Intervention de Thierry Breton

Réunion du 24 novembre 2005 à 11h00
Loi de finances pour 2006 — Discussion d'un projet de loi

Thierry Breton, ministre :

Le climat des affaires dans les services et le bâtiment demeure très bon.

Les premiers indicateurs disponibles sur le quatrième trimestre vont dans le même sens, et je me dois de partager ces informations avec la représentation nationale.

Si la consommation de produits manufacturés a légèrement baissé en octobre, elle reste à un niveau très élevé après avoir connu une progression tout de même exceptionnelle au cours de l'été. Sur les douze derniers mois, la consommation aura augmenté de 3, 2 % par rapport aux douze mois précédents. Il faut le souligner, c'est une performance extraordinaire.

Les prix ont continué à baisser en octobre et l'inflation n'atteindra vraisemblablement que 1, 8 % sur un an, et ce malgré la hausse du pétrole, qui n'aura donc pas produit d'effets « de second tour » sur le plan économique, notamment, sur l'inflation.

Les créations d'entreprises se maintiennent à un niveau proche de leur plus haut niveau historique. Nous atteindrons certainement les 220 000 créations d'entreprises que nous escomptions en 2005.

En résumé, malgré, bien sûr, certaines difficultés persistantes, l'économie de notre pays donne des signes évidents de reprise.

Mesdames, messieurs les sénateurs, au-delà de ces seules tendances conjoncturelles, notre projet de budget est aussi la traduction de la politique conduite avec détermination par le Gouvernement, avec le soutien de la représentation nationale, en faveur de la croissance et de l'emploi.

Vous auriez pu à bon droit nous critiquer, Jean-François Copé et moi-même, si nous nous étions réfugiés derrière le consensus, pour définir une prévision de croissance conservatrice. §Nous n'aurions alors pas rempli notre rôle, qui est de prendre loyalement en compte l'ensemble des éléments à notre disposition. Je pense, en particulier, aux effets de toutes les mesures que nous avons proposées et que vous avez adoptées.

Oui, ce budget a été construit pour soutenir le rebond de l'activité. Oui, nous sommes convaincus qu'il permettra à notre croissance de s'inscrire l'an prochain entre 2 % et 2, 5 %.

Pour autant, aucune prévision n'est évidemment infaillible, et je ne sous-estime pas les risques du scénario que je viens de vous présenter, notamment ceux qui pèsent sur notre environnement international. Le pétrole, le taux de change, notamment de l'euro par rapport au dollar, la conjoncture chez nos principaux partenaires européens sont autant de variables que nous ne contrôlons pas et avec lesquelles il nous faudra vivre, quoi qu'il arrive. Mais c'est la loi du genre.

Le pétrole et le taux de change sont, à l'évidence, favorablement orientés depuis quelques semaines. Il reste à mieux mesurer l'impact d'une hausse éventuelle des taux d'intérêt dans la zone euro. À l'instar de mes homologues européens, je suis toujours aussi peu convaincu de la nécessité d'une telle hausse aujourd'hui. Je l'ai souvent répété, je ne vois aucun risque de résurgence de l'inflation ni en France ni dans la zone euro. Il convient de ramener les perspectives de hausse de taux à leur juste proportion. Le président de la Banque centrale européenne, la BCE, a lui-même précisé qu'elles n'annonçaient pas un cycle de resserrement monétaire dans les mois à venir, ce qui, évidemment, nous rassure quant aux futures décisions de la BCE, notamment en 2006.

Face à ces risques, nous sommes prêts à réagir et à adapter l'exécution du budget autant que possible pour tenir nos engagements, qui portent donc sur le niveau des dépenses et du solde public, mais pas sur celui de la croissance. La preuve de notre résolution apparaît notamment dans les orientations affichées dans le projet de loi de finances rectificative, présenté hier matin en Conseil des ministres, et qui nous permettra de contenir le déficit à 3 %, alors même que la croissance est nettement moins forte que ce qui avait été prévu il y a un an.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous sommes engagés, Jean-François Copé et moi-même, à respecter cette année, une fois de plus, l'autorisation parlementaire initiale, le fameux « zéro volume », à l'euro près. L'ensemble des ouvertures de crédits demandées est plus que gagé par des annulations de crédits.

Pour arriver à ce résultat, après avoir mis en réserve un montant global de 7, 4 milliards d'euros, le Gouvernement a décidé d'annuler 6 milliards d'euros, la différence ayant été dédiée à des besoins sociaux, urgents pour l'essentiel.

Soyez sûrs, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous ferons preuve de la même résolution pour mettre en oeuvre le budget pour 2006, en utilisant notamment tous les moyens que nous offre dorénavant la LOLF.

À l'appui des éléments que je viens de rappeler, je puis dire que notre projet de budget pour 2006 fait sans ambiguïté le choix de la responsabilité.

Or c'est bien ce que requiert aujourd'hui la situation de nos finances publiques. C'est bien ce problème que j'ai voulu prendre à bras-le-corps en indiquant, en juin, que la France vivait au-dessus de ses moyens.

Certains ont trouvé que j'étais excessivement alarmiste. Avec Jean-François Copé, nous n'avons pourtant pas ce sentiment ! Je revendique d'avoir voulu provoquer une véritable prise de conscience, non pas en affirmant que les Français vivaient au-dessus de leurs moyens, mais en soulignant que c'était la France elle-même qui vivait au-dessus des siens ! Je n'ai pas peur des mots, il faut absolument corriger cette trajectoire dramatique prise par nos finances publiques. Je crois avoir ainsi créé, au moment décisif, en plein accord avec le Premier ministre, les marges de manoeuvre dont nous avions besoin, pour éviter des dépenses inutiles et concentrer nos moyens sur la croissance et l'emploi.

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