Intervention de Annie David

Réunion du 14 novembre 2014 à 21h30
Financement de la sécurité sociale pour 2015 — Articles additionnels avant l'article 56

Photo de Annie DavidAnnie David :

Vous vous en doutez, nous sommes opposés à cet amendement proposé par Gérard Roche au nom de la commission.

Je ne vais pas revenir sur l’historique que vient de faireNicole Bricq, il est tout à fait juste : le compte pénibilité était partie intégrante de la réforme des retraites ; il avait reçu l’accord des organisations syndicales, du moins celles qui adhéraient à la réforme. Les premières négociations remontent à 2003, puis d’autres ont suivi en 2008, et enfin celles de 2013 ont abouti à la loi de janvier 2014, dont les décrets d’application sont parus au mois d’octobre : les gouvernements successifs ont ainsi pu chacun réformer le système de retraite. Mon groupe avait contesté ces réformes et sa position n’a pas changé.

M. Roche nous demande d’adopter un comportement républicain, parce que notre système de retraite est en grande difficulté, ce dont je conviens, mais c’est à cause d’un manque de recettes. On en revient toujours au même point : faute de recettes, on n’arrive plus à assurer la pérennisation de notre système de retraite.

Selon moi, les parlementaires que nous sommes devraient surtout se souvenir de l’origine de la protection sociale, qui trouve sa source dans le programme du Conseil national de la résistance, un programme dont l’objectif était de répondre aux besoins d’une population maltraitée, meurtrie, en s’adressant surtout à la classe des travailleurs, qui était en très grande difficulté au sortir de la guerre. Les dirigeants de notre pays ont vraiment accompli, à ce moment-là, un grand geste républicain, monsieur Roche.

Le Gouvernement de l’époque comprenait des ministres de droite comme de gauche, et je vous rappelle que c’est un ministre communiste, Ambroise Croizat, qui fut l’un des fondateurs de notre protection sociale. C’était un véritable gouvernement républicain au sens où nous pouvons l’entendre ce soir dans cette enceinte, et ce gouvernement a été capable, alors que la France était peut-être dans une situation financière plus difficile encore que celle que nous connaissons à l’heure actuelle, d’asseoir le financement d’un système de protection sociale sur les richesses produites par le travail.

Aujourd’hui, nous sommes en train d’inverser la logique qui a prévalu à ce moment-là et de renier tout ce qui a été très justement construit à l’époque pour répondre à la détresse d’une grande partie de notre population.

Je me rappelle l’année 1982, quand la retraite à 60 ans a été obtenue. Je me souviens très bien de la joie de mes collègues de travail de l’époque, surtout des femmes, qui avaient la cinquantaine – l’âge que j’ai aujourd’hui –, et qui voyaient leur avenir s’ouvrir d’un seul coup, parce qu’elles se rendaient compte qu’elles pourraient partir à la retraite à l’âge de 60 ans et enfin mener une vie digne après toutes ces années de travail.

J’avais déjà évoqué dans cet hémicycle ce souvenir lorsque M. Woerth nous avait présenté sa réforme des retraites, et je trouve dramatique que nous soyons revenus sur cette avancée pour notre pays.

Le présent amendement, qui tend à repousser à 64 ans l’âge de la retraite, mesure qui repousse d’autant l’espoir pour un grand nombre de femmes et d’hommes d’avoir enfin un moment de répit, un moment de vie pour soi, nous ne pouvons l’accepter, comme nous ne pouvions accepter non plus le report à 62 ans de l’âge légal de départ.

Nous sommes persuadés que, avec un autre système de financement, nous pourrions assurer la retraite à 60 ans à taux plein à toutes celles et tous ceux qui l’ont bien méritée !

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