Intervention de Jean-Pierre Sueur

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 19 novembre 2014 : 2ème réunion
îles wallis et futuna — Examen du rapport d'information

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur, rapporteur :

Pour la première fois, une délégation de notre commission assistait à la grande fête du 29 juillet, date à laquelle Wallis-et-Futuna a été déclaré territoire d'outre-mer. Reçus par le roi, nous avons bu le kava. Mon discours, dans lequel j'ai mis toute ma conviction, a satisfait le roi, puisque j'ai eu droit à une deuxième coupe. Le Monde nous a appris peu après que le roi avait été destitué, si bien que notre collègue Robert Laufoaulu aurait pu y prétendre plutôt qu'à un mandat de sénateur.

Le poids de la coutume est très important. La majeure partie de la population n'est pas intégrée dans une économie monétarisée. La solidarité entre les familles, qu'il s'agisse d'agriculture ou de pêche, joue à plein. L'administration publique représente 54 % du PIB. La contribution du secteur privé est relativement faible.

La principale question est l'exode puisque la population a diminué de 2 000 habitants depuis 1996 : il y a plus de Wallisiens en Nouvelle-Calédonie qu'à Wallis. Une fois partis, les jeunes ne reviennent pas. Certes, un lycée agricole a été créé, mais les choses n'ont pas fondamentalement changé ; le bateau de pêche, financé par l'État reste à quai ; le tourisme pourrait être développé, mais le coût du transport est dissuasif.

Les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont une des clés de la réussite de ce territoire : un réseau de téléphonie mobile ainsi que des liaisons satellitaires sont indispensables. En outre, des câbles sous-marins avec les iles Samoa et Fidji devraient relier ces îles au reste du monde.

Nous demandons que la desserte aérienne des îles Wallis-et-Futuna se diversifie et qu'un navire mixte assurant une liaison à plus faible prix entre les îles soit envisagé.

L'offre bancaire devra également se développer : pour l'instant, il n'y a que la banque de Wallis-et-Futuna, détenue à 51 % par BNP-Paribas Nouvelle-Calédonie, avec un guichet permanent à Wallis et un guichet périodique à Futuna. Une seconde banque, publique par exemple, pourrait intervenir. L'association pour l'initiative économique (Adie) a déjà octroyé des micro-crédits à des personnes ayant des difficultés à accéder aux prêts bancaires.

Le rapport de 1993 de notre commission dressait un constat toujours d'actualité : l'inaliénabilité des terres coutumières, l'absence de cadastre et de propriétaires identifiables et la non-applicabilité du droit de la prescription et de l'expropriation à ces terres demeurent. La Cour des comptes demande une évolution, ce qui a suscité de fortes craintes localement. Il faudra nous appuyer sur des projets économiques pour faire évoluer les règles foncières.

Il y a deux établissements hospitaliers à Wallis-et-Futuna, mais pas de système de garde. En cas de prescription urgente, il est possible de se fournir dans la pharmacie de la salle d'urgence. La ministre des outre-mer souhaite doter ce territoire d'un scanner, d'une mammographie et d'une salle d'obstétrique : 9 millions d'euros sont prévus, ce qui représentera une économie étant donné les frais de transport économisés pour les évacuations sanitaires.

Les relations financières entre l'agence de santé de Wallis-et-Futuna et le régime d'assurance maladie calédonien est, selon Mme Pau-Langevin, « un sujet qui empoisonne les relations des Wallisiens et Futuniens avec la Nouvelle-Calédonie depuis trop longtemps ». L'agence de santé est effectivement recevable d'une année de fonctionnement envers le régime d'assurance maladie calédonien. Les conséquences financières de cette situation conduit à une dégradation des rapports entre les acteurs sanitaires des deux territoires, laquelle pourrait à terme entraîner une limitation de l'accueil des patients de Wallis-et-Futuna à la seule prise en charge des évacuations sanitaires urgentes. Plusieurs mesures ont été adoptées par l'État, qui assure la tutelle de l'agence de santé, pour circonscrire le montant de cette dette. Ainsi, le ministère de la défense a accepté d'abandonner les créances détenues sur l'agence de santé, soit une aide financière indirecte de 1,4 million d'euros. Afin d'éviter que la dette ne se reconstitue chaque année, il a été mis fin, dans le projet de budget pour 2015, à la sous-évaluation chronique des crédits versés à l'agence de la santé. Reste à la tutelle d'apurer l'arriéré de la dette selon un plan de remboursement réaliste et soutenable.

Je veux rendre hommage à l'action remarquable menée par Mme Marie-Ange Gerbal contre la vie chère. Elle préside l'observatoire des prix, des marges et des revenus, qui a montré l'importance des marges. Appliquer l'ensemble des règles pour favoriser la concurrence est nécessaire pour avancer.

La réalité coutumière encore prégnante doit se concilier avec les principes républicains, sans constituer une cause d'immobilisme. Le développement économique reste indispensable pour enrayer la diminution de la population et son exil.

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