Cette année, pour la première fois, la commission des lois a examiné ensemble les crédits de deux des programmes de la mission « Conseil et contrôle de l’État » : « Conseil d’État et autres juridictions administratives» et « Cour des comptes et autres juridictions financières »
Ces deux programmes ont en commun de présenter une certaine stabilité, permettant aux juridictions administratives comme aux juridictions financières de disposer de conditions relativement favorables à l’accomplissement de leurs missions.
Dans un contexte de fortes contraintes budgétaires, les crédits alloués pour 2015 au programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives » sont en progression de 2, 1 % en crédits de paiement et 35 emplois sont créés.
Les crédits du programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » connaissent une légère diminution par rapport à l’an dernier – de 1 % –, en raison d’un ajustement technique. Quant aux moyens humains, ils s’établissent à un niveau constant par rapport aux exercices précédents.
D’un point de vue strictement budgétaire, donc, ces programmes ne soulèvent pas de difficultés particulières.
Toutefois, l’ensemble des personnes que j’ai pu rencontrer pour préparer cet avis m’ont signalé que cette situation satisfaisante était fragilisée par la forte pression contentieuse subie par les juridictions administratives, d’une part, et par la multiplication des missions confiées aux juridictions financières, d’autre part.
Depuis 2011, l’objectif de ramener à un an les délais de jugement devant l’ensemble des juridictions est atteint pour les juridictions administratives, tous types d’affaires confondues.
Cependant, je tiens à interroger le Gouvernement sur les raisons de la suppression de l’indicateur « délai moyen constaté pour les affaires ordinaires », qui était particulièrement pertinent puisqu’il présentait les délais de jugement des affaires, en dehors des procédures d’urgence et des procédures particulières.
Pour les affaires ordinaires, les délais de traitement s’établissent plutôt autour d’un an et dix mois devant les tribunaux administratifs et d’un an et deux ou trois mois devant les cours administratives d’appel et le Conseil d’État.
Pour permettre aux juridictions administratives de maintenir leur bon niveau de performance face à une pression contentieuse constante – le contentieux du droit au logement opposable et celui des étrangers ont progressé respectivement de 44 % et 25 % de 2010 à 2013 –, des réformes de procédure ont été mises en œuvre, comme la suppression de l’appel ou le recours au juge unique dans 60 % des affaires.
Si ces procédures de simplification contentieuse ont permis à la juridiction administrative de faire face à l’augmentation du contentieux et de réduire ses délais de jugement, on peine à mesurer leur impact sur la qualité de la justice rendue. En effet, certains contentieux, concernant en particulier les publics les plus fragiles – par exemple, les contentieux sociaux –, cumulent suppression de l’appel, règlement par juge unique et dispense de conclusions du rapporteur public.
Enfin, comme lors des deux exercices précédents, j’ai pu constater un véritable sentiment d’impuissance des magistrats face à des contentieux pour lesquels l’utilité de l’intervention du juge pose question. Je pense en particulier au droit au logement opposable, ou DALO. Le juge ne tranche aucune question de droit et il ne règle pas non plus la situation du justiciable, puisqu’il ne peut qu’enjoindre l’administration, sous astreinte, de délivrer un logement qu’elle n’a pas.