Intervention de Jean Desessard

Réunion du 18 novembre 2014 à 9h30
Questions orales — Régularisation des travailleuses et travailleurs du 57 boulevard de strasbourg

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

Madame la présidente, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur, qui est absent ce matin. J’en profite pour dire que je lui ai envoyé quelques courriers qui sont restés sans réponse ; mais enfin, je ne m’attarderai pas sur ce point… Madame la secrétaire d’État, je vous remercie d’être présente ce matin pour m’apporter une réponse, que j’espère positive.

Ma question sera brève, car elle est simple et son exposé clair et limpide.

Depuis plusieurs mois, dix-huit travailleuses et travailleurs sans papiers se battent contre l’exploitation dont ils sont victimes en plein cœur de Paris : je veux parler des salariés du salon de beauté situé au 57, boulevard de Strasbourg. Recrutés peu après leur arrivée en France par ce qu’il convient d’appeler « un réseau mafieux », ces dix-huit personnes, en majorité des femmes, ont subi l’inacceptable.

Je me suis rendu sur place voilà une dizaine de jours et j’ai été bouleversé par leur récit : effectuant des journées de travail de plus de douze heures, dans des locaux insalubres, mal aérés, en présence de produits chimiques, ces personnes sont payées entre 200 et 400 euros par mois et séparées selon leur nationalité pour éviter toute rébellion.

Ces salariés se sont mobilisés avec courage pour s’extraire de leur condition et ont pris contact avec la Confédération générale du travail qui leur a, depuis, apporté un soutien indéfectible. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’UMP, qui critiquez souvent la CGT, je veux aujourd’hui rendre hommage à cette organisation pour ce combat : la CGT Paris a mené cette action de façon admirable et désintéressée, dans des conditions très difficiles.

Les salariés du 57, boulevard de Strasbourg ont porté plainte individuellement contre ce système fondé sur le recrutement et l’exploitation de personnes vulnérables par le travail dissimulé. La loi prévoit, dans le cadre de l’article L. 316-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, la délivrance d’un titre de séjour dès le dépôt d’une plainte contre la traite des êtres humains afin de protéger les victimes. Ce délit a été constaté par l’inspection du travail à quatre reprises depuis le mois de mai avec des procès-verbaux mentionnant des « conditions de travail incompatibles avec la dignité humaine ».

Or cette demande légitime n’a pas été entendue par la préfecture de police, qui refuse de délivrer les titres de séjour. Ces travailleurs qui ont choisi de résister et de faire valoir leurs droits pourraient être expulsés, alors que leur employeur, qui a entre-temps fui les lieux, n’est pas inquiété. Cette situation ne peut plus durer.

Madame la secrétaire d’État, la dignité humaine exige au moins le respect de la loi. Quelles mesures M. le ministre de l’intérieur compte-t-il prendre afin que ses services respectent l’article L. 316-1 du CESEDA et délivrent à ces travailleuses et travailleurs courageux un titre de séjour afin de mener leur combat à terme ?

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