Monsieur le président, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires européennes, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, le débat relatif au prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne est important compte tenu de son enjeu – le financement des politiques de l’Union européenne –, de son montant – l’un des plus importants du projet de loi de finances –, et de ses retombées pour notre pays. Il nous donne l’occasion d’analyser les relations financières entre la France et l’Union européenne et de mesurer le soutien des politiques communes européennes à notre pays, et en particulier à nos territoires.
Le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne s’établissait dans le projet de loi de finances pour 2015 à 21, 042 milliards d’euros, en augmentation de 4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2014. Vous serez saisis d’un amendement gouvernemental tendant à le minorer de 300 millions d’euros, afin de tenir compte de plusieurs éléments.
D’une part, la Commission européenne a proposé, sur la base du calcul respectif des produits intérieurs bruts des différents États membres, une augmentation de la contribution de certains pays, dont le Royaume-Uni, mais une réduction d’un milliard d’euros de la contribution française.
D’autre part, les négociations sur les budgets rectificatifs pour 2014, qui incluent la question des restes à liquider – M. le rapporteur spécial y a fait référence –, et celles qui sont menées entre le Conseil et la Commission sur le budget 2015 sont toujours en cours.
Nous avons donc fait une évaluation la plus réaliste possible compte tenu des dernières informations dont nous disposons.
Les répercussions des budgets rectificatifs pour 2014 ne devraient en effet intervenir qu’en 2015. C’est la conséquence de l’absence d’accord entre le Conseil et le Parlement, qui reporte de facto leur adoption à la session plénière de décembre.
Même en cas d’adoption de l’amendement, présenté par le Gouvernement, tendant à une minoration de 300 millions d’euros, le montant de la contribution de la France à l’Union européenne restera l’une des enveloppes budgétaires les plus importantes du présent projet de loi, après la défense et le pôle éducation et recherche.
Cela tient à la fois au rôle de la France dans la construction européenne, un des pays les plus riches et les plus puissants, et au chevauchement qui existe cette année entre deux périodes de programmation. Les paiements qui seront inscrits dans le budget pour 2015 de l’Union européenne visent à couvrir les engagements de la période 2007-2013, la mise en œuvre des politiques communes s’étant accélérée en fin de période, en même temps qu’ils assureront le lancement des politiques de la programmation 2014-2020. Ce phénomène classique en début de période a un effet cyclique sur le niveau des contributions nationales.
Vous le savez, à l’heure où se tient ce débat, le budget pour 2015 de l’Union européenne n’a pas encore été arrêté, faute d’accord entre le Conseil et le Parlement européen, au terme de la procédure de conciliation qui s’est achevée le 17 novembre dernier. Le point d’achoppement porte d’ailleurs plus sur les budgets rectificatifs pour 2014 que sur le budget pour 2015 lui-même. Mais l’accord avec le Parlement européen se fera sur les deux éléments : les budgets rectificatifs pour 2014 et le budget pour 2015.
Au demeurant, il ne s’agit en rien d’une situation exceptionnelle : un même phénomène s’est produit lors de la négociation des budgets pour 2011 et pour 2013. Et le différend avait pu être surmonté. Nous pensons que ce sera encore le cas ; d’ailleurs, il le faut. Il appartient donc désormais à la Commission de présenter une nouvelle proposition, ce qu’elle devrait faire en fin de semaine, afin que les deux branches de l’autorité budgétaire, c'est-à-dire le Conseil et le Parlement européen, dégagent rapidement un accord.
À ce stade, la position arrêtée par le Conseil prévoit un budget s’élevant pour l’ensemble de l’Union européenne à 145 milliards d’euros en crédits d’engagement et 140 milliards d’euros en crédits de paiement.
En tout état de cause, la France est, et continuera à être, l’un des premiers contributeurs au budget de l’Union européenne, le troisième en volume. Son solde net était de 8, 4 milliards d’euros en 2013. Selon les modes de calcul, on peut certes parvenir à des chiffres sensiblement différents, qui ont été cités, mais l’ordre de grandeur demeure quoi qu’il en soit identique. Par ailleurs, la question des rabais dont bénéficient certains États membres mérite d’être soulevée. Nous souhaitons, comme vous, une réforme des ressources propres. Voilà pourquoi nous avons soutenu la création d’un groupe à haut niveau sur ce sujet, présidé par Mario Monti ; nous attendons ses propositions.
Pour autant, nous ne pouvons pas nous contenter d’une lecture comptable consistant à analyser des flux entre le budget de l’Union européenne et le budget national. Les avantages de notre appartenance à l’Union ne peuvent pas se résumer à cette seule donnée, aussi importante soit-elle dans la définition de notre trajectoire budgétaire nationale.
Parler du budget de l’Union européenne, c’est parler de notre projet pour l’Europe, des politiques européennes qui irriguent nos territoires, de leur mobilisation au service de la consolidation de la croissance et de la création d’emploi.
Ce budget pour 2015 de l’Union européenne soutiendra les initiatives diverses de nos collectivités territoriales, de nos entrepreneurs, de nos chercheurs, de nos agriculteurs. Il viendra également en aide, en termes de formation, à des apprentis et à des associations. Tout cela se fera, d’abord, grâce aux grandes politiques européennes dont les enveloppes sont déjà préallouées.
La politique agricole commune restera la première politique du budget de l’Union – la France s’est battue en ce sens –, ses moyens ayant été préservés à un haut niveau pour les sept prochaines années.
Avec un budget de 64 milliards d’euros pour la France sur la période 2014-2020 et une augmentation de l’enveloppe du deuxième pilier en faveur du développement rural, qui sera portée à 11, 6 milliards d’euros, le Gouvernement a fait le choix de soutenir encore davantage la production animale ainsi que l’élevage, en particulier dans les zones difficiles.
La politique agricole commune réformée sera plus juste, plus verte, mieux régulée. Nous sommes convaincus que le soutien à nos agriculteurs et au secteur agroalimentaire est crucial pour l’avenir d’une filière qui représente un potentiel important en matière de croissance, d’exportation, d’emploi et de développement durable.
La politique de cohésion représente le deuxième poste budgétaire du cadre financier pluriannuel. Elle permettra de soutenir les initiatives portées par nos territoires.
La France a obtenu en août dernier la validation de son accord de partenariat avec la Commission européenne, qui régira l’utilisation de 26, 7 milliards d’euros de fonds structurels et d’investissement en faveur de l’économie locale, de la croissance durable et du développement humain au cours des sept prochaines années.
Il nous faut désormais tout faire pour que ces crédits puissent être déployés le plus rapidement possible et qu’ils aient un effet de levier maximum sur le développement de nos territoires. Les régions et l’État s’y attellent, grâce à un dialogue nourri avec la Commission. Les premiers programmes opérationnels, qui constituent le véritable mode d’emploi de ces fonds au niveau régional, ont déjà été validés : c’est ainsi le cas pour dix d’entre eux. À ce jour, la France est le pays ayant signé le plus de programmes opérationnels avec la Commission européenne.
Les prochaines adoptions devraient intervenir d’ici à quelques jours. Le programme national au titre du Fonds social européen a également été adopté, mettant ainsi à notre disposition 2, 9 milliards d’euros pour soutenir l’emploi, la formation professionnelle, l’inclusion sociale et la lutte contre le décrochage scolaire. Je n’oublie pas, bien sûr, que la France a été le premier État membre à voir son programme au titre de l’initiative pour l’emploi des jeunes – 620 millions d’euros – adopté par la Commission européenne. Sur le terrain – à Bondy comme à Marseille ou en Moselle –, j’ai pu mesurer la mise en œuvre de cette garantie pour la jeunesse. Cela permet réellement de mieux accompagner les jeunes afin qu’ils trouvent un emploi, une formation, un stage. Surtout, cela permet que les jeunes s’insèrent dans le monde de l’entreprise et évite qu’ils ne décrochent durablement du marché du travail.
Ces chiffres placent la France à la tête des États membres en termes de programmes adoptés pour le Fonds européen de développement économique et régional, le FEDER et le Fonds social européen, le FSE.