétendre à ce fonds, ce qui exige évidemment de nouvelles recettes.

Dans cette perspective, cet amendement a pour but de rétablir la contribution des entreprises au financement des fonds de l’amiante mise en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et supprimée dans la loi de finances pour 2009. Il s’agit donc, vous l’aurez compris, à la fois de dégager des moyens et de responsabiliser les entreprises dont les salariés travaillent au contact de l’amiante.

Cet amendement a été refusé à l'Assemblée nationale au motif que cette contribution ne rapportait pas assez : 68 millions d’euros en 2005, l’année de sa mise en œuvre, 21 millions d’euros en 2006 et 33 millions d’euros en 2007, alors que le triple était attendu lors de la mise en œuvre de cette contribution, soit 120 millions d’euros.

Lorsque, dans le même temps, vous ponctionnez l’encours de précaution de l’ONIAM à hauteur d’une vingtaine de millions d’euros parce que ses réserves sont jugées excessives, alors que l’on ne connaît même pas le nombre de victimes à venir, prétendre que la contribution patronale au FCAATA ne rapporte pas assez est pour le moins incompréhensible.

Je souligne que 91 % des maladies de l’amiante ayant donné lieu à un arrêt de travail se sont accompagnées de la reconnaissance d’une incapacité permanente. C’est pourquoi il est normal et logique que les employeurs participent à ce fonds.

Tel est le sens de l’amendement, que nous vous proposons d’adopter.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 287.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mon amendement étant identique à celui que vient de présenter M. Watrin, nos arguments vont se rejoindre.

Le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, créé en 1999, est indispensable pour que les milliers de travailleurs exposés à l’amiante au cours de leur vie professionnelle aient la possibilité d’arrêter leur activité de façon anticipée. Pour vous donner un chiffre concret, plus de 30 000 personnes étaient indemnisées par ce fonds à la fin de 2010.

Quelles sont les conditions pour recevoir cette allocation ? Être victime d’une maladie professionnelle liée à l’amiante ou avoir travaillé dans des établissements à risque élevé figurant sur les listes d’établissements fixées par arrêté. Cette liste est toutefois très restreinte et ne couvre absolument pas l’ensemble des travailleurs malades de l’amiante ou qui risquent très fortement de l’être.

Tous les établissements dont les travailleurs ont été exposés à l’amiante doivent contribuer à alimenter le Fonds. Avec cet amendement, nous demandons que la contribution des entreprises au financement des fonds de l’amiante, qui avait été créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et supprimée en 2009, soit rétablie. Il faut s’assurer que son recouvrement soit facilité et éviter les écueils qui avaient mené à sa disparition il y a cinq ans.

Nous demandons cela pour deux raisons : d’abord, parce qu’il est normal que les entreprises responsables contribuent ; ensuite, pour que tous les travailleurs puissent avoir enfin accès à l’allocation de cessation d’activité anticipée des travailleurs de l’amiante.

L’extension de l’accès à cette allocation est une mesure fondamentale de justice sociale pour des milliers d’artisans, intérimaires, fonctionnaires, travailleurs du désamiantage ou chargés des diagnostics qui sont malades de l’amiante, ou risquent de l’être, et qui ne peuvent pas être indemnisés.

Cette mesure avait déjà été préconisée en octobre 2005 dans le rapport de la mission commune d’information du Sénat sur l’amiante. Pourtant, le rapport du comité de suivi rendu public en juillet dernier montre bien que rien n’a encore été fait, dix ans après !

Il ne faut plus attendre, au vu du nombre de personnes potentiellement concernées !

(Sourires.), auquel cas nous retirerions l’amendement, après la lecture du décret en question, comme cela s’est produit précédemment.

M. Dominique Watrin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, à moins que Mme la secrétaire d’État n’ait déjà un décret en préparation §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Comme l’ont rappelé MM. Watrin et Desessard, à l’origine, il était prévu que les entreprises qui avaient utilisé de l’amiante participent au financement du FCAATA. Il s’agissait de donner une préretraite aux personnes qui avaient été en contact, dans leur travail, avec l’amiante.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Cette disposition figurait dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.

Mais, en 2009, nous avons voté – autant que je m’en souvienne à une quasi-unanimité – la suppression de cette cotisation parce que nous nous sommes rendu compte que les fonds ne rentraient pas. En effet, bon nombre d’entreprises qui auraient dû cotiser soit avaient disparu, soit contestaient en justice leur contribution. Les choses traînaient et, par ailleurs, cela coûtait fort cher.

Nous avons donc estimé qu’il valait mieux supprimer une cotisation, certes due par les entreprises, mais qui ne rapportait rien et dont le recouvrement posait problème.

Je vous rappelle que la contribution pour les maladies professionnelles et accidents du travail est financée uniquement par les entreprises, les cotisations étant payées par l’ensemble des entreprises. Or, il faut bien le reconnaître, étant donné la situation économique générale, il n’est pas forcément judicieux de leur imposer une cotisation supplémentaire. J’ai rappelé l’ensemble des raisons pour lesquelles, à mon avis, le moment serait mal choisi pour rétablir à la charge des entreprises une cotisation qui ne servirait finalement pas à grand-chose, sauf à pénaliser certaines d’entre elles, et à entraîner des charges beaucoup plus importantes que le produit de la cotisation prévue à l’origine.

Je rappelle qu’en 2006 ou en 2007 j’avais proposé d’augmenter la cotisation payée par les entreprises, mais, l’année suivante, le rendement avait été encore moins élevé... Vous voyez que cette proposition ne se justifie pas puisque, de toute façon, le Fonds est alimenté par l’ensemble des entreprises.

Voilà pourquoi j’ai émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

L’article 58 du présent projet de loi fixe à 693 millions d'euros par an la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, ce que l’on appelle en général « la préretraite amiante ».

Ces deux amendements identiques visent à rétablir la contribution acquittée par les entreprises et les entreprises productrices d’amiante.

Comme M. Dériot l’a expliqué, si, à un moment donné, cette contribution a été abandonnée, c’est parce qu’elle présentait trop de défauts, le principal étant la difficulté de son recouvrement et la faiblesse de son produit. Elle avait comme autre inconvénient d’être un frein à la reprise des sites.

Or, mesdames, messieurs les sénateurs, l’amiante étant interdite depuis 1997, plus on s’éloigne de la période d’utilisation intensive de l’amiante, moins le rétablissement de la contribution aurait de sens.

Cela étant, et j’attire votre attention sur ce point, cela n’enlève rien à la responsabilisation des employeurs dans le cas de l’amiante, qui continue d’exister. C’est le sens de vos amendements : les entreprises qui ont fait travailler des salariés dans des conditions d’exposition à l’amiante ayant eu des conséquences sanitaires terribles doivent être appelées, aujourd'hui, à les dédommager. C’est toute l’utilité de la reconnaissance de la faute inexcusable, qui concerne dans près de 40 % des cas des maladies professionnelles imputables à l’amiante.

Par conséquent, la notion de faute inexcusable rend la maladie professionnelle encore plus responsabilisante pour l’entreprise.

Pour toutes ces raisons, nous pensons que le rétablissement de cette contribution n’aurait pas les résultats escomptés, hormis sur le plan symbolique, et les salariés victimes de l’amiante n’y trouveraient pas d’avantages supplémentaires en termes de prise en charge et de réparation de leurs souffrances.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

M. Francis Delattre. Madame la secrétaire d’État, l’amiante a malheureusement une nouvelle actualité dans la gestion de nos communes. Depuis dix ans, en effet, nous menons des opérations de désamiantage et ceux qui, ici, gèrent des communes savent que toutes leurs voiries ou presque sont imprégnées d’amiante. Or les entreprises qui ont à intervenir sur la voirie commencent par nous demander une étude générale afin d’évaluer les risques pour leurs propres employés.

MM. Claude Dilain et Jean Desessard opinent.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Mais pourquoi trouve-t-on des traces d’amiante dans le bitume d’aujourd’hui ? Parce que les graviers issus de la démolition de bon nombre de bâtiments contenant de l’amiante ont été retraités et incorporés, naturellement avec le pétrole et tout le reste, dans le bitume.

C’est un cercle infernal !

Aujourd’hui, pour l’ensemble des communes, c’est un vrai problème. Les études de voirie ne coûtent pas moins de 300 000 ou 400 000 euros et, si vous n’avez pas l’étude qui révèle le degré d’amiante, les entreprises refusent d’intervenir. Or ceux qui font du bitume, du « noir » comme ils disent, je peux vous dire que nous les connaissons tous, ce sont toujours les mêmes ; on les retrouve d’ailleurs plus ou moins derrière toutes ces réglementations et ce sont les premiers à venir trouver les maires pour réclamer ces études au nom de la protection de leurs propres salariés.

L’amendement de mon ami écologiste est donc presque d’actualité. Peut-être ne pouvons-nous pas le voter in extenso, mais il n’en reste pas moins que nous sommes confrontés à un vrai problème de coût. Lorsqu’il faut intervenir sur une voirie en mauvais état qui recèle de l’amiante, cela coûte moitié plus cher.

Nous sommes au Sénat, où l’on traite habituellement des problèmes des collectivités territoriales. Or voilà un cas concret.

J’aimerais donc que la commission étudie une solution nous permettant, chers collègues, de faire face à cette situation nouvelle. Car, là, nous allons avoir besoin d’un fonds, ne serait-ce que pour comprendre l’origine du problème.

Il est tout de même incroyable que le recyclage ait été utilisé en partie pour fabriquer un bitume qui aujourd'hui contient de l’amiante. Il faut réagir !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Monsieur Delattre, la contribution dont nous parlons ici a exclusivement pour objet d’alimenter le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante. Or le FCAATA s’adresse à ceux qui sont aujourd’hui en vie et leur nombre va d'ailleurs en diminuant d’année en année. C’est le signe que certains des travailleurs qui ont été en contact avec l’amiante sont malheureusement décédés, mais aussi qu’il y a de moins en moins de personnes contaminées.

La récente découverte qui a été faite de la présence d’amiante dans les bitumes utilisés pour la voirie pose en effet un problème. Mais on ne va pas dès aujourd’hui faire bénéficier de l’allocation de cessation anticipée d’activité ceux qui aujourd’hui travaillent sur les voiries de ce type ! D’autres solutions seront trouvées ultérieurement pour indemniser ces personnes, si nécessaire.

Les fonds amiante n’ont pas non plus pour objet d’aider les entreprises ou les collectivités à se débarrasser de l’amiante. Ils servent exclusivement à indemniser les personnes qui sont contaminées…

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

… ou qui, ayant travaillé au contact de l’amiante, vont l’être dans un certain nombre d’années. Il sera temps de revoir cette question ; le Fonds existe et est alimenté, et l’argent disponible servira à ceux qui sont dans la situation de pouvoir prendre leur retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

J’ai particulièrement apprécié l’intervention de mon collègue Francis Delattre, qui souligne que le problème est encore plus grave parce que récurrent. On croit en avoir fini avec l’amiante, mais on s’aperçoit, en raison de nos modes de recyclage, que le risque de contamination perdure.

Je pense comme lui qu’il serait très intéressant, au-delà même de ces amendements, de créer une commission pour examiner le problème à l’échelle de l’ensemble des secteurs d'activité dont les salariés risquent d’être contaminés par l’amiante.

La commission des affaires sociales pourrait, me semble-t-il, s’emparer de cette idée pour ne pas s’en tenir aux difficultés actuelles, mais justement envisager les problèmes que l’amiante pourrait poser à l’avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

L’intervention de notre collègue Delattre nous fait réagir.

Le problème de l’amiante est en effet bien plus large qu’il n’y paraît aujourd’hui. Nous devrons demain prendre en charge ces personnes aujourd’hui soumises à des conditions de travail telles que c’est leur vie qui est en jeu. Alors, j’entends bien que le coût sera élevé pour nos collectivités territoriales, mais les salariés, eux, vont y perdre la vie !

Il faut bien avoir conscience que, avec 100 000 morts à l’horizon 2020, l’amiante est un véritable fléau. Il y a différentes possibilités pour répondre à ce problème.

Pour notre part, nous avons fait cette proposition d’alimenter plus largement le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA, par une contribution des entreprises. Mais, comme l’a relevé le rapporteur, cela ne concernera que les travailleurs en cours de cessation d’activité. D’autres seront concernés demain.

Une proposition intéressante pourrait consister à créer enfin cette voie d’accès complémentaire que nous appelons de nos vœux, mais dont nous ne pouvons proposer la création ici sous forme d’amendement, car cette mesure aurait évidemment un coût pour le budget de l’État, et l’on nous opposerait l’article 40.

D’autres pistes doivent être creusées pour permettre aux salariés et aux travailleurs de l’amiante de bénéficier d’une véritable indemnisation du préjudice subi. C'est la raison pour laquelle il faut, mes chers collègues, adopter cet amendement, même s’il entraînera un coût pour les entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Je rappelle à MM. Delattre et Desessard qu’un comité de suivi sur l’amiante avait été créé par la commission des affaires sociales. Présidé par Mme Archimbaud, il a rendu en juillet dernier un rapport extrêmement complet sur le sujet.

Mes chers collègues, je vous invite à lire ce rapport, qui traite de tous les problèmes, y compris de la voirie et du désamiantage. Nous pourrions nous appuyer sur ce document non pas pour créer un deuxième comité de suivi – ce n’est pas nécessaire -, mais pour élaborer des propositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je mets aux voix les amendements identiques n° 260 et 287.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 58 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 288, présenté par Mme Archimbaud, MM. Desessard, Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 58

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport portant sur les modalités et le coût de l’extension de l’allocation de cessation anticipée des travailleurs de l’amiante à tous les travailleurs ayant été exposés à l’amiante, y compris les artisans, les fonctionnaires et les intérimaires, est rendu aux parlementaires au plus tard le 1er octobre 2015.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Le comité de suivi « amiante » de la commission des affaires sociales du Sénat que présidait ma collègue Aline Archimbaud – le président de la commission l’a évoqué à l’instant – a effectivement rendu son rapport en juin dernier. Le constat est sans appel : l’amiante est à l’origine d’une catastrophe sanitaire majeure.

Ce matériau est responsable de 9 % des maladies professionnelles et de 76 % des décès liés à une maladie professionnelle en 2011, selon l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante, l’ANDEVA.

La question de l’indemnisation des victimes est donc centrale. Des dispositifs existent déjà, notamment l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante.

Je l’ai dit, pour bénéficier de cette allocation, il faut être victime d’une maladie professionnelle liée à l’amiante ou avoir travaillé dans des établissements à risque élevé figurant sur les listes d’établissements fixées par arrêté, listes bien trop restrictives. Cela est d’autant plus vrai que de nouveaux métiers risquent d’être concernés par les maladies de l’amiante, notamment ceux du désamiantage et du diagnostic « amiante ».

Avec cet amendement, nous demandons qu’un rapport sur le coût et les modalités d’une telle réforme soit rendu aux parlementaires avant le 1er octobre prochain, pour que nous puissions, ainsi que le Gouvernement, avoir tous les éléments en main pour mettre en place un dispositif complémentaire de la meilleure façon et dans les meilleurs délais.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Une demande similaire a déjà été formulée : la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 prévoyait qu’un rapport devait être remis avant le 1er juillet 2013. Ce rapport n’a toujours pas été rendu…

Ce document nous permettrait justement de mesurer le coût de la prise en charge des travailleurs qui ont été en contact avec l’amiante dans des entreprises ne figurant pas sur la liste qui seule permet de leur reconnaître le statut d’anciens travailleurs de l’amiante.

J’ai d’ailleurs évoqué ce problème lors de la discussion générale. Nous souhaiterions, madame la secrétaire d’État, disposer très rapidement de cette étude, pour voir s’il est envisageable, et dans quelles conditions, de couvrir certaines personnes qui n’ont pas forcement travaillé dans des entreprises figurant sur la liste arrêtée à cet effet.

Il est vrai que nous avons de plus en plus d’intérimaires qui se sont trouvés exposés à l’amiante, notamment sur des chantiers, ou qui travaillent dans des entreprises de l’amiante. Il est compliqué de reconstituer leur carrière pour les intégrer dans le dispositif et, de toute façon, ils ne travaillent souvent pas pour des entreprises figurant sur la liste.

C’est pourquoi il nous semble maintenant extrêmement urgent que cette étude puisse nous être fournie, afin que nous en discutions et que nous essayions de trouver des solutions.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Mesdames, messieurs les sénateurs, l’amiante est une catastrophe sanitaire à laquelle notre pays a été particulièrement exposé, probablement parce qu’il était l’un des principaux producteurs d’amiante, et l’un des principaux utilisateurs, aussi. De ce fait, il a, pendant de longues années, soit ignoré soit nié une partie des conséquences sanitaires.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Comme ce sont les travailleurs qui sont essentiellement touchés, disons-le clairement, c'est une catastrophe sanitaire « de classe ». L’ensemble des dépenses liées à l’amiante – la cessation d’activité et la prise en charge des maladies professionnelles – mobilisent aujourd’hui 18 % du budget consacré aux accidents du travail et aux maladies professionnelles. Ce pourcentage montre l’ampleur du problème, mais aussi l’importance de l’engagement dans l’indemnisation des salariés atteints des maladies consécutives à une exposition à l’amiante.

Vous avez évoqué le rapport voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, en soulignant qu’il aurait dû être remis en juillet 2013. Je ne sais pas si je serai crue sur parole, car je n’ai pas dans ma poche, comme précédemment, un décret daté et signé, mais mes services m’ont indiqué que ce rapport sera finalisé et remis au Parlement avant le 20 décembre prochain.

Dans ces conditions, ajouter un rapport supplémentaire sur la question n’apparaît pas nécessaire, car cela n’accélérera pas forcément la sortie du premier… Il n’est sans doute pas très efficace de voter une mesure identique quand la précédente n’a pas été suivie d’effet dans les délais impartis !

En outre, le Gouvernement a souhaité que les fonctionnaires et agents publics ayant développé une maladie professionnelle reconnue en lien avec l’amiante aient droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité. Des travaux interministériels sont actuellement en cours sur cette question.

Les travailleurs indépendants et les artisans ont, eux, leur propre régime de protection sociale. C'est dans le cadre du Régime social des indépendants qu’un dispositif doit être mis en place. Comme il suppose une majoration des prélèvements obligatoires demandés aux intéressés, la décision relève du RSI.

Monsieur le sénateur, je vous suggère, dans un premier temps, de retirer votre amendement et, dans un deuxième temps, de me faire confiance quant à la date de remise du rapport. À défaut de retrait, je serai obligée d’émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur Desessard, l'amendement n° 288 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

J’étais inquiet d’entendre le rapporteur parler d’un rapport à paraître avant le 1er juillet 2013. En fait, ce rapport n’a jamais été remis. Me voilà rassuré : il ne m’avait pas échappé !

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de vos explications. Vous m’avez demandé de retirer d’abord mon amendement et de vous faire confiance ensuite. Je me permettrai d’inverser l’ordre des choses : je vous fais confiance pour la parution du rapport en 2014 et, en conséquence, je retire mon amendement !

Sourires.

I A

« 2° Une indemnité journalière pour les chefs ou les collaborateurs d’exploitation ou d’entreprise agricole, les aides familiaux et les associés d’exploitation, pendant la période d’incapacité temporaire de travail ; ».

I. – L’article L. 752-5 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :

« Art. L. 752 -5. – Bénéficient d’indemnités journalières pendant la période d’incapacité temporaire de travail :

« 1° Les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole mentionnés au 1° de l’article L. 722-4 ;

« 2° Les collaborateurs d’exploitation ou d’entreprise agricole mentionnés à l’article L. 321-5 ;

« 3° Les aides familiaux et les associés d’exploitation mentionnés au 2° de l’article L. 722-10.

« Les indemnités journalières sont servies à l’expiration d’un délai, déterminé par décret, à compter du point de départ de l’incapacité de travail et pendant toute la période d’incapacité de travail qui précède soit la guérison complète, soit la consolidation de la blessure ou le décès, ainsi que dans le cas de rechute prévu au chapitre III du titre IV du livre IV du code de la sécurité sociale.

« L’indemnité est égale à une fraction du gain forfaitaire annuel fixé par arrêté des ministres chargés de l’agriculture et de la sécurité sociale. Elle est majorée à l’issue d’une période d’incapacité fixée par décret. Elle est incessible et insaisissable. »

II. – L’attribution d’indemnités journalières aux personnes mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 752-5 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de la présente loi, est applicable aux arrêts de travail prescrits à compter du 1er janvier 2015. –

Adopté.

Pour l’année 2015, les objectifs de dépenses de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles sont fixés :

1° Pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, à 13, 5 milliards d’euros ;

2° Pour le régime général de la sécurité sociale, à 12, 1 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

L’article 60 fixe les objectifs de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles pour 2015.

Nous souhaitons ici aborder l’énorme manque à gagner, évalué entre 587 millions et 1, 1 milliard d’euros, qu’entraînent pour cette branche la sous-évaluation et la sous-déclaration des maladies professionnelles.

Ainsi que l’a clairement souligné le rapport Diricq en 2011, plusieurs facteurs concourent à ce phénomène. D’abord, les accidents du travail doivent être déclarés par l’employeur à la caisse de sécurité sociale compétente, tandis que les maladies professionnelles doivent l’être par la victime.

La réticence de certains employeurs à déclarer les accidents du travail peut s’expliquer par leur souci d’éviter une hausse de leurs cotisations AT-MP.

Le rapport Diricq note également des comportements de dissimulation induits par la volonté de ne pas afficher des taux de sinistralité élevés ou en hausse : non-déclaration d’accident, pression sur les salariés, accompagnement du salarié chez le médecin par une personne de l’entreprise et prise en charge des soins par cette dernière, pression sur les médecins de ville pour qu’ils n’accordent pas d’arrêts de travail au motif que le salarié se verra proposer un poste aménagé, etc.

Quant à la sous-déclaration des maladies professionnelles, elle résulte, pour une large part, du manque d’information des victimes, qui ne connaissent pas toujours la nocivité des produits qu’elles manipulent ni leurs droits au regard de la sécurité sociale. Un salarié peut également s’abstenir de déclarer une maladie professionnelle par crainte de perdre son emploi, ce qui est assez fréquent. La complexité des démarches de reconnaissance et le caractère forfaitaire de la réparation offerte par la branche AT-MP peuvent enfin conduire certaines victimes à estimer qu’il est préférable sur le plan financier d’emprunter une autre voie d’indemnisation.

Par ailleurs, il faut souligner l’insuffisance de la formation, et même de l’information des médecins de ville comme des praticiens hospitaliers, ainsi que le manque criant, bien connu, de médecins du travail.

Enfin, une maladie est reconnue d’origine professionnelle si elle figure dans un tableau fixé par décret en Conseil d’État ou si le salarié est reconnu atteint d’une maladie professionnelle par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dont l’avis s’impose à la caisse de sécurité sociale. Cependant, cette procédure peut ne pas être exempte de défaillances. On parle de 10 000 à 40 000 cancers professionnels, d’origine professionnelle donc, dont une petite partie seulement est reconnue. Et que dire des problèmes de surdité ou des maladies musculo-squelettiques ?

Il faut tout de même savoir que 20 % des dépenses de santé seraient imputables à des causes professionnelles !

Au lieu donc d’exonérer de cotisations sociales tous azimuts les entreprises, nous pensons qu’il faudrait, au contraire, les responsabiliser et mettre en place les outils pour lutter contre ces phénomènes qui n’incitent pas à la prévention et « plombent » les comptes de la sécurité sociale.

Pour terminer, je voudrais vous interroger, madame la secrétaire d’État, sur une mesure concrète qui pourrait facilement être mise en œuvre dès lors qu’une volonté politique serait exprimée en ce sens.

Lorsque plusieurs salariés déclarent une même maladie alors qu’ils occupent le même poste de travail, il faudrait à tout le moins s’interroger sur la nocivité dudit poste et pousser l’entreprise à le faire évoluer pour éliminer le risque. C’est une mesure de bon sens qui n’est que rarement mise en pratique. L’assurance maladie a pourtant déjà tout en main pour le faire : elle collecte et enregistre depuis des années la liste des postes pathogènes. Toutefois, elle ne les rend pas publics et ne fait rien pour constituer ce qui pourrait être une sorte de cadastre des risques avérés.

Faisons bouger ces pratiques, à l’exemple de la région PACA dans le plan régional santé-environnement 2009-2013. Les membres de mon groupe considèrent que ce serait un bon moyen de mettre un terme à des dégâts humains et financiers qui n’ont que trop duré.

L'article 60 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Titre IV

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA BRANCHE FAMILLE

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 89, présenté par MM. Rachline et Ravier, est ainsi libellé :

Avant l’article 61 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « pour les familles dont un parent au moins est français ».

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 176, présenté par Mmes Keller et Cayeux, M. Delattre, Mme Canayer, MM. Cardoux et Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Milon, Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Avant l’article 61 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er avril 2015, un rapport présentant une évaluation de l’impact financier, économique et social de la réforme de la prestation partagée d’éducation de l’enfant prévue par l’article L. 531-4 du code de la sécurité sociale, consistant à réserver le bénéfice de la prolongation de la durée de versement de la prestation au second parent.

La parole est à Mme Fabienne Keller.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Il est ici question du complément de libre choix d’activité, ou CLCA, autrement dit le congé parental, somme versée aux familles dont l’un des deux parents a choisi de diminuer ou de cesser son activité pour se consacrer à l’éducation de son enfant de moins de trois ans.

Créée en 1985, cette prestation a été consolidée par la deuxième « loi Veil », qui l’a étendue aux familles de deux enfants et plus.

La récente loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes prévoit une diminution du congé parental, au profit de l’autre parent. Sous prétexte d’inciter les pères à prendre un congé parental, en leur réservant une période de six, douze ou dix-huit mois – on ne sait pas très bien – sur les trente-six mois du CLCA, le Gouvernement s’apprête à prendre une décision qui aura des conséquences importantes.

C'est la raison pour laquelle les membres du groupe UMP vous proposent d’adopter cet amendement, tendant à la réalisation d’une étude d’impact pour en évaluer les conséquences financières, économiques et sociales.

D'abord, une étude d’impact s’impose pour évaluer les conséquences financières de la décision du Gouvernement, laquelle réduira, de fait, la durée du congé parental. Je rappelle qu’il s’agit non pas d’une simple incitation, mais d’une vraie contrainte, et que le Gouvernement procédera par voie réglementaire.

De manière assez cynique, le Gouvernement évalue l’économie ainsi réalisée à 170 millions, 250 millions ou 490 millions d’euros, suivant que l’évaluation émane de la Direction de la sécurité sociale ou du Trésor. Ces prétendues économies seront compensées par un recours accru aux modes de garde pendant l’année de soudure à laquelle les familles seront à tout coup contraintes.

Ensuite, une étude d'impact s’impose pour évaluer les conséquences économiques et, surtout, sociales d’une telle décision. En effet, les femmes, qui prennent 96 % des congés parentaux et sont 492 000 à prendre un congé parental, vont être victimes d’une double peine : déjà payées, en moyenne, 27 % de moins que leurs collègues hommes assurant la même mission, elles ne bénéficieront plus d’aucune souplesse dans leur choix de vie pendant la totalité de la durée de leur congé et jusqu'à l’entrée de leur enfant en école maternelle.

Madame la secrétaire d'État, votre gouvernement ne s’y est pas trompé : vous avez changé le nom du dispositif et ce qui était une « allocation de libre choix » est devenu une « prestation partagée d’éducation de l’enfant », ou PréPaRe.

Or, comme plusieurs études l’ont démontré, une grande partie des femmes qui en bénéficient aujourd'hui travaillent en horaires décalés ou déstructurés, notamment à temps partiel – des formes de travail incompatibles avec les modes de garde existants et peu adaptés à un bon rythme de vie familiale. L’allégement de l’activité professionnelle permet à ces femmes d’accompagner librement leur famille, tout en gardant le droit au retour au plein emploi.

Pour les parents, en particulier pour les mères, le congé parental est un choix, celui de concilier vie familiale et vie professionnelle. C’est aussi un droit au retour vers la vie professionnelle, qui les protège.

C'est la raison pour laquelle l’amendement que je présente, avec Caroline Cayeux, Francis Delattre, Alain Milon et l’ensemble des sénateurs du groupe UMP, vise à alerter le Gouvernement sur l’impact considérable qu’aurait la poursuite de cette réforme : 500 000 familles sont concernées.

Madame la secrétaire d'État, je ne cache pas que cet amendement tend aussi à permettre un débat sur ce sujet extrêmement important. En effet, il est impératif de prendre en compte toutes les conséquences d’une telle décision avant que celle-ci ne soit validée par votre gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, dont l’adoption lui permettrait de disposer d’une évaluation sérieuse de l’impact de la mesure. En effet, nous ne sommes pas tout à fait convaincus que celle-ci permettra de réaliser des économies qui soient intéressantes pour la branche famille.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Madame Keller, je répondrai d'abord à votre demande de rapport, puis je reviendrai sur la discussion que vous avez ouverte, bien légitimement. D’ailleurs, c’est votre demande de rapport qui nous permet de débattre d’une mesure qui, comme vous l’avez indiqué, est de nature réglementaire.

L’article de la loi du 4 août 2014 dont nous débattons a été préparé par une étude d'impact, qui répondait déjà aux questions que vous soulevez aujourd'hui et à laquelle nous n’avons pas grand-chose à ajouter. En revanche, je peux vous dire que le Haut Conseil de la famille, dans le cadre de ses travaux réguliers, étudiera la façon dont les familles vont s’approprier la réforme, comme il l’a déjà fait, à plusieurs reprises, pour d’autres réformes.

Par conséquent, je ne suis pas sûre que votre demande de rapport soit réellement justifiée. Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement.

En ce qui concerne le complément de libre choix d’activité, le CLCA, devenu la PréParE, vous n’êtes pas tout à fait remontée assez loin dans le temps : vous être remontée à la deuxième loi Veil, mais peut-être eût-il fallu remonter jusqu’à la loi Dufoix.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Elle remonte à loin ! C’étaient mes débuts…

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

À cet égard, je ne peux pas m’empêcher de souligner que c’est la gauche qui a porté ces réformes, comme elle a porté beaucoup d’autres réformes relatives aux allocations familiales et à la politique familiale. Je rappelle également que la mise en place du CLCA, qui s’appelait, à l’époque, « allocation parentale d’éducation », revient à Georgina Dufoix, alors ministre des affaires sociales. C’était en 1984, si ma mémoire est bonne.

La prestation était versée à la naissance du troisième enfant. Autrement dit, à l’origine, cette prestation n’est pas totalement dépourvue d’une dimension nataliste. Elle prend acte du fait qu’un certain nombre de femmes – il nous faut bien reconnaître, pour le déplorer, et nous sommes toutes d’accord sur ce point, que la mesure vise essentiellement les femmes, seules à s’investir à ce point dans l’éducation des enfants – se retirent du marché du travail à la naissance de leur troisième enfant et qu’il faut les accompagner.

Cette prestation était versée pendant deux ans, durée jugée raisonnable, à l’époque – cela n’a pas changé –, pour éviter un impact négatif sur l’activité professionnelle des femmes.

La deuxième « loi Veil », qui date de…

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

… 1994, en effet, étend cette prestation à la naissance du deuxième enfant et allonge la durée de la prestation à trois ans.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette contribution au débat, mais sachez que les socialistes ont beaucoup soutenu Mme Veil au moment où il importait de le faire, en 1974 !

Marques d’approbation sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Pour en revenir à la loi de 1994, on a alors observé que l’allongement et le déclenchement du dispositif à la naissance du deuxième enfant avaient contribué à faire sortir 150 000 femmes du marché du travail : trois ans après la fin du versement de la prestation, ces femmes n’avaient pas réintégré le monde du travail.

Voilà pour l’histoire du CLCA.

Autre remarque : c’est en France que le CLCA est le plus long, le moins partagé et le moins bien rémunéré. D’ailleurs, je suis absolument convaincue que ces trois caractéristiques sont corrélées : c’est parce que le CLCA est pris par les femmes qu’il est moins rémunéré qu’ailleurs et qu’il est plus long. C’est encore parce qu’il est plus long qu’il est moins rémunéré qu’ailleurs…

Il est clair que la bonne solution résiderait dans un CLCA beaucoup plus court et mieux rémunéré. Cependant, l’impact budgétaire serait alors très important et incompatible avec les efforts que nous consentons aujourd'hui. C’est visiblement ce que l’on a aussi pensé ces dernières années, car il n’a à aucun moment été proposé de mieux rémunérer le CLCA et d’en réduire la durée.

Dans un des pays probablement les plus exemplaires en matière de partage des responsabilités parentales entre les hommes et les femmes, l’Islande, le CLCA est de neuf mois – trois mois pour la mère, trois mois pour le père et trois mois supplémentaires, au choix, pour l’un des deux – et il est mieux rémunéré – en général, sous un plafond fixé à 60 %.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Chez nous, le CLCA a un effet négatif sur le travail des femmes : il est trop long et les exclut durablement du marché du travail. Telles sont les raisons qui nous conduisent aujourd'hui, madame la sénatrice, à agir sur le CLCA.

En effet, nous préférons engager des dépenses importantes et des investissements sur les modes d’accueil des jeunes enfants. Je reviendrai sur ce choix.

La mesure relevant du domaine réglementaire, nous avons, en définitive, opté pour un partage qui nous semblait raisonnable : vingt-quatre mois pour un parent et douze mois pour l’autre. Pour vous donner un élément de comparaison, sachez que la durée moyenne du CLCA est aujourd'hui de vingt-sept mois. Autrement dit, la PréParE n’est que de trois mois plus courte, pour l’un des parents.

Pour me résumer, le Gouvernement est défavorable à l’amendement, estimant que le rapport demandé serait inutile.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Madame la secrétaire d’État, ce que vous nous présentez – partager le CLCA pour mieux impliquer les pères dans la vie familiale – est intéressant.

Toutefois, votre démonstration ne s’appuie pas sur la réalité des données que nous avons à notre disposition.

Aujourd'hui, la difficulté, dans notre pays, tient au fait que la rémunération des femmes est plus faible que celle des hommes. Des batailles ont été menées, des politiques ont été conduites, en faveur, notamment, de l’égalité professionnelle, mais, dans les faits, les femmes ont toujours des petits salaires, des petits boulots et des temps partiel. Or la personne du foyer qui prendra le congé parental est celle qui a le plus petit salaire. Et, dans les faits, ce n’est pas l’homme !

D’un point de vue philosophique, votre mesure peut donc être intéressante. Dans cette enceinte, nous sommes nombreux à penser qu’il faut travailler sur les mentalités et envoyer des signaux forts. Mais, en l’occurrence, la réalité économique est celle de profondes inégalités salariales.

Au bout du bout, même si les intentions étaient louables, cette mesure conduira, par effet confiscatoire, à réaliser des économies, en privant les femmes d’un temps de congé que les hommes ne prendront pas.

Ne nous faites donc pas croire que les choses pourront changer de cette façon ! Pour bouger les choses - appelons un chat un chat - il faut mener une politique dynamique, augmenter les petits salaires, le SMIC…

Quant à nous, nous dénonçons une mesure qui n’aidera ni la femme, ni l’homme, ni les couples, ni les familles !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Voilà des années que le Sénat débat des femmes qui, à l’issue d’un congé parental, doivent reprendre leur activité.

Voilà des années que j’explique à des gouvernements de droite qu’il faut faire des efforts pour ces femmes qui, ayant pris un congé parental et dont l’enfant va avoir trois ans, ne peuvent reprendre une activité faute de place à l’école maternelle – en région parisienne, en particulier dans mon département, l’école maternelle refuse les enfants qui viennent d’avoir trois ans.

Mais je n’ai jamais réussi, ici, à faire émerger des solutions telles qu’un prolongement du congé parental non indemnisé, par exemple, ce qui permet au parent de conserver son emploi.

La décision que vous avez prise, madame la secrétaire d’État, est pire encore ! Les femmes vont se retrouver avec des enfants de deux ans et, si le père n’a pas envie de prendre le congé ou n’est pas en mesure de le faire, elles n’auront aucune solution.

Sachez qu’en région parisienne – dans mon département, par exemple –, il n’y a pas de place en crèche pour les enfants de deux ans ! D’autres enfants ont intégré les structures à l’âge de trois ou quatre mois, et continuent d’y être accueillis au fil de leur développement. Donc ni place en crèche ni place à l’école maternelle, même en ZEP !

Que va produire cette mesure ? C’est très simple ! Vous allez pousser un certain nombre de femmes à démissionner pour pouvoir rester à la maison, et ces femmes seront, non pas temporairement, mais définitivement écartées du monde du travail. Après deux ou trois années sans emploi, elles ne parviendront jamais plus à en retrouver un !

Donc, j’y insiste, la mesure pour laquelle vous avez opté est pire encore. D’ailleurs, quand elle a été décidée, une seule image m’est venue à l’esprit, et c’était malheureusement celle de Pétain et de sa femme au foyer ! Est-ce cela votre ambition ? Peut-être espérez-vous ainsi diminuer le taux de chômage. Pour ma part, je m’oppose à cette mesure !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Pétain ? On ne nous l’avait jamais faite, celle-là !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Mes chers collègues, n’allons pas troubler, par des excès verbaux, le ton élevé et l’ambiance studieuse qui caractérisent, depuis le début de la semaine, l’examen de ce PLFSS.

Que dire de cet amendement, qui tend à demander l’élaboration d’un rapport ? Mme la secrétaire d’État a apporté, tant sur le fond que sur la forme, une réponse très claire.

Certaines institutions, tel le Haut Conseil de la famille, travaillent sur ces sujets et sont déjà en capacité de fournir des éléments chiffrés. Par ailleurs, sans clin d’œil ni malice, cette demande de rapport est étonnante quand, sur bon nombre de sujets, on nous fait valoir qu’il en existe déjà assez !

Mais certaines contradictions apparaissent également sur le fond.

On le sait, 96 % des bénéficiaires du complément dit de « libre choix d’activité » sont des femmes, ce qui, d’ailleurs, donne aux termes « libre choix » un caractère presque paradoxal. Mais les constats établis, que je partage, laissent apparaître deux positions : l’une consiste à considérer la situation actuelle comme une fatalité, un état de fait immuable ; l’autre à afficher une volonté de changement pour que, grâce à l’éducation et ce dès le plus jeune âge, on puisse aboutir à un réel partage des tâches, y compris des tâches éducatives et des rôles parentaux.

Il s’agit là d’une vision qui, plus qu’un projet ou un programme politique, doit nous encourager à essayer !

Le dispositif proposé me semble aller dans le bon sens, d’autant plus qu’il est assorti de mesures complémentaires concernant l’accueil de la petite enfance et la scolarisation précoce. Mis bout à bout, de manière élémentaire, ces différents dispositifs permettront de changer le système. C’est du moins ce que je pense, et ce que je souhaite !

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Il ne s’agit pas vraiment d’une explication de vote, monsieur le président, mais bien plutôt d’une interrogation.

Mme la secrétaire d’État a cité l’exemple de l’Islande, en précisant que ce système semblait être l’un des plus égalitaires au monde. Le congé parental y est découpé ainsi : trois mois pour le père, trois mois pour la mère et une rallonge possible de trois mois pour l’un ou l’autre. Mais comment, concrètement, les hommes et les femmes utilisent-ils la possibilité qui leur est offerte, madame la secrétaire d’État ? Le ratio s’établit-il à 50 % de femmes et 50 % d’hommes, ou retrouve-t-on une forte disparité entre les deux sexes ? En d’autres termes, comment le système qui nous a été décrit est-il mis en pratique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Vos réponses, madame la secrétaire d’État, suscitent de ma part quelques réflexions.

Vous avez rappelé que ce projet de congé parental a été porté par la gauche. Je l’ai moi-même indiqué ! Effectivement, la création remonte à 1985, mais le dispositif a été amplifié et conforté par la loi du 25 juillet 1994 relative à la famille, dite « loi Veil », notamment en permettant que le congé parental ouvre des droits à la retraite. Certes, le problème du niveau des retraites demeure, mais la question des annuités a été réglée.

Vous indiquez par ailleurs que nous disposons du congé parental le plus long, le moins partagé et le plus faiblement rémunéré. Mais la société française est telle qu’elle est ! C’est bien de se comparer à l’Islande, à la Suède ou à d’autres pays, mais il faut tenir compte de certaines réalités vécues !

À ce titre, je citerai ce résultat tiré d’une étude de la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, datant de quelques années déjà : 57 % des mères bénéficiant du congé parental estiment qu’un changement de conditions de travail leur aurait permis de continuer à travailler. C’est toute la question des femmes employées qui connaissent des horaires tardifs ou décalés, en soirée ou le samedi, notamment.

Il se trouve que j’ai beaucoup baroudé dans les quartiers, notamment les quartiers fragiles, d’une grande ville de France et je peux témoigner de ces mères qui ne sont pas à la maison à des heures où les enfants, eux, y sont.

S’agissant de l’investissement dans les modes d’accueil pour jeunes enfants, nous en sommes tous ravis ! Cela étant, le Gouvernement a atteint la moitié des objectifs de l’année. Or, comme vous le savez, madame la secrétaire d’État, les investissements des villes et des départements vont très fortement ralentir puisque vous avez « pompé » les fonds de la CNAF pour financer la réforme des rythmes scolaires. Cela a donné à toutes les collectivités locales un signal très clair de ralentissement des investissements sur les modes de garde, notamment les modes de garde collectifs, qui sont très coûteux.

Sur ce sujet, nous ne croyons plus du tout aux discours ! Comme l’a très bien dit Catherine Procaccia, nous ne croyons plus qu’aux actes ! En effet, nous rencontrons trop de jeunes femmes qui ne trouvent aucune solution correspondant à leurs besoins familiaux.

Vous aurez, en fin de compte, créé cette difficile année de soudure pour la mère, en limitant la durée du congé parental à deux ans, suivant la date précise de naissance de l’enfant, mais en laissant posée la question de la tension sur les modes de garde. In fine – Catherine Procaccia l’a également évoqué –, certaines femmes pourraient être contraintes de quitter leur emploi, ne pouvant plus bénéficier ni du congé parental ni du droit de retour dans l’emploi qui y est associé.

Je voudrais répéter que les femmes sont réellement victimes de la double peine ! Pourquoi demandent-elles le congé parental, et non les hommes ? Parce qu’elles sont moins payées et que l’allocation demeure très modeste – 590 euros par mois à taux plein ! Non seulement les femmes perçoivent des rémunérations plus faibles, mais on va désormais en plus les empêcher de reprendre leur carrière le moment venu. Comme si la contrainte allait changer cette réalité que nous regrettons, me semble-t-il, sur toutes les travées !

J’ai une deuxième conviction que je souhaite partager. De qui parlons-nous, mes chers collègues ? De femmes sans voix ! Nous pensons et théorisons le sort de femmes qui, non syndiquées, non représentées, ne s’expriment pas ! On ne les connaît pas ! On ne les entend pas ! Elles se débrouillent comme elles peuvent dans leur galère quotidienne, mais leurs solutions improvisées faites de bouts de ficelle et de solidarité de proximité les laissent tout de même parfois dans de réelles difficultés.

Bien sûr, l’élaboration d’un rapport n’est pas la panacée et d’autres rapports sont sans aucun doute établis. Pour autant, je tiens à vous signaler, madame la secrétaire d’État, qu’ayant cherché à creuser le sujet, j’ai été frappée par l’absence d’enquêtes très complètes, en tous cas qui ne soient pas relativement anciennes.

Quels sont, par exemple, les groupes homogènes ? Nous connaissons tous des parents qui ne prennent que quelques mois de congé parental, simplement pour en profiter un peu. Ils appartiennent, en règle générale, aux catégories socioprofessionnelles favorisées, dites CSP+. En revanche, d’autres utilisent le congé pendant trois années complètes, jusqu’à la soudure avec l’école maternelle. Certaines statistiques globales sont tellement grossières qu’elles n’ont plus aucune signification au regard de la diversité des réalités vécues.

Quoi qu’il en soit, aujourd'hui, 490 000 femmes ont jugé utile, pour leur équilibre familial, de recourir au congé parental, ce qui correspond à 490 000 familles, c'est-à-dire, en comptant deux enfants, en moyenne, par famille, environ 1 million d’enfants. De manière autoritaire, le Gouvernement a décidé de réduire ce congé d’un tiers. Ainsi, 150 000 familles – 300 000 enfants – vont voir très rapidement, dans un délai de deux à trois ans, leurs conditions de vie changer.

C’est pourquoi, madame la secrétaire d’État, je voudrais tenter de vous faire revenir sur ce choix, qui, étant de nature réglementaire, est entièrement entre vos mains.

Permettez-moi enfin de dire à ceux de nos collègues qui ne sont pas plus favorables aux rapports que je ne le suis moi-même en général, que, dans le cas présent, c’est le meilleur moyen, compte tenu de l’échéance du 1er avril 2015, d’exiger un véritable état des lieux sur ce sujet transversal, difficile à cerner et n’ayant fait l’objet, à ce jour, d’aucune évaluation correcte.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Pour ma part, je suis favorable à cette demande de rapport.

Sur le principe, je ne crois pas du tout à une égalité entre hommes et femmes qui serait fondée sur l’obligation faite à l’autre parent de prendre la suite du congé parental.

Par ailleurs, comme Mme Cohen l’a très bien décrit, nous sommes face à un déterminisme économique incontestable : c’est celui qui a le plus bas salaire qui s’arrêtera de travailler !

Il existe d’ailleurs un autre déterminisme, lié à la nécessité, le cas échéant, de trouver un mode de garde au moment où l’on renoue avec le monde du travail.

Effectivement, si l’on ne s’est pas inscrit en crèche ou si l’on n’a pas contacté d’assistante maternelle de manière très précoce, dès les premiers mois de l’enfant, il sera particulièrement difficile de trouver une solution de garde en cours de route, lorsque l’enfant aura atteint l’âge d’un an ou d’un an et demi. À partir de deux ans, on ne trouve carrément plus de solution de garde dans de nombreux territoires, qu’il s’agisse de banlieues ou de zones rurales.

Donc, sur le fond, je ne crois pas du tout à la solution du Gouvernement, regardant toujours avec une certaine suspicion les belles intentions d’égalité qui finissent en réductions de prestations.

Mais, surtout, quels sont les catégories sociales et les territoires concernés ? C’est là où le rapport serait utile.

En tant qu’ancienne élue de banlieue, et ancienne élue de la région Nord - Pas-de-Calais, je peux affirmer que le congé parental est utilisé par les femmes travaillant à temps partiel, celles qui ont le plus bas niveau de qualification, celles qui habitent dans les territoires connaissant un chômage de masse, et non par les femmes cadres supérieurs résidant à Paris ou dans toute autre ville métropolitaine.

Si l’on veut prendre une décision de cette nature – pour ma part, je n’y suis pas favorable –, il convient d’en mesurer l’impact sur les territoires et les catégories sociales concernés. Or mon expérience me laisse penser que la disposition envisagée affectera les territoires fragiles et les populations les plus modestes !

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de verser au débat quelques éléments de réponse supplémentaires.

M. Jean Desessard a souhaité connaître la répartition concrète du congé parental en Islande entre les hommes et les femmes. J’ai la réponse : 88 % des pères prennent un congé de trois mois et 100 % des mères prennent un congé de six mois. Donc, les pères utilisent la possibilité qui leur est offerte.

Quant à la recherche d’économies qui a été évoquée par certains, très franchement, cette nouvelle répartition du CLCA ne dégagera aucune économie substantielle : 80 millions d’euros, ce n’est pas suffisant, par rapport à un équilibre budgétaire, pour motiver, en soi, une évolution.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Je vous rappelle tout de même que nous parlons d’une mesure réglementaire prise dans le cadre de la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes du 4 août 2014.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

À ce moment-là, il ne s’agissait absolument pas de discuter des économies susceptibles d’être dégagées sur la branche famille de la sécurité sociale !

Si la loi précitée prévoit que la prestation partagée d’éducation de l’enfant, qui remplace le complément de libre choix d’activité, est répartie entre le père et la mère, c’est un décret qui va fixer la clef de répartition entre les deux parents.

Je voudrais souligner, madame Keller, qu’il existe de nombreuses études sur le CLCA. Non pas que nous ne voulions pas en réaliser une autre ou que nous ayons quelque chose à cacher, mais je vous invite à lire les études de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DREES, de la Caisse nationale des allocations familiales, et à consulter les annexes du PLFSS, dans lesquelles vous trouverez un résumé des études auxquelles je fais allusion.

Donc, madame Keller, nous ne manquons pas d’études, y compris sur les catégories socioprofessionnelles et la répartition territoriale.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Je vous les ferai parvenir, madame la sénatrice.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Je les ai lues : elles ne couvrent pas la demande de Mme Lienemann !

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

J’entends Mme Lienemann et Mme Cohen nous dire, en fait, que, s’il y a un effet sur le travail des femmes et un problème de retour à l’emploi, c’est à cause du chômage, donc une raison indépendante du CLCA.

On observe qu’une partie des femmes retrouvent malgré tout leur activité professionnelle à l’issue du CLCA, mais qu’un an de CLCA représente en moyenne 10 % de salaire en moins. En d’autres termes, même pour celles qui reprennent une activité, le CLCA est pénalisant dans le déroulement de leur vie professionnelle et creuse les inégalités salariales.

Par conséquent, ce n’est pas seulement une affaire de chômage, c’est aussi une affaire d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes !

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Mme Procaccia a posé la question de la protection des femmes en CLCA au titre du code du travail dès lors que la répartition a été modifiée.

Je vous rassure, nous ne modifions pas les trois ans de congé parental inscrits dans le code du travail. D’un côté, le code du travail permet à un salarié de demander trois ans de congé parental ; de l’autre, de manière indépendante et parallèle, une prestation est versée par les caisses d’allocations familiales.

Ce n’est pas parce que la prestation versée par les caisses d’allocations familiales évolue que le code du travail change. Les femmes qui voudront trois ans de congé parental pourront bénéficier pendant deux ans du CLCA…

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

… et, pendant un an, de la protection du code du travail – option que je ne souhaite pas, bien entendu, puisque le but est que les femmes reprennent plus tôt une activité professionnelle.

Sur les crèches, maintenant, dont il a été beaucoup question.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il serait bon, lorsque l’on parle de garde d’enfants, de ne pas se focaliser uniquement sur les places en crèche. En termes d’offre, l’accueil des jeunes enfants repose davantage, en France, sur les assistantes maternelles que sur les modes d’accueil collectifs. À nous donc, quand nous débattons de ces sujets, de considérer l’accueil des jeunes enfants dans ses deux composantes, les assistantes maternelles et les crèches.

L’assistant maternel exerce un vrai métier, certes souvent occupé par les femmes, et représente une authentique solution pour les parents qui recherchent un mode d’accueil pour leur enfant. C’est d’ailleurs souvent une meilleure solution pour les femmes qui travaillent en horaires décalés ou atypiques, que les crèches, dont les horaires sont plus stricts. Il n’existe malheureusement que peu de crèches pratiquant des horaires atypiques dans notre pays.

Je ne puis pas non plus vous laisser dire que nous avons « pompé » une partie du budget consacré à l’accueil des jeunes enfants au profit des rythmes scolaires : ce sont deux enveloppes budgétaires distinctes, madame Keller. Il n’existe pas de système de vases communicants entre, d’un côté, le budget « rythmes scolaires » et, de l’autre, le budget « crèches ».

Le budget consacré aux crèches, en augmentation de 7, 5 % par an, est le seul en France qui continue d’augmenter dans de telles proportions. En général, je le dis tout bas, de peur d’être trop entendue…

Si ce budget augmente de 8 % en 2015, c’est bien parce que nous savons – nous aurons l’occasion d’y revenir lorsque nous aborderons le thème de la modulation – que la spécificité de la politique familiale française tient non pas tant aux allocations qu’à la qualité des modes d’accueil que nous sommes capables d’offrir aux parents.

Comme s’y est engagé le Président de la République, nous nous sommes fixé un objectif, inscrit dans la convention d’objectifs et de gestion signée avec la CNAF, de création de 275 000 places d’accueil de jeunes enfants : 75 000 places dans les écoles maternelles – 18 000 places sont de nouveau ouvertes depuis 2012 -, 100 000 places chez les assistantes maternelles et 100 000 places dans les modes d’accueil collectifs.

Comme nous avons observé – vous connaissez tous le rapport du Haut Conseil de la famille – que les réalisations n’étaient pas à la hauteur de nos ambitions et que les années 2013 et 2014 n’avaient pas produit autant de places d’accueil de jeunes enfants que nous le souhaitions, peut-être pour des raisons conjoncturelles dues aux élections municipales ou du fait de l’inquiétude des maires, nous avons décidé, pour 2015, de prévoir 2 000 euros supplémentaires d’aide à l’investissement pour chaque nouvelle place de crèche décidée et commandée en 2015 par une collectivité territoriale, afin d’accompagner la création de crèches et de tenir les objectifs.

Donc, de ce point de vue, je puis vous garantir que nous ne lâchons rien sur les objectifs en termes de mode d’accueil et que nous mettons les moyens nécessaires pour accompagner et renforcer le plan qui est le nôtre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 61 A.

I. – L’article L. 521-1 du code de la sécurité sociale est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le montant des allocations mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article, ainsi que celui des majorations mentionnées à l’article L. 521-3, varient en fonction des ressources du ménage ou de la personne qui a la charge des enfants, selon un barème défini par décret.

« Le montant des allocations familiales varie en fonction du nombre d’enfants à charge.

« Les niveaux des plafonds de ressources sont révisés conformément à l’évolution annuelle de l’indice des prix à la consommation, hors tabac.

« Un complément dégressif à l’allocation est versé lorsque les ressources du bénéficiaire dépassent l’un des plafonds, dans la limite de montants définis par décret. Les modalités de calcul de ces montants et celles du complément dégressif sont définies par décret. »

II. – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er juillet 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Mes chers collègues, je vais certainement paraître à contre-courant dans ce flot d’amendements de suppression déposés par différents collègues et différents groupes, car je vais soutenir l’article 61 A.

L’histoire, nous la connaissons : les députés socialistes, après plusieurs jours de débats et d’échanges, ont proposé de moduler les allocations familiales selon les revenus des parents. Par là même, ils sont revenus sur la modulation de la prime à la naissance ou à l’adoption selon le rang de l’enfant.

Cette disposition est juste, transparente et s’inscrit pleinement dans la démarche de redressement des comptes publics en dégageant 800 millions d’euros d’économie par an en année pleine – 400 millions d’euros en 2015-, une économie nécessaire pour préserver l’avenir de notre modèle social et de la politique familiale.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire en commission et en séance publique, non, le Gouvernement ne s’attaque pas aux familles ! Près de 2, 5 milliards d’euros de plus ont été consacrés à la politique familiale depuis 2012. Qu’il s’agisse de l’allocation de rentrée scolaire, du complément familial, de l’allocation de soutien familial, les montants de ces différents dispositifs ont été relevés pour les familles qui en ont le plus besoin, dans une logique de justice sociale. Car il faut de la justice ; c’est bien cela, le sens du système redistributif français.

J’entends que la modulation des allocations familiales contreviendrait au principe d’universalité qui sous-tend la politique familiale française. Non ! La solidarité horizontale entre les célibataires et les familles est maintenue : toutes les familles de deux enfants ou plus continueront à toucher des allocations familiales. L’universalité reste au cœur du système, mais elle s’accompagne désormais d’une modulation dans le versement, permettant de tenir compte des ressources et de la situation réelle des familles.

Rien de nouveau dans tout cela, mes chers collègues, car le mécanisme des prestations familiales, en vigueur depuis 1932, a bien évolué tout au long du XXe siècle.

Au cours des années soixante-dix, quatre-vingt et quatre-vingt-dix, des prestations sous conditions de ressources et des prestations modulées selon les ressources ont fait leur apparition pour répondre aux besoins des familles, en particulier les plus modestes.

La politique familiale française, dans la réalité et au-delà des discours, n’est donc plus tout à fait celle de 1946.

Respect de l’universalité et impératif de justice sociale : voilà ce qui sous-tend cette mesure, qui avait déjà été étudiée de manière très approfondie par le Haut Conseil de la famille en avril 2013.

C’est un dispositif juste, simple et lisible : 12 % des familles les plus aisées recevront moins d’allocations. En clair, les familles qui, avec deux enfants, ont un revenu inférieur à 6 000 euros par mois continueront de toucher le même montant d’allocations. Au-delà, les allocations familiales seront divisées par deux, puis par quatre à partir de 8 000 euros de revenus. Je rappelle que la moitié des salaires mensuels sont inférieurs à 1 700 euros dans notre pays.

Ce dispositif de modulation est complété par un système de lissage introduit par le Gouvernement pour éviter les effets de seuil, et c’est heureux.

Pour conclure, je répète qu’il s’agit d’une modulation des allocations familiales. Aucun parallèle ne peut être fait avec d’autres domaines ou d’autres branches de la sécurité sociale. La comparaison serait absurde. La question de la généralisation du mécanisme à d’autres secteurs ne se pose pas.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, parce qu’il concilie l’enjeu de la réduction des déficits de la branche famille et l’exigence d’avancer vers plus de justice sociale, je vous appelle à maintenir l’article 61 A tel qu’il a été voté à l’Assemblée nationale.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de dix amendements identiques.

L'amendement n° 7 rectifié est présenté par Mmes Lienemann et Claireaux.

L'amendement n° 14 est présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances.

L'amendement n° 78 est présenté par Mme Cayeux, au nom de la commission des affaires sociales.

L'amendement n° 90 est présenté par MM. Rachline et Ravier.

L'amendement n° 115 est présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.

L'amendement n° 189 est présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

L'amendement n° 209 est présenté par M. Barbier.

L'amendement n° 264 rectifié est présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 266 est présenté par M. Joyandet.

L'amendement n° 320 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin.

Ces dix amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Cet amendement vise à supprimer la modulation des allocations familiales.

C’est un vieux débat qui, de mon point de vue, a une forte connotation quant à l’avenir du modèle français et l’état de la société.

Deux visions se sont opposées sur les droits, en particulier en matière de protection sociale. La vision classique, républicaine, notamment depuis le Conseil national de la Résistance, repose sur l’égalité des prestations et des droits, l’égalité d’accès et la juste contribution de chacun à proportion de ses facultés respectives. C’est vrai pour les prélèvements. Lorsqu’on rassemble la fiscalité et les prélèvements, toutefois, il s’agit plutôt d’avoir une société fondée sur les droits fondamentaux, dont fait partie la politique de la famille. On peut décider que ce n’est plus le cas, mais, historiquement, la branche famille fait partie de la protection sociale. C’est la philosophie qui a été défendue.

Les Anglo-Saxons ont une autre philosophie : ils appliquent la flat tax, impôt relativement peu progressif, et offrent des prestations qui, elles, sont conditionnées ou progressives.

Pour ma part, je pense que le modèle républicain est meilleur. Il est plus juste et, surtout, il constitue un ciment. Or j’observe que le Gouvernement nous propose la modulation des allocations familiales et qu’il refuse, par exemple, d’instaurer la CSG progressive.

Je souhaite la mise en place dans le pays d’un grand impôt progressif qui tienne compte des revenus ; je souhaite que le système de prélèvements soit plus juste et lié aux capacités contributives de chacun, mais que le principe républicain de l’égalité des droits, de l’égalité d’accès et de l’égalité des prestations soit maintenu. C’est cela, l’idée de l’égalité, et ce n’est pas neutre dans les consciences !

Petit à petit, un glissement s’opère en France et l’on considère que les prestations sociales deviennent des aides et ne sont plus des droits.

Justement, pour répondre à la nécessité d’une certaine sur-redistribution, il y avait deux piliers : les allocations versées à tous et des prestations liées à la condition sociale. Les deux étaient nécessaires pour justifier le maintien de ce socle républicain.

Dans l’immédiat, la modulation pourra paraître juste. D’après les sondages, les gens sont d’accord. Mais, petit à petit, nous risquons de voir s’installer dans le pays le sentiment de l’illégitimité des prélèvements et d’une assistance surabondante. Je crains ces dérives, ces effets sociaux sur le pacte républicain.

Ensuite, parler de justice sociale, ce n’est pas simplement comparer les familles entre elles : c’est comparer la situation des personnes, à ressources équivalentes, selon qu’elles ont ou non des enfants. Or le niveau de vie de toutes les familles qui ont des enfants, même celles dont les revenus sont les plus élevés, est inférieur à celui des personnes qui, ayant les mêmes revenus, sont sans enfant.

La politique de l’égalité fiscale, il faut la construire sur l’ensemble de la fiscalité. Il ne faut pas comparer les prélèvements entre familles, mais les prélèvements entre revenus, afin que les familles qui ont des enfants ne soient pas pénalisées par rapport à celles qui n’en ont pas, d’autant que les premières contribuent, à terme, au financement des retraites.

Il manque de l’argent à la branche famille ? Je rappelle qu’on lui a prélevé 9 milliards d'euros pour financer la branche retraite, et notamment les dispositions favorables aux mères au foyer. Il n’est donc pas vrai que la branche famille soit déficitaire en elle-même. Elle l’est devenue à cause du prélèvement qu’elle a subi.

Ce prélèvement a en outre justifié une indexation imparfaite des allocations familiales sur les salaires et même sur l’inflation. Et on nous dit maintenant que les allocations familiales représentent une somme dérisoire… De fait, leur poids dans le pouvoir d'achat des familles n’a cessé de décroître depuis 1946.

M. Jean Desessard applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 14.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Nous sommes à un moment important de notre discussion.

La commission des finances a voté en faveur de la suppression de l’article 61 A, qui prévoit la modulation des allocations familiales en fonction des ressources des familles.

Nous vivons un quinquennat un peu spécial. Je pense – et nous sommes de plus en plus nombreux dans ce pays à le penser – que le malentendu vient des annonces contenues dans le projet du candidat Hollande, adoubé ensuite par les Français.

La modulation des allocations familiales faisait-elle partie de ce projet ? J’ose vous renvoyer au texte. Voici ce qui était écrit : « Je maintiendrai toutes les ressources affectées à la politique familiale. » Pensez-vous vraiment que, depuis deux ans, toutes les ressources affectées à la politique familiale aient été consacrées à la politique familiale ? Marie-Noëlle Lienemann vient de nous donner un élément de réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

La mesure dont j’ai parlé a été prise par la droite !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Il y en a d’autres que la gauche a prises, à commencer par la réforme du quotient familial.

Madame Lienemann, nous sommes au moins d'accord sur un point : la justice passe par la fiscalité. Nous avons entendu un grand discours sur la fiscalité lors de la déclaration de politique générale du Premier ministre de l’époque. On nous annonçait une réforme fiscale passant notamment par la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG. Le sujet est complexe, mais nous aurions pu travailler dessus.

En revanche, la mise sous condition de revenus des allocations familiales n’avait pas été annoncée. D'ailleurs, le Gouvernement y tenait si peu qu’elle ne figurait pas dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale déposé à l’Assemblée nationale. Le projet de loi comportait quatre « mesurettes » censées rapporter 800 millions d'euros par an. Elles ont disparu au profit d’une mesure qui est, il faut bien le dire, idéologique. Quand on regarde le dispositif dans le détail, on voit que ce sont encore les couches moyennes et moyennes supérieures qui sont touchées.

Il est vrai que, jusqu’en 2008-2009, la branche famille était équilibrée, et que ses ressources ont diminué depuis. Cette évolution est totalement liée au contexte économique. Il n’en reste pas moins que 80 % des dépenses de la branche famille sont financées par des cotisations sociales ; ce n’est pas le cas des autres branches. La présente mesure ne nous paraît donc pas très juste.

Elle ne nous paraît pas non plus très adroite, tant d’un point de vue social que d’un point de vue économique. En plus de ce qu’a dit Marie-Noëlle Lienemann, il faut souligner que les familles consomment. Nous savons bien que l’argent qu’elles reçoivent n’est pas thésaurisé. Or la croissance a deux moteurs : la consommation et l’investissement.

J’ai rappelé que l’article 61 A avait été introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale. Concrètement, les allocations familiales seront divisées par deux pour un foyer avec deux enfants dont les revenus sont supérieurs à 6 000 euros mensuels, et divisées par quatre pour un foyer avec deux enfants dont les revenus sont supérieurs à 8 000 euros mensuels.

La mesure affectera plus de 600 000 familles. Là encore, nous sommes loin du projet du candidat Hollande. Voici ce qui était écrit : « Je rendrai le quotient familial plus juste en baissant le plafond pour les ménages les plus aisés, ce qui concernera moins de 5 % des foyers fiscaux. » Nous sommes loin du compte, avec aujourd’hui 600 000 familles concernées !

Nous sommes totalement opposés à cette réforme ; d’où cet amendement tendant à la suppression de l’article. Je suis heureux que la commission des finances nous ait suivis sur ce point. Notre collègue Caroline Cayeux va insister, au nom de la commission des affaires sociales, sur le caractère universel des allocations et sur les valeurs qui sous-tendent cette universalité, valeurs que nous partageons.

Nous tenons également à souligner que la mise sous condition de ressources des allocations familiales va créer une discrimination entre les enfants et, plus généralement, entre les familles, alors qu’il faudrait resserrer les liens entre Français plutôt que de contribuer à les diviser.

Notre politique familiale prend un tournant insupportable. Elle devient une politique de redistribution, alors qu’elle était une politique de soutien aux familles, largement reconnue pour ses excellents résultats. Si l’on peut encore espérer que notre contexte politique et économique très compliqué se retourne un jour, nous le devons peut-être à notre démographie. C’est tout de même incroyable : nous avons un atout, et on réunit tous les ingrédients pour qu’il n’en soit plus un dans quelques années !

Pour toutes ces raisons, techniques ou politiques, la commission des finances souhaite la suppression de l’article 61 A.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Caroline Cayeux, rapporteur, pour présenter l’amendement n° 78.

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

Je demande moi aussi, au nom de la commission des affaires sociales, la suppression de l’article 61 A.

Dans un souci de concision, je me contenterai d’insister sur trois points.

Premièrement, je dois dire la surprise qu’a provoquée cette décision brutale, qui n’avait pas été annoncée par le Président de la République – certains de nos collègues l’ont déjà rappelé –, mais qui a été voulue par les députés socialistes.

Deuxièmement, nous sommes profondément attachés à l’universalité des allocations familiales. À partir du moment où on touche à cette universalité, on peut s’interroger sur la possibilité de toucher à l’universalité dans d’autres domaines. Il ne s’agit pas de nourrir les fantasmes, mais, après tout, pourquoi ne pas déplafonner les aides en matière d’éducation publique afin de faire participer les familles en fonction de leurs ressources ? Je m’en tiendrai à cet exemple.

Troisièmement, depuis 2012, la politique du gouvernement auquel vous appartenez, madame la secrétaire d'État, a particulièrement touché les familles. Au total, si l’on prend en compte l’ensemble des mesures, à commencer par la révision à deux reprises du quotient familial, on arrive à une addition de plus de 3 milliards d'euros payée par les familles.

Nous nous élevons contre cette succession de mesures qui touchent les classes moyennes et augmentent perpétuellement la fiscalité qui pèse sur elles.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 90 n’est pas défendu.

La parole est à M. Olivier Cadic, pour présenter l'amendement n° 115.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Comme tous ceux qui viennent de s’exprimer sur ce sujet, nous souhaitons supprimer l’article 61 A, qui prévoit de moduler le montant des allocations familiales en fonction du revenu.

Il s’agit évidemment d’un amendement essentiel à nos yeux.

Je ne reviendrai pas sur tous les arguments qui ont été si excellemment développés par mes collègues, mais je tiens tout de même à m’étonner, au nom de mon groupe, de cette volonté affichée du Gouvernement de remettre en cause la seule politique française qui marche et fait figure d’exemple.

Le Gouvernement prétend ne pas remettre en cause le principe de l’universalité, auquel la plupart d’entre nous demeurent très attachés. Il établit pour cela un subtil distinguo entre universalité et uniformité. Abstraitement, c’est vrai, l’universalité n’est pas remise en cause, mais, en pratique, quand certaines familles ne toucheront presque plus rien, elle le sera bel et bien !

La modulation des allocations en fonction du revenu n’est donc pas envisageable. C’est une mauvaise solution – mais à un vrai problème qu’il n’est pas question d’éluder. Ce problème, c’est celui de l’équité, que l’on peut résumer à la question suivante : est-il normal que des familles aisées touchent autant que des familles modestes ?

Primo, tout dépend de ce que l’on entend par « aisées » et « modestes ». Nous savons hélas que, pour le Gouvernement, à partir de 1 200 euros brut de pension de retraite, on est assez aisé pour ne pas voir sa pension revalorisée... Secundo, nous pouvons comprendre que le principe choque aujourd’hui nombre de nos concitoyens.

Pourquoi ne pas envisager la fiscalisation des allocations familiales ? Cette solution aurait de nombreux mérites. D’abord, elle ne porterait nullement atteinte au principe d’universalité. Ensuite, elle serait techniquement beaucoup plus simple à mettre en œuvre : pas de surcoût de gestion pour les caisses d’allocations familiales et aucun changement pour l’administration fiscale, dans la mesure où le système est déclaratif. Enfin, elle permettrait d’initier une indispensable réforme de l’impôt sur le revenu des personnes, prenant véritablement en compte l’ensemble des revenus, qu’il s’agisse des revenus du travail ou des revenus de prestations sociales et des avantages connexes qui les accompagnent.

Cependant, une telle évolution mérite une réflexion et un travail de fond, qui, à l’évidence, n’ont pas été fournis ici.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 189.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je demande moi aussi la suppression de l’article 61 A, qui prévoit la modulation des allocations familiales en fonction des revenus, car je suis attaché au principe d’universalité.

J’ai beaucoup apprécié l’intervention de Marie-Noëlle Lienemann, qui a souligné qu’il existait deux grands systèmes. Le premier repose sur l’universalité des prestations et la progressivité de la fiscalité. À ce sujet, je rappelle que, nous aussi, nous sommes favorables à l’instauration d’une CSG progressive, afin d’augmenter la progressivité de notre fiscalité.

Où va le Gouvernement ? Est-il en train de mettre fin à notre système pour aller vers une progressivité moindre de l’impôt et une modulation de l’ensemble des prestations en fonction des revenus ? C’est la question qui est posée.

Michelle Meunier, que j’apprécie beaucoup, me permettra d’exprimer un désaccord. Elle nous a dit que la réforme apporterait plus de justice sociale en diminuant les allocations des familles gagnant plus de 6 000 euros par mois. Pourquoi le seuil ne serait-il pas 5 000 euros par mois, dans ce cas ? Cela apporterait un peu plus de justice sociale encore… Et pourquoi ne pas verser encore moins d’allocations aux familles gagnant plus de 10 000 euros par mois ? Cela apporterait aussi un peu plus de justice sociale…

Mes chers collègues, la justice sociale ne se fait pas petit bout par petit bout. Nos collègues de l’UMP ont trouvé tout à fait normal d’instaurer un délai de carence de trois jours dans le public, puisqu’il y en a un dans le privé. Selon eux, c’est une question de justice sociale et d’équité. Autrement dit, chacun y va de son petit bout de justice sociale !

Non, la justice sociale, c’est un système, ce sont des principes, c’est un projet ! Cela ne se résume pas à quelques « mesurettes » !

Nous sommes favorables à la suppression du quotient familial, madame Meunier, dont vous savez très bien qu’il favorise les familles aisées. Pourquoi ne l’avez-vous pas supprimé au nom de la justice sociale ? La justice sociale jouerait donc comme un curseur que l’on déplacerait à l’envi : de la justice sociale ici, mais pas là ?

La question posée est celle du système de pensée, du concept qui guide une politique familiale et une politique fiscale.

Certes, nous l’allons pas dresser un acte notarial des engagements de campagne du candidat François Hollande. Mais Jean-Marc Ayrault a tout de même regretté, voilà trois jours, de ne pas avoir fait la réforme fiscale que nous, écologistes, appelions de nos vœux !

Je le répète, on ne construit pas la justice sociale petit bout par petit bout, centimètre par centimètre. Nous devons avoir constamment en tête un projet de justice sociale et fiscale.

Les écologistes souhaitent donc la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l’amendement n° 209.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

M. Gilbert Barbier. Il est bien difficile d’intervenir après M. Desessard et ses envolées lyriques !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Le plus curieux dans cette histoire, c’est que, au départ, lors de la présentation du PLFSS, Mme Touraine avait annoncé qu’elle entendait récupérer de l’argent – car il s’agissait bien de cela - en décalant la revalorisation des allocations familiales des quatorze ans de l’enfant à ses seize ans.

Puis, au cours de la discussion à l’Assemblée nationale, cette mesure a été supprimée – j’espère qu’elle le restera, madame la secrétaire d’État –, et remplacée par la modulation des allocations familiales, introduite par cet article 61 A. Cette substitution s’est faite en quelques heures, à la suite d’une discussion menée par une partie des députés de la majorité à l’Assemblée nationale.

Je ne vais pas revenir sur tous les arguments qui ont été évoqués par les uns et par les autres, sauf pour dire qu’il s’agit d’un problème fondamental au regard de la justice sociale et de la transgression d’un principe non moins fondamental, à savoir l’universalité des allocations familiales, principe intangible depuis l’origine de ces allocations.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l'amendement n° 264 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Force est de constater que la suppression de cet article est réclamée par plusieurs groupes politiques, pour des raisons parfois différentes, parfois similaires.

Nous avons déjà apporté un certain nombre d’éléments au débat en posant notre question préalable, qui a été l’occasion de nous positionner contre la modulation des allocations familiales.

Dans ce débat, il me semble que certains termes sont employés à mauvais escient.

Plusieurs intervenants ont déclaré leur opposition à la modulation au nom de l’universalité des allocations familiales, mais, en répondant à notre question préalable, Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a expliqué que nous faisions une confusion entre universalité et uniformisation.

Mais qu’est-ce que l’universalité ? C’est non seulement l’universalité des allocations familiales, mais c’est aussi et surtout l’universalité d’un système de protection sociale irrigué par la solidarité horizontale.

Ce système a été construit sur le principe de la solidarité, c’est-à-dire que les familles qui touchaient le même montant d’allocations familiales se sentaient parties prenantes de la solidarité nationale et ressentaient ainsi le désir de soutenir tout le système de protection sociale.

Pourquoi voulez-vous, madame la secrétaire d’État, que, demain, des familles qui touchent moins parce qu’elles sont censées être un peu plus aisées aient envie de continuer de participer à ce système ?

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

À mon sens, l’analyse du Gouvernement présente le défaut majeur d’être à très court terme. Vous donnez l’impression, madame la secrétaire d’État, et ce depuis le début, d’avoir pour seule logique la réalisation d’économies, mais sans que vous en ayez pesé toutes les conséquences. C’est singulièrement le cas sur la politique familiale, où vous mélangez tout. Vous avancez des arguments radicalement contraires aux principes qui ont sous-tendu ce système dès le lendemain de la Libération.

C’est grave, non seulement pour le présent, mais aussi pour l’avenir, car c’est la porte ouverte à un système différent, un système assurantiel et, du coup, c’est le sabordage pur et simple de notre protection sociale !

J’appelle vraiment à une réflexion et je réaffirme notre opposition déterminée à la modulation des allocations familiales.

Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Jean Desessard applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Les amendements n° 266 et 320 rectifié ne sont pas soutenus.

Quel est l’avis du Gouvernement sur les sept amendements identiques restant en discussion ?

Sourires.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

On attirerait l’attention sur nos travaux de cette nuit !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

M. Francis Delattre. Il ne faut jamais renoncer au bon sens !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Au départ, le Gouvernement n’était pas favorable à la mesure !

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Je souhaiterais faire plusieurs remarques sur la question de l’universalité des prestations familiales. Je ne souscris pas totalement à la manière dont est racontée l’histoire de la politique familiale et des principes qui la fondent.

Cette politique est infiniment plus pragmatique et plus politique que principielle. Elle répond le plus souvent à des objectifs conjoncturels.

Permettez-moi d’abord de dire que ce principe d’universalité est attribué à tort au Conseil national de la Résistance, et je mets au défi quiconque de trouver la référence dans les textes en question.

En 1945, les prestations familiales, qui sont d’ailleurs des allocations aux enfants, mais aussi une allocation de salaire unique, sont créées pour compenser l’augmentation des prix intervenue à la Libération. Elles sont donc destinées en premier lieu à soutenir le pouvoir d’achat des familles, ce qui n’a rien à voir avec un quelconque principe d’universalité.

La deuxième caractéristique de la politique familiale, c’est qu’elle est nataliste, et je l’assume totalement. En 1945, elle est d’ailleurs portée essentiellement par des associations qui représentent des familles de quatre ou cinq enfants, …

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

… dans lesquelles les mères au foyer sont évidemment les plus nombreuses. Le but est alors de repeupler la France.

Il faut bien voir que la politique familiale évolue continuellement depuis 1945, en particulier au moment où les femmes entrent en masse dans le monde du travail, après avoir investi l’école : elle devient alors une politique tournée vers l’accueil des enfants et la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle.

Ce qui fait la force de la politique familiale française, ce ne sont pas les allocations familiales, mais ce qui nous permet d’avoir en France à la fois le taux d’activité professionnelle des femmes et le taux de natalité les plus élevés d’Europe, la bonne place de l’Irlande, sur le plan de la natalité, tenant à d’autres raisons.

C’est d’ailleurs ce qui intéresse nos voisins européens. Pour recevoir régulièrement mes homologues des autres pays de l’Union, je puis vous dire qu’elles – ce sont souvent des femmes ! – me demandent non pas comment nous versons les allocations familiales, tout le monde sait faire, mais plutôt pourquoi les femmes en France sont si nombreuses à travailler, tout en faisant autant de bébés !

Pardonnez-moi, mais je ne crois pas que ce résultat tienne à l’universalité des allocations familiales, qui restent d’ailleurs les dernières prestations à ne pas être placées sous conditions de ressources. Il vient plutôt de l’ensemble du dispositif mis à la disposition des familles pour que les femmes puissent travailler.

Par ailleurs, si les prestations familiales étaient aussi universelles que l’on veut bien le dire, il y a longtemps qu’elles auraient été versées dès le premier enfant.

M. Jean Desessard proteste.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

N’est-ce pas tout de même une « petite » dérogation au principe de l’universalité que d’avoir accepté pendant autant d’années que la naissance du premier enfant n’ouvre pas droit à des allocations familiales ?

Aussi, je vous répondrai simplement que le principe d’universalité est respecté dès lors que toutes les familles continueront à percevoir des allocations familiales, même si cette somme est modulée au-delà d’un revenu de 6 000 euros, plus 500 euros par enfant supplémentaire.

Depuis que ce débat a commencé, que ce soit ici, à l’Assemblée nationale ou dans la société civile, on a beaucoup parlé de l’impact de la modulation sur la natalité. Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne crois pas un instant que, dans les familles qui ont un revenu supérieur à 6 500 euros, on se pose la question des 120 euros d’allocations familiales au moment où l’on fait des bébés. Ce n’est pas vrai ! Si elle peut parfois se poser, la question des moyens pour faire un enfant ne se pose pas dans ces familles-là.

Enfin, dès lors qu’il est assez communément admis que la branche famille doit contribuer, elle aussi, à l’effort de redressement des comptes publics, la modulation des allocations familiales est incontestablement la plus juste des mesures que nous pouvions prendre.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Vous avez été nombreux à défendre les 11 % des familles les plus aisées de notre pays – pas celles à 1 200 euros ou 1 500 euros, comme j’ai pu l’entendre à l’instant, mais celles à 6 000 euros, plus 500 euros par enfant supplémentaire –, mais je n’ai entendu personne parler de l’augmentation de la pauvreté des enfants : entre 2008 et 2012, 400 000 enfants supplémentaires ont basculé dans la pauvreté.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Peut-on savoir ce que vous faites contre cela ?

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Nous nous efforçons de protéger ces enfants-là et ceux qui pourraient basculer dans la pauvreté.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Vous faites l’inverse ! Venez gérer une commune en région parisienne, et vous verrez !

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Dès lors que l’on admet l’idée que la branche famille doit contribuer elle aussi au redressement des comptes publics, idée qui n’est apparemment pas partagée par tous, …

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

… convenez qu’il est moins impactant pour la natalité de décider la modulation plutôt que la réduction de la prime de naissance ; il est moins impactant pour la pauvreté et le pouvoir d’achat des familles de décider la modulation plutôt que le report de la majoration de quatorze ans à seize ans ou la baisse de la prime de naissance, deux mesures que nous ne prenons pas.

Toutes ces mesures auraient été beaucoup plus douloureuses pour 90 % des Français ; celles que nous avons prises seront un tout petit peu de pouvoir d’achat en moins pour d’autres, à savoir 60 euros par mois pour une famille de deux enfants dont les ressources sont supérieures à 6 000 euros par mois. Je ne pense pas que leurs conditions de vie en seront réellement affectées, et c’est ce qui nous permet de mettre la priorité sur la lutte contre la pauvreté, le soutien à la natalité, à l’activité professionnelle des femmes et aux modes de garde.

Le Gouvernement est donc bien sûr défavorable à tous ces amendements identiques de suppression.

Mmes Nicole Bricq, Michelle Meunier, ainsi que M. Yves Daudigny applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Mme la secrétaire d’État considère qu’il ne s’agit pas d’une question de principe. Pour ma part, même s’il n’y a aucune référence inscrite en tant que telle dans les travaux du CNR, je pense que l’on peut se référer utilement au préambule de la Constitution de 1946, qui précise bien, dans son dixième paragraphe, que la Nation « assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. » Il s’agit d’une déclaration de principe intéressante, sur laquelle on peut se fonder.

Avec cette mesure de modulation des allocations familiales, vous pourriez créer un précédent susceptible de s’appliquer plus tard à d’autres domaines, notamment à un certain nombre de remboursements.

Ce faisant, vous risquez de porter atteinte au consentement à l’impôt et à l’attachement de nos concitoyens à ce système universel tant vanté sur toutes les travées de cet hémicycle.

Dès lors, vous risquez de pousser certains, qui constatent qu’ils contribuent beaucoup sans rien recevoir, fût-ce à titre symbolique, à se mettre en quête d’autres systèmes assurantiels. J’y vois un vrai danger pour notre protection sociale telle qu’elle est organisée à l’heure actuelle.

S’il ne s’agit pas d’une question de principe, madame la secrétaire d’État, venons-en donc aux deux éléments qui fondent, selon vous, le système des allocations familiales : la préservation du pouvoir d’achat et la politique nataliste. Si vous souhaitez avancer dans cette voie, modulez les allocations familiales, mais revenez en même temps sur les deux baisses du quotient familial que vous avez opérées, afin de rétablir une véritable égalité entre les couples avec enfants et les couples sans enfants. En effet, il y a là un véritable problème de pouvoir d’achat : se loger dans quatre pièces ne représente pas le même coût que se loger dans deux pièces. On le sait, le différentiel en termes de pouvoir d’achat est de l’ordre de 25 % entre ces deux types de familles.

Si telle était véritablement la préoccupation du Gouvernement, qu’il dépose rapidement un amendement pour revenir sur ces deux baisses successives du quotient familial qui ont porté un rude coup à la politique familiale, sans compter d’autres mesures néfastes, comme la fiscalisation de la majoration de pension de 10 % dont bénéficient les retraités ayant élevé trois enfants.

Pour toutes ces raisons, je voterai les amendements visant à supprimer la modulation des allocations familiales.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Claude Dilain, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Au cours de ce long débat sur la modulation des allocations familiales, depuis la discussion générale jusqu’à l’examen de ces amendements, j’ai entendu des sénatrices et des sénateurs, sur toutes les travées, s’inquiéter, au motif que cette mesure risquerait de casser le pacte républicain. Je suis heureux de vous entendre manifester avec autant d’énergie votre attachement à cette belle notion d’unité de la République, mes chers collègues !

J’espère simplement que vous avez conscience que la véritable menace, pour le pacte républicain, c’est le développement d’inégalités flagrantes entre territoires. Je vous invite à visiter certains quartiers de banlieue, mais aussi – et peut-être surtout – des territoires que l’on qualifie d’« hyper-ruraux ». Vous verrez que le sentiment d’inégalité, de ne plus appartenir à la famille républicaine ne tient pas à la modulation des allocations familiales. Le véritable enjeu, ce sont le logement, les transports, l’éducation, le chômage… Pensez-vous que l’on se sente encore appartenir à la famille républicaine dans les territoires où le taux de chômage est au moins le double de la moyenne nationale ? Ne pensez-vous pas qu’une telle situation peut porter atteinte à ce beau pacte républicain issu de la mise en œuvre du programme du Conseil national de la Résistance ?

J’ai bien compris que vous étiez inquiets, chers collègues, mais je voudrais, quand l’occasion s’en présentera, que vous mettiez la même conviction à défendre le pacte républicain lorsqu’il s’agira de solidarité entre villes riches et villes pauvres, ou entre départements riches et départements pauvres !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Pourquoi parler d’inquiétude ? Nous n’avons fait que présenter un projet politique, proposer un autre mode de redistribution : Mmes Lienemann et Cohen s’en sont fort bien chargées. Ce ne sont tout de même pas les écologistes ou les communistes qui vont s’inquiéter que des ménages dont les revenus mensuels sont supérieurs à 6 000 euros perdent 60 euros ! Là n’est pas la question !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Non, c’est une question de principe !

Puisque vous parlez de justice sociale, vous n’ignorez pas que le quotient familial procure aux familles aisées un gain de 2 000 euros par an, contre 200 euros seulement pour les familles pauvres ! Si l’on veut établir l’universalité, il faut que le gain soit de 730 euros pour toutes les familles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Votre conception de l’universalité n’est pas la même que la nôtre : vous estimez qu’une prestation est universelle dès lors que tout le monde touche quelque chose. À ce compte-là, il suffit de verser 3 euros à toutes les familles, et elle sera universelle !

Le système politique que promeuvent les écologistes est fondé sur l’individualisation de l’impôt, la progressivité de la CSG et sa fusion avec l’impôt sur le revenu : voilà comment on peut établir la justice sociale. En ce qui concerne les prestations, chacun doit cotiser selon ses moyens et recevoir en fonction de ses besoins.

Enfin, sans défendre une politique nataliste, bien entendu, les écologistes reconnaissent qu’élever un enfant représente un coût, dont la société doit prendre sa part. Une allocation doit donc être versée pour chaque enfant, dès la naissance du premier. Si vous nous aviez proposé un tel système, madame la secrétaire d’État, nous aurions été d’accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

En supprimant le quotient familial, voire le quotient conjugal, nous aurions les moyens de verser une allocation beaucoup plus importante aux familles pauvres, sachant que la pauvreté frappe de plus en plus d’enfants. Nous avions également d’autres propositions pour aider ces familles.

Pour aller plus loin, je rappellerai que nous sommes pour l’inconditionnalité des prestations, en particulier du RSA, dont l’attribution ne doit pas dépendre du revenu du conjoint et qui doit pouvoir être versé aux jeunes de 18 à 25 ans. À la fin de l’année dernière, lors de leur congrès, les écologistes ont voté en faveur de l’instauration d’un revenu d’existence citoyen, c’est-à-dire d’un revenu minimum accordé à tous, quel que soit le niveau de revenus, et financé par la fiscalité. J’avais d’ailleurs déjà défendu cette idée dans cet hémicycle lors du débat sur le RSA socle et le revenu minimum d’activité. J’avais alors dit à Martin Hirsch que la solution consistait à donner le même montant à tous et à redistribuer via la fiscalité.

Mes chers collègues, si nous sommes inquiets, c’est parce que vous ouvrez la porte à des modulations plus importantes à l’avenir : lorsque vous aurez besoin de davantage d’argent, il vous suffira de la pousser un peu plus ! Mais, au-delà et surtout, nous défendons une ligne politique différente. Nous avons autant envie que vous d’aider les familles pauvres, mais nous voulons le faire d’une façon différente.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Dix amendements identiques de suppression de l’article ont été déposés ; tous, ou presque, ont été défendus au nom du principe d’universalité. Est-ce à dire que l’ensemble de leurs signataires, qui siègent d’un bord à l’autre de cet hémicycle, défendent la même politique familiale ? Je ne le pense pas.

C’est donc qu’il y a confusion sur la notion d’universalité. En tout cas, cette notion n’est pas univoque, puisque chacun lui assigne un objectif différent. Pour moi, cela signifie que si cet article est supprimé, ce sera pour de mauvaises raisons !

Il y a confusion, parce que l’universalité n’est pas une valeur, mais un principe de mise en œuvre qui souffre des aménagements selon l’objet auquel il s’applique : universalité du suffrage, universalité budgétaire, universalité des allocations familiales, universalité de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA – personne ne conteste cette prestation, et pourtant le montant versé dépend bien des revenus du bénéficiaire.

L’universalité n’est jamais absolue. Elle l’est d’autant moins qu’universalité ne signifie pas égalitarisme et que l’égalité n’est pas rompue lorsque des personnes en situation différente sont traitées de manière différente. Telle est bien la jurisprudence du Conseil constitutionnel et tel est le schéma recommandé par le Haut Conseil de la famille : « En modulant les allocations familiales, on conserve le principe d’universalité des allocations familiales : toutes les familles ouvrent droit à des allocations, mais leur montant diminue avec le revenu. »

Il est faux d’affirmer que la modulation des allocations familiales porte atteinte aux fondements de la politique familiale. Non, chers collègues, les crédits de la politique familiale n’ont pas diminué depuis deux ans : consultez les tableaux présentés dans les rapports, comparez le montant des dépenses inscrites chaque année entre 2012 et 2014 à celles de 2011.

Que l’on relise l’exposé des motifs de l’ordonnance de 1945 : « La sécurité sociale est la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. » Quant au Préambule de la Constitution de 1946, il proclame que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ».

Il n’est écrit nulle part, dans ces textes fondateurs, que tous doivent toucher la même chose, mais il y est constamment question de solidarité, comme aujourd’hui, ce qui semble avoir échappé à la plupart d’entre vous.

Je ne dirai pas que je doute de la sincérité des positions des uns et des autres, car ce serait désagréable et ce débat est de bonne tenue, même si nous ne sommes pas d’accord. Comment ne pas penser cependant que l’attachement aux principes ou l’indignation s’expriment parfois tardivement : en effet, un certain nombre de sénatrices et de sénateurs présents ce soir n’avaient pas d’états d’âme, en 2009, lorsqu’ils approuvaient les ponctions sur les ressources de la branche famille que j’ai rappelées lors de la discussion générale, ponctions qui sont très largement à l’origine de la situation difficile que connaît aujourd’hui la branche famille.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Je voudrais évoquer un dernier point, en soulignant que le présent débat n’est pas concerné par mon observation, ce qui est tout à l’honneur du Sénat.

Un parallèle parfaitement détestable, irresponsable au regard de la santé publique, a été établi en d’autres lieux avec l’aide médicale d’État. Je le dis avec solennité, je crains les conséquences de ces confusions et de ces amalgames répandus à tous les vents. Enfin, je regrette vivement que puisse être défendue ce soir la suppression d’une mesure profondément juste.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je suis d’accord avec mon collègue Claude Dilain quand il évoque le pacte républicain. Bien évidemment, celui-ci ne se résume pas aux seules allocations familiales.

Je suis également d’accord avec Yves Daudigny quand il dénonce une confusion, mais celle-ci ne vient pas de nous, je le pense sincèrement : il y a confusion, dans ce débat, entre prestations et allocations. Les allocations familiales ne s’inscrivent pas dans la même philosophie et ne visent pas les mêmes objectifs que l’APA, mon cher collègue. En effet, l’APA est une prestation soumise à condition de ressources, mais les allocations familiales relèvent d’un droit, dont le bénéfice ne saurait dépendre du niveau de revenus. C’est sur ce point que nous ne parviendrons pas à nous entendre ce soir ; croyez que je le regrette.

Je regrette également que nous ne trouvions pas de terrain d’entente sur la notion de solidarité et sur la modulation des allocations familiales que vous proposez. Pour nous, cette mesure n’est pas juste, parce qu’elle résulte essentiellement de la volonté de réaliser des économies.

C’est vrai, monsieur Daudigny, jusqu’à présent, aucune ponction sur les ressources de la branche famille n’a été opérée depuis la dernière pratiquée par un gouvernement de droite. Mais si nous votons cet article, les dotations de la branche famille seront bien diminuées de 700 millions d’euros en 2015.

Par conséquent, nous maintenons notre amendement de suppression, car nous pensons, en toute sincérité, qu’il s’agit d’une mesure injuste, qui remet profondément en cause notre système politique. Comme l’a dit Jean Desessard, il s’agit pour nous de défendre une vision politique de la société fondée sur la solidarité, sur un pacte républicain issu du programme du Conseil national de la Résistance, auquel nous sommes tous attachés. Il me semblait, jusqu’à présent en tout cas, que nous partagions pour le moins cette vision, mais je suis au regret de constater que vous ouvrez là une brèche dans ce pacte républicain. Nous souhaitons donc la suppression de l’article 61 A.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Fabienne Keller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Sans reprendre l’argumentation développée par mes collègues, je veux défendre à mon tour le principe de l’universalité et souligner combien cette mise sous condition de ressources est révélatrice d’une philosophie.

Je vis dans une ville socialiste où l’accès à tout, de la cantine à la crèche en passant par les transports publics, est maintenant fonction des revenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Vous êtes, madame la secrétaire d’État, en train d’appliquer le même principe à l’échelon national, en modulant le montant de toutes les prestations selon le revenu.

Le seuil de revenu est fixé aujourd’hui à 6 000 euros mensuels. On sait bien que ce sera moins l’année prochaine, puis encore moins l’année suivante, et que les classes moyennes – les plus nombreuses et donc les plus « productives » en termes d’économies sur la branche famille – seront assez rapidement, à l’avenir, touchées par la mise sous condition de ressources des allocations familiales.

Je voudrais en outre insister sur les inégalités que créent ces dispositifs imparfaits. Je ne critiquerai pas les caisses d’allocations familiales, qui font ce qu’elles peuvent pour essayer de cerner la situation des familles en appliquant quelque 250 critères et des seuils, mais, en procédant de la sorte, on crée forcément des injustices, des inégalités, et un sentiment d’iniquité entre familles aux situations tout à fait comparables.

Rendre les impôts plus cohérents, plus justes : c’était un engagement présidentiel, inspiré par M. Piketty. La fusion de l’impôt sur le revenu, de la CSG et de certaines prestations avait été promise, pour assurer plus d’égalité et de lisibilité.

Or, aujourd’hui, bien loin des principes intégrateurs d’une fiscalité bien conçue, nous sommes en train de « bricoler » pour dégager des économies sur la branche famille, quitte à créer des inégalités. Au risque de vous surprendre, madame la secrétaire d’État, je voudrais vous dire que, pour ma part, je préférerais que soit analysée la possibilité d’intégrer les allocations familiales dans cet impôt plutôt bien construit qu’est l’impôt sur le revenu !

Par ailleurs, je ne vois absolument pas ce que les enfants pauvres, que vous avez évoqués, ont à faire dans ce débat ! Le travail que j’ai mené sur les adolescents des quartiers sensibles montre qu’ils surconsomment certains médicaments. J’ai écrit cinq fois à ce sujet à la Direction générale de la santé et à Mme la ministre, qui ne m’a jamais répondu. Alors que les enfants des quartiers sensibles, chers à M. Dilain, sont mis sous camisole médicamenteuse, le Gouvernement reste dans l’inaction ; il en va de même pour les enfants pauvres, qui n’ont, je le redis, rien à faire dans ce débat !

Je partage complètement les préoccupations de Claude Dilain sur l’iniquité en matière de chômage, de conditions de vie, de chances de profiter de l’ascenseur républicain dans les quartiers fragiles, mais je ne suis pas sûre que la mise sous condition de ressources des allocations familiales ait vocation à remédier à ces inégalités…

Enfin, madame la secrétaire d'État, j’identifie, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, deux bombes à retardement : la déstructuration du congé parental et la remise en cause de l’universalité des allocations familiales. Avec ces deux dispositifs – s’agit-il de projets idéologiques ou de recettes de poche ? –, vous remettez en cause des principes qui fondent la politique familiale de la France ; je le regrette !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Je veux d’abord rappeler que le gros de la politique familiale, c’est l’aide à la garde des enfants et à l’accompagnement du jeune enfant.

Le pouvoir d’achat des familles est une question importante. Les aides ne couvrent pas entièrement les frais de garde des enfants, et le reste à charge pèse lourdement sur les budgets des familles, surtout quand il y a plusieurs jeunes enfants.

On nous dit que la modulation des allocations familiales est une mesure juste. Le sujet est récurrent, même à gauche. J’observe que, chaque fois qu’il y a eu à arbitrer, il a été décidé de ne pas moduler les allocations familiales, au nom de la solidarité horizontale, le pacte républicain reposant pour une part sur l’égalité des prestations et des droits. Je rappelle d’ailleurs que, en mars 2012, François Hollande s’était engagé, devant l’Union nationale des associations familiales, à ce qu’il n’y ait pas de modulation des allocations familiales. Cet engagement n’intervenait pas inopinément. En effet, Lionel Jospin, lorsqu’il était Premier ministre, avait maintenu la non-modulation des allocations familiales.

J’ai beaucoup de mesures à proposer qui pourraient servir une politique de justice sociale. À titre d’exemple, nos collègues députés ont voté une taxe sur les dividendes : voilà une mesure qui contribuerait à la justice sociale, mais on ne la retient pas !

On nous dit qu’il faut cibler les aides pour que l’argent aille à ceux qui en ont le plus besoin. Mais alors, pourquoi le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, concerne-t-il de façon universelle toutes les entreprises, même celles qui n’investissent pas, qui ne créent pas d’emplois ? Quand il s’agit du CICE, le principe de l’universalité prévaut et on ne se soucie pas de redistribution ! On ouvre le dispositif sans d’états d’âme aux entreprises de la grande distribution, par exemple, qui n’en ont pourtant pas besoin pour créer des emplois ou exporter !

Il est légitime d’avoir des désaccords, mes chers collègues, mais il faut veiller à la pertinence des arguments employés. Pour ma part, je pense que, à moyen terme, l’absence d’universalité renforcera une sorte d’émiettement, de concurrence entre les gens, qui ont déjà le sentiment que plus rien ne les unit. Autant je suis une fanatique de la redistribution, autant je considère que, pour asseoir la redistribution, une dose d’universalité est nécessaire.

Enfin, je souligne que la modulation des allocations familiales donnera beaucoup de travail aux CAF. Je voudrais que l’on détermine exactement le coût et la charge de travail supplémentaire que sa mise en place va représenter.

Si l’on veut faire de la redistribution sociale, notamment en faveur des familles pauvres, cher Claude Dilain, on pourrait commencer par veiller à ce que tous ceux qui ont droit au RSA, en particulier au RSA activité, soient bien informés de leurs droits. En effet, nous savons que beaucoup de gens ne font pas valoir leurs droits faute d’information. Ainsi, les CAF pourraient informer systématiquement les foyers éligibles au RSA activité de leurs droits et des démarches à accomplir. Cela participerait aussi du combat contre la pauvreté !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je mets aux voix les amendements identiques n° 7 rectifié, 14, 78, 115, 189, 209 et 264 rectifié.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

En conséquence, l'article 61 A est supprimé.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à zéro heure cinquante-cinq, est reprise à une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La séance est reprise.

Pour votre information, mes chers collègues, je précise qu’il nous reste vingt-quatre amendements à examiner, dont dix-huit tendant à insérer des articles additionnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 175, présenté par Mme Deroche, M. Béchu, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Milon, Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia et MM. D. Robert et Savary, est ainsi libellé :

Après l’article 61 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le quatrième alinéa de l’article L. 521-2 est ainsi modifié :

a) À la dernière phrase, après les mots : « président du conseil général », sont insérés les mots : « au vu d’un rapport établi par le service d’aide sociale à l’enfance » et après le mot : « maintenir », est inséré le mot : « partiellement » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« À compter du quatrième mois suivant la décision du juge, le montant de ce versement ne peut excéder 35 % de la part des allocations familiales dues pour cet enfant. » ;

2° Après le deuxième alinéa de l’article L. 543-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’un enfant est confié au service d’aide sociale à l’enfance, l’allocation de rentrée scolaire due à la famille pour cet enfant est versée à ce service. »

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Il s’agit d’un amendement récurrent…

La loi du 6 janvier 1986 a posé le principe selon lequel, lorsqu’un enfant est confié à l’aide sociale à l’enfance, l’ASE, la part des allocations familiales dues au titre de cet enfant est versée au département.

Ce principe connaît cependant une adaptation possible : le juge des enfants peut décider, d’office ou sur saisine du président du conseil général, de maintenir cette part à la famille. Or, dans la pratique, cette dérogation est devenue la règle. Compte tenu de l’état des finances des conseils généraux, il semblerait pourtant naturel qu’elle reste l’exception. Nous proposons que, en tout état de cause, la famille ne puisse recevoir, sur décision du juge, plus de 35 % de la part des allocations familiales dues au titre de l’enfant confié à l’ASE, les 65 % restants étant perçus par le conseil général.

Par ailleurs, l’amendement tend à prévoir que lorsqu’un enfant est confié à l’ASE, l’allocation de rentrée scolaire due à la famille pour cet enfant soit versée à ce service. C’est une autre disposition de bon sens, car on ne voit pas pourquoi des parents ayant perdu l’autorité parentale sur leurs enfants bénéficieraient de prestations qui sont en fait payées par la collectivité départementale.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Avis défavorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 61 A.

L’amendement n° 312 rectifié, présenté par MM. Mézard, Barbier, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et M. Requier, est ainsi libellé :

Après l’article 61 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 521-3 du code de la sécurité sociale, les mots : « d’un âge minimum » sont remplacés par les mots : « de quatorze ans ».

La parole est à M. Gilbert Barbier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Cet amendement vise à inscrire dans la loi que l’âge de l’enfant qui emporte le bénéfice de la majoration des allocations familiales est maintenu à 14 ans.

À l’Assemblée nationale, vous avez assuré, madame la secrétaire d’État, que l’âge ouvrant droit à la majoration ne serait pas repoussé de 14 à 16 ans. Nous avons tendance à vous faire confiance, mais pouvez-vous nous confirmer cet engagement ? Si oui, je retirerai mon amendement.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

J’ai en effet indiqué à l’Assemblée nationale, et tout à l’heure dans cette enceinte, qu’il n’est pas prévu de procéder à un report de 14 à 16 ans de l’âge ouvrant le bénéfice de la majoration des allocations familiales.

Vous pouvez donc, monsieur le sénateur, retirer votre amendement en toute confiance !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Je le retire et vous remercie, madame la secrétaire d’État.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 190, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 61

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement pour rendre compte de différentes possibilités de revalorisation significative de la prestation prévue par l’article L. 531-4 du code de la sécurité sociale en contrepartie d’une diminution de la durée du congé parental.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Le Gouvernement a confirmé, lors des débats à l’Assemblée nationale, que le congé parental serait modifié de façon substantielle par décret, pour porter sa durée à vingt-quatre mois au maximum pour les femmes et à douze mois pour les hommes, contre trente et six mois actuellement.

Plus de 95 % des bénéficiaires d’un congé parental sont des femmes, car la perte de revenu pour le couple est alors moindre, le revenu moyen des femmes étant encore aujourd’hui inférieur à celui des hommes.

Cela signifie que les femmes bénéficiant du congé parental perdront six mois de droits. Il s’agit donc en réalité, sous couvert de promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes, de prendre une mesure d’économie.

Si la durée du congé parental est réduite, il convient, en contrepartie, d’augmenter sa rémunération. Nous aurions volontiers déposé un amendement en ce sens, mais l’article 40 de la Constitution nous en empêche. C’est pourquoi nous demandons que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur les moyens de revaloriser le congé parental.

Toutefois, puisque nous avons adopté l’amendement de Mme Keller tendant à prévoir la remise d’un rapport sur ce thème, il me paraît inutile d’en demander un deuxième. Je retire donc mon amendement.

Pour l’année 2015, les objectifs de dépenses de la branche Famille de la sécurité sociale sont fixés à 54, 6 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 79, présenté par Mme Cayeux, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Remplacer le nombre :

par le nombre :

La parole est à Mme Caroline Cayeux, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

Cet amendement vise à rectifier l’objectif de dépenses de la branche famille, pour tenir compte de la suppression de la modulation des allocations familiales votée précédemment.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Je vous remercie, madame la rapporteur, de souligner que les différents amendements adoptés par le Sénat ont conduit à accroître le déficit de la branche famille de 400 millions d’euros, ce dont vous tirez les conséquences au travers de cet amendement. Je ne peux, dans ces conditions, que m’en remettre à la sagesse du Sénat.

L'amendement est adopté.

L'article 62 est adopté.

précédemment examiné

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je rappelle que les articles 63 et 64, appelés par priorité, ont été examinés précédemment.

Titre VI

DISPOSITIONS RELATIVES À LA GESTION DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DES ORGANISMES CONCOURANT À LEUR FINANCEMENT AINSI QU’AU CONTRÔLE ET À LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE

I. – Les missions et les activités de développement, de production, de support et de pilotage local des centres régionaux de traitement informatique, du service commun des caisses d’allocations familiales de la région parisienne et des centres nationaux d’études et de développement informatique de la branche Famille du régime général sont transférées à la Caisse nationale des allocations familiales à compter du 1er juillet 2015.

II. – Les droits, biens et obligations des organismes accomplissant les missions et les activités mentionnées au I sont transférés à la Caisse nationale des allocations familiales au 1er juillet 2015.

III. – Les centres régionaux de traitement informatique mentionnés au I sont dissous le 30 juin 2015. –

Adopté.

I. – L’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Après le 4°, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° Les actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle exercées, en application de l’article L. 114-10, par les agents mentionnés au présent article, visant à refuser l’accès à une information formellement sollicitée, à ne pas répondre ou à apporter une réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d’information, d’accès à une information, ou à une convocation, émanant des caisses d’allocation familiales et des caisses d’assurance retraite et de santé au travail, dès lors que la demande est nécessaire à l’exercice du contrôle ou de l’enquête. » ;

b) Après la deuxième phrase du sixième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Tout fait ayant donné lieu à une sanction devenue définitive en application du présent article peut constituer le premier terme de récidive d’un nouveau manquement sanctionné par le présent article. » ;

2° À la première phrase du II, le mot : « dixième » est remplacé par le mot : « trentième ».

II

1° Les mots : « six mois » sont remplacés par les mots : « deux ans » ;

2° Le montant : « 15 000 euros » est remplacé par le montant : « 30 000 € » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Toute personne qui refuse délibérément de s’affilier ou qui persiste à ne pas engager les démarches en vue de son affiliation obligatoire à un régime de sécurité sociale, en méconnaissance des prescriptions de la législation en matière de sécurité sociale, est punie d’un emprisonnement de six mois et d’une amende de 15 000 € ou seulement de l’une de ces deux peines. »

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 81, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 12

Après les mots :

amende de

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Cet amendement a pour objet d’assurer une meilleure proportionnalité des sanctions en matière d’incitation au non-respect des règles de la sécurité sociale ou de refus persistant d’affiliation. Les sanctions financières semblent plus adaptées pour répondre à ces comportements.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Avis défavorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Caroline Cayeux, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

Je souhaite interroger Mme la secrétaire d’État sur la rationalisation informatique de la branche famille.

Le président de la CNAF nous a alertés sur les délais de mise en œuvre de cette rationalisation, considérant que l’échéance, fixée au 1er juillet 2015, était un peu trop proche. Pensez-vous, madame la secrétaire d’État, que les délais puissent être tenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Si la majorité des dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale entreront en application au 1er janvier 2015, nous avons choisi la date du 1er juillet pour la mise en œuvre de la modulation des allocations familiales, justement pour donner aux caisses d’allocations familiales le temps nécessaire à la mise en place des programmes informatiques de saisine des données relatives aux ressources des familles. Cette décision ayant été prise sur préconisation de la CNAF, le délai pourra, en principe, être tenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

Je vous remercie, madame la secrétaire d'État.

L'article 65 est adopté.

I. – L’article L. 242-1-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 242 -1 -3 . – Lorsqu’un redressement de cotisations sociales opéré par les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 ou L. 752-4 a une incidence sur les droits des salariés au titre de l’assurance vieillesse, ces organismes transmettent les informations nécessaires aux caisses mentionnées à l’article L. 215-1, afin que ces dernières procèdent à la rectification des droits des salariés concernés.

« En cas de constat de travail dissimulé, au sens des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail, révélant une situation de collusion entre l’employeur et son salarié, cette rectification ne peut être réalisée qu’à compter du paiement du redressement. »

II. – La section 1 du chapitre V du titre II du livre VII du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 725-12-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 725 -12 -2 . – Lorsqu’un redressement de cotisations sociales opéré par l’organisme mentionné à l’article L. 723-3 a une incidence sur les droits des salariés au titre de l’assurance vieillesse, cet organisme procède à la rectification de leurs droits.

« En cas de constat de travail dissimulé, au sens des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail, révélant une situation de collusion entre l’employeur et son salarié, cette rectification ne peut être réalisée qu’à compter du paiement du redressement. »

III. – Le présent article s’applique aux redressements notifiés à compter du 1er janvier 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 303 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Bizet, Bouchet, César et del Picchia, Mmes Deromedi, Des Esgaulx et Estrosi Sassone, MM. J. Gautier, Grand, Lefèvre et Duvernois, Mmes Lamure et Mélot et M. Raison, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

transmettent

insérer les mots :

dans un délai de sept jours ouvrables

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Fixer un délai relativement court pour la transmission aux caisses de sécurité sociale, par les URSSAF, des informations relatives aux droits des salariés en cas de redressement de cotisations sociales est la garantie pour ceux-ci de voir leurs droits pris en compte le plus rapidement possible.

La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Avis défavorable.

L'amendement est adopté.

L'article 66 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de sept amendements.

L’amendement n° 273 rectifié quater, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mmes Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Lefèvre, J. Gautier, Bizet, Bouchet et César, Mme Des Esgaulx, M. Grand, Mme Deromedi, M. del Picchia, Mme Estrosi Sassone, M. Duvernois, Mmes Lamure et Mélot et M. Raison, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre II du titre IV du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 142-... ainsi rédigé :

« Art. L. 142-... - En cas de litige portant sur des cotisations de sécurité sociale, des majorations de retard, ou encore sur la contribution sociale généralisée, le cotisant est invité à se faire entendre devant la Commission de recours amiable, suivant des modalités fixées par décret. »

L’amendement n° 302 rectifié quater, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Bizet, Bouchet, César et del Picchia, Mmes Deromedi, Des Esgaulx et Estrosi Sassone, MM. J. Gautier, Grand, Lefèvre et Duvernois, Mmes Lamure et Mélot et M. Raison, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 243-6-3 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 243-6-3. – Tout cotisant a la faculté de solliciter de l’organisme de recouvrement dont il dépend son interprétation sur une situation de fait au regard des dispositions législatives et réglementaires relatives aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale.

« La demande doit être faite en lettre recommandée. Elle doit contenir l’identité du demandeur, la disposition légale visée ainsi que la présentation écrite, précise et complète de la situation de fait.

« Tant qu’aucune décision n’a été prise, la demande doit être complétée par tout élément nouveau susceptible de concerner la situation de l’intéressé.

« La décision est communiquée au demandeur dans un délai de six mois à compter de l’envoi de la demande rédigée conformément au deuxième alinéa. Elle indique les voies de recours.

« Une publicité des différentes décisions rendues par les organismes est instaurée selon des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« La décision prise lie pour l’avenir l’organisme de recouvrement sauf en cas de modification des dispositions légales visées ou si la situation décrite a été substantiellement modifiée ou encore si les informations données étaient erronées.

« Aucun redressement ne pourra être appliqué à un cotisant de bonne foi qui a interrogé un organisme de recouvrement dans les conditions prévues par le deuxième alinéa et auquel il n’a pas été apporté de réponse dans le délai requis.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application des présentes dispositions. »

L’amendement n° 222 rectifié quater, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mmes Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Lefèvre, J. Gautier, Bizet et Bouchet, Mme Des Esgaulx, MM. César et Grand, Mme Deromedi, M. del Picchia, Mme Estrosi Sassone, M. Duvernois, Mmes Lamure et Mélot et M. Raison, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 243-6-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 243-6-... ainsi rédigé :

« Art. L. 243 -6 -.. . – À l’issue de la procédure contradictoire et avant l’envoi de l’avertissement ou de la mise en demeure prévu à l’article L. 244-2, les réclamations concernant les relations d’un organisme de recouvrement avec ses usagers sont reçues par une personne désignée par le directeur, après avis du conseil au sein de cet organisme, afin d’exercer la fonction de médiateur pour le compte de celui-ci. Son intervention ne peut pas être demandée si une procédure a été engagée devant une juridiction compétente par l’usager la sollicitant. L’engagement d’une telle procédure met fin à la conciliation. Seul le cotisant peut demander l’intervention d’un médiateur auprès de l’organisme de recouvrement dont il dépend.

« Le rôle et les pouvoirs du médiateur sont fixés par décret. »

L’amendement n° 306 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Bizet, Bouchet, César et del Picchia, Mmes Deromedi et Des Esgaulx, M. Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. J. Gautier et Grand, Mme Lamure, M. Lefèvre, Mme Mélot et M. Raison, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 243-7-7-… ainsi rédigé :

« Art. L. 243-7-7-… - Lorsque le contrôle est effectué au sein de l’entreprise, les documents ou supports d’information ne peuvent être emportés par l’inspecteur à l’organisme qu’après autorisation écrite du cotisant.

« Le cotisant doit avoir la possibilité d’un débat oral et contradictoire avec l’inspecteur du recouvrement sous peine d’irrégularité de la procédure de contrôle. »

L’amendement n° 305 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Bizet, Bouchet, César et del Picchia, Mmes Deromedi, Des Esgaulx et Estrosi Sassone, MM. J. Gautier et Grand, Mme Lamure, M. Lefèvre, Mme Mélot et MM. Raison et Duvernois, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 243-11 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sauf dans le cas de présomption de travail dissimulé, l’organisme de recouvrement doit faire parvenir un avis de contrôle à l'employeur ou au travailleur indépendant au moins quinze jours ouvrables avant la date de la première visite. »

L’amendement n° 298 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Bizet, Bouchet, César et del Picchia, Mmes Deromedi, Des Esgaulx et Estrosi Sassone, MM. J. Gautier, Grand, Lefèvre et Duvernois, Mmes Lamure et Mélot et M. Raison, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l’article L. 243-12-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 243-12-3-… ainsi libellé :

« Art. L. 243-12-3-… Dès lors qu'un redressement porte sur un non-respect d'une limite d'exonération de cotisations ou de contributions sociales prévue par la loi, et en cas de bonne foi du cotisant, seule la fraction dépassant cette limite d'exonération est réintégrée dans l'assiette des dites cotisations ou contributions. »

II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° 301 rectifié ter, présenté par Mme Gruny, M. Milon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Chasseing, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deroche et Deseyne, MM. Dusserre, Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli et Imbert, M. Lemoyne, Mme Micouleau, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia, MM. D. Robert, Savary, Bizet, Bouchet, César et del Picchia, Mmes Deromedi, Des Esgaulx et Estrosi Sassone, MM. J. Gautier, Grand, Lefèvre et Duvernois, Mmes Lamure et Mélot et M. Raison, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L’article L. 244-9 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La contestation de la mise en demeure, prévue à l’article L. 244-2 dans le cadre du contentieux général de la sécurité sociale, suspend toute procédure en recouvrement des cotisations. »

II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter ces sept amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Ces amendements sont défendus, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

La commission partage globalement l’objectif d’amélioration des relations entre les URSSAF et les cotisants, mais souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur ces amendements, dans la mesure où la faisabilité concrète à brève échéance de certaines des mesures proposées ne lui paraît pas toujours assurée.

En tout état de cause, la commission demande le retrait des amendements n° 273 rectifié quater, 302 rectifié quater, 305 rectifié ter et 298 rectifié ter. Par ailleurs, elle considère que l’amendement n° 222 rectifié quater est satisfait, et émet un avis favorable sur les amendements n° 306 rectifié bis et 301 rectifié ter.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Le Gouvernement considère que ces amendements ne contribueront pas à faciliter la lutte contre la fraude et à la rendre plus efficace.

Or il ne peut y avoir de réduction des dépenses ou d’amélioration de l’équilibre des budgets sociaux sans lutte résolue contre la fraude. Le Gouvernement est donc défavorable à l’ensemble de ces amendements, qui relèvent tous du même esprit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je trouve l’avis du Gouvernement un peu lapidaire…

Notre objectif est de lutter activement contre la fraude, peut-être même de façon encore plus efficace que ne le fait le Gouvernement. Nous avons donc examiné attentivement cette question et demandé l’avis de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS. Les avis émis par la commission résultent de cette consultation et ne sont nullement laxistes : il ne s’agit pas d’ouvrir grand les portes à la fraude !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Monsieur Cardoux, les amendements n° 273 rectifié quater, 302 rectifié quater, 222 rectifié quater, 306 rectifié bis, 305 rectifié ter, 298 rectifié ter et 301 rectifié ter sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Compte tenu des avis que vient de fournir la commission, la sagesse commande de retirer tous les amendements présentés, à l’exception des amendements n° 306 rectifié bis et 301 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Les amendements n° 273 rectifié quater, 302 rectifié quater, 222 rectifié quater, 305 rectifié ter et 298 rectifié ter sont retirés.

Je mets aux voix l'amendement n° 306 rectifié bis.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 66.

Je mets aux voix l'amendement n° 301 rectifié ter.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 66.

L'amendement n° 265, présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début de l’article L. 243-7-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l’entreprise contrôlée par une entreprise dominante, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3 du code de commerce, a fraudé en matière de cotisations sociales, la société mère ou la société holding de cet ensemble est tenue subsidiairement et solidairement, y compris au paiement des contributions et cotisations ainsi que des majorations et pénalités dues. »

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Cet amendement de précision vise à étendre la responsabilité des sociétés mères et holdings en cas de fraude de leurs filiales aux cotisations salariales, afin de lutter plus efficacement contre celle-ci, entendue de manière à la fois plus globale et plus précise.

En effet, aujourd’hui, la définition du travail dissimulé recouvre deux infractions distinctes : la dissimulation d’activité et la dissimulation d’emploi salarié. Ainsi, même si l’infraction de travail dissimulé est également caractérisée par le fait de ne pas accomplir auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales les déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales, nous pensons que la législation doit être la plus précise possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Cet amendement a pour objet de rendre solidaire une holding de ses filiales en cas de fraude aux cotisations sociales sans prendre en compte la diversité des situations. L’avis de la commission est défavorable.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Je m’interroge sur ce que recouvre la notion de fraude, hors le travail dissimulé. En matière de fraude aux cotisations sociales, en effet, c’est le travail dissimulé qui constitue la fraude.

Si c’est le travail dissimulé qui est visé, cet amendement est satisfait, puisque la société mère ou la holding est tenue subsidiairement et solidairement au paiement des cotisations sociales dues à la suite d’une infraction commise dans une entreprise contrôlée, le lien entre les deux entreprises étant défini comme un lien de dépendance ou de contrôle au sens du code de commerce.

L’amendement ne serait pas satisfait si la fraude recouvrait autre chose que le travail dissimulé, mais, à ce stade, je ne vois pas de quoi il pourrait s’agir.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 8 rectifié est présenté par Mmes Lienemann et Claireaux, M. Daunis, Mme Emery-Dumas, M. Labazée et Mme Schillinger.

L'amendement n° 191 est présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

L'amendement n° 315 rectifié est présenté par MM. Mézard, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 66

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La section 5 du chapitre V du titre II du livre III de la sixième partie du code du travail est ainsi modifiée :

1° L’article L. 6325-16 est complété par les mots : « et aux demandeurs d’emploi depuis deux ans » ;

2° À la première phrase de l’article L. 6325-17, après les mots : « et plus, », sont insérés les mots : «, soit de demandeurs d’emploi depuis plus de deux ans, ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 191.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. J’aurais bien laissé à mon collègue Jacques Mézard le soin de le faire, mais il n’est pas là pour défendre son amendement !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Monsieur le rapporteur général, lorsque, conjointement avec ma collègue Marie-Noëlle Lienemann, j’ai suggéré d’ouvrir les emplois d’avenir aux chômeurs, vous m’avez répondu que ces derniers n’avaient pas besoin de ce dispositif, réservé aux jeunes, mais plutôt de formations qualifiantes pour se réinsérer durablement dans l’emploi. Cet amendement a précisément pour objet de répondre à ce besoin.

Nous proposons en effet d’étendre le bénéfice des contrats de professionnalisation aux chômeurs de plus de 45 ans. Ces contrats permettent à des personnes de bénéficier d’une formation en alternance entre un organisme de formation et une entreprise, dans le cadre de la formation continue. Ils permettent de bénéficier à la fois d’une formation qualifiante et d’une rémunération, au moins égale au SMIC ou à 80 % du salaire défini par convention collective.

Nous le savons, le manque de formation est l’une des raisons qui empêchent les chômeurs de retrouver un emploi. Il en existe bien sûr d’autres, comme le manque d’attractivité, réel ou supposé, des postes, les conditions de travail proposées ou encore les salaires. Lors d’une question orale avec débat, j’avais souligné devant le ministre du travail que nous ne connaissions pas la part respective de chacune de ces causes.

Néanmoins, le manque de formation peut être une cause de chômage de longue durée et il nous faut utiliser tous les outils à notre disposition pour lutter efficacement contre ce fléau.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L’amendement n° 315 rectifié n'est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques n° 8 rectifié et 191 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Ces amendements ont pour objet l’extension aux chômeurs de longue durée de plus de 45 ans du bénéfice des contrats de professionnalisation. Cela peut contribuer au développement souhaité des contrats en alternance ; pour autant, est-ce la bonne solution ? Il importe qu’une formation qualifiante soit apportée. Un amendement relatif aux contrats d’avenir a déjà été examiné.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Même si je comprends parfaitement la démarche des auteurs des amendements, j’aimerais entendre l’avis du Gouvernement, sachant que celui de la commission est défavorable.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Avis défavorable !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je mets aux voix les amendements identiques n° 8 rectifié et 191.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L’article L. 114-12-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Les deuxième et troisième phrases du troisième alinéa sont supprimées ;

2° Le septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au 1er janvier 2016, il contient également le montant des prestations en espèces servies par les organismes mentionnés au premier alinéa. »

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 268, présenté par M. Daudigny, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 114-12-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° La troisième phrase du troisième alinéa est supprimée ;

2° Le septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il donne également directement accès en tant que de besoin aux montants des prestations en espèces mis à disposition par les organismes mentionnés au premier alinéa. »

La parole est à M. Yves Daudigny.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

L’amendement est retiré, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 268 est retiré.

Je mets aux voix l'article 67.

L'article 67 est adopté.

Au premier alinéa de l’article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « sans qu’il soit tenu d’en faire une demande préalable » sont supprimés. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 4 rectifié bis est présenté par Mmes Lienemann, Claireaux et Emery-Dumas.

L'amendement n° 187 rectifié est présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.

L'amendement n° 236 rectifié est présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 68

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale, les mots : « 25 % en cas de constat de l’infraction définie aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail » sont remplacés par les mots : « 40 % en cas de constat de l’infraction définie aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail ou de 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ».

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Là encore, je laisse à mon collègue Jean Desessard le soin de présenter le dispositif !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 187 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Cet amendement a pour objet de lutter plus efficacement contre la fraude aux cotisations sociales. Aujourd’hui, l’opinion publique, guidée par les médias, se focalise sur la fraude aux prestations sociales par les particuliers. Celle-ci est réelle, nous ne le nions pas, mais la fraude aux cotisations imputable aux employeurs est beaucoup plus importante. À titre de comparaison, si la fraude aux prestations représentait 290 millions d’euros en 2012, celle aux cotisations aurait été de l’ordre de 20 milliards à 25 milliards d’euros cette même année, selon la Cour des comptes, soit un rapport de 1 à 100 !

Pour lutter plus efficacement contre la fraude aux cotisations sociales, nous proposons de rendre les majorations des sommes recouvrées plus dissuasives, notamment dans le cas de manœuvres frauduleuses. Aujourd’hui, le montant du redressement des cotisations et contributions sociales mis en recouvrement à l’issue d’un contrôle est majoré de 25 %. Nous souhaitons porter ce taux à 40 %, et même à 80 % en cas de manœuvres frauduleuses.

Cette majoration des sanctions permettra de s’attaquer à une partie du problème, mais l’enjeu principal reste le taux de redressement. À titre d’exemple, le taux de redressement de la fraude liée au travail illégal n’est que de 1, 4 % à 1, 7 %. Le renforcement des moyens d’investigation fait l’objet d’un amendement qui a été déposé par ma collègue Aline Archimbaud et que je défendrai dans quelques instants.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 236 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Ces amendements identiques visent à faire passer le taux de majoration des sommes recouvrées de 25 % à 40 %, voire à 80 % en cas de manœuvres frauduleuses, pour les cas de travail dissimulé par dissimulation d’activité ou par dissimulation d’emploi salarié.

Fixer un taux de majoration de 80 % en cas de manœuvres frauduleuses paraît excessif. En outre, il faut l’avouer, la notion même de « manœuvres frauduleuses » est un peu vague.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

La majoration de redressement en cas de constat de travail dissimulé a déjà été renforcée par l’Assemblée nationale en première lecture. En outre, au cours des dernières années, le Gouvernement a considérablement renforcé les dispositifs de sanction et de contrôle à l’encontre du travail dissimulé.

Cela étant dit, je m’interroge : si le recours au travail dissimulé continue d’être aussi important, est-ce parce que les sanctions ne sont pas assez lourdes ou parce que les délinquants échappent trop souvent à la détection ?

J’ai plutôt tendance à privilégier la seconde hypothèse. Plutôt que d’aggraver les sanctions, il conviendrait donc de mettre en place les dispositifs nécessaires pour mieux identifier le travail dissimulé et procéder aux recouvrements dans les meilleurs délais. Comme dans d’autres domaines, le Gouvernement n’est pas du tout convaincu que la dissuasion résulte de l’augmentation des peines.

En conséquence, le Gouvernement émettra un avis défavorable sur ces amendements identiques s’ils sont maintenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je mets aux voix les amendements identiques n° 4 rectifié bis, 187 rectifié et 236 rectifié.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 281 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, MM. Desessard, Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 68

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi un rapport étudiant les moyens d’actions des organismes sociaux contre la fraude aux cotisations, en renforçant notamment leurs pouvoirs d’investigation, en les dotant de nouveaux outils plus efficaces en matière de recouvrement des montants redressés et en augmentant fortement les pénalités.

Ce rapport estime par ailleurs le coût, mais aussi les bénéfices que pourrait rapporter la constitution d’équipes inter-régionales de lutte contre la fraude et la création d’une direction nationale d’enquête chargée de combattre la grande fraude, celle qui concerne les grandes entreprises.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je dois dire que je n’ai pas très bien compris l’argumentation de Mme la secrétaire d’État, mais peut-être cela allait-il trop vite à cette heure de la nuit…

Force est de constater que lorsqu’on parle de fraude, on pense toujours qu’elle est le fait de particuliers.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Or j’ai pourtant démontré que la fraude était avant tout le fait des employeurs. Ni M. le rapporteur général ni Mme la secrétaire d’État n’ont contesté mes chiffres ! C’est donc qu’ils sont exacts ! Je le répète, le rapport entre la fraude des particuliers et celle des employeurs est de 1 à 100.

Vous dites, madame la secrétaire d’État, que ce n’est pas en alourdissant les amendes que l’on réglera le problème. Pour notre part, nous pensons néanmoins que cela peut permettre d’envoyer un signal utile, mais nous tenons compte de votre avis. Selon vous, il vaut mieux renforcer les contrôles et les moyens d’investigation afin de mieux repérer les fraudeurs : tel est précisément l’objet de l’amendement n° 281 rectifié, madame la secrétaire d’État ! Vous m’avez devancé…

Le présent amendement vise à accroître les moyens de contrôle. Toutefois, l’article 40 de la Constitution nous empêchant de chiffrer exactement ces moyens, nous demandons au Gouvernement la remise d’un rapport sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Vous demandez un rapport de plus, cher collègue, en l’occurrence sur les moyens d’action des organismes sociaux contre la fraude aux cotisations sociales.

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, mais, pour ma part, je trouve qu’il serait effectivement intéressant de connaître les moyens mis en œuvre pour atteindre les objectifs en matière de lutte contre la fraude. Pour autant, l’élaboration d’un rapport sur ce sujet ne nous paraît pas absolument nécessaire.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Une partie des informations souhaitées figure déjà dans les rapports régulièrement établis par les organismes, en particulier par les URSSAF. Un autre rapport n’est donc pas nécessaire. En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

I. – Le code du travail est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa de l’article L. 8224-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le fait de méconnaître les interdictions définies au même article L. 8221-1 en commettant les faits à l’égard de plusieurs personnes ou d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur est puni d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 75 000 €. » ;

2° Après le premier alinéa des articles L. 8234-1 et L. 8243-1, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende :

« 1° Lorsque l’infraction est commise à l’égard de plusieurs personnes ;

« 2° Lorsque l’infraction est commise à l’égard d’une personne dont la vulnérabilité ou l’état de dépendance sont apparents ou connus de l’auteur. »

II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° La section 2 ter du chapitre III bis du titre III du livre Ier est complétée par un article L. 133-6-8-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 133 -6 -8 -4 . – Le travailleur indépendant qui a opté pour l’application de l’article L. 133-6-8 est tenu de dédier un compte ouvert dans un des établissements mentionnés à l’article L. 123-24 du code de commerce à l’exercice de l’ensemble des transactions financières liées à son activité professionnelle. » ;

2° Après le premier alinéa de l’article L. 243-7-7, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La majoration est portée à 40 % dans les cas mentionnés à l’article L. 8224-2 du code du travail. »

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Je suis saisi de deux amendements.

L'amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° A la première phrase du premier alinéa de l’article L. 243-7-6, le pourcentage : « 10 % » est remplacé par le pourcentage : « 20 % » ;

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Cet amendement a été adopté à l’unanimité par la commission des finances.

Selon la Cour des comptes, les majorations existantes restent relativement modestes et sont donc peu dissuasives. Elle affirme que le manque à gagner, pour la sécurité sociale, est de l’ordre de 20 milliards d’euros.

L’amendement n° 16 rectifié vise donc à porter de 10 % à 20 % la majoration de redressement en cas de récidive d’une pratique non conforme à la législation en vigueur en matière de cotisations sociales. Au regard de la jurisprudence qui s’est dégagée, on peut considérer que la récidive d’une pratique non conforme à la législation en vigueur peut être assimilée à une fraude.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

L'amendement n° 15, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéas 11 et 12

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

2° Au premier alinéa de l’article L. 243-7-7, le pourcentage : « 25 % » est remplacé par le pourcentage : « 40 % ».

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

L’amendement n° 15 tend à porter de 25 % à 40 % la majoration de redressement due en cas de constat de travail dissimulé.

En pratique, le travail dissimulé est rarement sanctionné pénalement. Il est pourtant en pleine explosion ! Ainsi, dans ma commune, tous les matins, à partir de 7 heures, une trentaine de personnes d’origine incertaine attendent devant un café qu’un employeur vienne les chercher en camionnette. Cela fait deux ans que j’alerte le préfet et les services compétents, mais personne n’est même jamais venu voir ce qu’il se passe ! Je vous laisse imaginer l’effet que produit cette situation dans l’opinion…

Puisque nous n’avons pas les moyens, ou la volonté, de mettre fin à ces pratiques, la dissuasion pourrait être une voie intéressante. On sait très bien que, au pénal, avec de bons avocats, on s’en tire toujours à bon compte. En revanche, la perspective d’une forte amende peut donner à réfléchir…

Je souligne que mes deux amendements ne visent que les cas de récidive. Augmenter les majorations serait sûrement un bon moyen de lutter contre le travail dissimulé que, sur le terrain, on voit se développer de manière totalement ouverte et anarchique aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

La commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur ces deux amendements, considérant que si l’on voulait renforcer la lutte contre la fraude, il fallait effectivement s’en donner les moyens et instaurer des majorations dissuasives.

Permettez-moi néanmoins une remarque, monsieur Delattre : dans l’objet de l’amendement n° 15, l’estimation à 20 milliards d’euros du montant de la fraude aux cotisations sociales est attribuée à l’ACOSS. Or le directeur de cet organisme, que nous avons auditionné, a formellement démenti ce chiffre. Selon ses propres mots, c’est « n’importe quoi ! »

Si le coût de la fraude était aussi élevé, cela signifierait que notre pays compte plus d’un million de travailleurs clandestins, auquel cas le petit bistrot que vous évoquez serait plutôt une grande surface !

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

Quand le travail dissimulé constitue la structure de l’entreprise et son mode de fonctionnement, il n’y a aucune raison d’éprouver la moindre empathie pour elle et de chercher d’une quelconque façon à la préserver. Si le montant des pénalités imposées la conduit à fermer, ce n’est pas grave, car ce modèle social et économique ne mérite pas de survivre.

Quand le travail dissimulé n’est pas le mode ordinaire d’organisation du travail, il doit néanmoins être sanctionné. Cependant, s’il peut être tentant d’augmenter les pénalités, j’attire votre attention sur le fait que celles-ci sont déjà relativement importantes : leur montant, forfaitaire, correspond à six mois de cotisations salariales en cas de travail dissimulé, quelle que soit la durée effective de ce dernier. Si une entreprise sanctionnée ne recourant pas de manière habituelle au travail dissimulé ne peut pas payer, on ne recouvrera pas les pénalités : à quoi sert-il alors de les augmenter ? De plus, si l’entreprise est amenée à cesser son activité, ce n’est pas non plus une bonne opération.

Le Gouvernement ne pense donc pas que la surenchère en matière de pénalités soit une bonne solution pour accroître l’efficacité de la lutte contre la fraude aux cotisations et le travail dissimulé, dans laquelle nous sommes déjà très engagés. En conséquence, il émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Force est de reconnaître que Mme la secrétaire d’État est cohérente : elle a émis un avis défavorable tant sur mon amendement n° 187 rectifié que sur ceux de M. Delattre, qui ont le même objet. C’est d’ailleurs pour cette raison que je les voterai.

Il y a cependant une chose qui me gêne un peu dans votre discours, madame la secrétaire d’État : vous semblez dire qu’il ne faut pas aggraver la situation des entreprises en difficulté et que, dans ce cas, le contrôle se doit d’être léger.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Peut-être est-ce la raison pour laquelle vous vous êtes opposée à ma demande de remise d’un rapport sur les moyens de contrôle…

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

C’est de la mauvaise foi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Madame la secrétaire d’État, j’attire votre attention sur le fait que les entreprises qui battent de l’aile tirent souvent sur les prix et peuvent provoquer la faillite de sous-traitants. Il n’est donc pas sans risques de vouloir à tout prix maintenir en vie des entreprises en mauvaise santé.

Monsieur le rapporteur général, je suis surpris de votre position. Déjà, lorsque nous avons évoqué les contrats d’avenir, vous vous étiez opposé à nos propositions au motif qu’il fallait plutôt apporter des formations qualifiantes. En bon élève, j’ai donc présenté un amendement en ce sens, mais vous ne vous y êtes pas montré favorable non plus. Alors que faut-il faire pour obtenir votre accord ?

Dans la même veine, vous venez d’émettre un avis favorable sur les amendements de M. Delattre, après avoir donné un avis défavorable à mon amendement n° 187 rectifié, qui avait pourtant le même objet ! Il y a de quoi se demander si ce n’est pas un délit de…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

C’est une forme de discrimination ! Je suis un peu déçu : j’aurais aimé que vous émettiez également un avis favorable sur mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je n’avais pas remarqué, monsieur Desessard, que votre amendement était exactement identique à ceux de M. Delattre. Il me semblait qu’il y avait quelques légères différences. Mettons cela sur le compte de la fatigue… En tout état de cause, l’essentiel, c’est que la disposition soit votée.

En revanche, concernant les contrats de professionnalisation, je vous ai dit que, à titre personnel, les exonérer de cotisations sociales ne me choquerait pas, mais mon rôle est de représenter la commission, qui en l’occurrence avait émis un avis défavorable, peut-être à tort. Il faudra, le cas échéant, y revenir plus tard, par exemple à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi » du projet de loi de finances.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'article 69 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l’ensemble de la quatrième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

La quatrième partie du projet de loi est adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

En début de semaine, nous soulignions le caractère responsable de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, au regard tant du redressement des comptes sociaux que du respect des engagements pris en matière de compensation des pertes de recettes induites par la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Nous saluions également un projet ambitieux et volontariste de modernisation de notre système de santé, marqué par des axes forts : le financement des soins, la maîtrise des dépenses de médicament, l’évolution de l’organisation hospitalière vers plus de proximité, le virage vers les soins ambulatoires.

Enfin, nous faisions valoir un projet de justice sociale, ne prévoyant aucun transfert de charges ni nouvelle franchise, instaurant la modulation des allocations familiales et des dispositions facilitant l’accès des foyers en difficulté à des soins de qualité.

Or, ce soir, après trois jours et trois nuits de travaux de qualité, conduits dans un esprit de respect mutuel, le texte soumis à notre vote n’est plus exactement celui du projet de loi initial. La nouvelle majorité sénatoriale a légitimement voulu le marquer de son empreinte, et l’a donc modifié en affirmant ses valeurs, en déclinant sa vision de la société au fur et à mesure de la discussion des articles. Je le dis nettement : ses valeurs, sa vision de l’avenir ne sont pas les nôtres !

Ainsi, vous avez inscrit une réduction supplémentaire des dépenses de santé de 1 milliard d’euros. On ne peut prendre une telle mesure sans mettre en péril la qualité de notre système de soins, sans accentuer les inégalités territoriales et les inégalités d’accès aux soins que subissent les plus défavorisés de nos concitoyens.

Vous avez décidé, un peu à la surprise générale, de supprimer les exonérations de franchise dont bénéficient les allocataires de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé, l’ACS, ce qui pénalisera les familles les plus fragiles de notre pays.

Que vous supprimiez la modulation des allocations familiales ou que vous rétablissiez des jours de carence témoigne que vous n’avez pas le même idéal de justice que nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

De même, lorsque vous modifiez très fortement, au détour de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, les modalités d’accès à la retraite, nous ne pouvons pas vous suivre.

Vous comprendrez donc, mes chers collègues, que le groupe socialiste votera contre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale tel qu’il est issu de nos travaux.

Cela étant précisé, je voudrais maintenant m’adresser à notre collègue Francis Delattre.

Monsieur Delattre, vous avez souvent évoqué la question de la dette sociale. Nous pouvons partager l’inquiétude que vous inspire l’évolution possible des taux d’intérêt dans les mois et les années à venir. Nous sommes d’accord avec vous sur le fait qu’il est scandaleux de reporter sur nos enfants et petits-enfants la charge de nos dépenses de santé. Mais ne payons-nous pas aujourd’hui, pour partie en tout cas, le fait que des décisions qui auraient dû être prises en d’autres temps ne l’ont pas été ?

À l’époque où notre ancien collègue Alain Vasselle était rapporteur général de la commission des affaires sociales, il avait proposé plusieurs années de suite d’augmenter la CRDS, la contribution pour le remboursement de la dette sociale. Or cette question est au cœur du débat sur la résorption des déficits ! Des amendements portant sur ce sujet ont d’ailleurs été très bien défendus en commission, mais ils n’ont pas survécu à la discussion en séance plénière.

Je rappelle en outre que, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, une majorité, qui n’était pas de gauche, avait décidé d’allonger la durée de vie de la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, jusqu’en 2024.

Par conséquent, si la dette sociale est ce qu’elle est aujourd’hui, si elle nous inquiète tant, cela tient non pas aux choix opérés par le Gouvernement depuis 2012, mais au fait que certains n’ont pas su prendre leurs responsabilités en d’autres temps. §

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, ce texte, tel qu’issu des travaux de l’Assemblée nationale, comportait déjà la mise en œuvre du pacte de responsabilité, avec, au titre de 2015, des mesures d’économie de 21 milliards d’euros pour la santé et la protection sociale et de 9, 6 milliards d’euros pour la sécurité sociale. Nous ne pouvions dès lors pas le soutenir, d’autant qu’il ne prévoyait quasiment pas de recettes nouvelles. D’ailleurs, la seule recette nouvelle adoptée à l’Assemblée nationale, à savoir la taxation des dividendes, a été supprimée par le Sénat.

Pendant trois jours et trois nuits, le groupe CRC a fait valoir des propositions pour dégager des ressources nouvelles et a montré sa volonté d’aller vers une société plus juste, fondée sur la solidarité, une société qui mettrait en son cœur l’humain, et non pas la finance, qu’elle utiliserait au contraire pour répondre aux besoins de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

Malheureusement, trop peu de mesures en faveur des assurés sociaux ont été adoptées ; tout au contraire, la plupart des dispositions retenues ne vont pas dans ce sens. À cet égard, l’examen du PLFSS dans notre hémicycle a encore aggravé la situation : je pense au report de l’âge de la retraite à 64 ans, à l’instauration de trois jours de carence dans la fonction publique hospitalière, à l’inscription de 1 milliard d’euros d’économies supplémentaires sur les dépenses de santé, alors qu’un ONDAM de 2, 1 % était déjà, à nos yeux, bien insuffisant…

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous voterons résolument contre ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. Nous regrettons vivement que nous n’ayons pas pu montrer, ensemble, qu’une autre politique est possible, une politique fondée sur l’utilisation de la richesse produite, qui ne manque pas dans notre pays, comme en témoignent les milliards d’euros versés en dividendes.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Nous arrivons au terme d’un débat extrêmement riche, long et dense.

Personne ici ne sera surpris que je ne sois pas du tout d’accord avec les propos qu’a tenus M. Daudigny, surtout avec l’analyse qu’il a faite de la situation financière de la sécurité sociale.

Vous faites des gorges chaudes du prétendu « héritage ». Or, en 2008, je le rappelle, une crise mondiale sévissait, alors qu’aujourd’hui la situation est stabilisée, la plupart des pays ayant à peu près rétabli leurs équilibres financiers. En 2008, année où la crise atteignait son paroxysme, les intérêts de la dette de l’ACOSS s’élevaient à 800 millions d’euros, pour un taux d’intérêt de 4, 5 %, alors que celui-ci n’est plus aujourd’hui que de 0, 1 %, ce qui représente 25 millions d’euros d’intérêts annuels. En 2008, le gouvernement en place a donc su faire face à la crise avec beaucoup de détermination ; s’il n’en avait pas été ainsi, nous serions actuellement dans une situation beaucoup moins favorable encore.

Par ailleurs, le gouvernement de M. Fillon avait institué – peut-être un peu tard, il est vrai – une TVA anti-délocalisations afin de trouver de nouvelles ressources, car il n’est pas normal, ainsi que nous l’avons fait remarquer plusieurs fois, que la politique de la famille soit financée par les entreprises. Or la première décision qu’a prise la majorité actuelle a été de supprimer ce dispositif.

Enfin et surtout, je tiens à rappeler que les seules réformes courageuses en matière de retraites sont dues à l’action de François Fillon et d’Éric Woerth. Si ces réformes n’avaient pas été engagées, en 2003, en 2008 et en 2010, je pense que notre régime de retraites exploserait aujourd’hui.

Vous avez nié ces réalités pendant des années ; je ne pouvais manquer l’occasion de les rappeler ce soir devant la Haute Assemblée.

Au fil d’un débat extrêmement constructif

M. Jean Desessard rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Ainsi, nous avons modifié ou supprimé des mesures néfastes qui avaient été votées par les députés : je pense à la généralisation de l’abattement de 1, 5 euro pour les emplois à domicile, à la suppression de la taxation des dividendes pour les sociétés anonymes et les sociétés par actions simplifiées, à la suppression de l’exonération des franchises médicales pour les bénéficiaires de l’ACS, ou encore à la suppression de la modulation des allocations familiales.

En outre, de nouvelles mesures ont été adoptées sur l’initiative de la majorité sénatoriale : l’exonération partielle des cotisations vieillesse pour les médecins exerçant en zone défavorisée, le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, l’engagement d’une réflexion, dès 2015, sur une réforme systémique du régime de retraites, la baisse de 1 milliard d’euros de l’ONDAM, grâce notamment à l’instauration de trois jours de carence dans la fonction publique hospitalière, à une action plus résolue pour garantir la pertinence des actes, tant à l’hôpital qu’en ville, à des mesures renforçant les conditions d’évaluation des médicaments et à une réforme de la tarification des urgences hospitalières.

Lors de la discussion générale, nous reprochions au texte de manquer d’ambition et de se limiter à des « réformettes » pour colmater des trous au moyen d’expédients, sans véritable perspective ni hauteur de vue. La majorité sénatoriale, comme l’avait annoncé le président Gérard Larcher lors de sa prise de fonctions, entend s’opposer de manière constructive. C’est ce que nous avons fait au travers de l’examen de ce projet de loi, en apportant notre contribution en vue d’une réforme structurelle. Le groupe UMP votera ce projet de loi de financement de la sécurité sociale tel qu’issu des travaux du Sénat. §

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Ce PLFSS comportait initialement des mesures positives, notamment l’octroi du tiers payant intégral, la suppression des franchises médicales pour les bénéficiaires de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire de santé, l’ACS, ou encore le fait que la rémunération à l’activité prenne désormais en compte la qualité et la sécurité des soins.

Toutefois, ce texte s’inscrivait dans une démarche globale de réduction des recettes imputable au pacte de responsabilité, qui induit mécaniquement des dépenses et des prestations à la baisse.

Par ailleurs, la présence de l’article 61 menaçait l’universalité de notre politique familiale en prévoyant de moduler les allocations familiales selon le revenu.

Pour ces raisons, le groupe écologiste avait prévu de s’abstenir lors du vote final. Cependant, l’évolution au fur et à mesure des débats au Sénat nous conduit à revoir notre position. Le PLFSS issu de nos travaux comporte en effet très peu de mesures positives.

Nous saluons certes le maintien de l’article 29, qui permet d’accorder le tiers payant intégral aux bénéficiaires de l’ACS dès le 1er juillet 2015. C’est une mesure forte pour l’accès aux soins des plus fragiles.

Nous nous réjouissons aussi de l’adoption de deux amendements de nos collègues de l’UDI-UC visant à fiscaliser davantage les primes de départ des dirigeants et les retraites chapeaux. Ce sont là des mesures d’équité.

Enfin, si nous approuvons la suppression de la modulation des allocations familiales, qui portait atteinte à leur universalité, nous regrettons qu’un projet plus global ne soit pas défini pour réformer en profondeur notre politique familiale, par exemple en supprimant le quotient familial et en étendant l’allocation au premier enfant.

Force est de constater que la nouvelle majorité sénatoriale n’y est pas allée de main morte et qu’elle a voté de nombreuses mesures aggravant le texte.

Ainsi, le Sénat – et pas uniquement la nouvelle majorité… – a supprimé l’article introduit à l’Assemblée nationale visant à dissuader, par une augmentation adéquate de la fiscalité, les dirigeants d’entreprise de se rémunérer en dividendes plutôt qu’en salaires. Le fait de taxer autant les dividendes que les salaires constituait pourtant une mesure de bon sens.

De même, la suppression de l’alignement des droits à la consommation des cigarillos et tabacs à rouler sur ceux des cigarettes est contraire aux valeurs défendues par les écologistes.

Nous sommes choqués aussi que le Sénat ait rétabli les franchises médicales pour les bénéficiaires de l’ACS. Il s’agissait pourtant d’une des rares mesures positives du PLFSS, qui permettait de diminuer les frais que les plus modestes doivent engager pour se soigner. Avec la suppression de cet article, la nouvelle majorité sénatoriale indique clairement que pour se soigner il faut continuer à payer !

Après les assurés, c’est au tour des personnels de faire les frais des nouvelles orientations de notre assemblée, avec la mise en place de trois jours de carence dans la fonction publique hospitalière. Les personnels médicaux font don de leurs journées, parfois même de leurs nuits, au service de la santé des malades. Ils travaillent dans des conditions de plus en plus dures, dans des services de plus en plus débordés : en remerciement de cet engagement, le Sénat décide de rogner leur pouvoir d’achat en cas d’arrêt maladie. C’est une mesure que nous ne pouvons cautionner.

De surcroît, la nouvelle majorité sénatoriale a relevé l’âge légal de départ à la retraite à soixante-quatre ans. Dans le contexte actuel de croissance nulle et de stagnation du marché de l’emploi, cette disposition aura pour seul effet de maintenir les seniors dans la situation de vieux chômeurs, sans que cela permette de résoudre le déficit des caisses de retraites. Nous ne pouvons souscrire à une telle mesure !

Enfin, ce PLFSS ne comporte aucun projet de société. C’était déjà vrai avec le texte initial ; ça l’est davantage avec celui que nous votons ce soir. La sécurité sociale est envisagée comme une charge à réduire. Ce discours simpliste omet une évidence, à savoir que la santé est un secteur d’avenir. En raison de l’évolution démographique, les besoins en matière de soin et d’accompagnement des personnes iront en s’accroissant dans les années à venir. Il y a là un formidable gisement d’emplois à exploiter et à soutenir. Ce n’est malheureusement pas l’état d’esprit dans lequel a été voté ce projet de loi.

En conclusion, eu égard à l’opinion déjà mitigée que nous avions sur le texte initial, et considérant les mesures injustes adoptées par la nouvelle majorité sénatoriale, le groupe écologiste votera contre ce PLFSS.

Je salue malgré tout la qualité de nos débats et l’excellence des présidents de séance qui ont animé nos travaux. Je remercie également les ministres et secrétaires d’État d’avoir pris le temps de nous expliquer la position du Gouvernement afin d’éclairer nos votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

La majorité sénatoriale ayant changé, il fallait bien que les débats changent de tonalité.

Je remercie tout d’abord les différents ministres qui se sont relayés au banc du Gouvernement. Ils se doutaient bien qu’ils ne venaient pas dans une chambre d’enregistrement, mais ils savaient aussi qu’ils n’arrivaient pas en terrain ennemi et que la discussion était possible. Même si nous avons beaucoup d’estime les uns envers les autres, les options ne peuvent plus être les mêmes depuis le renouvellement de septembre.

J’entends dire que nous avons pris des décisions favorisant les riches : cela m’attriste. Personne n’a le monopole du cœur ! Nous traversons une crise extrêmement grave, et il est naturel que nous ne prescrivions pas les mêmes remèdes en fonction de notre sensibilité politique.

Depuis des années, quel que soit le gouvernement, le leitmotiv était que l’hôpital coûtait trop cher. Cette fois, en respectant l’orientation fixée par le Gouvernement, nous sommes allés plus loin que lui en matière de réforme du système de santé, mais au travers de mesures qui n’en dégradent pas sa qualité. Ainsi, le milliard d’euros d’économies supplémentaires ne nuira pas à la qualité des soins, car nous avons arrêté de pressuriser l’hôpital et choisi de faire porter nos efforts sur la médecine de ville. Nous devons continuer à travailler efficacement sur le médicament, comme nous l’avons fait avec les génériques.

Le rétablissement des jours de carence serait, selon vous, un mauvais signal adressé au personnel hospitalier. Mais si la mesure ne s’applique qu’à lui, c’est qu’elle a été proposée dans le cadre du PLFSS. Plus fondamentalement, le débat est de savoir si les fonctionnaires peuvent être dispensés des obligations s’appliquant aux salariés du secteur privé.

Monsieur Desessard, différentes méthodes peuvent être retenues pour pérenniser nos retraites par répartition auxquelles nous sommes tous très attachés sur ces travées. Puisque les dispositions sur la pénibilité permettent de protéger les personnels qui ont eu des carrières longues ou des métiers difficiles, il me semble plus simple de jouer sur les bornes d’âge : on ne peut pas diminuer les allocations des personnes âgées – nous connaissons le niveau moyen des retraites dans notre pays – et on ne peut pas non plus écraser nos entreprises en difficulté en augmentant les cotisations. C’est donc très sincèrement que j’ai proposé mon amendement.

Pour autant, cela ne signifie pas qu’il y aurait, d’un côté, ceux qui combattraient pour les riches et, de l’autre, ceux qui combattraient pour les pauvres. C’est caricatural !

Le texte que nous allons adopter est le projet d’un Sénat d’opposition, d’un Sénat qui ne saurait être une chambre d’enregistrement des propositions gouvernementales. Je me félicite que nous ayons travaillé en bonne intelligence et avec beaucoup de conscience.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je tiens à exprimer ma satisfaction : le Sénat a renoué avec un mode de fonctionnement qui a rendu ce débat possible.

C’était ma première expérience en tant que rapporteur général. J’avais certes observé mes prédécesseurs Yves Daudigny et Alain Vasselle, mais il m’a fallu prendre mes marques, non sans quelque inquiétude. En effet, nous avons dû accoucher d’un texte dans des délais relativement brefs, alors que nous sommes dans l’opposition. Il s’agissait d’une opération délicate.

Sans adhérer à tous les choix du Gouvernement, nous voulions, dans un climat courtois et serein, tenter d’apporter une réponse aux préoccupations des Français quant à l’avenir de leur sécurité sociale.

Je crois pouvoir dire que nous n’avons pas défiguré le texte. Nous n’avons pas voté de recettes nouvelles – nous étions d’accord sur ce point – et nous avons décidé un effort accru sur les dépenses, en allant plus loin que le Gouvernement, mais toujours dans la direction qu’il a voulu emprunter.

Nous avons ainsi adopté de nombreux articles sans modification – M. le président de la commission en dressera un bilan exact. Certains, il est vrai, ont été supprimés, parfois d’ailleurs avec un avis de sagesse du Gouvernement, et d’autres ont été plus substantiellement modifiés.

Nous avons marqué ce texte de nos principaux choix pour l’avenir de notre système de protection sociale.

Nous avons ainsi maintenu un soutien pour toutes les familles. Nous avons renforcé l’effort sur les dépenses d’assurance maladie, dont le déficit structurellement installé doit faire l’objet d’une action résolue et sans interdits. Nous avons adressé un signal sur les retraites, dont l’avenir n’est, à ce jour, pas assuré.

Notre système de protection sociale est aussi financé par de la dette, dont nous transférons la charge à une génération qui aura déjà souffert de la stagnation économique et du sous-emploi. S’interdire les efforts pour la génération présente conduira forcément à les accroître pour celle de demain.

Notre pays est allé, me semble-t-il, au bout de la logique des recettes. Il doit désormais agir résolument, mais aussi avec discernement, sur les dépenses et redonner ainsi de l’air à une économie en difficulté. C’est dans ce sens que nous souhaitons aller, monsieur Daudigny, n’en doutez pas. Vous nous faites un procès sur nos valeurs. Elles sont démocratiques, humanistes, responsables, et je crois que nous les partageons largement pour l’essentiel !

Pour finir, je salue les différents présidents de séance, qui ont eu la patience de supporter des débats quelquefois longs. Je remercie aussi le Gouvernement, et particulièrement Mme la secrétaire d’État pour son écoute et l’esprit de dialogue courtois qu’elle a su insuffler à nos discussions, même si nous ne sommes pas toujours d’accord. Cela n’a pas toujours été le cas par le passé, je peux en témoigner.

Je remercie également l’ensemble des sénateurs, notamment les membres de la commission des affaires sociales, de leur présence assidue. Je ne sais si M. le président a procédé à des pointages §mais je pense que l’on ne peut que se féliciter de leur participation constructive – parfois un peu moins… –, toujours dans un esprit de concertation, voire de conciliation.

Je remercie, enfin, le président de la commission pour son animation consensuelle et sa présence attentive à la bonne réalisation de nos travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Je veux, moi aussi, au nom de la commission, remercier les différents présidents de séance de nous avoir permis de mener à bien nos travaux.

Je salue également tous les ministres qui sont venus, ainsi que leurs collaborateurs. Leur présence constante et les réponses qu’ils nous ont apportées nous ont permis d’avancer et d’aboutir au texte que nous avons souhaité.

Je rappelle que la nouvelle équipe qui dirige le Sénat s’est mise en place entre le 1er et le 15 octobre. La commission des affaires sociales et la commission des finances n’ont donc disposé que de quatre semaines pour rédiger les différents rapports à votre disposition et présenter leurs travaux.

Tout cela n’a pu être réalisé que grâce à la qualité des sénateurs, dans leur ensemble, de la commission des affaires sociales, ainsi que de celle des rapporteurs et de nos collaborateurs.

Monsieur Daudigny, je voudrais revenir sur vos propos, qui m’ont profondément interpellé. Vous avez évoqué Alain Vasselle et certaines de ses propositions, notamment celles relatives à la CRDS. J’ai été de ceux qui soutenaient, dans la majorité, ses propositions. Je pensais qu’elles étaient de nature à sauver la sécurité sociale. À l’époque, l’opposition ne le soutenait pas beaucoup. C’est dommage, car nous aurions pu faire adopter quelques-unes de ses préconisations. Il est facile, aujourd’hui, de lui reprocher de n’avoir pas réussi à faire passer ses rapports !

Vous avez aussi parlé de certains PLFSS pour dire que nous n’avions pas réussi à mettre en place tout ce que nous avions présenté dans le cadre de programmes présidentiels ni à sauver la sécurité sociale. C’est vrai, mais depuis que vous êtes au pouvoir, vous non plus ! On peut même dire que le résultat actuel est encore pire qu’il y a trois ans, alors que le résultat d’il y a trois ans était lui-même pire qu’il y a cinq ans !

Nous nous rendons compte aujourd’hui que la France a besoin d’être réformée en profondeur. Les Français sont quasiment d’accord avec certaines des propositions qui ont pu vous sembler assez révolutionnaires, voire réactionnaires.

Si nous n’avons pas le courage de mener ces réformes, à l’image du texte que nous allons adopter ce soir, ce n’est pas vous qui serez aux commandes en 2017. Et cela, je ne le veux pas !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici le résultat du scrutin n° 28 :

Le Sénat a adopté.

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Je remercie l’ensemble des sénateurs qui ont participé à ce débat, particulièrement le président de la commission des affaires sociales, le rapporteur général et les rapporteurs qui se sont succédé à leurs côtés.

Le texte adopté ce soir au Sénat n’est conforme ni à l’esprit ni à la lettre de celui élaboré par le Gouvernement et voté par l’Assemblée nationale. Vous ne serez donc pas étonnés d’apprendre que le Gouvernement cherchera, à l’Assemblée nationale, à revenir à son texte initial. §

Néanmoins, je salue l’excellente qualité et le bon climat de nos débats. Je sais d’expérience que cette maison peut être un lieu d’échanges extrêmement courtois, où personne ne renonce à ses convictions. Bonne fin de nuit à tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 18 novembre 2014 :

À neuf heures trente :

1. Questions orales.

(Le texte des questions figure en annexe)

De quatorze heures trente à dix-huit heures trente :

2. Débat sur le thème « Ruralité et hyper-ruralité : restaurer l’égalité républicaine ».

3. Proposition de loi constitutionnelle visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable (779, 2013 2014) ;

Rapport de M. Hugues Portelli, fait au nom de la commission des lois (92, 2014 2015) ;

Résultat des travaux de la commission (n° 93, 2014 2015).

De dix-huit heures trente à dix-neuf heures trente et de vingt et une heures trente à zéro heure trente :

4. Proposition de loi tendant à réformer le système de sécurité sociale des étudiants (622, 2013 2014) ;

Rapport de Mme Catherine Procaccia, fait au nom de la commission des affaires sociales (86, 2014 2015) ;

Texte de la commission (n° 87, 2014 2015).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le samedi 15 novembre 2014, à deux heures trente.