Nous avons toute confiance dans les régions, qui seront désormais autorités de gestion en ce qui concerne la très grande majorité de ces fonds, pour que ces crédits soient mis efficacement au service de leur stratégie de développement. La France pose ainsi un acte de décentralisation fort et rejoint la pratique courante de la plupart de nos partenaires européens. Les projets mis en œuvre dans ce cadre incarnent une Europe aux côtés de nos territoires, une Europe concrète, une Europe positive, une Europe qui investit.
Au-delà de ces budgets préaffectés, nous devons répondre aux appels à projets et à propositions qui sont lancés par la Commission européenne. Nous aurons ainsi à conforter les réflexes européens des différents acteurs concernés en France. Deux grandes politiques européennes sont à cet égard essentielles, car elles participent de l’amélioration de notre compétitivité, à laquelle vous avez fait référence.
La première est la politique de recherche et d’innovation, à travers le programme Horizon 2020. Son budget a été porté à 79 milliards d’euros sur la période 2014-2020 pour l’ensemble de l’Union européenne, soit une augmentation de 38 % par rapport à la période précédente.
C’est essentiel que nous puissions présenter de bons projets pour que la France bénéficie du programme Horizon 2020 si nous voulons atteindre l’objectif que nous nous sommes fixé de consacrer 3 % de notre PIB à la recherche et à l’innovation. C’est essentiel aussi si nous voulons tirer profit du potentiel international de nos laboratoires, de nos universités, en créant les activités de recherche, mais aussi les produits de demain, ainsi que les emplois y afférents.
Je souligne que le programme Horizon 2020, principalement destiné aux universités et aux laboratoires de recherche, peut aussi venir en aide aux projets d’entreprises. Ces dernières sont amenées de plus en plus à faire financer une partie de leurs projets de recherche par ce programme européen.
En tout état de cause, nous devons chercher à augmenter notre taux de retour, qui est actuellement de l’ordre de 12, 6 %. C’est un défi auquel nous devons nous atteler.
La seconde politique européenne essentielle tient aux grands projets de transports européens qui passent par le territoire français. Le Premier ministre a annoncé l’engagement fort de la France afin de réaliser le canal Seine-Nord Europe et la ligne ferroviaire Lyon-Turin. Là encore, nous avons plaidé lors de l’adoption du cadre financier pluriannuel en faveur d’une augmentation très substantielle de l’enveloppe allouée à ces grands projets, en ayant à l’esprit qu’ils peuvent profiter des 40 % de financements du mécanisme d’interconnexion pour l’Europe.
Vous le voyez, ce budget européen vise clairement à répondre aux défis de nos territoires, de la cohésion sociale et de l’emploi, de l’économie et de l’avenir. Il permet également de faire face aux crises les plus urgentes. À cet égard, je pense d’abord à l’aide humanitaire d’urgence, qui soutient le financement des actions sur plusieurs terrains de crise – Syrie, Soudan, République centrafricaine – et l’action coordonnée de l’Europe pour endiguer l’épidémie d’Ebola.
Je pense aussi, plus généralement, à l’action extérieure de l’Union européenne, qui s’adresse notamment aux pays ayant vocation à la rejoindre, en particulier les pays des Balkans occidentaux, qui bénéficient des crédits de préadhésion, ainsi que les pays du voisinage. Je pense à ceux du Sud, qui doivent continuer à bénéficier de tout notre soutien dans leur processus de transition démocratique et pour assurer la stabilité en Méditerranée.
Je ne voudrais pas conclure cette intervention sans évoquer à mon tour, à l’instar des deux précédents orateurs, le plan de relance de 315 milliards d’euros que le président de la Commission européenne présente ce matin à Strasbourg devant le Parlement européen.
Ce plan, dont les principaux éléments vous ont été communiqués, repose sur la création d’un fonds stratégique d’investissement, directement géré par la Banque européenne d’investissement, la BEI. Celui-ci sera doté d’une capacité de financière de 21 milliards d’euros, présentée comme une capacité de prise de risque garantie en partie par le mécanisme d’interconnexion pour l’Europe, mais aussi par la contribution de la Banque européenne d’investissement elle-même. Cette capacité financière permettra de lever des investissements privés dans des domaines qui sont des priorités européennes, mais pour lesquels l’investissement aujourd'hui fait défaut.
L’investissement en Europe est en recul d’environ 18 % par rapport à son niveau d’avant la crise de 2008. L’investissement public lui-même est aujourd'hui moitié moindre en Europe qu’aux États-Unis : 2 % du PIB en Europe contre 4 % aux États-Unis. Dans tous les pays de l’Union, au Nord comme au Sud, même si les situations sont différentes et ne concernent pas exactement les mêmes secteurs, on constate un manque d’investissement préjudiciable au potentiel de croissance de l’Europe, que nous devons veiller à préserver.
Dans certains pays, il s’agit de développer davantage les infrastructures d’énergie pour favoriser une meilleure interconnexion entre le nord et le sud de l’Europe, et assurer la sécurité énergétique ; ou encore de développer le recours aux énergies renouvelables. §Dans tel autre pays, notamment en Allemagne, ce sont parfois les infrastructures de transport de base, c'est-à-dire les routes, les ponts, qu’il faut favoriser.
De façon générale, il s’agit de combler certains retards en matière d’investissement dans les domaines d’avenir, comme dans le numérique, et d’apporter notre soutien à la recherche ainsi qu’à l’innovation dans les petites et moyennes entreprises.
Par ailleurs, il est nécessaire de continuer à soutenir la formation et l’élévation du niveau de qualification : c’est un gage non seulement de compétitivité pour l’économie européenne dans le futur, mais également d’employabilité pour nos concitoyens, notamment pour les jeunes.
Ce fonds stratégique d’investissement, doté d’une capacité financière de 21 milliards d’euros, devrait donc permettre au groupe BEI d’augmenter sa capacité d’intervention de 60 milliards d’euros – c’est un effet de levier de 3 –, lesquels entraîneraient ensuite des cofinancements pour un volume global de 315 milliards d’euros – c’est un effet de levier de 5 –, soit un levier total de 15. Ces chiffres sont conformes à ceux qui ont été enregistrés par la BEI après l’augmentation de capital de 10 milliards d’euros décidée en 2012.
Je me félicite donc de la présentation de ce plan de 315 milliards d’euros annoncé par le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. Ce plan devra maintenant être adopté à la fois par le Conseil européen des 18 et 19 décembre prochain, par le Parlement européen et par le Conseil de l’Europe, pour pouvoir être mis en œuvre le plus rapidement possible. C’est une nécessité pour soutenir la croissance et pour favoriser le redémarrage de l’investissement en Europe. C’était une demande forte de notre part, car notre priorité doit être la relance des investissements publics et privés, notamment dans tous les secteurs porteurs de croissance que j’ai mentionnés : l’énergie, le numérique, les transports, les télécommunications.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je souhaitais vous dire aujourd’hui.
Les discussions entre le Parlement européen et le Conseil reprendront dès que la Commission aura mis une nouvelle proposition de budget sur la table. Nous continuerons naturellement à être vigilants pour que les fonds européens soient bien calibrés et dépensés au mieux de l’intérêt général européen comme de celui de notre pays.
Nous le devons à l’ensemble des citoyens européens, qui attendent de notre part que nous leur démontrions la valeur ajoutée de l’action de l’Union européenne. Soutenir les territoires et leurs projets, agir pour l’innovation et la formation, investir pour l’avenir : tel est le sens de notre contribution au budget européen ! §