Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes appelés à vous prononcer en nouvelle lecture sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.
Ce texte revient en effet vers vous après avoir été modifié et adopté par l’Assemblée nationale. Certaines mesures que vous aviez adoptées l’ont également été par les députés. Ces mesures consensuelles ne seront donc pas discutées à nouveau. En revanche, l’Assemblée nationale est revenue sur certaines dispositions que vous aviez adoptées, faisant apparaître une importante divergence des choix politiques entre les deux chambres.
Je tiens d’abord à saluer le consensus républicain qui s’est noué sur certaines mesures. Dès la première lecture, une discussion constructive et apaisée avec la majorité sénatoriale a permis de dégager un consensus républicain sur un certain nombre de mesures.
C’est le cas, par exemple, du tiers payant pour les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé. Votre assemblée a fait preuve de responsabilité en refusant de faire un objet de discorde idéologique de cette mesure de justice.
Les mesures en faveur de l’installation de médecins dans les zones sous-denses et dans les zones isolées, la réforme du financement des hôpitaux de proximité ou encore l’expérimentation des hôtels hospitaliers sont des mesures qui permettront de mieux répondre aux besoins des patients et d’engager la transformation structurelle de notre système de soins.
Ces dispositions adoptées de façon conforme représentaient un peu plus de la moitié des articles du texte que vous aviez examiné.
La Haute Assemblée avait également apporté un certain nombre d’améliorations aux dispositions du texte qui vous était soumis. Certaines de ces modifications ont été reprises à l’identique par l’Assemblée nationale. Ce sont donc dix articles qui ne seront pas examinés par le Sénat, car ils ont été adoptés conformes par l’Assemblée nationale.
Là encore, on peut se réjouir qu’un consensus ait pu se construire autour de mesures telles que la réforme des structures de dépistage du VIH, le financement de la démocratie sanitaire ou encore le fonds d’intervention régional.
La convergence en cours de discussion permet de limiter le nombre d’articles soumis à votre examen à moins de quarante.
Enfin, pour certains articles, le travail d’amélioration s’est poursuivi, ce qui n’a pas permis une adoption des articles dans des termes identiques, mais je pense que les ajustements adoptés par l’Assemblée nationale devraient trouver un accueil favorable dans votre assemblée. Je pense, par exemple, aux mesures sur les centres de vaccination et sur le plasma thérapeutique.
Je tiens à le dire, avec ces mesures qui ont été adoptées en termes identiques – ou pourraient l’être –, les deux assemblées et le Gouvernement ont permis des avancées concrètes pour la protection sociale et la santé des Français.
Marisol Touraine l’a indiqué lors de la discussion générale en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, et je vous le dis aujourd’hui : si ces avancées ont été possibles, c'est aussi parce que la majorité sénatoriale s’est montrée, sur de nombreux sujets, plus ouverte, plus responsable et plus constructive que l’opposition à l’Assemblée nationale, et nous tenons à le saluer.
Ces convergences ne sauraient toutefois occulter que le Gouvernement et la majorité de l’Assemblée nationale font, sur toute une série de sujets importants, des choix radicalement différents de ceux que la majorité sénatoriale avait opérés en première lecture. L’Assemblée nationale est revenue sur plusieurs dispositions adoptées par le Sénat, faisant apparaître des différences de choix en termes de justice et d’efficacité.
Les députés sont en particulier revenus sur plusieurs votes du Sénat qui n’allaient pas dans le sens de la justice.
Ils ont ainsi supprimé le relèvement de l’âge légal de la retraite à soixante-quatre ans, car nous considérons qu’il n’est pas juste de faire travailler plus longtemps des personnes qui ont commencé tôt leur carrière.
Ils ont supprimé les trois jours de carence pour la fonction publique hospitalière, car nous refusons de stigmatiser les fonctionnaires et nous ne pensons pas que c’est en pénalisant les agents qu’on lutte contre l’absentéisme.
Ils ont supprimé des franchises médicales pour les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé, parce que nous ne souhaitons pas que des personnes dont les ressources sont inférieures au seuil de pauvreté aient à payer pour accéder aux soins.
Parce que nous faisons le choix non seulement de la justice, mais aussi de la responsabilité et de l’efficacité, l’Assemblée nationale a rétabli plusieurs mesures d’économies qui permettent d’assurer la pérennité de notre modèle social.
Elle a ainsi rétabli la modulation des allocations familiales, qui contribue à une œuvre de modernisation de la politique familiale engagée voilà deux ans et demi, pour la rendre plus juste et pour développer les services aux familles, permettant de concilier vie familiale et vie professionnelle.
Elle a rétabli la mesure en faveur de la « générication » des sprays – vous l’aviez en effet abrogée – afin de promouvoir les médicaments génériques. Vous partagez pourtant cette orientation, et vous avez même fixé des cibles plus ambitieuses en termes d’économies. De notre côté, nous passons de la théorie à la pratique en adoptant des mesures concrètes pour y parvenir.
L’Assemblée nationale a également rétabli les mesures de régulation des dépenses globales de médicament et de maîtrise des dépenses de traitement de l’hépatite C pour assurer le respect de l’ONDAM, l’Objectif national de dépenses de l’assurance maladie, en 2014 et en 2015.
Tout en rétablissant ces mesures concrètes d’économies, l’Assemblée nationale n’a pas accepté la surenchère dans l’affichage d’économies qui vous avait conduits à adopter des cibles plus élevées sans présenter de mesures concrètes permettant de les atteindre.
Nous pourrons avoir une discussion sur ces sujets. Sur certains points, nous sommes en présence de conceptions radicalement différentes de la justice sociale. Sur d’autres, il peut s’agir davantage de divergences d’appréciation sur les moyens de parvenir aux objectifs recherchés.
En tout état de cause, les allers-retours de ce texte montrent que le Gouvernement a une ligne claire : la réforme juste. Il s’agit de rétablir nos comptes sociaux pour assurer l’avenir de notre modèle social, de renforcer l’efficacité de notre système de santé et de nos prestations sociales, mais sans jamais renoncer aux ambitions de notre modèle, en préservant et en renforçant les droits.