Intervention de Pascale Boistard

Réunion du 27 novembre 2014 à 9h30
Financement de la sécurité sociale pour 2015 — Article 8 ter, amendement 2009

Pascale Boistard, secrétaire d'État :

Les amendements identiques n° 1 rectifié, 9 et 47 visent à rétablir le dispositif adopté par la Haute Assemblée en première lecture : l’augmentation généralisée, non ciblée, de la déduction forfaitaire de cotisation créée en 2012. Ce débat a eu lieu maintes fois et nous n’allons pas le reprendre entièrement ce matin ; je me contenterai d’en rappeler brièvement les termes.

La proposition des auteurs de ces amendements ne repose pas sur un bon diagnostic. Le secteur des aides à la personne subit depuis plusieurs années – en réalité, depuis le début de la crise, en 2009 – une érosion liée avant tout au choix que font de nombreux ménages de renoncer à des services qui ne sont pas toujours indispensables. La baisse du nombre d’heures déclarées n’est donc pas nécessairement corrélée à l’essor de pratiques illégales, ni aux évolutions législatives, contrairement à ce qui est souvent soutenu.

La Cour des comptes, dans son rapport de juillet dernier sur le développement des services à la personne et le maintien à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie, que je vous engage à lire, le constate clairement : rien ne démontre qu’il y ait davantage de travail illégal et, surtout, à supposer même que cette croissance soit avérée, une augmentation de la réduction de cotisation ne serait pas la bonne solution.

En outre, la mesure proposée pèserait lourdement sur les finances publiques, puisqu’elle coûterait plus de 180 millions d’euros, soit 110 millions d’euros de plus que la mesure adoptée par l’Assemblée nationale.

Les auteurs des amendements prétendent que ce coût serait en quelque sorte compensé par les cotisations supplémentaires liées aux emplois créés. Vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs, que ce raisonnement n’a pas de sens : l’augmentation de la réduction de cotisation conduira avant tout à une baisse de recettes, consécutive aux moindres cotisations versées par les particuliers qui emploient actuellement des salariés à domicile, sans que les fins incitatives de cette hausse ne soient aucunement garanties. Ce n’est pas ainsi que l’on présente sérieusement l’équilibre financier d’une mesure.

J’ajoute que l’adoption de ces amendements aurait une incidence significative sur le budget de l’État, qui verse à la sécurité sociale des compensations pour les pertes de recettes qu’elle subit ; or les auteurs des amendements ne savent nullement quelles économies l’État devrait réaliser pour la compenser.

Enfin, je ne souscris pas à la proposition de faire bénéficier d’une réduction supplémentaire des services qui ne sont pas prioritaires, d’autant que les aides au secteur sont déjà considérables. En effet, elles représentent plus de 4 milliards d’euros au titre du crédit d’impôt, auxquels il faut ajouter plus de 2 milliards d’euros d’exonérations sociales, et bénéficient à des publics très larges : non seulement à des personnes handicapées ou dépendantes, mais aussi à toute personne âgée de plus de soixante-dix ans, qui bénéficie d’une exonération totale de cotisations sans considération de ressources.

Les particuliers employeurs qui ne remplissent aucun des critères prévus à l’article 8 ter bénéficieront d’une réduction de 75 centimes d’euro. Le Gouvernement a demandé à l’Assemblée nationale de cibler le soutien financier sur les services de garde d’enfants de plus de six ans, qui, aujourd’hui, n’ouvrent droit à aucune aide supplémentaire. Cette mesure représente un effort substantiel, mais s’inscrit dans une démarche cohérente avec l’amélioration du ciblage des aides recommandée par la Cour des comptes.

Il n’est pas opportun de se livrer à une fuite en avant dans les exonérations accordées au secteur, sans opérer aucune distinction entre des besoins réels, qu’il est nécessaire de soutenir, et des services de confort, pour lesquels on peut se demander au nom de quoi il serait pertinent de faire supporter un coût aux finances publiques.

Le dispositif adopté à l’Assemblée nationale est, pour le Gouvernement, un bon compromis : un compromis responsable entre l’effort de réduction et une baisse ciblée de prélèvements favorable aux familles. J’émets donc un avis défavorable sur les amendements identiques n° 1 rectifié, 9 et 47.

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