Sans entrer dans les détails techniques comme mes collègues de la commission des finances – ils sont bien plus compétents à cet égard –, je voudrais simplement, monsieur le secrétaire d'État, analyser votre intervention, que j’ai écoutée avec beaucoup d’attention.
Je crois que vous êtes à la fois embarrassé, sincère et habile – je m'en explique.
Vous affirmez que les collectivités territoriales sont bien gérées, ce dont nous ne doutons pas, que le système de péréquation, verticale ou horizontale, est compliqué et incompréhensible au point qu’il faudra le revoir, et que les dépenses des collectivités augmentent sensiblement plus vite que celles de l’État depuis quelques années. Nous en sommes d’accord.
Vous nous expliquez ensuite que, sur à peu près 200 milliards d’euros de recettes des collectivités territoriales, la part de l’État représente 50 milliards d’euros, soit le quart, et que, si cette part est réduite ou qu’elle progresse moins vite, ce n’est pas trop grave, puisque les trois quarts restants – qui représentent donc 150 milliards d’euros –, eux, progressent plus vite.
Et pour quelles raisons ? C'est grâce à la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, que vous avez fléchée. Mais c’est de la richesse que les collectivités se sont créée en sachant développer leur tissu économique !
D’autres collectivités ont dû malheureusement augmenter certains impôts, et je prendrai l’exemple des départements. Il y a peu de temps encore, l’État avait promis de mieux leur compenser un certain nombre de charges, comme l’APA, l’APCH ou le RSA. Or on a fini par leur dire que, pour y arriver, ils seraient autorisés à augmenter les droits d’enregistrement. Moyennant quoi, ce sont les départements qui prennent cette initiative impopulaire afin d’augmenter leurs recettes.
Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que les trois quarts restants, ceux qui correspondent aujourd'hui aux 150 milliards d’euros, augmentent plus vite que les dotations de l’État !
Ensuite, vous nous expliquez que le Premier ministre a donné des instructions pour qu’au 1er janvier 2015 – j’observe au passage que c'est toujours plus tard, et l’on sait ce qu’il advient de ses promesses ! –, l’impact de toute norme supplémentaire imposée aux collectivités devra être neutralisé sur le plan financier. C'est très bien, mais attendons de voir…
Autrement dit, de façon contractée et lapidaire, vous reconnaissez que nous avons raison, mais, sauf à déstructurer l’ensemble du budget de l’État, vous nous demandez de proposer des recettes supplémentaires pour compenser les réductions que nos amendements impliquent parce que l’État est exsangue
C'est là toute votre habilité, monsieur le secrétaire d'État, et je le dis sans remettre en cause la sincérité de votre présentation. Mais, pour ma part, je renverserai le raisonnement pour vous dire que, si nous en sommes arrivés là, c'est que, depuis plusieurs années, l’État ne fait pas de véritables économies : il se contente de réduire le rythme de la progression des dépenses.
Cette année, on nous annonce des coupes de plusieurs milliards d’euros dans le budget de l’État, simplement parce que l’on a réduit le rythme d’augmentation des dépenses ! Or l’on a simplement fait en sorte que la dérivée de la courbe d’évolution des dépenses soit un peu moins positive.
Monsieur le secrétaire d'État, ce n’est pas cela qu’il faut faire, et je vous renvoie donc la balle : pour que précisément les collectivités locales ne soient plus étranglées – comme la plupart de nos collègues l’ont expliqué –, l’État doit consentir des économies structurelles qui aboutissent à des réductions de dépenses, et non à une réduction du rythme de leur augmentation. C'est la seule solution pour nous en sortir, vous le savez bien ! D'ailleurs, l'Europe et la Commission européenne l’indiquent constamment au Gouvernement.
Le problème est là ! Vous nous demandez comment nous allons financer cette augmentation de dotation aux collectivités, et je vous réponds, monsieur le secrétaire d'État, que c'est à l’État de faire des économies pour permettre aux collectivités de vivre !