Nous partageons certains constats. Ces enjeux ont donné lieu à de longues heures de débat au cours des Assises de la ruralité.
Monsieur Longeot, je suis moi-même élue rurale ; les territoires ruraux n'ont pas attendu les Assises pour prendre leur destin en main. Mais nous n'arrivons pas à dupliquer les bonnes initiatives. Comment créer de la complémentarité entre zones urbaines et rurales pour favoriser le développement économique ? J'ai visité une cuisine centrale implantée dans une commune de zone rurale, qui livre des repas aux établissements pour personnes âgées de zone urbaine. L'idée de contrats de réciprocité a été avancée au cours des Assises.
Les Assises ont fait émerger un certain nombre de sujets. D'abord, la dotation globale de fonctionnement. La réforme annoncée par le Premier ministre a pour but de rectifier les inégalités. Ensuite, le numérique et la téléphonie mobile, sans lesquels ne serait-ce que le télétravail ne serait pas possible. Enfin, l'économie de proximité, le petit commerce, l'artisanat, l'économie agricole. Ce ne sont pas seulement des clichés ; des initiatives utiles ont émergé. Nous allons accompagner ce travail. Le Comité interministériel a été créé pour faire des propositions concrètes et pragmatiques. Les Assises ont également permis à de nombreux acteurs, peu associés à ces décisions, de s'exprimer. C'était fondamental pour les territoires ruraux, qui ont trop souvent le sentiment d'être oubliés.
Monsieur Raison, je comprends votre déception. Les 300 dossiers retenus contenaient de très bons projets. Tous n'avaient toutefois pas le même potentiel, ni les mêmes ressources humaines et financières. J'ai demandé aux préfets d'accompagner spécifiquement les communes dont les projets n'ont pas été retenus. À mon arrivée à Bercy, j'ai trouvé un certain nombre de dossiers du Fisac en souffrance, car les budgets précédents n'avaient cessé de diminuer. Songez que le retard de traitement de ces dossiers avait atteint trois ans ! Il a fallu un effort de gestion et un abondement de 140 millions d'euros pour résorber le stock et lancer la réforme de l'artisanat et du commerce en ciblant les crédits du Fonds sur les territoires prioritaires et les territoires ruraux.
Les appels à projets des centres-bourgs seront soutenus par des crédits supplémentaires aux crédits déjà fléchés : 40 millions d'euros par an pour 50 communes, dont 14 millions d'euros en provenance du FNADT, sans parler les fonds de l'Anah et ceux relatifs à l'aide à l'acquisition de logements anciens en zone rurale. Le dispositif sera évalué, et nous trouverons un moyen de généraliser ce dont les territoires ruraux ont besoin.
La notion d'équité territoriale - tendant vers l'égalité - a en effet une forte dimension interministérielle. La création du CGET l'atteste, qui dépend directement du Premier ministre. Il renoue avec une forte ambition de solidarité entre territoires et entre ministères, pour répondre à trois enjeux : la lutte contre les inégalités entre les territoires - en termes d'emplois, en matière sociale, d'infrastructures -, la fin de la dichotomie entre urbain et rural, et la réconciliation de la décentralisation et de l'aménagement du territoire. Tous les ministères en charge de ces dossiers étaient présents lors des Assises de la ruralité. Je vous laisse votre appréciation sémantique ; je trouve pour ma part qu'égalité est un joli mot dans une République - il ne signifie pas uniformité -, et un objectif à ne pas perdre de vue.
Vous citez les expérimentations d'Édith Cresson en matière de délocalisation des services publics. Des expériences ont été conduites - voyez le rapport d'Alain Bertrand sur l'hyper-ruralité. La Caisse d'allocations familiales de Guéret traite des dossiers pour la Caisse d'allocations familiales de Seine-Saint-Denis : voilà une expérience à reproduire ailleurs.