Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Cette question, à laquelle se joint Mme la sénatrice Teura Iriti, est relative au retour attendu de l’État dans le financement du Régime de solidarité de la Polynésie française, le RSPF.
La loi du 5 février 1994 d’orientation pour le développement économique, social et culturel de la Polynésie française définissait, pour une durée de dix ans, les conditions dans lesquelles « la nation aidera le territoire de la Polynésie française à réaliser une mutation profonde de son économie, afin de parvenir à un développement mieux équilibré et à une moindre dépendance à l’égard des transferts publics, en favorisant le dynamisme des activités locales et le progrès social ».
Au chapitre de ce progrès social, la conjugaison des solidarités territoriale et nationale a permis de mettre en place un système de protection sociale original, qui a notamment introduit la création d’un régime de solidarité spécifique pour les plus démunis. Ainsi, entre 1994 et 2007, la participation de l’État au régime de solidarité a représenté une somme globale de 350 millions d’euros, soit une moyenne de 27 millions d’euros par an.
L’interruption brutale, en 2008, de ces crédits de solidarité a généré un défaut de financement de l’État de 190 millions d’euros alors que, concomitamment, la Polynésie subissait les conséquences de la crise économique mondiale. En effet, le taux de chômage en Polynésie a doublé en six ans, passant de 10 % à plus de 20 % et entraînant une augmentation des effectifs relevant du régime de solidarité territoriale, passés de 50 000 à 80 000 bénéficiaires.
Aujourd’hui, plus du quart de la population de la Polynésie française vit en dessous du seuil de pauvreté et ne survit que grâce aux faibles allocations versées via ce régime de solidarité. Par voie de conséquence, celui-ci connaît un déficit chronique qui s’aggrave chaque année, avec un risque imminent de non-paiement des allocations sociales, unique source de revenus pour les plus démunis.
Cette situation est évidemment très inquiétante et nécessite une intervention rapide de l’État au titre de la solidarité nationale, intervention qui commence par un retour de l’État au financement dudit régime de solidarité.
En réponse aux sollicitations de la nouvelle majorité issue des élections de mai 2013, et notamment de nos trois députés à l’Assemblée nationale, deux pistes de réflexion sont actuellement proposées par le Gouvernement, pistes qui ne constituent cependant que des régularisations : premièrement, l’obligation pour les fonctionnaires métropolitains en poste en Polynésie française de cotiser à la caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française ; deuxièmement, l’application aux malades polynésiens, qui sont obligés d’être rapatriés en France pour y recevoir des soins très spécialisés, des tarifs hospitaliers métropolitains, et non pas des tarifs plus élevés de 30 %, comme c’est le cas actuellement. Ces deux mesures, si elles sont nécessaires, restent encore très insuffisantes pour combler le déficit colossal du régime de solidarité territoriale.
Je vous rappelle en outre que les recommandations du rapport de l’IGAS de janvier 2004 étaient extrêmement claires quant à la participation de l’État au régime de solidarité territoriale : « Un arrêt, ou même une réduction sensible aurait des effets déstabilisants pour l’équilibre financier du régime de solidarité, et au-delà, pour la protection sociale généralisée qui risquerait des remises en cause. Ceci est » – selon la mission IGAS – « d’autant moins souhaitable que les plus fragiles en seraient les premières victimes. Cette participation de l’État fait partie de la solidarité nationale. »
En septembre dernier, Mme la ministre des affaires sociales et de la santé et Mme la ministre des outre-mer ont réaffirmé par écrit « le principe d’une contribution de l’État au redressement du régime de solidarité de la Polynésie française ».